stairways to heaven and hell

Je reviens avec la première photographie sur la maison de béton Experience in Material 45, également nommée House in Jingumae (pour faire plus simple), par l’architecte Ryoji Suzuki. Je la prends en photographie sous un angle mettant en valeur les mystérieux escaliers semblant monter vers le ciel. À chaque fois que je vois ce bâtiment, je me pose la question de l’organisation intérieure car on ne voit aucune ouverture qui pourrait nous donner quelques pistes. La dernière photographie nous donne par contre l’impression d’une descente dans les bas-fonds. Il s’agit d’un passage souterrain de la station Yotsuya Sanchōme reliant deux quais de la ligne de métro Marunouchi. Cette tuyauterie exagérée est vraiment étonnante et on se demande si tous ces tuyaux sont bien fonctionnels. Cette imagerie de tuyauterie me rappelle la manga Akira, qui m’a beaucoup inspiré pour mes formes futuro-organiques. Je ne suis pas sûr de l’avoir déjà mentionné ici, mais ces formes futuro-organiques que j’ai tant dessiné m’ont en fait été initialement inspirées par le graphisme du mangaka Masakatsu Katsura pour la couverture du premier volume du manga Vidéo Girl Ai (電影少女). J’avais lu assidûment ce manga à l’époque de sa sortie en France de 1994 à 1997 aux éditions Tonkam. J’avais même dessiné une version modifiée en très grand format de cette couverture. Cette illustration m’avait pris beaucoup de temps, mais je me souviens encore bien de ces précieux moments passés à dessiner devant une grande feuille cartonnée en écoutant de la musique. Comme toutes les illustrations que j’ai dessiné à cette époque, j’ai dû écrire au dos du dessin le nom des albums que j’écoutais au moment où je dessinais. J’ai toujours aimé garder une trace de ce que j’écoutais en dessinant et je me rends compte maintenant que je fais exactement la même chose sur ce blog. J’ai également ce besoin de documenter les photographies que je prends avec la musique que j’écoute. La construction de mes billets sur ce blog mélangeant photographies et présentations musicales n’est en fait qu’une retranscription de cela. Je viens de m’en rendre compte en écrivant ces lignes. Pour revenir à ces tuyaux de la station Yotsuya Sanchōme, j’en montre d’autres photos sur mon compte Instagram. Et entre ces escaliers qui semblent monter vers le paradis pour l’un et vers l’enfer pour l’autre, j’en montre d’autres disposés au dessus de voies ferrées près de la station d’Ebisu. Cette passerelle pour piétons que je montre sur la quatrième photographie a l’air ancienne et usée. J’apprends qu’elle va bientôt disparaître dans sa forme actuelle pour être remplacée par une autre à quelques mètres de là. Je ne sais pas pour quelle raison, mais cette passerelle a souvent été utilisée comme lieu de tournage pour des publicités, dramas ou vidéos musicales. Je parlais d’ailleurs récemment d’une vidéo de Tricot tournée à cet endroit pour le morceau Right Brain Left Brain (右脳左脳). Et sur la troisième photographie qui donne l’impression d’être prise à la dérobée, il s’agit de l’actrice et personnalité de télévision Haruna Kawaguchi. J’aime en ce moment prendre en photo les affiches des abribus. Allez savoir pourquoi…

J’ai regardé le Blu-Ray du concert Air Pocket de 2018 depuis déjà plusieurs semaines, mais je n’avais jusqu’à maintenant pas trouvé le temps et le courage d’en écrire un résumé. Je sais qu’écrire sur ces concerts me prend en général beaucoup de temps car l’enthousiasme me fait toujours trop écrire. Je vais essayer de contenir (un peu) mes phrases cette fois-ci. Outre ce concert, il me restera plus tard à évoquer Ringo Expo’14 et j’aurais couvert sur ce blog tous les concerts de Sheena Ringo et Tokyo Jihen officiellement sortis en DVD/Blu-ray. Ce concert intitulé Sheena Ringo to Aitsura no iru Shinkū Chitai (椎名林檎と彼奴等の居る真空地帯), plus communément appelé Air Pocket, est sorti le 20 Octobre 2018. Il est tiré d’une tournée nationale en 23 dates couvrant tout le Japon du 2 Mars au 27 Mai 2018. Cette tournée prenant le nom de Hyotto shite Reko Hatsu 2018 (ひょっとしてレコ発2018) accompagne la sortie de l’album de reprises de ses propres morceaux Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~) le 2 Mars 2018 (la date du premier concert de cette tournée). Il faut noter que cette année 2018 était particulièrement chargée pour Sheena Ringo car la tournée Ringo Expo’18 était également programmée plus tard dans l’année en Novembre 2018. La vidéo que l’on peut voir en DVD ou Blu-ray de ce concert Air Pocket à été tournée vers la fin de la tournée, le 17 Mai 2018 au NHK Hall de Tokyo.

Comme pour le concert de 2015 (椎名林檎と彼奴等がゆく 百鬼夜行2015), le groupe accompagnant Sheena Ringo se nomme Mangarama, mais les membres sont un peu différents. Midorin (みどりん) de SOIL& »PIMP »SESSIONS prend cette fois-ci le relai à la batterie. C’est un habitué des concerts de Sheena Ringo. Ukigumo (浮雲) n’est pas présent cette fois-ci. Masayuki Hiizumi (ヒイズミマサユ機), aka H Zett M, est présent aux claviers comme sur la tournée 2015 et chante également occasionnellement en accompagnement. On retrouve les autres habitués Yukio Nagoshi (名越由貴夫) à la guitare, Keisuke Torigoe (鳥越啓介) à la basse, Yoichi Murata (村田陽一) au trombone, Kōji Nishimura (西村浩二) à la trompette et Takuo Yamamoto (山本拓夫) au saxophone et à la flûte. Cette formation est relativement classique pour un concert de Sheena Ringo. Le concert en lui-même l’est également. Mais un concert de facture « classique » pour Sheena Ringo a un niveau d’excellence qu’il est difficile d’égaler. Sa performance sur scène avec son groupe est toujours impeccable et la qualité de la mise en scène, en particulier les costumes de scène, est comme toujours excellente. Au fur et à mesure des concerts de Sheena Ringo, cette qualité générale est même devenue comme un acquis et j’imagine donc la pression qu’elle doit se mettre sur les épaules pour ne pas décevoir le public qui n’en attend pas moins. Ceci étant dit, il ne s’agit pas là d’un concert gigantesque comme ceux de la série Expo joué au Saitama Super Arena. L’organisation sur scène pour Air Pocket est beaucoup plus mesurée et se concentre donc sur l’interprétation. Cette interprétation est extrêmement solide, mais on n’y trouvera par contre qu’assez peu de moments de tension vocale comme on a pu en voir sur d’autres concerts de Sheena Ringo ou de Tokyo Jihen. Certains morceaux, comme celui qui termine le set avant les rappels, sont cependant remplis d’une puissance vocale qui nous hypnotise devant notre écran. Il ne s’agit pas là de son meilleur concert mais tout fan ou amateur de Sheena Ringo ne devrait pas passer à côté.

On trouve sur Air Pocket un grand nombre de morceaux extraits du dernier album Reimport vol.2, mais également de nombreux autres piochés dans l’ensemble de sa discographie. Le concert démarre sur un écran vidéo montrant un compte à rebours de 3 mins. Le Ringo Hyoreco Space Center, qui prend clairement la NASA comme inspiration, s’apprête à lancer une navette spatiale pour mettre en orbite dans l’espace le nouvel album Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~) ou Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~. On a l’impression que la livraison de ce nouvel album se fera par voie spatiale pour les acheteurs qui l’ont commandé. Sheena apparaît à ce moment sur scène vêtue d’une robe bleutée, d’une couronne et d’éléments semblant tirés d’une armure. Le reste du groupe est habillé de tenues dont je ne sais l’origine. Peut-être s’agit il de tenues mongoles? Le set démarre par le morceau Jinsei ha Omoidōri qui n’apparait sur aucun album car il s’agit d’une B-side du single Carnation. Le concert ne démarre pas vraiment avec les morceaux que je préfère mais je suis tout de même surpris d’apprécier cette fois-ci le morceau Oishii Kisetsu. Sheena ne mettra pas très longtemps pour se saisir de sa guitare, pour le quatrième morceau du set, Gibs. Nagoshi y effectue des arrangements à la guitare un peu différents de ce que l’on connaissait jusque là. Des années après l’écriture de ce morceau et après de très nombreuses interprétations, Sheena est toujours aussi convaincante. La sauce prend vraiment pour moi à partir de ce quatrième morceau du set. Le morceau Ishiki suit ensuite dans une interprétation sans instruments classiques et en version strictement rock qui gagne en puissance au fur et à mesure que le morceau avance. L’ambiance générale du concert est résolument rock. La présence de Midorin aux percussions, plutôt habitué aux ambiances jazz, m’avait d’abord un peu étonné.

Il n’y a qu’une seule reprise d’un autre artiste sur ce concert. Il s’agit du morceau Nature Boy par Nat King Cole. H Zett M l’interprète en solo au début, pendant que Sheena se change une première fois pour un long kimono. Cette reprise de Nature Boy est courte et sert de transition rapide vers le morceau JAL005, qui est un des morceaux que j’ai tout de suite aimé sur l’album Hi Izuru Tokoro. Le groupe joue devant un écran géant montrant des images de nuages et d’océan, des images planantes comme ce vol de la compagnie JAL reliant Tokyo à New York. Reimport vol.2 comprend le morceau Shōjo Robot initialement écrit pour Rie Tomosaka. J’en parlais longtemps dans un billet récent. Je le rappelle pour les quelques visiteurs discrets qui ne l’auraient pas encore lu. Cette version en concert est très différente de celle de Rie Tomosaka, plus jazz par l’intervention aux claviers de H Zett M. J’ai quand même une préférence pour la version originale sur le EP de Rie Tomosaka.

Benkai Debussy, morceau tiré du deuxième album Shōso Strip, détonne ensuite. H Zett M se rapproche du devant de la scène et accompagne Sheena au chant. Cette interprétation est assez géniale. Elle le fait assez souvent, mais j’adore à chaque fois la manière dont Sheena Ringo vient faire traîner son mediator de haut en bas puis de bas en haut sur les cordes de sa guitare, comme si elle y prenait un plaisir sadique (on appellerait cela Itazura en japonais). Le morceau est immédiatement suivi par Yokushitsu ponctué par une forte basse électronique et par des larsens à la guitare de Nagoshi. Sheena tient dans la main un paravant et elle effectue à certains moments des mouvements rapides qui font écho à la scène de découpe de pomme lors du concert Ringo EXPO 08. Elle a heureusement eu la bonne idée de ne pas utiliser un couteau cette fois-ci. Le piano de H Zett M apporte beaucoup sur ce morceau. Sheena lache ensuite son kimono et reste en tenue légère de couleur verte-pomme pour interpréter des morceaux de Reimport Vol2, Usurahishinjū et Anya no Shinjū tate. Elle se laisse emporter par le premier morceau jusqu’à tomber au sol. On voit là quelques similitudes avec des scènes du concert de 2015, Hyakkiyakō 2015 (百鬼夜行). Le deuxième morceau, Anya no Shinjū tate, prend des accents Enka et son interprétation est très convaincante. La reprise des Feuilles Mortes de Jacques Prévert est également un classique des concerts de Sheena Ringo, sauf que son interprétation ne me convainc jamais vraiment car son accent français n’est pas très bon ce qui rend les mots de la chanson très rugueux. Mais il s’agit d’une version courte du morceau qui agit en quelque sorte comme un interlude.

Sheena s’est changée une nouvelle fois pour porter maintenant un large et chaud blouson aux mêmes motifs que ceux du reste du groupe. Ce blouson porte aussi des motifs de léopard. Avec un pantalon en cuir et des chaussures noires à talons hauts, les cheveux courts, c’est une de ses tenues de scènes les plus cool que j’ai pu voir jusqu’à maintenant. Elle chante maintenant Memai, qui est une B-side d’un de ses premiers singles, Koko de Kiss shite. Je n’avais jamais fait trop attention au morceau Otona no Okite, mais il s’avère très bon, notamment quand les cuivres viennent accentuer l’ensemble. Le morceau qui suit, Jūkinzokusei no Onna, dégage beaucoup d’énergie. Sheena a laissé le blouson et se trouve maintenant en t-shirt avec une guitare entres les mains. Des chants bouddhistes précèdent la composition très rock de ce morceau. « Heavy metallic am I », nous chante elle pendant ce morceau qui s’appelait initialement The Heavy Metalic Girl. Sheena Ringo l’avait écrit pour la bande originale intitulée Doku Ichigo de la pièce de théâtre Egg de Noda Map. Comme je l’expliquais en détails dans un précédent billet, la version originale du morceau était chanté en japonais, tandis que la version sur Reimport vol.2 interprétée lors de ce concert est en anglais.

On approche maintenant du dernier tiers du concert. Sheena et le groupe Mangarama interprètent tout de même 24 morceaux lors de ce concert. Le morceau suivant, Shizuka Naru Gyakushū, voit Sheena jouer de la guitare acoustique, ce qui est plutôt rare. Il s’agit d’un morceau sorti officiellement sur l’album Hi Izuru Tokoro, mais qu’elle a écrit il y a très longtemps à ses debuts sous le titre Kudamono no Heya (果物の部屋). Sur Kareinaru gyakushū (c’est la série des counterback), l’ambiance devient plus pop et les petits drapeaux distribués aux spectateurs sont de sortie. Sheena est particulièrement souriante en entraînant le public avec elle sur des mouvements de drapeaux exagérément amples. L’ambiance se détend toujours un peu lorsqu’on approche de la fin des concerts, comme si la pression commençait à tomber progressivement. Sur Kodoku no Akatsuki, j’aime bien la manière dont la voix de Sheena pousse vers des pointes aiguës. Elle reste à la guitare sur le morceau suivant Jiyū e Michizure, mais la vitesse du morceau semble plus rapide que la normale. Nagoshi est très rapide à la guitare et Sheena pousse le rythme en chantant rapidement avec beaucoup d’énergie. Ce morceau fonctionne excellemment bien. On arrive au morceau final, Jinsei ha Yume darake, qui est un morceau que j’adore et qui révèle tout son talent d’écriture musicale. Il s’agit du single principal de l’album Reimport vol.2 et il est forcément très attendu. Sheena donne beaucoup de force dans sa voix, ce qui donne des frissons. Le public est très réceptif et nous fait entendre son appréciation. Il s’agit à mon avis d’un des grands moments du concert!

Sheena quite ensuite la scène mais reviendra, habillée d’un kimono très formel de couleur verte, pour les rappels avec 3 morceaux. Le détail amusant est que les membres du groupe reviennent scène avec des noms modifiés. Yukio Nagoshi devient ainsi 754 (l’interprétation en chiffre de son nom, syllabe par syllabe: Na = 7, Go = 5 et Shi = 4). Sheena devient bien entendu 417, mais le nouveau nom de Masayuki Hiizumi en Zumori a une origine qui est pour moi beaucoup plus floue. Hiizumi annonce lui-même le démarrage des rappels avec une pointe d’humour dans le ton de sa voix. On le voit toujours sérieux et très concentré derrière ses claviers, donc ça fait plaisir de le voir plus décontracté comme à la (grande) époque de Tokyo Jihen Phase 1 (sur le concert Dynamite Out bien entendu). Le premier morceau des rappels est une version très arrangée de Marunouchi Sadistic chantée en anglais. Ça doit être le morceau de Sheena Ringo qui a eu le plus de versions et d’arrangements différents. Il est désormais trop classique pour étonner mais j’aime quand même beaucoup les petits pas de danse que Sheena ajoute au morceau. Elle reprend ensuite la guitare pour un autre grand classique de Hi Izuru Tokoro, à savoir Nippon. Ce morceau, initialement créé à la demande de la NHK pour supporter l’équipe de football japonaise, est mal-aimé des fans internationaux qui y voient des paroles nationalistes. J’ai toujours pensé que c’était une extrapolation incorrecte de ses intentions, car le langage sportif nous parle en général de bataille et d’un désir de voir son pays remporter la victoire. Adopter ce langage dans les paroles d’un morceau censé supporter l’équipe japonaise n’a rien de vraiment déplacé. Bref, ce morceau n’est certainement pas mon préféré mais le solo de guitare de Sheena penchée en arrière en kimono vaut de toute façon cent fois le détour. Le concert se termine sur un morceau plus calme mais à l’ambiance très rock. Yasei no Dōmei est un des très beaux morceaux de Reimport vol.2. À la toute fin du morceau, Sheena se courbe en avant très formellement pour faire un dernier remerciement au public pendant que Nagoshi nous envahit de ses sons de guitare. Elle montre à chaque fois un grand respect pour le public qui est venu la voir. J’ai toujours l’impression qu’elle remercie le public comme si c’était la dernière fois qu’elle montait sur scène. Mais on sait heureusement que ce concert n’était pas le dernier.

Je note ci-dessous pour référence ultérieure la liste des morceaux du concert Air Pocket (椎名林檎と彼奴等の居る真空地帯) de 2018:

1. Jinsei ha Omoidōri (人生は思い通り), B-side du single Carnation (カーネーション)
2. Oishii Kisetsu (おいしい季節) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)
3. Irokoizata (色恋沙汰) de l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ)
4. Gibs (ギブス) de l’album Shōso Strip (勝訴ストリップ)
5. Ishiki (意識) de l’album Kalk Samen Kuri no Hana (加爾基 精液 栗ノ花)
6. Nature Boy (真理の人), reprise d’un morceau de Nat King Cole sorti en 1948
7. JL005-bin de (JL005便で) de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
8. Shōjo Robot (少女ロボット) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)
9. Benkai Debussy (弁解ドビュッシー), de l’album Shōso Strip (勝訴ストリップ)
10. Yokushitsu (浴室) de l’album Shōso Strip (勝訴ストリップ)
11. Usurahishinjū (薄ら氷心中) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)
12. Anya no Shinjū tate (暗夜の心中立て) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)
13. Kareha (枯葉), reprise du morceau Les feuilles mortes écrit par Jacques Prévert et composé par Joseph Kosma, présent sur l’album Utaite Myōri: Sono Ichi (唄ひ手冥利 ~其ノ壱~)
14. Memai (眩暈), B-side du single Koko de Kiss Shite. (ここでキスして。)
15. Otona no Okite (おとなの掟) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)
16. Jūkinzokusei no Onna (重金属製の女) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)
17. Shizuka Naru Gyakushū (静かなる逆襲) de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
18. Kareinaru gyakushū (華麗なる逆襲) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)
19. Kodoku no Akatsuki (孤独のあかつき) de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
20. Jiyū e Michizure (自由へ道連れ) de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
21. Jinsei ha Yume darake (人生は夢だらけ) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)
22. Marunouchi Sadistic (丸ノ内サディスティック), version largement modifiée et en anglais du morceau de l’album Muzai Moratorium (無罪モラトリアム)
23. NIPPON de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
24. Yasei no Dōmei (野性の同盟) de la compilation Gyakuyunyū ~Koukūkyoku~ vol.2 (逆輸入 ~航空局~; Reimport, Vol. 2 ~Civil Aviation Bureau~)

between the skies

Le ciel nuageux prend parfois le dessus sur le paysage urbain. Sur cette série photographique, je mélange volontairement ces nuages avec les fils électriques qui tanguent au dessus des petites rues. Il serait bien dommage que ces fils électriques disparaissent complètement du paysage, car ils font part intégrante de l’environment urbain. Au milieu de ces câbles qui font des noeuds, une petite maison aux lignes obliques conçue par l’Atelier Tekuto. J’adore cette maison de béton et ses grandes baies vitrées qui reflètent le ciel se trouvant autour sur les autres photographies. Cette position centrale entre les ciels est volontaire, comme s’il s’agissait d’un centre ouvrant une porte sur un autre monde intérieur. Ces lignes électriques me rappellent aussi l’association que j’en avais fait avec des kanji il y à longtemps. Les traits des kanji se mélangeaient avec les fils électriques et semblaient flotter dans les airs.

Les ciels nuageux des photographies ci-dessus me rappellent celui, certes plus cosmique, de la couverture du dernier album de Minakekke intitulé Memorabilia. Le titre de cet album reprend celui du huitième morceau déjà sorti en single et dont j’avais déjà parlé. Ce single était déjà très bon, mais pas aussi sublime que l’album dans son intégralité et en particulier les cinq premiers morceaux. Minakekke fait évoluer légèrement son style depuis le EP Oblivion mais ses envolées de voix maintiennent un esprit similaire empreint de mélancolie. Je réécoute d’ailleurs cet EP Oblivion en écrivant ces lignes, ce qui me fait dire que Minakekke est vraiment une artiste malheureusement trop méconnue. Comme le morceau Luminous sur le EP Oblivion, le morceau Butterfly sur Memorabilia nous fait tout de suite rentrer dans cet album aux atmosphères sombres. On ressent son chant comme une complainte, mais sans résignation tant elle mène ses morceaux sans temps morts. On ressent une passion qui transparait dans sa voix jusqu’à la faire trembler par moment (sur un morceau comme Bones). L’émotion qui s’en dégage est pour sûr très forte. Musicalement, c’est aussi très dense, avec des ambiances parfois proches du gothique de The Cure. Et je me mets maintenant à réécouter le chef d’oeuvre qu’est Disintegration.

oublier les cerisiers (4)

Les cerisiers en fleurs sont ici ceux du parc Tako à Ebisu et de l’avenue Meiji au niveau du passage surélevé pour piétons de Shibuyabashi. Je prends en photo tous les ans les cerisiers en fleurs de l’avenue Meiji, car c’est un des plus bels endroits de Tokyo. Ils sont particulièrement denses entre Shibuyabashi et Tengenjibashi, et formeraient presque un tunnel si on étirait les branches un peu de chaque côté. Les autres photos de ce billet s’éloignent des sakura, car il faut bien les oublier progressivement, et s’attardent sur ce qui attire mon regard dans les rues encombrées de Shibuya et d’Ebisu: une mosaïque de l’artiste Invader, une affiche d’une statue de Bouddha pour une exposition dédiée à Nara, une moto Kawasaki vintage en rouge et noir, un magasin de disques vinyles appelé Ultra Shibuya avec une enseigne rétro-futuriste en néon et une affiche du groupe Kinoko Hotel (que je n’ai pas encore écouté mais qui m’intrigue depuis quelques temps) posée sur la baie vitrée. J’observe également beaucoup l’évolution des graffitis de rue, et j’aperçois récemment ceux du groupe appelé « Tokyo Zombie Crew« , qui me rappellent un peu le « Tokyo is yours » qu’on a aussi beaucoup vu dans les rues de Tokyo. On ne trouve bien entendu que peu d’informations sur ces grapheurs même si certains sites web essaient de les répertorier.

今日見た光、忘れない

On s’enfonce quelques instants dans les nuages qui viennent brouiller le paysage urbain et derrière lesquels on pourrait se cacher, disparaître pendant quelques heures pour revenir ensuite avec un air légèrement réjoui comme si on avait fait une découverte extraordinaire. Je me cache régulièrement pendant quelques heures seulement derrière ces nuages lorsque je pars en marche dans la ville. Derrière ces nuages, on a étonnamment les idées claires, car derrière les nuages se cache toujours une éclaircie qu’on n’oublie pas. Ces découvertes extraordinaires, je les montre d’abord sur mon compte Instagram car j’ai de plus en plus de mal à écrire des billets complets dans la foulée de mes marches urbaines. Il se passe parfois plusieurs semaines entre les photographies que je prends et les billets que j’écris pour les montrer. Je prends par conséquent moins de photographies ces derniers jours, même si je marche beaucoup. J’essaie ainsi de remonter dans le temps pour me rapprocher petit à petit du moment présent. Mon expérience internet est à deux vitesses, celle du présent, rapide et quasi-immédiate sur Instagram et celle qui prend son temps sur ce blog. Je suis à une période où j’hésite encore entre les deux, mais aucune de ces vitesses ne s’impose pourtant à l’autre. Il m’arrive de sprinter sur Instagram en montrant soudainement beaucoup de choses puis m’arrêter soudainement pendant plusieurs semaines et retrouver dans ce blog comme un refuge ou un apaisement. Je ne vais derrière les nuages que pendant quelques heures et je reviens ensuite par ici pour méditer ce que j’y ai vu. Toute la complexité est de ne pas trop s’éloigner du présent lorsqu’on se perd dans ses méditations.

J’avais beaucoup aimé et écouté le premier album Serotonin II, sorti en Octobre 2019, de la singapourienne, maintenant londonienne, Nat Çmiel, qui se fait appeler Yeule. J’avais par contre été moins attentif aux reprises qu’elle avait faite ensuite et à la version remixée intitulée Serotonin X reprenant quelques morceaux de ce premier album. Le deuxième album de Yeule, Glitch Princess, sortira dans quelques heures, le 4 Février, et quatre morceaux sont déjà en écoute sur Bandcamp. Le premier intitulé My Name is Nat Çmiel est en fait sorti en Décembre 2020. En l’écoutant à cette époque, il m’avait semblé que Yeule s’éloignait de plus en plus de son existence humaine pour devenir une sorte de prototype androïde capable d’émotions. Le morceau est parlé et donne l’impression que Yeule lit une fiche décrivant les caractéristiques de sa propre personnalité. Il y a quelque chose qui est en même temps robotique et sensible, comme peut l’être un Fitter Happier sur OK Computer. Il s’agit en fait d’une sorte d’introduction à cet album et les trois autres morceaux disponibles actuellement sont beaucoup plus accessibles et contiennent même des petits airs pop malgré la relative noirceur de l’ensemble. Des quatre morceaux, Too Dead Inside est certainement celui que je préfère mais les deux autres que l’on peut écouter pour l’instant, Don’t be so hard on your own beauty et Friendly Machine, sont tout aussi beaux. Le morceau Don’t be so hard on your own beauty est d’ailleurs relativement classique dans sa conception musicale, principalement axé sur une guitare et la voix de Yeule, sans les nombreux effets électroniques que l’on connaissait de son premier album et que retrouve par contre sur l’autre morceau Friendly Machine. Yeule se surnomme elle-même princesse des glitches sonores et ils sont en général très présents dans ses compositions. La musique de Yeule s’accorde avec les vidéos qui la représentent souvent seule (parfois avec son chat Miso) dans un état parfois proche de la folie. L’image atypique qu’elle projette forme un tout avec les morceaux qu’elle crée. J’ai l’impression qu’elle se transforme même de plus en plus. Outre les tatouages de personnages inspirés de l’univers ero-guro du mangaka Suehiro Maruo, elle se maquille maintenant le visage d’étranges marquages colorés. Comme je le mentionnais un peu plus haut, Too Dead Inside est un des plus beaux morceaux qu’elle a créé jusqu’à maintenant. Sa mélodie nous accroche tout de suite et est empreinte d’une étrangeté attirante. Je suis assez impatient d’écouter la suite dans quelques heures ou jours quand l’album entier sera disponible. J’allais presque l’oublier, mais comme Yeule est une personne non-binaire (comme Utada Hikaru d’ailleurs), j’aurais certainement dû utiliser dans mon texte un pronom neutre plutôt que « elle ». On peut voir le « they » régulièrement utilisé en anglais, mais j’ai rarement ou jamais vu utiliser le « iel » ou « ielle » en français. Les articles en anglais évoquant le nouvel album de Utada Hikaru utilisent systématiquement le « they », mais je n’ai pas vu l’équivalent en français. Par exemple, l’article en français sur le site Pen Official utilise « elle » mais « they » en version anglaise. Le « they » étant pour moi avant tout pluriel, je ne le trouve pas vraiment adapté pour une personne unique, quoique pour Yeule, mon impression diffère car elle évoque elle-même avoir différentes personnalités vivant en elle. En regardant récemment son compte Twitter, je remarque un détail qui m’intéresse beaucoup. Je la vois porter au doigt une bague « armour ring » (certainement de la marque Vivienne Westwood) qui me rappelle forcément une autre artiste dont je parle très souvent sur ces pages.

Pour continuer avec mes découvertes musicales, j’écoute beaucoup ces derniers jours deux morceaux du duo Tamanaramen (玉名ラメン) composé des sœurs Hikam et Hana Watanabe. J’écoute le dernier single Glowing Arcade sorti le 1er Janvier 2022 et le single précédent sorti en Novembre 2021, The light behind my eyelids (dont les paroles m’inspirent d’ailleurs le titre de ce billet). Je connais le nom de ce groupe depuis quelques temps car il est très singulier et on le retient. Mais la voix de Tamanaramen m’est surtout familière depuis que je l’ai découverte sur le troisième morceau intitulé The encounters de l’album NO MOON de D.A.N. Comme je l’évoquais déjà, ce morceau est excellent et peut-être bien le meilleur de l’album notamment pour le mélange des voix dont celle de Tamanaramen. Je reviens souvent sur ce morceau avec un plaisir d’écoute à chaque fois renouvelé. Tamanaramen m’a intrigué suite à cela, ce qui m’a poussé à écouter quelques morceaux sur YouTube et à m’attacher pour le moment à ces deux morceaux électroniques en particulier. L’ambiance musicale de Glowing Arcade est plutôt minimaliste avec une prédominance de la voix qui semble très proche de l’auditeur. Dans une approche intime pleine de mélancolie, elle nous parle de son état d’être. 「もう変わらない、変われないけどさ』(Je ne changerais pas maintenant , je ne peux plus changer). Et à cette mélancolie s’ajoutent des paroles volontairement positives et je dirais même enfantines dans la manière dont elle les chante et les répète 『みんなで行こう」(allons-y tous ensemble). Je trouve cette atmosphère très délicate et sensible. La voix de Tamanaramen (je ne suis pas sûr qui, de Hikam ou Hana, chante) est frêle et fragile, et se confronte à des sons électroniques plus agressifs sur le deuxième morceau The light behind my eyelids. En fait, plus qu’agressif, je dirais que le rythme électronique est beaucoup plus soutenu et présent, avec une dernière partie purement instrumentale vers la fin. J’aime beaucoup l’ambiance nocturne de ce morceau, qui prend des airs menaçants par moments, et qui est très bien relayée par la vidéo. Je suis déjà décidé à parcourir un peu plus l’univers nuageux de Tamanaramen.

ichigo ichie

Ichigo Ichie (一期一会) est un concept culturel consistant à « chérir la nature irremplaçable d’un moment », nous apprend Wikipedia. Ce terme japonais insiste sur le fait que chaque instant de la vie est unique et ne peut être répété, même si on se trouve dans une situation similaire à ce que l’on a déjà vécu ou qu’on se retrouve à nouveau avec le même groupe de personnes. Ichigo ichie nous rappelle donc qu’il faut apprécier chaque moment de la vie. Cela laisse à mon avis supposer qu’on ait bien conscience de ces moments qui passent et qu’on se doit d’apprécier. J’ai souvent l’impression que ces fameux moments passent plus vite qu’on arrive à s’en rendre compte. Notre esprit essaie plutôt de distinguer des moments uniques, souvent après coup, parmi la multitude de moments beaucoup plus communs de la vie. Apprécier chaque moment de manière unique suppose qu’on ait de manière continuelle conscience du moment qui passe et je me demande si cette conscience ne viendrait pas perturber la qualité du moment en question et nous empêcher d’en profiter pleinement. J’essaie de faire le lien entre ce concept du ichigo ichie et mes promenades urbaines dans Tokyo. Elles sont assez systématiquement bordés dans le temps, au maximum 2h (un autre concept vient s’immiscer ici, le 2時間だけのヴァカンス), mais j’ai souvent conscience pendant cette courte période de la qualité du moment passé, notamment parce qu’il est limité. J’ai l’impression pendant ces moments là de chérir la nature irremplaçable d’un moment. Je m’en rends compte souvent après être revenu à la maison, lorsque la promenade urbaine n’est plus qu’un souvenir que je garde en mémoire pendant quelques temps avant que celui-ci disparaisse, enfoui sous d’autres souvenirs de marches tokyoïtes plus récentes. La musique que j’écoute en marchant ajoute pour moi à la qualité du moment quand les bruits de la rue viennent la dégrader. Je me pose assez souvent la question si cette musique dans les écouteurs est vraiment nécessaire et si la qualité du moment ne serait pas meilleure sans ces écouteurs dans les oreilles pour apprécier la multitude de couches sonores qui composent le milieu urbain. J’ai tendance à penser ce moment de deux heures dans les rues de Tokyo avec mon appareil photo en mains comme un moment à part et le passer avec une musique que j’aime en tête transforme ce moment en une expérience. Enfin, plus que d’essayer d’appliquer ce concept du ichigo ichie à la lettre, c’est plutôt la réflexion qu’il engage qui est intéressante, car il nous pousse à réfléchir à ce qu’on fait, pourquoi on le fait et pourquoi c’est nécessaire de le faire. J’aime appliquer ce genre de réflexion à la pratique de ce blog car j’ai encore maintenant beaucoup de doutes et très peu de certitudes sur le pourquoi de cette démarche que j’ai pourtant mené pendant un peu plus de 18 ans sans interruption.

Ichigo Ichie (苺イチエ) est le nom de scène emprunté par l’actrice Eri Fukatsu dans la pièce de théâtre Egg dirigée par le dramaturge Hideki Noda et sa compagnie Noda Map. Je n’ai pas vu la pièce de théâtre mais la raison pour laquelle j’en parle ici est que la direction musicale de cette pièce datant de 2012 était assurée par Sheena Ringo. Ce n’est pas la première fois qu’elle intervient comme directrice musicale sur une pièce de théâtre ou sur un film. C’était déjà le cas sur le film court Hyakuiro Megane (百色眼鏡) sorti en 2003 et son adaptation théâtrale intitulée Lens sortie en 2004, reprenant tous les deux des morceaux de son troisième album Kalk Samen Kuri no Hana (加爾基 精液 栗ノ花). Il y avait également le film Sakuran réalisé par Mika Ninagawa et sorti en 2007. Les musiques du film composées et interprétées par Sheena en compagnie de Neko Saito ont été regroupées sur l’album Heisei Fūzoku (平成風俗) qui sert de bande originale au film. Elle a également composé la même année des musiques pour la pièce de théâtre kabuki Sannin Kichisa (三人吉三) et j’avais déjà parlé du morceau Tamatebako (玉手箱) qu’elle y interprète. La particularité sur Egg est que Sheena Ringo n’y compose que les musiques. Les paroles sont écrites par Hideki Noda et les morceaux sont interprétés au chant par Eri Fukatsu.

Un petit album de 8 morceaux intitulé Doku Ichigo (毒苺), qu’on pourrait traduire par « fraise toxique », est sorti en CD le 31 Août 2012 dans un coffret que j’ai trouvé sur Mercari pour un prix très raisonnable (on le trouve à des prix très variables). Les 8 morceaux sont attribués à Ichigo Ichie (苺イチエ), joué sur scène par Eri Fukatsu, car le personnage Ichigo Ichie interprète ces morceaux pendant la pièce de théâtre. Tous les morceaux ont été créés spécialement pour Egg, mais Sheena en a repris deux dans des versions différentes sur les albums Reimport. Le deuxième morceau de Doku Ichigo, intitulé The Heavy Metalic Girl et chanté en japonais par Eri Fukatsu, est également présent sur Reimport 2 (逆輸入 ~航空局~) sorti en 2017, dans une version assez différente chantée en anglais par Sheena et portant un titre japonais Jūkinzokusei no Onna (重金属製の女) ayant la même signification que le titre en anglais sur Doku Ichigo. au passage, le chassé-croisé anglais-japonais est assez intéressant. À vrai dire, je suis vraiment surpris par la version du morceau sur Doku Ichigo car Eri Fukatsu l’interprète brillamment. Elle a une voix beaucoup plus affirmée que je le pensais initialement et porte très bien ce morceau, peut être même mieux que Sheena sur la reprise qu’elle en a fait sur Reimport 2. En fait, le morceau fonctionne mieux en japonais, ce qui joue sur l’impression générale que j’en ai. J’aime aussi beaucoup l’ambiance de la vidéo accompagnant The Heavy Metalic Girl. On trouve également le septième morceau de Doku Ichigo sur le premier volume de Reimport (逆輸入 ~港湾局~) sorti en 2014. Sur Doku Ichigo, le sixième morceau Bōenkyō no Naka no Keshiki (望遠鏡の中の景色) et le septième morceau Bōenkyō no Soto no Keshiki (望遠鏡の外の景色) sont liés et reprennent un même thème musical. Mais tandis que le sixième morceau met l’accent sur la voix de l’interprète, le septième se concentre par contre sur la partition musicale jazz interprété par le groupe SOIL& »PIMP »SESSIONS, qu’on a déjà croisé à plusieurs reprises aux côtés de Sheena Ringo. La version jazz sur Doku Ichigo est plus complexe et intéressante que la version sur le premier Reimport. C’est un beau moment de ce mini-album. On pouvait d’ailleurs entendre ce même morceau, ou une version légèrement différente peut-être, pendant la cérémonie de clôture des Jeux Olympiques de Rio en 2016, au moment du passage de relai vers Tokyo comme ville hôte pour les Jeux de 2020. Il faut se souvenir que Sheena Ringo faisait partie du comité artistique des Jeux Olympiques de Tokyo 2020, avant la dissolution de ce groupe il y a quelques mois. C’était une des conséquences du report des Jeux en 2021 et d’une revue à la baisse des ambitions pour les cérémonies officielles, considérant la crise sanitaire toujours très présente.

La pièce de théâtre Egg a aussi des liens avec l’olympisme. Même en lisant un résumé des thèmes de la pièce, il m’est bien difficile de comprendre vraiment l’histoire, s’il existe vraiment une histoire articulée. On nous dit que « Egg » est en fait le nom d’un sport imaginaire, utilisant de vrais œufs. La pièce nous raconte l’histoire d’un groupe de sportifs, dont l’acteur principal Satoshi Tsumabuki, se démenant pour participer aux Jeux Olympiques. La pièce contient apparemment des éléments politiques, une histoire d’amour et des allés retours dans le temps, à l’époque des Jeux Olympiques de Tokyo de 1964, pendant la guerre en Mandchourie en 1940 et à l’époque actuelle en 2012, l’année où a été montrée la pièce au Théâtre Métropolitain de Tokyo du 5 Septembre au 28 Octobre. Souvenons-nous que 2012 était également une année olympique pour Londres et que 1940 était initialement la date prévue pour les Jeux Olympiques de Tokyo. Ils ont été annulés à cause de la guerre et ont finalement eu lieu beaucoup plus tard en 1964. L’album Doku Ichigo contient trois morceaux faisant référence directe à ces trois dates olympiques, car l’année est incluse dans le titre du morceau, comme par exemple Wakare 1964 (別れ 1964). Ces morceaux reprennent le même air et les mêmes paroles mais se différencient en intégrant un style nous rappelant l’année en question. Le style est par exemple proche du Shibuya-Kei pour Wakare 2012, morceau concluant ce petit album.

Doku Ichigo est une bonne surprise. On peut d’ailleurs l’écouter en intégralité sur YouTube. Je connais peu le théâtre moderne japonais mais Hideki Noda en est une figure importante. C’est amusant de constater qu’il aime jouer avec les mots et utiliser des termes obsolètes. J’imagine qu’il a dû très bien s’entendre avec Sheena vu son intérêt pour les utilisations inhabituelles de Kanji dans les paroles de ses morceaux. On peut d’ailleurs les voir ensemble en interview sur YouTube et sur le site web de Noda Map. Il évoque d’ailleurs la programmation de la pièce à Paris au Théâtre National de Chaillot dans la salle Jean Vilar du 3 au 8 Mars 2015. La pièce était apparemment jouée en version originale et Hideki Noda évoque dans la vidéo le fait que le public français est à priori réceptif à ce genre de spectacle, même s’il ne comprend pas la langue. Selon son sentiment, le public français serait en mesure de ressentir les émotions et les sensations que la pièce et les acteurs transmettent même si c’est joué en japonais. Il évoque une certaine ouverture d’esprit que j’arrive assez bien à appréhender. Avant de partir pour Paris, la pièce s’était jouée pour quelques nouvelles dates à Tokyo de Février 2015 et était ensuite revenue au Japon pour des dates additionnelles à Osaka et Kitakyushu. Je ne suis pas sûr que la pièce de Noda Map soit disponible en DVD mais je serais bien curieux de voir le spectacle en entier, notamment pour entendre les morceaux de Sheena Ringo interprètés en situation. En en voyant l’affiche de Egg, je pense à l’affiche d’une autre pièce de théâtre de Noda Map intitulé The Character, que j’avais aperçu devant le Tokyo Metropolitan Art Space à Ikebukuro. La tête dorée construite à base de personnes comme dans les dessins de Kuniyoshi Kunisada m’avait impressionné.