海のように暖かくて寒い

Après avoir participé à une opération groupée de nettoyage des plages de la baie de Tokyo à Odaiba, je me décide à rentrer à pieds en traversant une nouvelle fois le Rainbow Bridge. Je garde un bon souvenir de ma première traversée par la voie Sud côté Océan Pacifique. Je me décide cette fois-ci pour la voie Nord donnant une vue sur l’intérieur de la baie et sur les tours de Tokyo au loin. Le ciel était plus couvert et l’air plus humide que la dernière fois mais les conditions restaient suffisamment agréables pour marcher pendant longtemps. J’aime cette perspective d’avoir à marcher longtemps et le sentiment d’isolation temporaire que provoque la longue traversée du pont, comme si on entrait dans un espace parallèle coupé du monde pendant plusieurs dizaines de minutes. Il y a peu de personnes qui traversent le pont à pieds et j’espère que ce billet ne va pas lancer une nouvelle mode. J’en doute fortement, ceci étant dit. Il est certain que ce pont me fascine, pour ces formes courbes, pour ces voies piétonnes qui se détachent des voies routières lorsqu’on approche d’Odaiba, pour la superposition des routes, autoroute et voie de train de la ligne Yurikamome. Les voies piétonnes ne longent malheureusement pas la grande boucle routière, impressionnante lorsqu’on y circule en voiture. J’appréciais particulièrement la parcourir à moto il y a plus de 15 ans et je faisais parfois même volontairement le déplacement.

En traversant le pont, j’ai également eu le plaisir d’apercevoir le bateau Hotaruna, dessiné par Leiji Matsumoto. Avec Himiko, Hotaruna est un des deux bateaux de la flotte reliant Asakusa à Odaiba sur la rivière Sumida. La sixième photographie montre la tour Yokoso Rainbow Tower à la forme triangulaire très particulière et même emblématique. Comme je le mentionnais sur mon compte Instagram, j’ai toujours interprété le nom du building Yokoso, qui veut dire bienvenue, comme un message d’accueil dans le centre de Tokyo. Lorsque je suis arrivé pour la première à Tokyo en 1999 depuis l’aéroport de Narita, qui était le seul desservant les vols internationaux à l’époque, ce building a été le premier souvenir architectural remarquable que j’ai eu. JapanPropertyCentral m’indique que Yokoso est en fait une contraction de Yokohama Soko, mais j’aime à penser que l’utilisation de Yokoso est volontaire vu l’emplacement du building à l’entrée du centre de Tokyo. Une contraction en Yokosoko m’aurait paru plus naturelle en japonais. Comme le fait également remarquer WakameTamago, on peut remarquer une certaine influence de la bulle économique dans ce building. Bien qu’il a été construit en 1995, après l’éclatement de la bulle, on ressent tout de même une certaine extravagance dans cette forme triangulaire très inhabituelle ne prenant pas en compte les considérations actuelles d’optimisation de l’espace utilisable. En ce sens, on y ressent des restes de la bulle.

Depuis quelques semaines, je reprends plaisir à marcher à l’extérieur sans porter de masque bien que la plupart des gens continuent à le porter malgré les messages d’assouplissement donnés par le gouvernement. Je le remets bien sûr à l’intérieur et lorsque la foule se fait plus dense près des stations. Un des grands plaisirs de pouvoi enlever le masque à l’extérieur est de retrouver les odeurs de la rue, celles de l’encens lorsqu’on approche des temples, celles des arbres et des plantes bordant certaines rues, celles des parfums lorsqu’on croise en un coup de vent d’autres passants, celles du bain chaud lorsqu’on passe le soir devant certaines maisons ayant laissées une fenêtre entrouverte, celles de la cigarette d’un passant qu’on renifle en passant comme si on fumait soi-même, celle du charbon de bois chauffé dans un barbecue coréen. Pendant presque deux ans, on s’était privé d’un de nos sens.

Ikkyu Nakajima (中嶋イッキュウ) a souvent des idées originales à proposer à son groupe Tricot. La dernière idée en date était de diffuser une émission en direct sur YouTube pendant 24h non-stop. L’émission s’est déroulée du samedi 28 Mai à partir de 21h jusqu’au lendemain dimanche 29 Mai même heure. Je n’ai bien sûr pas pu tout regarder, mais j’ai quand même passé quelques heures en tout à regarder le groupe jouer des morceaux demandées par l’assistance, en provenance du monde entier si on en croit les commentaires. Il y avait également des invités comme Kentarō Nakao (中尾 憲太郎), bassiste du groupe Number Girl et producteur. Ikkyu l’avait en fait déjà invité dans l’émission Wow Music sur J-Wave qu’elle animait temporairement. Pendant cette interview, j’apprends notamment que Montifour Kida (キダ モティフォ) appréciait Sheena Ringo à ses débuts et le fait que Sheena était fan de Number Girl (elle allait les voir en concert à Fukuoka) a amené Montifour à également s’intéresser au groupe. Pendant l’émission YouTube, les spectateurs pouvaient faire des dons en utilisant la fonctionnalité Super Chat (スパチャ) de YouTube pour que leurs messages soient lus en direct pendant l’émission. Les dons s’additionnant, un nouveau morceau était interprété à chaque fois que les sommes accumulées dépassaient 30,000 Yens. A 300,000 Yens au compteur, le groupe devait créer en direct un nouveau morceau. Ce montant a été atteint dans le journée de dimanche et le groupe s’est donc mis au travail pendant environ deux heures pour créer un nouveau morceau qui apparaîtra certainement en bonus sur un futur single ou EP. Une des surprises de l’émission était de voir soudainement arriver une personne en costume de l’agence HoriPro venant proposer un contrat à Tricot. Avex diffuse les albums de Tricot depuis le quatrième album Makkuro (真っ黒), mais il s’avère que le groupe n’avait pas d’agent jusqu’à maintenant. J’ai d’abord cru qu’il s’agissait d’un canular mais c’était vraiment un agent de HoriPro venant proposer en direct au groupe un contrat de 100 millions de Yens. HoriPro est surtout connu pour être une agence pour talents, acteurs et actrices mais moins pour des groupes de rock. J’espère que cette décision ne va pas influencer la direction artistique du groupe, mais si cela peut donner un peu plus de présence télévisée, ça serait une très bonne chose. La présence d’Ikkyu dans le super-groupe Genie High du producteur renommé Anon Kawatani a certainement été déclencheur de cette décision. J’imagine que cette décision avait déjà été prise avant l’émission et que le groupe a mis en scène la surprise de la visite de l’agent de HoriPro. Ils savent en tout cas très bien jouer la comédie. Avec une vingtaine de morceaux joués pendant l’émission YouTube et ce genre de coup de théâtre, je ne me suis pas ennuyé. Les quelques captures d’écran ci-dessus ont été prises pendant l’émission qui n’est malheureusement pas visible en différé.

crossing the rainbow bridge (2)

En approchant d’Odaiba, le pont Rainbow Bridge passe à proximité d’une petite île de forme carrée. Cette île est actuellement un parc, mais était autrefois une zone fortifiée appelée Daiba sur laquelle des canons étaient placés. Il y a plusieurs îles de ce type dans la baie de Tokyo, mais seule celle-ci est ouverte au public. Elles ont été mises en place pour protéger Edo de l’arrivée en 1853 du Commodore Perry, avec sa flotte de bateaux noirs de l’US Navy, qui avait pour intention de forcer le Japon à commercer avec l’Amérique. Une dernière courbe du Rainbow Bridge nous fait descendre en pente douce sur la terre ferme, enfin celle gagnée sur la mer. On remarque tout de suite un chemin de terre ombragé nous amenant jusqu’à la petite île carrée. Ce chemin entouré d’arbres nous laisse par moments entrevoir le Rainbow Bridge dans toute sa longueur. Il ressemble à un long dragon qui aurait émergé de l’eau et qui aurait pris pour idée de se diriger vers le centre de la ville. Cette petite île artificielle est vraiment agréable. Il n’y avait que 5 ou 6 personnes au moment où j’en faisais le tour. L’île n’étant pas proche d’une station de train, les visiteurs doivent être naturellement limités ce qui nous permet d’apprécier d’autant plus la tranquillité des lieux. On apprécie de loin la structure si particulière des bureaux de la chaîne télévisée Fuji conçue par Kenzo Tange. Après avoir fait le tour de l’île et pique-niqué rapidement dans un autre parc, je reprends ma marche vers les structures olympiques des Jeux de Tokyo 2020 à Ariake. Un des bateaux descendant certainement la rivière Sumida approche du pont que je suis en train de traverser. Plusieurs enfants sont à bord et me font bonjour ce à quoi je leur réponds volontiers. Ou peut-être aies je fait ces signes de la main le premier. Toujours est-il que j’avais besoin d’exprimer par des gestes expansifs le bonheur de marcher sous une météo idéale. Les enfants devaient ressentir le besoin d’exprimer leur joie d’être en petite croisière sur les rivières et la baie de Tokyo.

crossing the rainbow bridge (1)

Je me suis décidé pendant une journée de congé à marcher longtemps. Un ciel idéal, bleu avec quelques nuages, m’a très vite convaincu de partir en exploration urbaine. J’avais en fait dans l’idée de traverser le pont Rainbow Bridge pour aller voir les installations olympiques des jeux de Tokyo 2020 en pensant qu’elles seraient désormais ouvertes en partie au public comme peut l’être le nouveau Stade Olympique. Je sors de la station de métro de Tamachi et marche en direction de l’océan. Il faut traverser quelques canaux avant d’arriver sur la grande boucle du Rainbow Bridge. En fait, marcher en prenant son temps et en regardant la mer, celle de la baie de Tokyo, correspondait à l’idée que j’avais en tête. La boucle routière, sur laquelle circule également la ligne de train Yurikamome, est difficile à prendre en photo dans son intégralité. Je ne manque pas par contre l’immeuble biseauté Yokoso (datant de 1995), que l’on voit également très bien depuis la boucle en roulant. Cet immeuble doit être le tout premier que j’ai remarqué et que j’ai gardé en tête lors de ma première arrivée en bus à Tokyo en 1999. Depuis l’aéroport de Narita jusqu’à l’arrivée dans le centre de Tokyo, c’est le premier building qui se distinguait du reste et qui correspondait bien à l’idée que je me faisais de Tokyo à l’époque, avant d’y vivre. On monte ensuite dans le pont arc-en-ciel par un des piliers. Il y a deux routes, celle Sud et celle Nord. Je voulais d’abord emprunter la route piétonne Sud car elle est côté Tokyo, mais elle était fermée. La route Nord est côté Océan, ce qui n’est pas plus mal finalement car elle permet de mieux apprécier les courbes du pont. Je ne peux m’empêcher d’avoir le vertige une fois en haut de la structure mais il n’y a aucune possibilité de tomber par inadvertance. Comme la voie piétonne longe directement la route, on peut difficilement regarder l’océan au calme. Je ne sais pour quelle raison pourtant, je n’ai pas écouté de musique aux écouteurs à ce moment là. La traversée n’est pas aussi longue que je l’imaginais et on approche assez vite près de la plage d’Odaida.