la fin des sakura à Inokashira

Même quand la saison des cerisiers en fleurs est terminée, il en reste encore un peu à montrer. Les photographies ci-dessus sont prises au parc Inokashira à Kichijoji le week-end dernier. Il y avait beaucoup moins de monde que d’habitude au moment du hanami, mais il y avait tout de même la foule typique des week-ends. Ce parc est particulièrement visité à tous moments de l’année. Les pédalos et barques étaient cependant plus nombreux que d’habitude sur l’étang du parc, car on pouvait naviguer sur l’eau en dessous des quelques cerisiers encore en fleurs. Je n’avais pas pris en photo ces pédalos en forme de cygnes depuis très longtemps car le sujet ne présentait pas beaucoup d’intérêt, mais j’y trouve ce jour-là un attrait particulier. Peut-être parce que la fin des cerisiers en fleurs vient prendre écho avec ces objets d’une autre époque. Je revois ici un certain charme de la désuétude, comme j’en parlais dans un billet précédent. Les photographies ci-dessus sont prises vers 4h du soir alors que les lumières se jaunissent et commencent doucement à s’estomper entre les feuilles du parc.

Je garde toujours une oreille attentive sur la musique de Fujimoto Chao 藤本ちゃお lorsqu’elle donne des liens sur Twitter vers ses nouveaux morceaux au fur et mesure qu’elle les construit. Le dernier morceau en date s’intitule Alone in the desert et je l’aime beaucoup, dans le style de l’album Yokoso bokura no homepage he. Comme souvent chez cette artiste, le morceau se compose d’un ou de plusieurs motifs électroniques plutôt sombres se répétant à l’infini, et sur lesquelles vient s’inscrire une voix parlée, parfois brouillée d’interférences. Sur la vidéo YouTube du morceau, Fujimoto Chao a monté sa musique sur des extraits du film Nobody Knows 誰も知らない de Hirokazu Kore-eda, et on comprend alors que les paroles du morceau sont directement inspirées par ce film. Comme j’en parlais dans un article précédent quand j’avais vu ce film, il m’avait beaucoup marqué par son histoire terrible et la force insoupçonnable des enfants (sujet continuel de Kore-eda), protagonistes principaux de cette histoire. J’imagine que Fujimoto Chao a dû également être marqué par ce film. Au bout de trois minutes, le morceau se termine brusquement par une coupure, comme dans un changement de scène du film.

it’s cold out there

Les fleurs dans la nuit, elles sont belles et mystérieuses. Ce soir là , il fait froid près des fleurs. ここはとても寒いよ.

Comme je le disais dans un billet précédent, je me suis mis à la recherche de nouvelles musiques sur Bandcamp ou Youtube, et de fils en aiguille, je suis tombé sur le blog Make Believe Melodies de Patrick St.Michel, journaliste musical au Japan Times tenant un blog musical bien documenté couvrant la musique japonaise indépendante et underground. Je me suis empressé de le garder en marque page et de commencer à explorer ses pages en commençant par les articles sur les meilleurs albums de 2017 et des années précédentes.

Je découvre sur ces abondantes pages l’artiste appelée Fujimoto Chao 藤本ちゃお avec notamment cet album ようこそ僕らのホームページへ qu’on pourrait traduire par Bienvenue sur ma homepage. La musique est électronique, relativement simple mais terriblement efficace (parfois je reconnais une loop que j’utilisais sur un de mes morceaux fait maison, ou un son qui me rappelle un peu Crystal Castle sur leur premier album) mais c’est l’association de cette musique électronique, souvent très rythmée et même percutante, avec les textes de Fujimoto Chao qui rend l’ensemble fascinant. Elle ne chante pas vraiment, elle parle plutôt en chuchotant ses textes d’une voix assez basse comme si elle s’adressait directement à la personne qui l’écoute depuis la pénombre de sa chambre. Il faut d’ailleurs plutôt écouter ces morceaux avec des écouteurs ou au casque. Les textes en japonais nous parlent beaucoup de douleurs, celles de la jeunesse (elle a apparemment tout juste 20 ans), parfois à la limite des pleurs sur certains morceaux de sa discographie assez étoffée déjà, mais parfois laissant échapper un sourire. Lorsque l’on écoute bien ce qu’elle nous dit, ces paroles sont même parfois inquiétantes. C’est un univers unique qui interpelle. L’album n’est pas très long avec 8 morceaux pour environ une trentaine de minutes, certains sont instrumentaux avec des loops vraiment accrocheuses et lourdes comme sur le deuxième morceau. L’atmosphère se construit petit à petit au fur et à mesure des morceaux jusqu’au meilleur morceau de l’album 天使現象 (phénomène d’ange), morceau de 9 minutes sombre et anxiogène, mais qui trouve une sorte d’éclaircie soudaine et salvatrice au milieu du morceau en finissant sur une boucle électronique lumineuse. Cet objet musical s’écoute d’une traite dans son ensemble, et devient excellent avec l’enchaînement des trois morceaux ㅇㅅㅇ, tokyo night et 天使現象. Je ne sais pas si c’est à mettre entre toutes les oreilles et il faut être réceptif à ce style de musique. Mais en ce qui me concerne, j’aime beaucoup découvrir ce genre de météorite musicale. En plus, à l’arrière de mon cerveau, cette musique fait écho à l’ambiance que j’imagine quand j’écris l’histoire de Kei.

Les albums de Fujimoto Chao sont seulement disponible sur Bandcamp et non sur iTunes. On peut écouter tous les morceaux en ligne sur la page Bandcamp de l’artiste et si l’on veut télécharger, on définit d’ailleurs soit même le prix que l’on souhaite. On donne donc ce que l’on veut sans qu’il y ait toujours un prix minimum. Un prix de 100 yens par morceau semble être le standard cependant. En général, les acheteurs donnent un petit peu plus, ce qui était d’ailleurs mon cas pour cet album. Du coup, j’ai également réouvert ma page Bandcamp en y rendant disponible quelques morceaux créés dans le passé. J’ai envie de me remettre à créer des morceaux électroniques. Un jour peut-être, bientôt peut-être.