le temple dans la roche d’Ōya

A proximité des mines d’Ōya, il ne faut pas manquer la visite du temple bouddhiste d’Ōya (大谷寺). Son emplacement au pied d’une falaise est particulièrement intéressant car on a l’impression qu’il est incrusté dans la montagne de pierre d’Ōya. Les deux bâtiments principaux du temple sont en fait placés juste devant cette falaise, protégeant des sculptures de divinités bouddhistes créées à même la pierre. La principale et plus ancienne est une sculpture de 4 mètres de Senjū Kannon possédant mille bras. On pense que cette statue date de la période Heian (de 794 à 1185) et aurait été sculptée par le moine bouddhiste Kūkai (空海), qui aurait également fondé le temple en l’an 810. Cette sculpture ainsi que d’autres Bouddhas sculptés sur la même falaise de pierre d’Ōya (大谷磨崖仏) ont contribué à la désignation de ce temple comme site historique national japonais en 1926, appellation destinée à protéger les lieux culturels historiques importants. Le temple possède également un petit musée et un jardin. La statue massive de Kannon que je montre sur la dernière photographie est située en dehors de l’enceinte du temple. Cette statue de 27 mètres de haut a été édifiée après la seconde guerre mondiale, de 1948 à 1954, prenant le nom de Heiwa Kannon (平和観音) ou Kannon de la paix.

dans les mines de pierre d’Ōya

Cela faisait plusieurs années que je voulais visiter les mines de pierre d’Ōya (大谷) dans la préfecture de Tochigi, mais les deux heures nécessaires en voiture pour s’y rendre nous ont toujours un peu freiné. L’occasion se présente enfin et le trajet aller ne nous a pris qu’une heure et cinquante minutes. Les mines de pierre d’Ōya (大谷石) se trouvent à Ōyamachi, à proximité de la ville d’Utsunomiya. La pierre d’Ōya est une roche créée à partir de lave et de cendres. Elle a la particularité d’être ignifuge et facile à sculpter. On trouve cette pierre sur un gisement de plusieurs kilomètres autour de Ōyamachi. La pierre d’Ōya est notamment connue pour l’utilisation que l’architecte américain Frank Lloyd Wright en a fait pour la façade de l’ancien Hôtel Impérial à Tokyo. Cette pierre a également été utilisée pour l’ancienne école Jiyū Gakuen Myōnichikan (自由学園明日館) que Wright a conçu en 1921 et que nous avions visité en Avril 2022. Une des mines que l’on peut visiter a fermé en 1986 après 70 ans d’activité et est ensuite devenue un musée appelé Ōya Stone Museum. On y accède par un petit couloir qui nous amène rapidement vers une impressionnante caverne de pierre qui fait en tout 20,000 m2 et dont le sol est situé 30 mètres sous terre. On peut marcher dans de nombreuses galeries mais certaines sont condamnées. Il y fait sombre et frais, environ 12 degrés à notre passage. Le découpage géométrique de la pierre impressionne. Les grands murs et les ouvertures me font tout de suite penser à l’architecture brutaliste. On en est pas loin, je trouve. L’éclairage est diffus mais suffisant pour ne pas trébucher à chaque marche. Il contribue à l’ambiance, à l’impression d’être entré dans un endroit mystérieux, bien que nous ne sommes pas les seuls à marcher dans ces galeries. Les visiteurs sont cependant parsemés dans le vaste espace souterrain. Le parcours est ponctué par quelques explications nous expliquant le découpage de la pierre à la main au départ, puis par l’utilisation de machines mécaniques.

Quelques œuvres d’art sont placées à certains endroits des galeries. On trouve également accrochées sur un mur de pierre des séries de photos d’évènements ayant eu lieu dans cette caverne. On pouvait apparemment y célébrer une cérémonie de mariage. Les galeries de la mine ont été utilisées de nombreuses fois pour des scènes de films. Quelques affiches de films sont notamment montrées à l’entrée de la galerie. J’en montre une photo sur mon compte Instagram. J’ai vu quelques uns des films utilisant cet endroit, comme Tonde Saitama (翔んで埼玉) du réalisateur Hideki Takeuchi dont je parlais dans un précédent billet, et Real Onigokko (リアル鬼ごっこ) du réalisateur Shion Sono que j’évoquais également dans un autre billet. On y a également tourné des vidéos musicales, comme celle de Stereo Future de BiSH (un des meilleurs morceaux du groupe) que j’évoquais aussi dans un billet de ce blog. Sur ce billet datant de Novembre 2019, je donnais déjà pas mal d’information sur les mines d’Ōya et c’est d’ailleurs cette vidéo qui m’a donné envie d’aller visiter l’endroit. Et vous me voyez certainement venir mais le musée de pierre d’Ōya a également été utilisé pour une vidéo de Tokyo Jihen (東京事変), Kenka Jōtō (喧嘩上等), dont la photographie ci-dessus est extraite. Sheena Ringo se tient debout devant un mur de pierre découpé à la machine, tandis que Toshiki Hata effectue une danse Kagura en tenue traditionnelle sous les regards des autres membres du groupe (et d’un cheval, allez savoir pourquoi). En visitant les mines d’Ōya, on comprend très vite la force d’évocation de l’endroit et les raisons qui ont poussé des artistes et réalisateurs à utiliser ces lieux à l’atmosphère fantastique.

le parc fleuri de Ashikaga

La longue Golden Week de 10 jours paraît déjà bien loin, mais j’ai plusieurs séries de photographies restantes à montrer, ce qui me donne l’occasion d’y revenir en images. Pendant une journée ensoleillée du milieu de la Golden Week, nous sommes allés faire un tour du côté de Ashikaga dans la préfecture de Tochigi, pour aller visiter un parc assez connu, le Ashikaga Flower Park. Nous n’étions bien entendu pas les seuls à avoir cette idée, d’autant plus que ce parc est reconnu pour ses fleurs de wisteria et que les premiers jours du mois de mai correspondent à la pleine floraison. Un peu comme pour les cerisiers, ça a beaucoup moins de sens de visiter ce parc en dehors de la pleine floraison, donc toute la foule s’y dirige en même temps. Nous le savions et nous nous étions préparés mentalement à la foule. Ceci étant dit, l’arrivée n’était trop pénible. Avec un parking à voitures de 6000 places et un personnel assez nombreux pour faire la circulation, nous n’avons pas trop perdu de temps. La foule à l’intérieur du parc est immense, mais on arrive facilement à se déplacer sans se marcher sur les pieds. Le spectacle des wisterias fleuris est assez magique. Il y a plusieurs grands wisterias aux fleurs violettes placés à différents endroits du parc. Je suis impressionné par le toit de fleurs tombantes qui se dresse au dessus de nos têtes. Je n’imaginais pas qu’un seul arbre puisse porter autant de fleurs. On peut aussi admirer et traverser au centre du parc un tunnel de wisterias blanches. La profusion de fleurs joue sur la beauté des lieux et on en oublie petit à petit l’enfer de la foule. J’aime aussi beaucoup la complexité des branchages de ces arbres, qui fonctionnent comme des labyrinthes. J’aimerais, un jour peut être, essayer de les dessiner.

Pendant toute notre visite, on s’est demandé qu’elle était le lien entre le nom de cette ville Ashikaga de 149,000 habitants et le shogūnat Ashikaga (1336–1573) pendant l’ère Muromachi. Il se trouve que le clan Ashikaga qui s’était installé à Kyoto dès 1336 est en fait originaire de la ville de Ashikaga dans la province de Shimotsuke qui est l’actuelle préfecture de Tochigi. Un total de 15 Shōguns se succéderont pour diriger le pays pendant plus de deux siècles. Oda Nobunaga mettra fin au pouvoir du clan Ashikaga en 1573. Le troisième Shōgun établit une résidence à Kyoto construite en 1379 appelée le Palais des fleurs (花の御所 Hana no Gosho), en raison de l’abondance de fleurs dans le paysage du palais. Je n’ai pas pu confirmer s’il y a un lien entre l’image de ce palais aux fleurs du clan Ashikaga à Kyoto et le fait d’avoir installer ce grandiose parc fleuri à Ashikaga, mais je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a dû y avoir une certaine inspiration.

Le nouveau morceau de la compositrice track maker et interprète Utae s’intitule Beautiful Hell, le bel enfer comme peut l’être le parc d’Ashikaga en pleine saison. Ça fait un petit moment qu’elle n’avait pas sorti de nouveau morceau, malgré des participations à d’autres projets musicaux, mais je reste toujours attentif à ce qu’elle crée au compte-gouttes, il faut bien le dire. On retrouve sur ce morceau le même souci du détail et l’élégance du son électronique, sur lequel vient se poser la voix neutre de l’interprète. J’aime bien cette voix qui ne se force pas, qui n’exagère pas mais qui se complexifie au fur et à mesure du morceau par de multiples superpositions de voix se mélangeant les unes aux autres. Pourtant cette musique ne fait pas dans l’excès ou la profusion des sons. J’y trouve même une certaine forme d’apaisement qui s’accorde bien avec mes promenades photographiques. Je me souviens d’ailleurs encore clairement d’avoir écouté certains des morceaux de Utae quand je marchais seul au delà de Ikebukuro à la recherche du Tokyo Apartment de Sou Fujimoto. J’aime garder en mémoire ces associations musicales avec des lieux parcourus.

Week-end à Nikko

Nikko, le samedi 20 et dimanche 21 Novembre 1999. Après mon petit séjour en France, un « pèlerinage » dans l’un des hauts lieux du bouddhisme japonais s’imposait, histoire de se ré-imprégner du Japon que l’on aime. Nous, SeB, Aya et moi, avons donc décidé d’aller prendre l’air à Nikko, petite ville des plus agréables.

Parlons un peu histoire, c’est à Nikko que repose le shogun Tokugawa Ieyasu (un des seuls dont je connais le nom). Ce lieu a été également choisi par Tokugawa Iemitsu, le petit fils de Ieyasu, pour y ériger un des temples bouddhistes les plus richement décoré du Japon: le Toshogu. Allez, on est parti ! Ikimashou !!

Notre petit périple commence évidemment par la visite des temples de Nikko et plus particulièrement du Toshogu.


(ci-dessus) Une petite vue d’ensemble de l’entrée des temples de Nikko, pour mettre dans l’ambiance.

On commence par le jardin Shoyoen, « jardin ou l’on flâne », nom donné par Issai Satoh (1772-1859), un érudit confucéen de la période d’Edo. Le jardin est composé d’un petit plan d’eau avec carpes (koi), l’eau est l’élément essentiel du jardin japonais. Mais le meilleur, c’est cet arbre aux feuilles rouges écarlates: momiji. On trouve également ce type d’arbres au Canada, c’est la feuille rouge du drapeau canadien. Cette période est idéale pour admirer la campagne japonaise. Les forêts sont teintées de toutes les couleurs imaginables (sauf le bleu, …). Bref, c’est un plaisir pour les yeux.


(ci-dessus) Le jardin Shoyoen et un type qui s’est mis devant l’appareil au dernier moment, c’est malin.


(ci-dessus) Voilà les arbres dont je parlais auparavant.

On continue la visite des temples (le « des », c’est parce qu’il y en a au moins une vingtaine éparpillée dans la forêt). Le « temple du Dragon » (appellation personnelle) est particulièrement intéressant. Il est composé d’une grande peinture de dragon au plafond. L’acoustique de la pièce est étudiée de telle facon qu’un son aiguë (deux plaquettes de bois s’entrechoquant) émis sous la tête du dragon entre en résonance et provoque un écho d’une vingtaine de secondes.


(ci-dessus) Un des nombreux temples, perdus dans la nature, bordant un cimetière (c’est gai, je sais).


(ci-dessus) Un autre spécimen de temple. On est devant l’entrée principale. On pouvait visiter pratiquement tous les temples et éventuellement faire une petite prière (dans le cas ou l’on connait des gens qui vont passer un exam de pharma, par exemple).

Le temple principal du complexe est bien entendu le Toshogu. C’est un temple très décoré aux formes compliquées. Étonnamment, on trouve également des temples shintoïstes (jinja) à Nikko. Bizarre, bizarre …


(ci-dessus) Bon, voici enfin le Toshogu. Fallait patienter un peu.


(ci-dessus) A proximité du Toshogu, une petite pagode célèbre pour une sculpture sur bois représentant trois singes (y’a pas mal de singes en liberté a Nikko). La pagode abrite également un cheval blanc (d’henri 4) offert par la Nouvelle Zelande (Il serait, parait-il, sacré).


Même à Nikko, on a du mal à passer inaperçu. Avec nos fans.

Le soir, rien de tel qu’un minshuku (hôtel de type « ryokan » donc traditionnel avec tatamis et futons, mais dans une famille). La dame qui nous a accueilli se trouve être une joueuse de koto réputée. Le koto est un instrument traditionnel à 13 cordes, à l’horizontal. Il symbolise le dragon: la queue à droite, la tête à gauche, les petits ponts et les cordes représentent la crête du dos. Avec un beaucoup d’imagination, on reconnait, non? Regardez la photo pendant quelques minutes, vous verrez.

SeB et moi avons pu nous initier en jouant l’air le plus connu: »sakura sakura ». (C’est un sacrilège, mais la musique avait été reprise dans la pub Obao. Hum, Hum !!). N.B: le moins cher des koto coute 100,000 yens soit environ 5,000 francs et mesure bien 2m de long.

Ce même soir, nous avons également eu droit à un repas délicieux, préparé avec amour: sukiyaki (viande fine, champignons, tofu et autres légumes préparés dans une sauce bouillante). Oishii !! Et tout ca, suivi d’un bain chaud au Onsen voisin.

Definitly, le minshuku est LA formule pour découvrir le Japon.

Le lendemain, à la fraiche, on reprend la route pour le lac Chuzenji et ses nombreuses cascades: Kegon no taki est merveilleuse, mais aussi réputée pour ses suicides (sic !!).


(ci-dessus) Le lac Chuzenji au fond.


(ci-dessus) Le long d’une cascade menant à la cascade que l’on voit ensuite.


(ci-dessus) La fameuse cascade. Ici avec Jamiroquai, en guest star. A droite, la cascade de Kegon, elle est magnifique. Qu’en pensez vous?.

Le week-end se termine, retour à Tokyo sous la conduite avisée de maya tchan.