un parapluie qui tue le soleil

Un point positif de cette crise, si je puis dire, est d’augmenter pour moi les occasions de marcher le week-end pour compenser le manque d’exercice dans la semaine en raison du travail à distance depuis la maison. La période de la fin du mois de Mai et du début Juin était même des plus agréables pour marcher masqué à pas rapides tout en évitant habilement les autres passants afin de garder une bonne distance pour raisons de sécurité. Il m’arrivait donc de changer subitement de trottoir ou de faire semblant de rester naturel en me forçant à marcher lentement derrière un groupe de personnes bouchant un trottoir étroit sans accès immédiat sur la route. Il faut savoir parfois prendre son mal en patience jusqu’à la prochaine bifurcation de route qui permettra de reprendre son rythme de croisière. Je marche à pas rapides pour justifier que cette marche en ville avec appareil photo soit en fait une activité sportive contraignante. Je ne suis pas contraint de faire un rapport sur le nombre de kilomètres parcourus et il ne s’agit en fait pas d’une contrainte car j’aime de toute façon marcher au hasard des rues, même sans appareil photo, même sans musique même si c’est mieux avec, même en connaissant ces quartiers par cœur. La saison des pluies qui vient de commencer depuis quelques jours contraint grandement mes parcours dans les campagnes urbaines. La série ci-dessus se passe quelque part à Ebisu et vers Azabu-Jūban. Elle date déjà de quelques semaines, mais on ne constate heureusement pas l’anachronisme entre mes billets. D’ailleurs, il y a plus de dix années d’écart entre certaines photographies publiées dans le billet précédent. Pour aller en direction d’Azabu-Jūban, je passe cette fois-ci un peu par hasard devant le grand portail vert foncé de la résidence de France à côté de l’ambassade. L’année dernière, Mari et moi étions allés, une fois n’est pas coutume, aux festivités du 14 Juillet à l’intérieur de cette résidence. Il est fort à parier qu’il n’y aura pas de réception cette année. Un peu plus loin, je me perds volontairement dans les rues de Minami Azabu entre la rue Sendaizaka et la rue Meiji jusqu’à Furukawabashi, pour tomber par hasard sur un petit temple appelé Shōnenji (称念寺). Il se trouve au bout d’une petit rue en pente. Lorsque l’on passe l’entrée, on peut apercevoir des rangées de tombes à l’ombre de plusieurs grands pins. Le temple se cache derrière une dépendance plus récente couverte de plaquettes de bois. L’enceinte du temple est coincée au milieu d’une zone résidentielle, mais lorsque l’on entre à l’intérieur, on oublie assez vite les maisons tout autour. On ne les aperçoit d’ailleurs pas depuis l’intérieur du temple, ce qui donne le sentiment éphémère d’être entré dans un autre univers à l’écart de la ville. Même si je connais assez bien ces quartiers pour y avoir vécu il y a très longtemps, il reste pour moi de nombreux lieux cachés dans cette campagne urbaine. Je n’ai d’ailleurs pas encore trouvé le petit étang où l’on peut pêcher. Ce n’est pas un endroit que je recherche activement, il ne doit pas être très difficile à trouver, mais j’y pense à chaque fois que je passe dans ces rues. En levant les yeux vers le ciel, on aperçoit les longues traînées blanches de l’escadrille Blue Impulse. Ils faisaient deux tours dans le ciel de Tokyo pour remercier le travail sans relâche du personnel hospitalier. Cela faisait apparemment 6 ans qu’ils n’avaient pas fait une telle démonstration. C’était à l’occasion du dernier jour de l’ancien stade olympique avant sa destruction, pour être remplacé par le nouveau stade conçu par Kengo Kuma.

Images extraites des vidéos sur YouTube des morceaux Goodbye Train (グッバイトレイ) par Ryukku To Soine Gohan (リュックと添い寝ごはん) sur leur album Seishun Nikki (青春日記) et Aoi Zanzou (アオイ残像) par Namida Ai (なみだ藍) sur l’album Taiyou Korosu Umbrella (太陽殺すアンブレラ).

Les méandres de l’internet me font découvrir un blog intéressant intitulé This side of Japan dédié à la musique japonaise dans une variété de genres allant du rap au rock indépendant, en faisant quelques écarts vers des horizons plutôt pop. Ce blog écrit par Ryo Miyauchi en anglais est tout jeune car il a démarré le 31 décembre 2019. Il ne comprend que quelques billets pour l’instant mais son dernier billet évoquant un certain nombre de jeunes groupes japonais de rock indé m’a tout de suite intrigué. La sélection est très intéressante dans son ensemble et la plupart des groupes me sont inconnus. Je noterais particulièrement deux morceaux que j’aime beaucoup pour leur énergie. Sur le morceau Goodbye Train グッバイトレイン du groupe Ryukku to soine gohan リュックと添い寝ごはん, on est tout de suite happé par l’énergie adolescente qui s’en dégage. J’aime de temps en temps ces petits instants musicaux plein d’insouciance, comme semblent l’être les trois membres du groupe en voyage sur les plages du Shōnan devant la presqu’île d’Enoshima et à quelques pas de la ligne de train Enoden. L’ambiance de cette vidéo a certainement dû jouer sur mon appréciation générale du morceau et m’a poussé à l’écouter plusieurs fois. Il s’agit de rock indé avec des accents pop que je trouve assez typiques des groupes rock Japonais, mais l’impulsion que donne le groupe sur ce morceau est communicative en plus d’être bien exécutée musicalement. Il s’agit d’un tout jeune trio dont les membres ont entre 18 et 19 ans, et qui a donc l’avenir devant lui. L’autre morceau de rock indé que je découvre s’intitule Aoi Zanzou アオイ残像 par la compositrice et interprète originaire de Kagoshima, Namida Ai なみだ藍. Ce morceau démarre également au quart de tour sur un riff de guitare que je trouve là encore assez typique de ce que le rock indé japonais peut créer. Le morceau nous emmène sans faiblir et on se laisse facilement accroché par le rythme qu’il nous impose et par cette voix voilée un peu particulière et légèrement imparfaite par instants. Il s’agit du premier morceau de son premier album Taiyou Korosu Umbrella (太陽殺すアンブレラ), le parapluie qui tue le soleil, sorti en Avril 2020. J’écoute beaucoup ces deux morceaux qui m’apportent un peu de soleil en cette saison des pluies.

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