dans la spirale de Minami Aoyama

Comme je le montrais il y a quelques mois, je passe régulièrement faire un tour à la galerie Spiral à Minami Aoyama. On y montre très souvent des choses intéressantes et plutôt de la jeune génération étudiante en arts. Récemment, on pouvait y voir une série de collages photographiques par Erika Kusumi クスミエリカ, dont celui ci-dessus reprenant des éléments du building métaboliste Nakagin de Kisho Kurokawa. La page de l’artiste montre quelques autres de ses créations digitales, notamment des mélanges hétéroclites similaires à celui ci-dessus, incluant beaucoup d’architecture pour créer des petites villes ou espaces de vie chaotiques. Je reconnais dans ces compositions des bâtiments que j’ai moi-même déjà pris en photo, comme Shinjuku Park Tower de Kenzo Tange, la tour du Park Hyatt où se passe la majorité de l’action du film Lost in Translation de Sofia Coppola. La petite exposition incluant les créations de Erika Kusumi s’appelait Utopia & Chaos et montrait le travail de trois autres artiste dont Ayako Kuno, dont je montrais une des créations dans un billet précédent.

La programmation de ce que l’on montre dans les salles ouvertes du Spiral change très souvent. J’ai l’impression que les oeuvres exposées changent toutes les semaines. Plaquées sur les murs, j’aperçois ces deux grandes peintures que je ne peux m’empêcher de prendre en photo. Apparemment, on ne pouvait pas prendre de photos dans certaines parties de la galerie, ce qui est très rare pour cette galerie, car en général les photographies sont autorisées au Spiral. Il n’y avait pas non plus de signes indiquant que les photographies n’étaient pas autorisées. La jeune fille surveillant la salle, peut être une étudiante volontaire, faisait à mon avis un peu de zèle. L’une des deux peintures en couleurs vertes me fait penser à un paysage marin de végétation où les algues dans divers tons de vert se mélangent et forment des tresses comme une chevelure humaine. L’autre montre un personnage féminin torturé à mi-chemin entre une figure humaine et un robot cybernétique. Ce personnage me dit quelque chose, comme si je l’avais déjà aperçu dans un manga. Il me rappelle vaguement un mélange de personnage cyborg dans le manga cyber punk Black Magic M-66 de Masamune Shirow, pour la cybernétique, et le personnage de l’amie de Tetsuo, Kaori, dans Akira de Katsuhiro Ōtomo, pour la détresse du visage et surtout la chevelure. De fil en aiguille, me revient en tête la superbe vidéo de Kōji Morimoto (un des animateurs sur Akira) pour le morceau Extra de l’artiste électronique Ken Ishii. Ce morceau de 1995 est percutant tant pour la musique que pour les images animées très proche de l’esprit de Akira. Du coup, j’écoute beaucoup ces derniers temps l’album Jelly Tones dans lequel se trouve ce morceau Extra. Extra est le morceau phare de cet album mais l’ensemble se tient bien et garde cet esprit percutant (Stretch) en se mélangeant avec une atmosphère sombre (Moved by Air) de ville la nuit éclairée par des néons diffusant une lumière floue. C’est l’image qui me vient en tête. Par association, je réécoute l’album électronique Dove Loves Dub de Takkyu Ishino. Je précise « par association » car l’album de Takkyu Ishino est sorti la même année, en 1995, et utilise comme graphisme de sa pochette une illustration de Katsuhiro Ōtomo, qu’on pourrait croire sorti de Akira. En fait, j’avais cet album dans ma discothèque depuis des années mais sans l’avoir vraiment écouté avec attention comme il se doit. Je ne le découvre en quelque sorte que maintenant. L’album est plus axé techno que celui de Ken Ishii, mais j’aime les écouter à la suite. Il y a un brin d’humour dans les morceaux de Dove Loves Dub, comme Tko Tone qui reprend en sample des voix de rues criant les mots « 800 Yens » en référence au tarif horaire d’un service de téléphonie rose appelé telekura qui devait être actif à l’époque. D’autres morceaux, comme GTR, tracent une musique techno répétitive et efficace comme des bolides sportifs. Dans le nom GTR, je vois d’ailleurs une référence à la Skyline de Nissan. Je connais en fait assez peu la musique électronique japonaise, je vais creuser un peu plus le sujet en cherchant dans ces ambiances futuro-chaotiques et neo-tokyoïtes.

Au même moment dans la galerie Spiral de Minami Aoyama, se déroulait également l’exposition de design textile de la Tama Art University: Tama Art University Textile Design Exhibition 2018. A vrai dire, je n’ai strictement aucune référence ou connaissance du monde de la monde et du design vestimentaire, mais l’aspect avant-garde de certaines des créations m’a beaucoup intéressé. On voit parfois dans Shibuya ou à Harajuku une jeunesse qui n’a pas peur de l’excentrique et va assez loin dans l’avant-gardisme vestimentaire. Le site Tokyo Fashion que je regarde de temps en temps d’un oeil distrait montre parfois des spécimens intéressants d’une extrême originalité. La limite entre le cool et le n’importe-quoi semble pourtant très floue, mais toujours est il que c’est une bonne chose que cet anti-conformisme non-agressif trouve sa place dans certaines rues de Tokyo.

arts de galeries et de rues

Agnes b. Aoyama store – Juillet 2017 – Ohkojima Maki 大小島 真木 – Représentation de baleine sur la vitrine du magasin

Spiral – Août 2017 – Kyoko SHINDO 新藤 杏子 – Exposition The Fools – Great Artists

Art de la rue à Ebisu – Août 2017 – Dessins d’enfants sur un mur

Spiral – Septembre 2017 – Leandro Erlich – “Window and Ladder – Leaning into History”

Spiral – Octobre 2017 – Chiharu Shimizu – Exposition Diversity in the Arts – Museum of together

Art de la rue à Ebisu – Octobre 2017 – La présence des ombres

Art de la rue à Aoyama – Novembre 2017 – Bortusk Leer – Street Monsters

Seibu Shibuya – Novembre 2017 – Hiroto IKEUCHI 池内啓人 – Exposition Shibuya Style Vol. 11

Spiral – Décembre 2017 – Ayako Kuno – Exposition Shu Shu Shu Show – Spiral Take Art Collection 2017

Spiral – Décembre 2017 – Keigo Kamide – Exposition Shu Shu Shu Show – Spiral Take Art Collection 2017

Spiral – Décembre 2017 – Etranges architectures – Exposition Shu Shu Shu Show – Spiral Take Art Collection 2017

Spiral – Décembre 2017 – feebee – Exposition Shu Shu Shu Show – Spiral Take Art Collection 2017

dans la spirale des buildings

R・torso・C, par Atelier Tekuto

Les trois photos ci-dessus sont prises avec un iPhone et déjà postées sur Instagram. Je reprends à très petites doses la publication sur Instagram. La maison de la première photo se trouve quelque part à Ebisu. Je l’ai déjà prise en photo, j’aime beaucoup ce petit bâtiment et les deux voitures rouges et noires ajoutent à la composition. Les deux photos suivantes sont prises dans la galerie du Spiral à Minami Aoyama. Dans les masques, on pouvait voir une oeuvre vidéo de Rhizomatiks, qui conçoit notamment les nombreux effets visuels des concerts du groupe Perfume. Sur la dernière photo, un extrait d’une grande peinture de Kyoko Uematsu 植松京子 (insta) qui exposait dans le cadre du SCIF numéro 18 (Spiral Independent Creators Festival).

Il y a quatre ou cinq ans, j’ai créé une série d’une trentaine de morceaux électroniques tous disponibles sur ma page SoundClound. Un des morceaux se voyait doté d’une petite vidéo faite maison, le morceau intitulé ナガツ (Nagatsu), un des mots inventés par Zoa quand il était plus petit et qui me servaient d’inspiration pour certains titres. L’envie me prend soudainement de continuer les vidéos pour mes anciens morceaux, comme pour celui ci-dessous intitulé Rear View (un des plus anciens). Au passage, j’ai migré les videos sur youtube à l’adresse suivante.

Into the spiral

En descendant la spirale du building du même nom à Aoyama, on aperçoit un personnage bizarre. Lorsqu’il n’y a pas d’exposition, Spiral montre ce que je pense être sa collection permanente. Ce portrait, certainement de la série 肖像・赤, est de l’artiste japonais Yasumasa Morimura. Sa spécialité est de détourner des oeuvres célèbres en se mettant en scène. Sans vraiment apprécier ses oeuvres, ce visage rouge étrange est quand même marquant.

Timberize Tokyo

J’ai découvert par hasard l’exposition Timberize Tokyo qui se tenait au Spiral à Aoyama, il y a de cela quelques semaines. L’exposition présentait un sujet intéressant et assez surprenant à premier abord, celui de la construction en plein Aoyama de séries d’immeubles en bois.

Depuis 2000 et l’évolution de loi japonaise sur les standards architecturaux, il est désormais possible de construire des buildings en bois avec systèmes de protection incendie. Timberize Tokyo est un groupe d’architectes et ingénieurs à la recherche de nouvelles possibilités architecturales autour du bois. Depuis que Shigeru Ban crée des bâtiments à partir de tubes de carton renforcé, on imagine un peu mieux les innovations possibles à partir de bois renforcés pour la construction de bâtiments de grande taille.

Le Japon a une longue tradition d’utilisation du bois en construction, mais les formes proposées par le groupe Timberize Tokyo ne s’inspirent pas de design d’autrefois. On imaginerait assez bien les constructions montrées en maquette dans des matériaux plus classiques pour des buildings de cette taille comme le béton ou l’acier. C’est d’ailleurs assez difficile de s’imaginer ces bâtiments en taille réelle. Le bois renvoie plutôt vers des espaces chaleureux et intimes, tandis que ce qui est présenté réfère plutôt aux grands ensembles. L’exposition présentait un grand nombre de maquettes: des immeubles de bureaux sur plusieurs étages, des centres commerciaux, écoles, immeubles d’habitation… avec des formes parfois assez naturelles, justement, comme les structures florales du bâtiment Petal (en photo ci-dessus).

La vue de Aoyama en maquette est aussi intéressante, elle montre les implantations proposées pour ces constructions. Je ne connais pas la raison du choix du quartier d’Omotesando, peut être pour donner un certain impact en choisissant une avenue très fréquentée ou peut être parce qu’elle est bordée d’arbres, des zelkova. Les bâtiments de bois sont implantés à différents endroits le long des avenues et viennent remplacer les vieux immeubles. Ils n’ont heureusement pas été jusqu’à proposer le remplacement du Omotesando Hills de Tadao Ando, du Tod’s de Toyo Ito ou le One Omotesando de Kengo Kuma. Il s’agit peut être d’une belle utopie que d’avoir de tels immeubles de bois en plein Omotesando, mais je serais heureux de voir une partie de ce projet se concrétiser. Et ça serait un très joli contraste si tel immeuble se trouvait à côté des façades de béton de Tadao Ando.