Overlap House par Akihisa Hirata

La maison particulière à Minami Ōtsuka que je mentionnais dans mon billet précédent s’appelle Overlap House. Elle a été conçue par l’architecte Akihisa Hirata et a été construite en 2018. On la trouve dans un coin de rues d’un quartier résidentiel, perdue parmi d’autres maisons de formes quelconques. Elle apparaît tout de suite comme une anomalie dans le paysage urbain. J’avais déjà vu cette maison dans un magazine il y a plusieurs mois et, après avoir découvert et été épaté par Tree-ness House du même architecte que j’avais découvert il y a trois ans, j’avais très envie d’aller voir de plus près cette maison atypique. En la voyant pour la première fois devant soi, on s’interroge d’abord sur son organisation. Difficile de percevoir clairement d’un seul coup d’oeil comment sont organisés les étages, car l’espace est caché en partie par une végétation luxuriante. On se pose ensuite la question de sa structure. Elle a l’air extrêmement légère, portée par des minces piliers d’acier. Je me pose ensuite la question de sa résistance aux séismes. Les couleurs des surfaces apparemment aléatoires sont également surprenantes et intrigantes.

Overlap House est, comme son nom l’indique en partie, une superposition de parties habitables et de parties naturelles composant un jardin. Elle est composée de trois unités (A, B et C) posées à différents niveaux et accessibles par des entrées séparées. Une des unités est, par exemple, accessible du rez-de-chaussée à travers une porte de verre comme je le montre sur la troisième photo. L’accès aux autres unités demande de traverser un jardin en pente faisant le tour des autres unités tout en évitant le vis-à-vis. De grandes baies vitrées assurent la continuité entre l’espace intérieur et les jardins. Certains jardins et terrasses sont posés sur les toits des autres unités. L’idée est de laisser évoluer les plantes sur l’espace de la maison afin que l’espace habitable se fonde dans les espaces verts. Ces espaces verts se veulent également être une connection directe avec l’espace extérieur de la rue. Si on compare les photos disponibles sur le site de l’architecte avec celles que j’ai prise récemment, on constate en effet que la végétation est beaucoup plus dense et fournit une assez bonne isolation. La structure de la maison est très légère, faite de plaques et de piliers d’acier. Elle semble tout de même très fragile. Cette apparente fragilité me rappelle un peu celle de House NA par Sou Fujimoto.

Depuis l’extérieur, je fais le tour de la maison pour essayer de comprendre son organisation mais c’est tout de même assez compliqué de bien comprendre comment les espaces s’interconnectent. La photographie ci-dessus à gauche prise par Daici Ano et quelques croquis de l’architecte permettent de mieux comprendre l’ensemble. Un terrain en construction à côté de Overlap House permet également d’apercevoir l’arrière dans son intégralité. La disposition des motifs colorés des façades a été pensée par un algorithme. Ces couleurs contribuent à brouiller les limites entre l’espace naturel et l’espace habitable. Je me dis que cette maison aurait été idéalement placée au bord d’un parc, mais c’est plutôt elle qui apporte un petit parc à l’intérieur d’un quartier des plus banals, comme un petit bouquet de fleurs au milieu de la grisaille urbaine. Pour en savoir plus, le site FloorNature donne beaucoup plus d’informations.

le long de la ligne de tram Toden Arakawa

Je vais assez souvent dans l’arrondissement de Toshima ces dernières semaines et cette fois-ci, c’était pour aller à la recherche d’une maison très particulière que je montrerais dans un prochain billet. J’arrive d’abord à la station d’Ōtsuka par la ligne JR Yamanote et je me décide ensuite à prendre le tramway de la ligne Toden Arakawa jusqu’à la station de Omogakebashi. Le tramway de la ligne Toden Arakawa prît service en 1911. Il est opéré par Toei et couvre trente stations de Waseda à Minowabashi, sur une longueur d’un peu plus de 12kms. C’est une des seules lignes de tramway restantes à Tokyo avec la ligne de Setagaya opérée par Tokyu. C’est la première fois que je monte dans ce tramway. Pareillement à la ligne Enoden à Kamakura, le petit tramway partage parfois sa ligne avec les routes empruntées par les voitures. Il s’arrête aux feux et aux passages pour piétons. Il faut bien s’accrocher pendant le voyage car le rythme est saccadé avec des prises de vitesse par moment. Je pensais d’abord descendre à la station de Zōshigaya avec l’idée de refaire un tour au Kishimojin-dō (鬼子母堂) dans le temple Hōmyōji, mais je prolonge le plaisir d’être à bord du tramway et descends finalement quelques stations plus tard, à Omogakebashi, pour ensuite rejoindre Takadanobaba à pied. Je prends toujours en photo les deux fresques d’Osamu Tezuka sous les lignes de trains près de la station de Takadanobaba, pour essayer de capturer les rayons de lumière et d’ombre mais je n’arrive jamais à en tirer une photo convaincante. Ma mission à Takadanobaba était de trouver la pâtisserie japonaise qui confectionne des manjū à l’effigie d’Atomu et de Uran chan. Elle s’appelle Aoyagi (青柳) et a été fondée en 1918.

Nous sommes déjà à la fin de l’année, ce qui me donne à chaque fois l’occasion de regarder les statistiques de Made in Tokyo sur l’année passée. J’ai publié cette année 165 billets, en incluant celui-ci, soit presqu’une vingtaine de plus que l’année dernière avec 146 billets. Le nombre de billets publiés n’a cessé d’augmenter ces dernières années, sans que ça soit vraiment volontaire de publier plus que l’année précédente. Mon record en terme de billets était pour l’année 2004 avec 214 billets, suivi de cette année 2021 avec 165 billets. Entre 2004 et 2021, la longueur des textes écrits est par contre incomparable. J’écris beaucoup plus de textes ces dernières années et 2021 est de très loin un record avec un compte d’environ 162,000 mots écrits. Je me répète certes beaucoup ou pars souvent dans des digressions qui allongent mes textes plus que nécessaire. Malgré tout cela, le nombre de visites et de visiteurs est en légère baisse par rapport à l’année 2020, à 15,747 visites par an et 8,305 visiteurs par an, ce qui me ramène à un niveau similaire à 2019. À chaque nouvelle année qui démarre, je me pose presque systématiquement la question du format de ce blog. Mais l’année avance plus vite que ma réflexion et au final rien ne change vraiment. Le contenu de mes billets reste rythmé par mes découvertes musicales et par mes sorties photographiques et architecturales. J’aimerais écrire plus de textes de fiction et expérimenter un peu plus avec les images.

一瞬の光を切り取って

Un des objectifs de ma marche dans les quartiers de l’arrondissement de Meguro était de trouver une maison de béton près de la station de Yūtenji. Elle s’appelle Sky Cave et a été conçue par Ikawaya Architects. Je la montre sur les quatre photographies ci-dessus. Joël me l’avait indiqué par e-mail il y a plusieurs semaines et je me devais d’aller partir à sa recherche. Cette maison contient une clinique au rez-de-chaussée, tandis que les deuxième et troisième étages sont des étages privées pour deux générations d’une même famille. La qualité de cet espace vient en grande partie de la voûte au troisième étage couvrant en partie la terrasse et l’espace intérieur composé du salon et de la salle à manger. Elle surprend lorsqu’on l’aperçoit à travers l’espace urbain alentour. La maison est idéalement placée devant une petite forêt, tandis que la station de Yūtenji est assez proche derrière. La grande et superbe maison de béton des deux dernières photographies se trouve elle à Naka-Meguro. Je l’ai déjà prise en photo il y a longtemps et montré dans un billet de 2010. Je l’ai souvent recherché distraitement jusqu’à ce que je la retrouve volontairement pendant cette marche. J’avais déjà fait deviner qui habite dans cette riche maison de béton dans mon billet précédent et la réponse avait été facilement trouvée.

En reprenant ma route en direction de Kami-Meguro, une jeune fille aux cheveux teints en blond et coupés au carré, portant un carton des deux mains, m’arrête soudainement alors qu’elle descendait la rue que je parcourais en sens inverse. Elle avait l’air pressée mais avait en même temps un petit air enjoué. Il est relativement rare qu’un ou une inconnue m’adresse la parole en pleine rue, et ça m’a d’abord surpris. Elle m’explique qu’elle est maraîchère en me faisant un signe de la main en arrière pour m’indiquer vaguement d’où elle vient, et essaie de vendre un surplus de clémentines. La démarche m’étonne un peu surtout qu’il ne s’agit pas ici d’une rue commerçante mais plutôt d’une rue résidentielle quasiment déserte. Elle semble en fait descendre vers la station, certainement pour aller les vendre là bas et elle a vu en moi un éventuel client. Je devais avoir la tête de quelqu’un qui allait lui acheter des clémentines et, pris dans l’action, je ne pouvais que difficilement lui refuser. Elle me demande d’abord si j’aime les clémentines et m’indique que celles-ci sont très bonnes car elles viennent de Nagasaki. Il y avait une quinzaine de clémentines dans son carton, mais je ne me voyais pas en manger autant donc on se met d’accord sur cinq. En voyant mon appareil photo en bandoulière, elle me demande si je suis photographe. Et peu après, elle reprend sa route au pas de course et disparaît comme une fille éclair (閃光少女) dans le coin d’une rue.

Je me suis donc acheté comme cadeau de Noël le coffret de Tokyo Jihen composé du best album Sōgō (総合), du Blu-Ray Prime Time et d’une cassette audio incluant deux morceaux remixés. Sōgō contient en tout trente morceaux dont les deux inédits Hotoke Dake Toho (仏だけ徒歩) et Genzai to Fukuin (原罪と福). Plus je l’écoute, plus j’aime le morceau Hotoke Dake Toho écrit et composé par Sheena Ringo. Il n’était pas évident à la première écoute mais c’est un morceau qui se révèle après plusieurs écoutes. Genzai to Fukuin est composé par Seiji Kameda et ça se ressent dès les premières notes. Il n’est pas spécialement mémorable car plus classique. Je n’aime pas beaucoup la première partie mais il monte en intensité émotionnelle dans sa deuxième partie, ce qui rattrape un peu l’ensemble. Le principal problème de cette compilation Sōgō est le nouveau mix par Uni Inoue. Inoue est le mixeur officiel du groupe et est même considéré par certains membres de Tokyo Jihen comme le sixième membre du groupe. Il a eu la désagréable idée de monter beaucoup trop fort les niveaux, notamment de basse et de batterie. Ce boost fonctionne assez bien sur certains morceaux comme OSCA, mais est une catastrophe sur Killer Tune par exemple. La voix de Sheena Ringo sature quand elle monte en puissance et le hi-hat de la batterie est beaucoup trop prononcé. J’ai remarqué ce problème sur plusieurs morceaux et ça passe difficilement pour une écoute avec des écouteurs. J’ai beaucoup de mal à comprendre ce choix de mixage, qui se trouve être moins bon que ce qu’on peut entendre sur les originaux. Le Blu-Ray Prime Time donne une bien meilleure expérience bien qu’il soit sans grande surprise. On retrouve toutes les vidéos musicales du groupe depuis le début. La qualité d’image est plutôt bonne sur les morceaux plus anciens et excellente sur les nouveaux. Je suis toujours épaté par la qualité visuelle de la vidéo du morceau Sora ga Natteiru (空が鳴っている) de l’album Daihakken (大発見), réalisée par Yuichi Kodama comme la plupart des vidéos récentes du groupe. Ma vidéo préféré, comme celle du public, est celle du récent Ryokushu (緑酒) que Tokyo Jihen jouera d’ailleurs à Kōhaku ce 31 Décembre. Il y a quelques bonus sur Prime Time: les courtes vidéo promotionnelles pour l’album Music (音楽) avant sa sortie, une version de Senkō shōjo (閃光少女) de l’album Sports (スポーツ) composée d’extraits vidéos d’autres clips, entre autres. Mais rien de vraiment nouveau, à vrai dire. La plupart des vidéos étaient en fait déjà sortis à ma connaissance sur les DVD/Blu-ray accompagnant chaque album après leur sortie et je les avais déjà. Il y avait également une compilation de vidéos intitulée Golden Time sortie après la séparation de Tokyo Jihen en 2012, qui contenait les morceaux Konya wa karasawagi (今夜はから騒ぎ, Beaucoup de bruit pour rien) et Tadanaranu kankei (ただならぬ関係, And the beat goes on), jamais sorties auparavant en DVD/Blu-ray. Prime Time est beaucoup plus complet, comprenant en tout 28 morceaux dont certains récents jamais sortis en DVD/Blu-ray comme Eien no fuzai shōmei (永遠の不在証明, The Scarlet Alibi), Aka no dōmei (赤の同盟, Alianza de sangre), Ryokushu (緑酒) et bien sûr Hotoke dake toho (仏だけ徒歩, To Nirvana). Au final, redécouvrir sur grand écran et en excellente qualité tous ces morceaux à la suite vaut le détour. Une très bonne surprise du coffret est la mix tape de deux morceaux, Karada (体) (B-side du single Killer Tune) et Zettaizetsumei (絶体絶命), par Yoshinori Sunahara. Le mix donne par exemple beaucoup de sensualité au morceau Karada, et le côté rétro sur Zettaizetsumei fonctionne très bien. Sunahara ajoute beaucoup d’effets supplémentaires mais ça ne surcharge pas à mon avis les morceaux. Je me dis en écoutant cette mix tape, que ça aurait été excellent de laisser Sunahara remixer la totalité de la compilation, ce qui aurait apporter une vraie nouveauté. Yoshinori Sunahara (砂原良徳) est producteur et DJ, ancien membre de Denki Groove et membre actuel du super-groupe Metafive, fondé par Yukihiro Takahashi du YMO. Dans un billet de 2017, j’essayais de trouver des liens entre Sheena Ringo et Yukihiro Takahashi, et je pense que je m’en approche doucement.

Comme je le mentionnais déjà, Tokyo Jihen est très présent ces derniers temps dans les médias pour la promotion du best album. Et peut être un peu trop d’ailleurs car Sheena Ringo en est tombée malade bien qu’on ne sache pas la cause exacte de cette maladie. Elle n’était par conséquent pas présente pour certaines émissions, dont celle Live sur YouTube Hanakin Night Ajito Nau (花金ナイト -ビヨンド- 「アジトなう。」) du 22 Décembre 2021. Kameda menait donc l’émission sans Sheena mais avec les trois autres garçons ce qui était assez drôle car l’émission était du coup décousue. Mais la « cheffe » regardait quand même l’émission depuis chez elle et envoyait par moment des messages SMS pour recentrer la discussion. Pendant cette émission, Izawa nous confirme encore que le groupe avait l’intention initiale de se reformer pour une seule année, mais qu’il avait fait exprès de créer des nouveaux pour que le groupe puisse continuer. Izawa nous a dit plusieurs fois lors d’autres émissions son attachement pour Tokyo Jihen. Ça paraissait d’ailleurs très clair lors de cette émission. Un autre détail amusant est d’entendre Ukigumo se plaindre qu’il n’arrive pas toujours à lire les kanji dans les paroles de certains morceaux écrits par Sheena (on sait qu’elle utilise souvent des kanji compliqués ou anciens). Kameda revient encore sur le fait qu’il avait découvert très tard que le titre du morceau Hotoke Dake Toho était un palindrome. Ces petits moments où ils abordent la personnalité particulière de Sheena étaient assez amusants. L’émission, bien qu’assez désordonnée, était intéressante mais était seulement disponible en Live et n’est plus actuellement disponible sur YouTube. Le mardi 28 Décembre, une autre émission appelée MVP Music Awards avec le groupe et le réalisateur Yuichi Kodama était visible en Live sur le site de Pia pour celles et ceux qui avaient acheté Sōgō et Prime Time. Une loterie sélectionnait 600 personnes pour y assister sur place dans une salle de Yurakuchō, mais je ne faisais malheureusement pas partie des heureux gagnants. Je me suis contenté de la version retransmise en simultané sur internet. MVP Music Awards mimait en fait une cérémonie de remise de prix, genre MTV vidéo music awards, sauf que seul Tokyo Jihen était nominé et la présentation était assurée par Sheena Ringo, qui imitait une présentatrice de spectacle, comme elle sait très bien le faire. L’émission était pleine d’humour mais tout de même assez anecdotique.

J’ai beaucoup plus aimé l’émission radio Wow Music sur J-Wave le 18 Décembre car elle était présentée par Seiji Kameda et avait Sheena Ringo comme invitée. Kameda lui posait des questions sur ses influences comme s’il ne les connaissait pas déjà. En fait, il s’avère que Kameda a une très mauvaise mémoire car il oublie beaucoup de détails sur l’histoire du groupe. Il dit même que les fans doivent être beaucoup plus informés sur le groupe qu’il l’est lui-même. Sheena nous parle de sa méthode de création musicale. Elle nous dit qu’elle démarre en général d’un visuel, en imaginant par exemple des scènes de la vie quotidienne. Elle évoque également la difficulté qu’elle peut avoir à écrire les paroles sur des morceaux composés par les autres membres du groupe. Vers la fin de l’émission radio, Kameda demande à Sheena quel est l’artiste qu’elle a apprécié en concert et elle mentionne James Blake qu’elle aurait vu lors d’un concert au festival Fuji Rock. Tokyo Jihen ne s’est à priori pas produit en même temps que James Blake lors de ce festival. Kameda passe le morceau Voyeur de l’album Overgrown sorti en 2013. J’avais beaucoup aimé et écouté quelques morceaux de James Blake sur ses premiers EPs Klavierwerke et CMYK puis sur son premier album éponyme sorti en 2011 (The Wilhelm Scream est fabuleux), mais je n’avais pas suivi sa carrière. Je ne découvre donc que maintenant l’album Overgrown que je cours acheter au Disk Union d’Ochanomizu (pour la modique somme de 300 yens). Le morceau Voyeur passé pendant l’émission Wow Music m’avait beaucoup impressionné (cette nappe sonore unie qui couvre une partie du morceau) et je découvre que l’album dans sa totalité est assez fabuleux, notamment les morceaux Retrograde, Digital Lion en collaboration avec Brian Eno, To the Last. J’avais oublié la grâce de la voix de James Blake, tout en nuances. Musicalement, l’atmosphère ne respire pas la joie de vivre, mais on y trouve quand même une chaleur humaine certaine dans le froid hivernal qu’il nous montre sur la pochette de l’album. En fait, je suis assez surpris que Sheena Ringo mentionne James Blake, mais je suis en même temps bien content d’avoir découvert cet album.

オートマチックで遡って

Retour automatique dans les rues de Meguro que je n’ai pas encore épuisé, loin de là. Je marche cette fois-ci en direction de Yūtenji mais je m’égare volontairement en route. Les rues y sont étroites et denses. Une de mes hantises est de rentrer par erreur en voiture dans ce quartier et d’y resté coincé. J’y viens de toute façon en général à pieds ou à vélo. Ces rues me sont cependant connues. Je retrouve près de Kami Meguro une illustration de rue représentant une fleur symétrique que j’avais déjà photographié auparavant. J’avais également photographié Il y a plusieurs années les baleines et la pieuvre dessinées sur un muret près du sanctuaire Hachiman-jinja. Je tombe sur ces illustrations de rues par hasard. Je sais à peu près où elles se trouvent sans pourtant connaître le lieu exact. J’ai ce sentiment de flou géographique à chaque fois que je marche dans les rues de Meguro, mais je me perds rarement car il suffit de descendre les pentes pour gagner la rivière qui me ramènera vers Naka-Meguro. J’aime beaucoup ce genre de quartiers, certes très résidentiels, car on a l’impression de ne jamais les connaître vraiment.

Je continue mes découvertes musicales par morceaux plutôt que par albums avec les quatre titres dont je montre les couvertures ci-dessus. Je ne pensais pas que je pouvais aimer la musique d’Aimer, mais j’aime en tout cas beaucoup le morceau intitulé Chikyugi (地球儀), peut être parce qu’elle l’interprète en collaboration avec Vaundy. Ce morceau est présent sur son sixième album Walpurgis sorti en Avril 2021. Aimer est originaire de Kumamoto dans le Kyūshū et est apparemment admiratrice de la musique de Sheena Ringo et Utada Hikaru, si on en croit sa fiche Wikipedia. Sa voix husky a un certain mordant que je ne lui soupçonnais pas et s’accorde bien avec celle de Vaundy. Vaundy compose les musiques et produit ce morceau. Il compose à chaque fois des morceaux qui me plaisent car ils savent garder une certaine élégance même s’ils sont résolument pop. Et je dirais même que j’apprécie le morceau Omokage qu’il a composé pour le trio Milet, Aimer et Ikuta Lilas (幾田りら ou encore Ikura, du groupe Yoasobi) réunies pour l’émission The First Take sur YouTube. Les trois ont des voix très différentes mais qui se marient très bien entre elles. Elles ont toutes les trois des voix assez exceptionnelles, Milet a notamment une voix étonnante, et elles représentent en quelque sorte la nouvelle génération des chanteuses pop japonaises. Le morceau est un peu trop « pop » pour moi, mais les voir chanter en s’amusant sur la vidéo est très réjouissant. Cette chaîne The First Take arrive vraiment à « extraire » le meilleur des artistes qui s’y produisent. Et pour revenir à Vaundy, vu le succès de son dernier single Odoriko (踊り子) qui est premier au classement hebdomadaire de la radio J-Wave depuis quelques semaines, j’ai du mal à comprendre sa non-présence à l’émission Kōhaku de la NHK LE 31 Décembre.

Je ne pensais pas revenir aussi rapidement vers Quruli, mais les hasards des listes de fin d’année sur les meilleurs singles et albums de 2021 m’y replongent pendant quelques minutes que je répète très souvent dans ma playlist personnel. Le morceau I Love You du dernier album de Quruli intitulé Genius Love se trouve à la onzième place de la liste des singles japonais 2021 sélectionnés par le site The Glow. Le morceau a une structure simple et est immédiatement accrocheur. Je pense que la voix de Shigeru Kishida joue beaucoup dans mon appréciation de ce morceau. J’y ressens comme un confort qui me donne maintenant envie d’explorer la discographie plus récente du groupe, alors que je n’ai découvert pour l’instant que les trois albums les plus anciens. Sur cette même liste, on trouve un morceau du groupe D.A.N. intitulé NO MOON, sur un album du même nom sorti en Octobre 2021. Je savais pertinemment que j’allais finir par écouter la musique de ce groupe car je savais qu’Utena Kobayashi y participait, notamment pour y jouer de son instrument fétiche, le steel pan. D.A.N. est un groupe tokyoïte né en 2014 et composé de Daigo Sakuragi (櫻木大悟) à la guitare, voix et synthétiseur, Jinya Ichikawa (市川仁也) à la basse et Hikaru Kawakami (川上輝) à la batterie. Leur musique mélangeant sons électroniques et instruments est très atmosphérique. Je dirais même qu’elle est pleine de grâce, notamment par la voix exceptionnelle de Daigo Sakuragi, par moments androgyne ou proche du hiphop. L’ambiance qui se dégage de ce morceau est très prenante et je suis déjà certain d’aller à la découverte du reste de cet album. J’en parlerais certainement bientôt sur ces pages. Pour terminer, je reviens vers la musique de 4s4ki sur un morceau intitulé space coaster sur son nouvel EP Here or Heaven, sorti le 9 Décembre 2021. Le morceau a un beat électronique aggressif et la voix modifiée de 4s4ki répète le même motif vocal pendant toute la longueur du morceau, ce qui donne à ce morceau un côté expérimental et atypique que j’aime vraiment beaucoup. Je n’aime pas systématiquement tous les morceaux qu’elle compose mais je suis toujours très curieux d’écouter ces nouvelles créations.

des feuilles jaunes et des fleurs bleues

Après la visite de l’Université de Tokyo, je continue ma route depuis Hongō-Sanchōme en descendant en direction de la rivière Kanda. Je longe la rivière jusqu’à la station de Suidōbashi, en passant devant la tour Century faisant partie du campus Hongō-Ochanomizu de l’Université Juntendo. On doit cette tour, que je montre sur la deuxième photographie, à l’architecte britannique Norman Foster. Elle a été construite entre 1987 et 1991. En longeant la rivière, les couleurs des trains de la ligne Chuo-Sobu se mélangent avec celles des feuilles d’automne. Le terrain valloné vient créer des pentes comme celle de la troisième photographie. Cette pente se nomme Onna-zaka (pente de la femme). J’étais d’abord surpris par le nom de cette pente, mais cette dénomination n’est pas unique à ce lieu car elle désigne une pente de moindre dénivelé par rapport à Otoko-zaka (pente de l’homme) qui serait plus abrupte. Mais, j’ai tout de même été surpris par le dénivelé de cette Onna-zaka et par la présence à mi-chemin d’un bâtiment de béton qui semble être en partie soutenu par deux tiges métalliques. Enfin, je me demande quand même quelle peut bien être la fonction exacte de ces tiges car je ne pense pas qu’elles soient assez résistantes pour supporter le poids du bâtiment. En continuant encore un peu, je finis par atteindre le quartier d’Ochanomizu et ses nombreux magasins de musique. J’y avais acheté il y a très longtemps une guitare Gibson SG noire et un ampli Marshall. Je ne me souviens plus exactement du modèle de l’ampli mais ça devait être un MG30FX ou un MG50FX. J’avais eu à cette époque dans l’idée d’apprendre à jouer mais mes progrès très lents avaient eu raison de toutes mes prétentions artistiques. Tout avait commencé après avoir trouvé une veille guitare et un petit ampli laissés par des anciens locataires de ma résidence, à qui voulait bien s’en saisir. Je m’étais ensuite rendu compte que la guitare était en piteux état, mais gratter les cordes pour essayer d’en extraire une mélodie, même expérimentale, m’avait beaucoup plus. La Gibson avait ensuite remplacé cette vieille guitare jusqu’à ce qu’elle tombe sur le manche depuis son support, poussée par le vent qui s’était engouffré dans un rideau à travers une fenêtre ouverte. J’aurais pu essayer de la faire réparer mais je m’étais résigné à la vendre, ce que je regrette encore un peu maintenant. Ceci étant dit, je ne savais jouer aucun air connu, comme j’aimais le dire en plaisantant quand on me demandait à l’époque de jouer quelque chose, et elle finissait par gêner dans le petit appartement (surtout l’ampli encombrant). Mais je me rends compte que j’avais déjà parlé de tout cela il y a plus de deux ans. Alors que je réfléchis à tout cela en marchant, la gare d’Ochanomizu approche. Elle est toujours en construction et les rénovations prendront apparemment fin en 2024.

En chemin entre Suidōbashi et Ochanomizu, je m’étais arrêté quelques minutes devant l’école Athénée Français (アテネ・フランセ) dédiée à l’apprentissage des langues, notamment du français. Sa façade rose parsemée de lettres de l’alphabet en fait un bâtiment tout à fait unique. Il date de 1962 et a été conçu par l’architecte Takamasa Yoshizaka. Disciple de Le Corbusier avec Kunio Maekawa et Junzo Sakakura, il a participé à la conception du National Museum of Western Art à Ueno, seule oeuvre architecturale de Le Corbusier au Japon.