春休み#7〜Miho no Matsubara

En dernière étape de nos petites vacances, nous nous arrêtons à Miho no Matsubara (三保の松原), un long bosquet de pins au bord de l’océan sur la péninsule de Miho, située dans l’arrondissement de Shimizu de la ville de Shizuoka. Miho no Matsubara, pour la vue panoramique qu’il donne du Mont Fuji, est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Hiroshige en a représenté une estampe ukiyo-e. Malheureusement, le ciel était très couvert au moment de notre passage et le Mont Fuji restait caché au loin. Nous avons espéré que le ciel se dégage soudainement mais notre attente fut vaine. Il n’empêche que la beauté des lieux valait le détour, notamment pour les pins centenaires aux formes biscornues, comme sculptées par les vents marins. On accède à la longue plage de pins par un chemin de 500 mètres bordé lui-même de pins et appelé Kami no Michi, la route de Dieu.

Miho no Matsubara est aussi connu pour la légende de Hagomoro qui raconte l’histoire d’un ange vêtu d’un manteau de plumes appelé hagomoro, survolant la plage de la péninsule de Miho. Éblouie par le blanc des sables de la plage, l’être céleste se dévêtit du hagomoro et l’accroche à un pin avant de se baigner. Un pêcheur découvre ce manteau de plumes et ne le rendra à l’ange qu’à la condition qu’elle exécute une danse céleste pour lui, ce qu’elle fera avant de rejoindre le ciel sous les yeux admiratifs du pêcheur. Le blanc du sable sur la plage de Miho a depuis longtemps disparu mais la légende continue d’être célébrée tous les ans en octobre le temps d’un festival racontant cette histoire sous la forme d’un théâtre nō près du fameux pin où était accroché le hagomoro. C’est avec cette histoire en tête que nous reprenons la route du retour, un peu déçu de ne pas avoir aperçu le Mont Fuji sur cette plage.

春休み#3〜Fujinomiya 2ème partie

À Fujinomiya, si le temps le permet, on peut cadrer une photographie du Mont Fuji à travers une gigantesque porte torii rouge. Je ne résiste bien entendu pas à l’envie de prendre cette photographie, somme toute évidente mais qui fait son effet tout de même. En plus de se trouver à l’entrée du Mt. Fuji World Heritage Centre de Shigeru Ban, le grand torii rouge démarque également l’entrée du sanctuaire Fujisan Hongu Sengen Taisha.

Depuis les temps anciens, le Mont Fuji fait l’objet d’un culte au Japon, notamment en raison de ses éruptions, il y a de très nombreuses années. Au 8ème et 9ème siècle, les croyances des villageois installés au pied du Mont Fuji disaient que ces éruptions répétées étaient la manifestation de la colère de la divinité du feu, Asama no Okami. On dit que le culte du Mont Fuji et la création de plusieurs sanctuaires, dont le Fujisan Hongu Sengen Taisha, datent de cette époque à partir des années 800, alors que de nombreuses éruptions avaient lieu. Les sanctuaires ont été construits au pied de la montagne et tout autour dans une tentative de pacifier la montagne sacrée, le principal sanctuaire étant le Fujisan Hongu Sengen Taisha. La dernière éruption du Mont Fuji date du 16 Décembre 1707. On l’appelle l’éruption Hōei, car elle a eu lieu pendant cette ère. Elle faisait suite à un grand tremblement de terre de niveau 8.7 sur l’échelle de Richter quelques semaines auparavant le 11 Novembre 1707. Le tremblement de terre faisant subir une pression sur la poche de magma située dans les profondeurs du Mont Fuji, l’a alors réveillé alors qu’il était inactif. Le Mont Fuji est actuellement dans un état actif, bien qu’il n’ait pas présenté d’éruptions depuis plus de 300 ans. On sait que le tremblement de terre du Tōhoku en Mars 2011 a pareillement augmenté la pression du magma sans heureusement produire de réaction volcanique.

J’ai en tête tout cela alors que je regarde cette montagne sacrée à la fois superbe et effrayante. C’est un paradoxe tout japonais. On se sent comme réconforté et protégé quand on aperçoit le Mont Fuji. On le guette dans le paysage pour essayer de le détecter derrière les nuages et on s’exclame à l’unisson lorsqu’on l’aperçoit soudainement. En même temps, cette montagne volcanique sous pression est capable de ravages à peine imaginable, si elle partait en éruption. Les prédictions disent que la propagation des cendres issues d’une éventuelle éruption pourrait atteindre Tokyo et recouvrir la ville de 2 à 10 cm de cendres. C’est certainement cette dualité qui pousse à l’admiration, ajoutée au fait que cette montagne, étant détachée et isolée de toute les autres, apparaît comme symbolique. Elle a la taille gigantesque d’un monstre qui effraie mais qu’on ne peut s’empêcher de voir.

Le sanctuaire Fujisan Hongu Sengen Taisha donne un excellent point de vue sur le Mont Fuji. On l’approche en longeant une rivière. C’est un endroit charmant, d’autant plus qu’il y a peu de monde. Il a peu de touristes, ce qui m’étonne un peu, mais c’est une bonne chose. Je reste un peu traumatisé par la visite du Tōdai-ji à Nara, il y a exactement un an de cela. A l’intérieur de l’enceinte du sanctuaire, le rouge vif du bâtiment principal en face de nous rivalise d’intérêt avec le cerisier en fleurs juste à côté. Les photographies des quelques visiteurs se tournent plutôt vers le cerisier, même s’il n’est pas encore en pleine floraison. Alors que la journée du sanctuaire se termine bientôt à 16h, je saisis ces instants paisibles en photographies par peur de ne plus m’en souvenir dans quelques années. En regardant les photographies maintenant, je me remémore la sensation des lieux.

Après avoir jeté un dernier regard sur le cône inversé posé sur l’eau du Mt. Fuji World Heritage Centre, il nous faudra vite reprendre la route pour rejoindre notre destination finale de la journée avant la nuit noire.