une semaine en mars (9ème)

Le vendredi de cette semaine de mars, nous sommes allés au National Art Center Tokyo (NACT) à Nogizaka pour voir l’exposition consacrée à l’artiste japonaise Kusama Yayoi 草間彌生, intitulée My Eternal Soul わが永遠の魂. La dernière fois que nous avons pu voir une retrospective de Kusama Yayoi, c’était en février 2004 dans un Roppongi Hills qui venait d’ouvrir à l’époque. L’exposition s’appelait Kusamatrix. Depuis, nous avons aperçu des oeuvres de Kusama Yayoi par-ci par là dans Tokyo, comme à Tokyo Mid-Town en 2008 mais en dehors des salles d’exposition. Kusama Yayoi est connue et reconnue notamment pour ses formes rondes en poix de différentes couleurs (des polka dots rouges ou jaunes notamment) dessinées sur des objets, comme par exemple sur des grandes citrouilles. Ces citrouilles géantes sont semées à différents endroits au Japon, comme à Hakata près de Fukuoka ou sur l’île de Naoshima. Pour l’exposition au NACT, on pouvait voir quelques unes des oeuvres emblématiques de Kusama Yayoi.

L’exposition est composée de deux parties intitulées « Kusama au 21ème siècle » et « Kusama au 20ème siècle ». La première et principale partie de l’exposition « Kusama au 21ème siècle » nous montre la série My Eternal Soul composée de peintures d’un très grand format carré. L’exposition a sélectionné environ 130 peintures, sur les 500 qu’elle a créé de 2009 jusqu’à maintenant, et les a disposé dans une grande pièce centrale sur tous les murs et sur deux rangées. Cet agencement, par son impact visuel pour le visiteur qui entre dans la pièce, me rappelle un peu ce que le Mori Art Museum a pu nous montrer avec les fresques géantes de Takahashi Murakami fin 2015.

Sur ces grandes peintures, on retrouve quelques uns des motifs dessinés en répétition et vus dans des oeuvres précédentes. Au milieu de la grande pièce centrale, sont disposés de grands objets très colorés en forme de fleurs à poix. Elles semblent inoffensives sauf si on s’en approche un peu trop près. Les photographies au smartphone étaient autorisées dans cette salle seulement. Ca a l’air de devenir une norme dans les musées au Japon d’autoriser les photos au smartphone, mais pas les appareils réflex en raison de leur taille certainement. C’est la deuxième fois que je rencontre ce cas. En général, les photographies sont tout simplement interdites.

Le reste de l’exposition nous montre Kusama au 20ème siècle, depuis ses débuts à Matsumoto avec les peintures représentant ses visions, son départ et ses années passées à New York, jusqu’à son retour à Tokyo. Parmi les oeuvres montrées, j’en reconnais quelques unes pour les avoir déjà vus dans d’autres lieux. Les oeuvres de Kusama Yayoi laisse un fort impact sur les visiteurs.

Dans un billet précédent publié il y a quelques mois après avoir vu le film d’animation Kimi no na ha (Your name), je parlais d’une forme de lien qu’on appelle musubi 結び. J’aime aller à la recherche de ces formes de liens entre les différentes choses que j’aime, notamment en musique. Parfois ces liens sont très faibles ou subtils, mais j’ai souvent utilisé ces formes de liens dans mes recherches et découvertes musicales. Quand j’étais plus jeune, au début des années 90, j’aimais lire les crédits à la fin des livrets accompagnant un CD de musique pour essayer d’y trouver des signes de collaboration avec d’autres artistes, que je pourrais ensuite découvrir. Ces liens sont un fil conducteur qui relie les choses pour leur donner une certaine logique.

En exemple, j’essaie d’illustrer avec le diagramme ci-dessus fait maison des liens que j’ai recherché et trouvé récemment entre différents artistes que j’aime, qui m’ont amené de fils en aiguille de l’oeuvre d’un(e) artiste vers un(e) autre. Le point de départ étant Kusama Yayoi, justement, dont on vient de voir l’exposition.

Il y a de cela quelques mois alors que je continuais sans répit à explorer la discographie complète de Sheena Ringo 椎名林檎 (je dois maintenant avoir à peu près tous les disques), je découvre la compilation Ukina 浮名 sortie en 2013 qui comprend exclusivement des collaborations entre Sheena Ringo et des artistes invités de différents horizons musicaux. Parmi eux, un groupe appellé Zazen Boys. Sous ce nom un peu douteux se cache le nouveau groupe de l’ancien leader de Number Girl, Shutoku Mukai 向井秀徳 qui interprète deux morceaux sur Ukina. Number Girl suivait l’influence du rock indépendant américain des Pixies et de Sonic Youth, deux groupes clés que je chéris dans ma discothèque personnelle depuis le début des années 90, où mon intérêt pour les musiques alternatives rocks a pris naissance. C’est intéressant comme les liens entre Number Girl et Sheena Ringo sont multiples, car avant cette collaboration avec le groupe de Shutoku Mukai, Sheena Ringo avait déjà fait équipe avec Hisako Tabuchi 田渕ひさ子, guitariste de Number Girl, pour le groupe éphémère Hatsuiku Status 発育ステータス pour une série de concerts appelée Gokiritsu Japon 御起立ジャポン en Juin 2000 et immortalisée sur un DVD du même nom.

Une autre collaboration sur Ukina, peut être plus inattendue, est celle du morceau Apple avec l’artiste électronique japano-américain Towa Tei テイ・トウワ. Au sujet de Towa Rei, j’avais un à priori sur sa musique comme étant plutôt légère et orientée « dance floor ». Il y a en effet ce côté là, mais ce morceau Apple a poussé un peu plus en avant ma curiosité et mon intérêt pour ce musicien. En recherchant un peu sur Youtube, je me prends de passion pour quelques morceaux de son nouvel album EMO, notamment le très particulier REM avec la jeune chanteuse idole alternative Ano. Ce morceau a quelque chose de très en phase avec l’idée que je me fais de l’électro japonaise. J’écoute également le mouvementé morceau Brand Nu Emo avec les soeurs Kiko et Yuka Mizuhara et deux membres du groupe METAFIVE Leo Imai au chant et Keigo Oyamada (alias Cornelius) à la guitare. Il y a quelques liens entre Towa Tei et le mouvement Shibuya Kei des années 90 (ex: Pizzicato Five) par la présence de certains invités sur cet album (comme Keigo Oyamada du feu groupe Flipper’s guitar, pionnier de ce mouvement). A vrai dire, je n’ai que très peu d’intérêt musicalement parlant pour le mouvement Shibuya Kei mais j’ai beaucoup apprécié la lecture d’une série d’articles sur le blog Neojaponisme (qui est désormais assez peu actif malheureusement comme la plupart des blogs que je suis depuis très longtemps). Des anciens membres du YMO (Yellow Magic Orchestra) comme Yukihiro Takahashi participent également à cet album. Yukihiro Takahashi est en fait assez présent dans la discographie de Towa Tei, au chant notamment, car il participe également au morceau Radio de l’album Lucky de Towa Tei, sorti en 2013. Lucky contient le morceau Apple interprèté avec Sheena Ringo. Lucky prend pour couverture l’art de Kusama Yayoi, des poix blancs de formes inégales sur un fond rouge, si caractéristiques de l’artiste. La voix de Kusama Yayoi intervient également sur le dernier morceau de l’album intitulé « Love Forever » qui n’est autre que le nom d’une exposition passée de Kusama. L’air de rien, des passerelles semblent se créer et je me pose maintenant la question si une collaboration entre Sheena Ringo et l’art de Kusama Yayoi pourrait voir le jour. On en est peut être pas très loin quand l’on voit que le tout nouveau Department Store Ginza 6 prend pour thème un morceau de Sheena Ringo et prend pour décor des lampes à poix rouges de Kusama Yayoi. Ces liaisons infimes n’ont peut être pas beaucoup de sens, mais j’aime les débusquer.

Pour pousser encore un peu plus les liaisons, un des derniers morceaux de Sheena Ringo, pas encore sorti sur un album, s’intitule en français dans le texte « 13 jours au Japon » et apparait sur la compilation « Les 50 ans de Saravah » en hommage à Pierre Barouh. Je me suis demandé quels pouvaient bien être les liens entre Sheena Ringo et Pierre Barouh. Je reconnais chez Sheena Ringo une certaine attirance pour la langue française car de nombreux morceaux de ses derniers albums sont sous-titrés en français. Pierre Barouh a aussi des liens avec le Japon. Ceci dit, je ne connais pas quels liens ont amené cette participation à l’album hommage du label Saravah. Sans essayer de trouver une explication très précise, je reste intrigué par la découverte de liens indirects comme le fait que Yukihiro Takahashi, dont je parlais un peu plus haut pour sa participation aux albums de Towa Tei, a lui même intitulé son premier album solo « Saravah! » (après le YMO), en référence au label de Pierre Barouh. Ces liens ne veulent pas forcément dire grand chose à part indiquer des influences et des connexions artistiques présentes ou éventuelles dans le futur, mais les déceler me fascine.

une semaine en mars (8ème)

De retour à Tokyo, je profite de quelques heures de libre pour une promenade urbaine. Comme très souvent, ces ouvertures dans mon planning du week-end, des jours fériés ou des jours de congé ne sont pas planifiées longtemps à l’avance et je me rabats souvent sur les territoires connus de Aoyama ou de Shibuya, quand des heures se libèrent soudainement. Ce sont des territoires que j’ai maintes fois parcouru et photographié, mais ils restent mes endroits préférés dans Tokyo, autant pour l’intérêt urbain, la capacité à se renouveler sans cesse et pour la foule urbaine en éternelle mouvement (que j’essaie pourtant souvent d’extraire de mes photographies).

Mon parcours, cette fois-ci, emprunte beaucoup les rues parallèles à Cat Street, une rue quasi piétonne perpendiculaire à l’avenue d’Omotesando au niveau de l’immeuble GYRE de MVRDV. L’intérêt principal de cette promenade était de confronter certains des bâtiments à l’architecture remarquable à mon nouvel objectif Canon 17-40, par exemple le QUICO de Kazunari Sakamoto. C’est un petit immeuble en pointe avec accentuation bleue près des ouvertures. Vu le peu de recul dans la rue étroite où il se trouve, il est très difficile de le prendre en entier en photographie au format horizontal.

Une des raisons de ma visite par ici était notamment d’aller découvrir une nouvelle galerie qui s’appelle The Mass. On y montrait normalement une exposition intitulée 12 by 12 / ART x MUSIC qui associe art et musique en exposant des couvertures d’albums musicaux créées par des artistes reconnus comme Richard Prince, Damien Hirst ou encore Banksy. Le tout étant sélectionné par Hiroshi Fujiwara. La perspective d’y voir quelques couvertures connues de Sonic Youth, par exemple, m’avait attiré jusqu’ici. La malchance de ces congés de mars m’a encore joué un tour car l’exposition était fermée le jour de mon passage. Pire encore, il était soit disant interdit de prendre des photographies de l’espace estérieur composé de blocs de béton formant la galerie d’exposition. Cela parait incroyable d’interdire la photographie de l’extérieur d’un bâtiment. Je me suis quand même permis discrètement, comme le montre la photographie ci-dessus. Il faut dire que c’est du beau béton et il m’était difficile de résister.

Dans la même rue que le QUICO, juste devant cette galerie The Mass et juste derrière GYRE, il y a cet étrange bâtiment dont les nombreuses ouvertures sont composées de groupes de quatre fenêtres. Le troisième étage du bâtiment est tout particulièrement intéressant, car il me fait penser à une serre qui serait posée de travers en haut du bâtiment. Ce décalage laisse penser que ce troisième étage n’est pas lié au reste du bâtiment, et qu’il pourrait s’orienter au bon vouloir des propriétaires. Ce n’est pas le cas bien entendu mais j’aime ces constructions qui mènent à la réflexion et à l’imaginaire.

Et toujours dans la même rue, devant le GYRE, les draperies de l’immeuble de verre DIOR par SANAA ne perdent pas de leur blancheur, tout comme le musée d’art contemporain de Kanazawa. En descendant l’avenue d’Omotesando jusqu’au croisement avec la longue rue Meiji, notre regard se laisse forcément attirer par les surfaces en miroir à l’entrée du Tokyu Plaza. Il est devenu assez rapidement un landmark sur cette avenue et attire les photographes. A l’entrée de Tokyu Plaza, l’effet de fracturation de la foule dense du croisement à travers ce jeu de miroirs multiples est intéressant à photographier.

Mon parcours me fait ensuite passer devant la galerie alternative d’art Design Festa Gallery. Je ne sais jamais très bien où elle se trouve et il faut à chaque fois que je tourne en rond dans le quartier pour tomber dessus. Je la retrouve cette fois grâce à un bâtiment annexe couvert de peintures de visages féminins. Juste à côté, une mini galerie est ouverte sur la rue et l’artiste aux cheveux bleues présentent ces oeuvres. Elle se tient debout devant une file bien ordonnée de jeunes filles principalement, venues faire signer un dessin, ou un morceau de carnet. Cette procession bien organisée, perdue dans le labyrinthe des rues de ce quartier, évolue dans le plus grand calme.

Mais ma montre me rappelle déjà que le temps m’est compté et qu’il faut que je prenne le chemin du retour pour aller récupérer à Roppongi Hills, où je les avais laissé. Ces promenades non planifiées et sans but très précis faut beaucoup de bien de temps en temps.

une semaine en mars (7ème)

Je termine cette série de photographies à Kanazawa avec ce billet et en commençant par un très bon restaurant japonais sur les hauteurs du Mont Utatsu 卯辰山 donnant une vue sur l’étendue de la ville de Kanazawa. C’est agréable de déjeuner avec vue panoramique, accompagné d’une petite bouteille de sake Kokuryu (le Kokuryu Gin No Tobira). Ce déjeuner était juste après notre marche dans les jardins du Kenrokuen et notre visite du musée d’art contemporain de Kanazawa. Après le repas, le guide taxi nous attendait pour démarrer une visite de la ville en 3 heures.

Une des étapes était le quartier des demeures de samouraï à Nagamachi Bukeyashiki 長町武家屋敷跡. Là encore, les rues sont préservées, mais les anciennes demeures de samouraï sont pour la plupart des résidences privées et on ne peut bien sûr y accéder. Une des demeures est ouverte à la visite, il s’agit de la résidence Nomura. On peut accéder à une partie de la résidence et admirer le jardin très dense en roches, lanternes et passages de pierre au dessus de l’eau. On a eu la malchance de commencer notre visite en même temps qu’un groupe d’étrangers en visite organisée. Ils visitaient au pas de course et se déplaçaient en masse. Notre envie à tout moment de les éviter a perturbé la tranquillité que devrait prendre une visite dans de tels lieux. A Nagamachi, nous avons également visité une ancienne pharmacie reconvertie en musée avec divers objets. Dans une des salles, on peut y voir des cadeaux de mariage traditionnels typique de Kanazawa et de sa région et une série de balles de toutes les couleurs et de divers design.

Notre visite nous fait passer finalement au sanctuaire de Oyama 尾山神社 dont la porte est un mélange d’influence japonaise et européenne, notamment par l’utilisation de vitraux. Le sanctuaire en lui-même est de forme tout à fait classique. Sur le terrain devant le sanctuaire, un bâtiment aux murs de verre est posé. Ce design transparent est intéressant.

Il nous faut maintenant repartir vers Tokyo. On traverse la Porte Tsuzumi 鼓門, qui est l’entrée principale de la gare JR de Kanazawa par laquelle on accède au Shinkansen Hokuriku. Cette porte est devenue un symbole de Kanazawa et c’était un des monuments que je voulais absolument voir et photographier. Le design est très particulier et symbolise les formes du tambour japonais tsuzumi. Revenons maintenant à Tokyo pour la suite de cette semaine de congé en photographies.

une semaine en mars (6ème)

Higashi Chaya est un des quartiers de Kanazawa avec des rues préservées de l’époque d’Edo. C’était à l’époque le quartier des plaisirs. Des maisons de bois à deux étages toutes en profondeurs, avec des devantures faites de lamelles fines sont alignées dans quelques rues préservées de ce quartier. Ces maisons sont appelées ochaya お茶屋. Des geishas y pratiquaient autrefois divers arts comme le koto, shamisen, la danse ou la cérémonie du thé. Kanazawa est d’ailleurs reconnu pour l’excellence de ses arts et de son artisan, notamment les objets en laque recouvert de feuilles d’or. La plupart de ces maisons de thé (ochaya) sont maintenant reconverties en restaurants, cafés, boutiques ou demeures privées et nous n’avons malheureusement pas pu apercevoir de geishas dans les rues de Higashi Chaya. Nous avons cependant aperçu quelques japonais et japonaises en kimono, peut être loués pour la journée, car on ne devine pas une excellente facture. Voir des « personnages » en kimono dans ces rues ajoutent au pittoresque et à l’ambiance des lieux. J’imagine que, eux aussi, essaient de se mettre à la place des habitants de l’époque d’Edo, dans ce décor rare. Il y a également dans la ville de Kanazawa un autre endroit que nous avons visité brièvement où l’on peut voir un alignement similaire de ochaya. Il s’agit de Nishi Chaya.

Mais revenons un peu vers Higashi Chaya. La pluie de la première journée de notre visite ne décourage pas notre visite des rues, mais nous sommes tout de même contents de pouvoir entrer à l’intérieur de l’une des ochaya du quartier. L’ochaya Shima 志摩 est ouverte à la visite. Il s’agit d’une maison à deux étages, comme toutes les autres de la même rue, et avec un petit jardin intérieur. Plusieurs pièces en tatamis sont séparées par des portes coulissantes à l’étage. La maison est extrêmement bien conservée et là encore, il ne suffirait pas de grand chose pour se croire à l’époque d’Edo, comme regarder les activités de la rue à travers les persiennes du couloir du deuxième étage. Les photographies prises au smartphone sont autorisées à l’intérieur, mais pas les appareils photo reflex, par crainte que leur taille vienne abimer les portes et objets de la maison.

Déplaçons nous maintenant vers un autre quartier de Kanazawa, Teramachi 寺町. Comme son nom le laisse deviner, il s’agit d’un quartier où l’on trouve une multitude de temples (environ 70), placés à proximité du château de Kanazawa. Nous visitons celui de Myōryū-ji 妙立寺 que l’on appelle également Ninja-dera, non pas parce qu’il abritait des ninjas mais parce qu’il possédait de nombreux passages secrets, portes dérobées et autres pièges. On parle même d’un tunnel secret depuis un puits du temple jusqu’au château de Kanazawa. C’est extrêmement inhabituel pour un temple d’avoir ce genre de pièces secrètes. Il faut savoir que ce temple a été conçu en secret comme un poste avancé pour observer l’ennemi en cas d’attaques qui pourraient mettre en danger le château du seigneur féodal du clan Maeda. Une visite guidée minutée et extrêmement bien préparée nous montre un à un tous les secrets de ce temple, et ils sont nombreux. Le temple Myōryū-ji possède une architecture complexe et malgré la visite en détails, on a du mal à bien appréhender sa structure et on peut se perdre très facilement dans les pièces avec portes cachées dans les placards, escaliers dérobés sous le plancher, passages cachés derrière les portes coulissantes. A la période Edo, sous le shogunat Tokugawa 徳川幕府, les constructions de plus de trois étages étaient interdites. De l’extérieur, le temple semble faire deux étages, mais en réalité il en fait quatre avec un total de 23 pièces et 29 escaliers. Certaines des pièces sont très petites comme celle dédiée au rituel Seppuku, pour le suicide éventuel du chef de guerre ayant été vaincu à la bataille. Les photographies ne sont malheureusement pas autorisées à l’intérieur du temple. On se contentera donc de l’extérieur en photo, qui nous montre d’ailleurs un des secrets du temple: le poste d’observation tout en haut de la toiture. Le temple de Myōryū-ji est un endroit unique à voir et qui plait aussi bien aux adultes qu’aux enfants.

Pour une partie de notre découverte de Kanazawa, pendant 3 heures exactement, nous avons utilisé les services d’un guide taxi qui nous amenait de visite en visite à notre demande. Il partageait également avec nous nombres d’anecdotes, notamment comment ce temple Ninja-dera est devenu une visite incontournable du quartier Teramachi depuis qu’il a été mis en avant pendant unes des campagnes gouvernementales de re-découverte du Japon « Discover Japan », il y a de cela quelques années. Les visites y sont maintenant très programmées (30 mins) et il faut réserver à l’avance. Le prix de la visite à 1000 yens est assez cher pas rapport aux autres temples ou musée mais ce lieu unique vaut vraiment le déplacement.

une semaine en mars (5ème)

Avant de venir à Kanazawa, je ne savais en fait que très peu de choses sur cette ville, à part l’existence du grand musée d’art contemporain 21st Century Museum of Contemporary Art Kanazawa, car il apparait très souvent dans les livres et magazines d’architecture. On doit son design au duo d’architectes Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa qui forme SANAA, primé du Pritzker en 2010 (le musée datant de 2004, on imagine qu’il a contribué pleinement à cette reconnaissance). Le musée est idéalement situé au centre de la ville près du parc Kenrokuen. Il suit une ligne stylistique très typique de SANAA, composé d’une somme de bâtiments de forme monolithique et de couleur blanche. Ce sont des unités indépendantes regroupées dans une grande forme circulaire couverte de verre qui délimite les contours du musée. Là encore, c’est typique des créations de SANAA. A travers les grandes baies vitrées, le musée semble pleinement ouvert vers l’extérieur et rend l’accès au musée très facile et accueillant pour les néophytes. Par contre, avec plus d’une vingtaine de blocs à l’intérieur du cercle, l’espace ressemble un peu à un labyrinthe où il semble facile de se perdre ou de tourner en rond (c’est le cas de le dire). Je spécifie volontairement « semble » car la partie centrale du musée n’était malheureusement pas accessible lors de notre visite. Elle était fermée pour cause de préparation de l’exposition suivante. C’était d’autant plus dommage que l’exposition suivante démarrant le 8 avril, après notre départ donc, est celle de Manabu Ikeda, dont j’ai déjà parlé ici et dont j’admire vraiment les oeuvres gigantesques et pleines de détails.

On pouvait tout de même découvrir certains espaces du musée, en gros faire le tour du musée sur le cercle intérieur en longeant la longue baie vitrée courbe. Autre mauvaise surprise de notre visite, la fameuse piscine de Leonardo Erlich habituellement en libre accès était également fermée ce jour là pour la même raison de préparation d’exposition. En fin de compte, on n’a pas pu voir les oeuvres de l’exhibition permanente, notamment celle de Anish Kapoor ou James Turrell. Restaient les oeuvres à l’extérieur du musée: un assemblage de tubes par l’architecte mexicain Fernando Romero intitulé « Wrapping » et un ensemble de trois surfaces de verre colorées et courbes intitulé « Colour Activity House » par Olafur Eliasson. Un des intérêts que j’ai trouvé à ces oeuvres, à part leur beauté intrinsèque, est la manière dont on peut les combiner avec le décor du musée de SANAA, comme par exemple superposer les surfaces colorées de l’oeuvre de Olafur Eliasson avec les blocs blancs du musée, ou les regarder à travers le grillage de la construction de tubes de Fernando Romero.

De toute façon, malgré cette relative malchance quand aux expositions (le mois de mars est en quelque sorte un mois de transition avant la « rentrée » en avril au Japon), la véritable attraction pour moi était le musée en lui-même, par la beauté des formes et ce blanc immaculé qui n’a étonnement pas perdu de sa propreté malgré plusieurs années d’existence. Il doit faire l’objet de toutes les attentions et d’un nettoyage impeccable (et onéreux) très régulier.