just be where you are

Je documente beaucoup les changements visuels qui s’opèrent en ce moment à Shibuya et ça risque de continuer encore pendant plusieurs mois, le temps que les nouveaux blocs architecturaux se mettent en place. Je me dis que ça sera intéressant de revoir ces endroits en photographie dans une dizaine d’années lorsque ces nouveaux immeubles et le nouvel urbanisme qui l’accompagne seront devenus un paysage commun pour les passants de Shibuya. En pensant au Shibuya d’il y a plus d’une dizaine d’années, je me remémore soudainement les photographies argentiques qu’avait fait le photographe Sebastien Pons entre 2001 et 2005 dans sa série Colors of Tokyo. Je me souviens qu’il me les avait montré lors de son passage à Tokyo. J’avais été grandement impressionné à l’époque par les couleurs saturées qu’il développait, donnant un grand impact aux personnages de rue qu’il prenait sur le vif. J’ai certainement pris l’habitude de pousser un peu la saturation de mes photographies après avoir vu les siennes, mais je suis incapable de prendre des inconnus en photo sur le vif comme il le faisait. Ce style de couleurs très saturées me rappelle le style de la photographe japonaise Mika Ninagawa. Comme je le mentionnais rapidement dans le billet précédent, elle réalise également des films comme Sakuran avec Anna Tsuchiya comme actrice principale en 2006 et Helter Skelter avec Erika Sawajiri en 2012. Je viens d’ailleurs de regarder Helter Skelter sur Netflix. J’ai bien aimé le film qui nous parle de l’aliénation provoquée par la célébrité et le côté ‘prophétie auto réalisatrice’ quand on connaît les soucis judiciaires actuels de Sawajiri est assez perturbant. J’ai également commencé à regarder la série Followers, toujours de Mika Ninagawa sur Netflix, et on nous parle encore du milieu de la mode et de ses règles infernales. Je ne sais pas trop quoi en penser, car la série se laisse regarder mais est extrêmement agaçante à de nombreux égards. La série reste très inoffensive et les acteurs ont une tendance a sur jouer et à se regarder jouer. Il y a tellement d’acteurs et actrices invités faisant des apparitions que ça ressemble à un défilé de mode. L’histoire, dans les quatre premiers épisodes que j’ai vu pour l’instant, reste assez prévisible et la critique en fond des médias sociaux sent le déjà-vu et arrive beaucoup trop tard pour être intéressante ou avant-garde. Le film Helter Skelter montre ce même milieu professionnel de la mode mais était beaucoup plus dérangeant et intéressant. Du coup, Followers ressemble à une version japonaise de Gossip Girl, série qui était certes distrayante dans ses premières saisons, mais on attendrait un peu plus d’originalité de la part de Ninagawa. Mais on se rattrape sur la beauté graphique de Followers qui me fait tout de même continuer, en espérant que l’histoire décolle un peu plus tard dans les épisodes de la série. C’est aussi étonnant de voir KOM_I en actrice, et la bande son est intéressante. On peut y entendre des morceaux de Supercar, Chai et Sheena Ringo (que Mika Ninagawa a d’ailleurs déjà pris en photo). Sur Helter Skelter, j’avais eu la bonne surprise d’entendre le morceau Mushi no Onna de Jun Togawa (morceau qui est très utilisé apparemment car je l’avais déjà entendu dans Forest of Live de Sion Sono).

Je suis un peu aigri en ce moment car j’ai décidé de ne pas aller au concert de Tokyo Jihen ce week-end. Une très grande majorité des événements spéciaux, concerts, écoles, certains espaces culturels comme Bunkamura, les Disneyland et Universal Studio ont décidé de fermer leurs portes sur consigne du gouvernement japonais pour essayer d’endiguer le virus, mais Tokyo Jihen décide malgré cela de maintenir les deux concerts de Tokyo dans le Hall A d’une capacité de 5000 personnes au Tokyo International Forum. Une option de remboursement est proposée, mais j’ai du mal à comprendre la position du groupe de maintenir ces concerts dans la situation actuelle. La logique de symétrie qui pousse Sheena Ringo à vouloir absolument redémarrer le groupe un 29 Février, va un peu trop loin à mon avis. J’aurais grandement préféré que le concert soit repoussé pour pouvoir y assister plus tard.

Pour me réconforter un peu, j’écoute Purity Ring qui est de retour avec un nouveau morceau intitulé Stardew. C’est un vrai bonheur car le morceau est excellent comme les très bons moments des albums précédents, notamment Another Eternity que je me remets à écouter en boucle en ce moment. Le style électronique-pop est toujours prépondérant sur ce nouveau morceau, mais il surpasse en qualité et intérêt tous les morceaux que je connais du groupe.

Un grand nombre des titres de mes billets sont extraits de paroles de morceaux dont je parle dans chaque billet, et je trouve qu’ils sont étrangement d’actualité sur les deux derniers billets.

いま世界が大変だから

La foule reste encore très présente au grand carrefour de Shibuya malgré le virus qui menace et le nombre de cas confirmés qui augmente un peu plus chaque jour dans tout le Japon. La proportion de personnes portant un masque pour se protéger, et protéger les autres, semble plus importante que l’année dernière, mais comme la période des allergies au pollen a déjà commencé, il est de tout façon assez normal de voir les gens se protéger de cette façon. Je fais la même chose même si l’allergie au pollen n’est pas très virulente pour moi cette année pour l’instant. Ces photographies datent en fait de la semaine dernière. Je pense que la proportion de gens masqués doit être plus importante maintenant. Je dirais environ 3/4 des personnes dans le train par exemple, même si les masques sont difficiles à se procurer. Dans les couloirs en dessous du carrefour de Shibuya, je découvre une exposition temporaire du photographe Tomokazu Yamada appelée Beyond The City. Il y documente en noir et blanc les changements actuels de Shibuya en montrant les zones de constructions. Des artistes sont invités à poser devant ces décors qui ont des airs apocalyptiques, et on reconnaît d’ailleurs KOM_I sur plusieurs photographies. Ça me rappelle qu’elle sera à l’écran sur Netflix dans la série Followers de Mika Ninagawa que je suis assez curieux de voir. Elle n’a pas le rôle principal ceci-dit.

En ce moment, les journées sont longues et difficiles et la musique relativement calme de Macaroom arrive au bon moment. J’écoute l’album Swimming Classroom du groupe sorti en 2018, mais que je ne découvre que maintenant au hasard d’une liste des meilleurs albums japonais de la décennie 2010 (créée par un groupe Discord que je suis depuis peu). C’est une excellente surprise et cet album a un petit quelque chose de réconfortant, certainement dû à la voix d’Emaru et aux compositions electro-pop lumineuses, comme des bulles de lumières, d’Asahi. Le morceau clé de l’album est le quatrième intitulé Tombi, qu’on ne se lasse pas d’écouter. La vidéo montre Emaru naviguer en zigzag dans les rues d’Ikebukuro, toute vêtue de blanc comme un être fantomatique. Ses mouvements ont beaucoup de liberté, ne se préoccupant pas des passants et des gens qui regardent. Cette inconsidération du regard d’autrui me fascine. Je ne suis pas sûr que la vidéo entière ait été prise à Ikebukuro mais je reconnais au moins le Tokyo Metropolitan Art Space de l’architecte Yoshinobu Ashihara dans lequel, ou à l’extérieur duquel, la plupart des scènes ont été prises. Un passage du morceau est parlé de manière rapide et ça me rappelle un peu Daoko. L’ambiance générale est cependant plus proche de l’univers musical d’Etsuko Yakushimaru, notamment pour les moments de fantaisie qui ponctuent certains morceaux. On y mélange les sonorités électroniques avec des bruitages extérieurs, des bruits de rues ou ceux d’une piscine (ou d’un bord de mer) sur le morceau titre. Un morceau comme naked lunch devient plus expérimental et mélange les directions musicales (j’y entends de brèves sonorités indonésiennes). La voix d’Emaru y est tellement modifiée dans ce morceau qu’on n’arrive plus à comprendre ce langage. Peut être s’agit il d’une langue imaginaire ou d’un japonais très modifié. Ce morceau ajoute une dose de mystère bienvenue. Les morceaux sont dans l’ensemble très mélodiques avec un grand souci de construction, mais souvent parasités de divers sons électroniques. L’album contient beaucoup de jolis morceaux, mais outre Tombi, j’ai une préférence pour le morceau d’ouverture akuma pour cette manière de chanter proche du parlé qui s’accélère par vagues et pour son final fait de soupires pleins d’une tension émotionnelle qui s’est amassée petit à petit au fur et à mesure que le morceau se déroule. Certains morceaux ont des côtés plus féeriques parfois ponctués de paroles énigmatiques comme le “2+2+2+ » en refrain sur le deuxième morceau woo. A force d’écouter cet album, il devient de plus en plus prenant et je finis par comprendre pourquoi il a été inclus dans cette liste des meilleurs albums japonais de ces dernières années. Ce type de liste reste de toute manière extrêmement suggestif et il y aurait beaucoup de choses à dire sur le classement, notamment la répétition excessive de certains artistes (Seiko Oomori, Ichiko Aoba, Tricot, Kinoko Teikoku…) dans le classement qui montre une certaine étroitesse de ce genre de communautés souvent centrées sur un groupe d’artistes et des styles musicaux bien déterminés. Toujours est-il que je suis friand de ce genre de listes car elles me permettent très souvent de découvrir de nouvelles choses, comme cet album Swimming Classroom de Macaroom. J’ y retrouve aussi beaucoup d’album dont j’avais parlé ici ces dernières années comme Shinsekai de Midori, Nightlife EP de Yuragi, Superman de Suiyoubi no Campanella (bien que ça ne soit pas mon préféré), Radio Onsen Eutopia d’Etsuko Yakushimaru, Eureka de Kinoko Teikoku, Itekoma Hits de Otoboke Beaver et Haru to Shura de Haru Nemuri.

before eternity kicks in

Ikegami est un quartier de Tokyo que je ne connais pas beaucoup mais que j’apprends à connaître tranquillement en commençant par le grand temple Ikegami Honmonji, de l’école bouddhiste Nichiren. Pour cette première visite, on n’a pas exploré tous les recoins de l’enceinte du temple qui est gigantesque et on s’est plutôt limité à la surface, c’est à dire à ce qui saute immédiatement aux yeux. La place devant le bâtiment principal est vaste et très dégagée. On y accède par un grand escalier dont les marches de tailles inégales accusent les années. Je reviendrais très certainement bientôt dans ce temple pour l’explorer un peu plus profondément. La rue courbe qui nous amène au temple depuis la station de Ikegami est intéressante car elle nous replonge dans l’ère Showa lorsqu’on regarde les devantures de certaines échoppes. Cette rue a le charme du désuet et contrairement à des quartiers plus prisés de Tokyo, cette ambiance ne changera certainement pas dans les années ou même décennies qui viennent.

capsules urbaines

Je recherche beaucoup en ce moment à faire contraster le décor urbain avec les couleurs de la végétation qui s’en dégagent soudainement, sans prévenir. Sur cette série photographique, le rouge végétal l’emporte haut la main sur le reste du paysage urbain, même la maison individuelle futuriste R・Torso・C de l’Atelier Tekuto sur la première photographie a du mal à rivaliser avec la force de cette couleur rouge. En insérant une photographie de la rivière de Shibuya, je m’amuse ensuite à soumettre ces formes et couleurs végétales à la rudesse grise du béton. L’architecture aux formes lisses et angles nets des première et dernière photographies agissent comme à cadre destiné à contenir et à amortir cet extrait de ville. Dans mon esprit, j’aime régulièrement concevoir mes billets comme des petites capsules urbaines suivant une logique définie de composition. Ces capsules s’apparenteraient à des salles d’un ensemble architectural beaucoup plus vaste, lui même représentant une réalité parallèle à celle de la Ville. Lire le manga Blame! de Tsutomu Nihei me fait réfléchir à ma vision de la Ville.

Dans les commentaires d’un billet précédent intitulé ‘walk as you mean to go on’, Nicolas me conseille la lecture du manga Blame! (ブラム!) de Tsutomu Nihei. Je ne connaissais pas ce manga de science fiction dont le premier épisode date de 1998, mais j’avais par contre vu de cet auteur l’anime Knights of Sidonia que j’avais beaucoup aimé à l’époque. Knights of Sidonia ressemble un peu à Neon Genesis Evangelion car, de manière similaire, des formes extraterrestres attaquent inlassablement une communauté qui essaie tant bien que mal de se défendre. Ce que j’aimais par dessus tout dans Knights of Sidonia, c’était la représentation très inspirée d’une ville verticale intégrée à un vaisseau spatial. On retrouve cette même complexité urbaine sur le manga Blame!, sauf que la représentation de la ville y est beaucoup plus chaotique.

Dans Blame!, Tsutomu Nihei nous montre un monde ultra-futuriste où les technologies cyberpunk se mélangent à d’immenses constructions de béton et de métal sombres et cauchemardesques. Un personnage solitaire, Killy, dont on ne sait que peu de choses, évolue entre les différents niveaux de cette gigantesque ville verticale. La ville est composée de strates séparées par des megastructures quasi indestructibles jouant le rôle de système d’isolation entre les différents niveaux de la ville. La ville que l’on parcourt dans Blame! prend ses fondations sur Terre et a ensuite grandi sans contrôle humain sur des dizaines de milliers de kilomètres pendant plus d’un millénaire. La ville est progressivement construite par des machines automatiques appelées bâtisseurs qui l’étendent à l’infini jusqu’à l’emballement et le chaos. L’univers de cette ville est sombre et crasseux, souvent vertigineux le long des longues parois donnant sur le vide, et viscéral quand les tubes de toute sorte s’entremêlent comme s’ils se connectaient à des organes. La ville est labyrinthique tout comme l’histoire qui y est relatée. On se perd dans ces lieux en suivant les traces de Killy comme on se perd dans l’histoire qui est particulièrement et volontairement complexe à comprendre. Le manga n’est pas facile d’accès du fait du nombre restreint de dialogues et d’explications sur les événements qui viennent interrompre le parcours des personnages. Cela pourrait avoir un aspect un peu frustrant, mais on apprend vite en parcourant les pages du manga qu’il s’agit ici plutôt de s’imprégner de l’ambiance des lieux et de vivre cette lecture comme une expérience. Il est difficile d’avoir des explications rationnelles à tout ce qui surgit, se transforme, disparaît soudainement pour réapparaître plus tard dans d’autres lieux. Pour sûr, ce manga ne s’adresse pas à tous, mais, en ce qui me concerne, j’ai tout de suite été impressionné par les détails et la spatialité de cette architecture gigantesque. D’une certaine manière, je suis même rassuré de savoir que Tsutomu Nihei a fait des études d’architecture avant de devenir mangaka, tant il maîtrise la conception des espaces.

L’univers post-apocalyptique de cette ville est mystérieux et on apprend sa genèse que par bribes d’informations très incomplètes. Killy, aidé dans son parcours par une scientifique appelée Cibo (ou Shibo), recherche des humains porteurs du terminal génétique. On apprend que les humains avaient autrefois contrôle sur l’évolution de cette ville en s’y connectant à travers ces terminaux génétiques, mais qu’une contamination leur à fait perdre ce contrôle, laissant la ville en proie aux machines bâtisseuses inarrêtables et aux créatures cybernétiques appelées Sauvegardes (ou Contre-Mesures ou Safeguards selon les traductions). Killy et Cibo ont pour objectif de rendre à l’humain cette capacité de se connecter avec la ville, afin d’en arrêter son expansion folle, de stopper les actions destructrices des Sauvegardes et de redonner à cette ville un fonctionnement normal. Le périple de Killy et Cibo est ponctué de nombreux combats contre ces Sauvegardes qui cherchent inlassablement à exterminer les humains. Killy est humain mais possède des capacités cybernétiques et une arme très puissante, un Émetteur de Rayon Gravitationnel (Gravitational Beam Emitter), dotée d’une technologie rare et donc convoitée. Cette arme est un de ses plus précieux alliés contre les Sauvegardes et autres créatures hostiles car ses effets sont dévastateurs.

Dans ces mondes obscures, vivent des tribus plus ou moins étranges ou hostiles qui viendront croiser le chemin de Killy. Dans les premiers volumes de l’histoire, il traversera le village des electro-pêcheurs (ou électro-harponneurs), un regroupement humain vivant retranché et précairement dans une partie de la ville et ne sachant que peu de choses sur leur histoire ou leur environnement. Ils ont connaissance de légendes sur un monde ancien mais peu de certitudes. Les nombreuses rencontres que fait Killy sur son parcours n’aident en fait pas beaucoup le lecteur à comprendre l’origine de cette ville, et viennent même complexifier l’ensemble. Une autre forme vivante appelée Silicié (ou Créature de Silicium) vient plus tard empêcher la progression de Killy et Cibo dans leur recherche. Ce sont des cyborgs de couleur noire aux formes étranges parfois grotesques et élancées, luttant d’abord pour leur survie en détruisant toute forme humaine. Un peu plus loin encore, un personnage aux allures féminines appelé Sanakan, représentante haut placée des troupes de Sauvegardes possédant également un Émetteur de Rayon Gravitationnel, essaiera aussi de leur barrer la route. D’autres personnages comme l’intelligence artificielle Mensab (ou Main-serv) et son gardien Seu, ou l’ancien Sauvegarde spécial reconverti Dhomochevsky et son compagnon Iko, essaieront plutôt de les aider dans leur quête d’un porteur de terminal génétique. L’histoire se complexifie encore quand on nous indique que ce terminal permet de se connecter à une Résosphère (ou Netsphere) qui semble être un monde parallèle à la réalité basique où le temps et l’espace fonctionnent différemment.

Il faut s’accrocher entre tous ces concepts mais on apprend vite à lâcher prise et à se laisser entrainer dans cet univers plutôt que d’essayer d’en comprendre les moindres détails. Et cet univers est fabuleux, que ça soit pour l’aspect grandiose et le détail extrême des lieux, que pour la qualité graphique et l’élégance des personnages que l’on y croise. En fait, cette densité nous fait penser que ce monde est beaucoup plus vaste et réfléchi que ce que l’auteur nous montre dans les pages du Manga. De nombreux termes font référence au monde digital et informatique comme le nom des personnages Mensab (Main-Serv autrement dit ’Serveur Principal’) ou Seu (software de l’IBM AS/400), le Silicium qu’on retrouve dans les composants électroniques, la Résosphère comme représentation du cyberspace, les Contre-Mesures qui essaient d’éliminer les humains contaminés comme des virus informatiques, les règles d’accès à la Résosphère qui ressemblent à une gestion d’accès d’un système d’exploitation informatique. La frontière entre le monde très physique de cette ville titanesque et le monde digital où des entités se téléportent devient de plus en plus flou au fur et à mesure qu’on avance dans l’histoire. En fait, la densité de ce monde et les références au monde digital (par exemple, les intelligences artificielles) ne sont pas si éloignées que ça des mondes de Masamune Shirow sur Ghost in the Shell. L’ambiance graphique est cependant plus proche de celle de H.R. Giger dont Tsutomu Nihei dit être influencé. Intéressante coïncidence, Je suis justement en train de revoir tous les films Alien suite au billet que je mentionnais plus haut, et j’ai déjà vu les quatre premiers de la série. Me reste à revoir les films plus récents de la série Prometheus. Tsutomu Nihei revendique également un attrait pour la bande dessinée franco-belge d’auteurs comme Enki Bilal ou Moebius. Je sens que je vais bientôt ressortir de ma bibliothèque la trilogie Nikopol et le gros volume de l’Incal.

Suite à la lecture des six volumes du manga Blame!, je regarde le film d’animation éponyme réalisé par Hiroyuki Seshita sur Netflix. Le film est graphiquement très fidèle mais ne va pas aussi loin que le manga dans la représentation de la grandeur des espaces. L’histoire reste beaucoup plus abordable que le manga car elle se limite au deuxième volume quand Killy rencontre Zuru et le village des electro-pêcheurs, et qu’il tente avec Cibo une connexion à la Résosphère à travers un terminal synthétique récupéré dans l’ancienne entreprise Toha Heavy Industries. On ne retrouve pas non plus dans le film d’animation la folie graphique que l’on peut voir dans le manga, notamment dans le dessin de certains personnages. Mais, le film est tout de même très beau visuellement et constitue un complément intéressant et même instructif sur l’univers du manga.

une poignée de petits soleils

On peut ressentir la chaleur sur une photographie à travers les éblouissements de rayons de soleil mais peut-on ressentir le froid sur des photographies comme celles que je montre ci-dessus. Cette marche hivernale me fait d’abord passer dans les zones résidentielles vides de Daikanyama puis vers les zones résidentielles vides de Naka Meguro. Sur les deux premières photographies, j’aime comment les surfaces couvertes de plaquettes fines de bois se répondent. Ces deux photographies se complémentent en quelque sorte. Les formes simples de la maison individuelle sur la première photographie viennent pourtant contrastées avec les formes diverses de la deuxième photographie. Comment expliquer exactement ce qui me plait dans ces deux premières photographies? Je n’arrive pas à le dire exactement car c’est de l’ordre du ressenti que je suis peut être le seul à percevoir. Un peu plus loin à proximité de la rivière Meguro, je découvre un étrange parterre de fleurs. Cette association de couleurs m’est assez inhabituelle. On dirait une poignée de petits soleils venant nous réchauffer lorsqu’on les approche.

La première image est extraite de la vidéo sur YouTube du morceau Delete Forever par Grimes sur son futur nouvel album Miss Anthropocene qui sortira le 21 Février 2020. La deuxième image est extraite de la couverture du tome 4 du manga Akira par Katsuhiro Otomo publié en Juillet 1987.

Le trône, les longues draperies rouges, les piliers en ruine et la vue dégagée à l’arrière sur la vidéo du nouveau morceau Delete Forever de ༺GRIMES༻ rappellent beaucoup la couverture du volume 4 du manga Akira de Katsuhiro Otomo. Claire Boucher s’est très clairement inspirée de l’univers d’Akira sur cette vidéo. En sous-titre, elle décrit que cette vidéo représente les lamentations d’un tyran alors que son empire tombe en ruine. L’univers musical du morceau est par contre très éloigné de la bande sonore d’Akira et est même assez différent des morceaux plus éthérés que l’on connaissait de Grimes jusqu’à maintenant pour son nouvel album Miss Anthropocene qui sortira bientôt, le 21 Février 2020. Il n’empêche que ce morceau à base de guitare acoustique est très bon et viendra certainement diversifier l’ambiance plus sombre musicalement parlant du reste de l’album.