every drop is drained away

Les photographies de ce billet, au sanctuaire de Hikawa, à Daikanyama et vers Naka Meguro, datent toujours du mois de Juillet ou des mois précédents, comme pour les billets les plus récents. Avant de passer aux photographies prises au mois d’Août, j’essaie désespérément de publier au plus vite les billets que j’ai déjà créé en brouillon dans WordPress et qui ont déjà ces séries de photographies attachées. Je ne sais pas trop pourquoi je m’impose à moi-même cette pression pour publier de nouveaux billets. Ce n’est pas comme s’il y avait une foule de visiteurs les attendant avec impatience, d’autant plus au mois d’Août qui est en général plus calme que le reste de l’année en terme de nombre de visites et de visiteurs. Le ratio entre le temps passé à créer ces billets par rapport au nombre de visites aurait du me faire arrêter depuis longtemps. J’ai toujours eu la faiblesse de penser qu’il fallait que je continue pour que ce blog devienne quelque chose, mais je le pense de moins en moins. Si ce blog devait être “découvert”, ça aurait déjà été fait depuis longtemps. En même temps, si je me pose régulièrement ces questions, c’est certainement parce que j’en ai pas encore fini avec ce blog.

Tokyo Jihen a sorti le 12 Août 2020 un nouveau single accompagné de deux autres morceaux pour composer au total un maxi-single. Le morceau principal s’intitule Aka no Doumei (赤の同盟 – Alianza de Sangre) avec une vidéo sorti le 14 Août. Le morceau sert de thème musical au drama Watashitachi wa Douka Shiteiru (私たちはどうかしている) avec Ryusei Yokohama (que j’avais vu au théâtre pour Bio Hazard) et Minami Hamabe, qui se déroule dans le milieu de la confiserie japonaise d’où la pochette du maxi-single représentant le symbole de Tokyo Jihen en version wagashi. Je trouve que ce morceau est meilleur que tous les morceaux sortis sur le mini-album de réformation News. Le morceau commence assez classiquement, mais le piano d’Ichiyo Izawa et la guitare en zigzag de Ukigumo nous surprend agréablement par leur présence démonstrative. Le morceau a une structure très particulière, notamment avec une coupure inattendue qui redémarre doucement avec le piano. Le groupe maintient l’esprit de la musique que l’on connaît d’eux mais s’affranchit de plus en plus des normes de composition classique. J’espère qu’ils vont continuer sur cette piste. Tous les morceaux sont écrits par Sheena Ringo. Ichiyo Izawa compose la musique de Aka no Doumei ainsi que celle du deuxième morceau Meijitsu Tomo ni (名実共に – Sweetie Reasons). Ukigumo compose le troisième morceau Gyokuza no Wana (玉座の罠 – The Lost Throne) et il y chante également en duo. A la première écoute, ce troisième morceau est celui qu’on apprécie tout de suite, peut être parce que sa composition est plus classique et que les voix s’accordent bien. Par rapport à Aka no Doumei, le deuxième morceau Meijitsu Tomo ni est beaucoup plus lent et plus sombre, mais avec des accents soudains de batterie et de guitare qui viennent casser ce calme, et une musique assez mystérieuse qui intervient à plusieurs reprises jusqu’à un court solo de guitare qui fait partir le morceau sur une toute autre voie. News ne m’avait pas autant enthousiasmé que ce maxi-single, du coup, je vais certainement le réécouter pour en avoir le coeur net.Toujours est-il qu’avec ces nouveaux morceaux, Tokyo Jihen s’engage vers un chemin plus intéressant que celui démarré avec News.

いつも正しいことばかり言う

Ce billet déborde de couleurs vives qui viennent contraster avec le décor urbain grisâtre. Un petit immeuble de la rue commerçante de Naka Meguro a soudainement subi une transformation haute en couleur. Un mur rouge et une geisha à légère tendance futuriste, accompagnée d’une traîne d’origami volants, viennent perturber le regard des passants. En fait, je semble être la seule personne à remarquer cette illustration géante. Elle fait peut être déjà partie du décor et n’entraîne plus l’intérêt des passants. On ne peut pas dire que cette geisha, dans son ensemble, ait beaucoup de personnalité mais le dessin est bien exécuté et les couleurs sont très denses. Je préfère ne montrer que les pieds et le bas du kimono qui sont les parties les plus réussies de l’illustration. On peut par contre voir l’intégralité de cette geisha sur le compte Instagram de Nakameguro Arts District. A vrai dire, je me force un peu à ne pas montrer de photographie de geisha car ce style d’images est devenu trop ‘cliché’ du ‘Japon qu’on aime tant’. Je l’ai bien fait dans le passé même si ce n’était pas de vraies geisha, mais je préfère détourner l’image comme la photo de geisha dont le visage est caché dans des nuages sur une des dernières pages de mon photobook In Shadows. En feuilletant ce photobook pour y retrouver cette image, je me dis que In Shadows doit être le photobook que j’ai le mieux réussi conceptuellement, même si cet ouvrage reste en grande partie incompris.

Dans une petite rue perpendiculaire à celle où se trouve ce dessin de geisha, je reconnais dans un magasin de vêtements vintage les personnages Beavis et Butt-Head sur un t-shirt noir. Je n’étais pas particulièrement adepte de cette série de Mike Judge, passant sur MTV dans les années 1990, même si elle est devenue culte, mais je regardais beaucoup MTV à cette époque. Je revois donc ces deux têtes avec une certaine nostalgie en pensant à l’humour complètement décalé de cette série et aux rires légèrement malsains des deux personnages. J’ai pris la dernière photographie derrière le PARCO de Shibuya. On était en train d’y installer une grande illustration d’un personnage d’inspiration manga aux cheveux rouges. Je ne sais pas du tout si ce personnage correspond à un manga en particulier ou s’il s’agit d’une création originale pour le Department Store PARCO. J’ai eu l’impression que le dessin n’était pas encore terminé au moment où je suis passé. En fait, le soir de mon passage rapide dans cette rue, une émission musicale était tournée en direct dans le studio Super Dommune de PARCO et retransmise sur YouTube. L’émission en elle-même ne m’avait pas beaucoup intéressé à part pour la partie où BISH interprétait un ancien morceau Beautiful さ sur la terrasse tout en haut du PARCO. L’émission était sensé donner une idée de ce à quoi pourrait ressembler les événements musicaux dans le futur, considérant les contraintes imposées par le virus Corona. Dans les images de synthèse que montrait l’émission, on retrouvait notamment ce personnage féminin aux cheveux rouges.

“Eh eh… Hu Hu Huuu….. mass of the… eh eh eh… hu huuu… fermenting… yeah dude hu hu huu… dregs… hu hu huu…. heavy machinery cool” Je fais parler Beavis et Butt-Head pour annoncer la musique qui va suivre.

On ne peut pas évoquer le rock indé japonais sans parler de Mass of the fermenting Dregs, (マス オブ ザ ファーメンティング ドレッグス) qu’on appellera plutôt M.o.F.D. ou Masu Dore (マスドレ) par souci de simplicité et parce que ce nom de groupe est des plus improbables. Ce n’est pas le seul groupe japonais avec un nom à coucher dehors et dans le cas de M.o.F.D., je n’ai pas cherché à en connaître l’origine. Natsuko Miyamoto, fondatrice originelle du groupe et seule survivante de la formation initiale après quelques réformations, avoue elle-même avoir composé ce nom de groupe comme une association de mots lui passant par la tête à ce moment-là. Il n’empêche que la musique rock alternative post-hardcore du groupe est d’une énergie étonnante et d’une efficacité à toute épreuve. On ressent cette énergie dans la voix de Natsuko mais aussi dans le jeu sans faille et réglé au millimètre de Naoya Ogura à la guitare accompagné de Isao Yoshino à la batterie. Le groupe s’est d’abord formé d’un trio féminin à Kobe en 2002, mais le départ de deux membres du groupe pour des raisons différentes a eu raison de l’énergie combative du groupe qui entra dans une période de hiatus de quelques années à partir de 2012. Le groupe ressortira de l’ombre en 2018 avec l’album auto-produit No New World. Plus récemment, M.o.F.D. vient de sortir le EP de deux titres You / Uta wo Utaeba うたを歌えば, en avance de leur nouvel album Naked Album en cours de crowdfunding. Ces morceaux, tout en débordant d’énergie, restent très mélodiques dans l’ensemble. C’est notamment le cas des deux morceaux du EP. Les premiers morceaux de No New World, comme New Order ou Asahinagu, prennent également des accents power pop, mais le groupe fait également des passages bienvenus vers des sons plus expérimentaux et distordants, sur le trop court Yah Yah Yah et sur le troisième morceau If Only démarrant sur un son lourd de guitares. On trouvait également cet aspect sur le EP éponyme du groupe sorti en 2008, seul album que je connaissais de M.o.F.D. jusqu’à cet album de 2018 et le nouvel EP. On pourrait craindre que l’énergie l’emporte sur l’émotion, ce qui n’est pas faux par moments, mais des morceaux comme Sugar contre-balance ce sentiment. Sugar doit être un de leurs meilleurs morceaux. J’ai tendance à écouter de la musique sombre et mélancolique (ce qui n’a absolument rien à voir avec mon état d’esprit), donc une petite enjambée vers une énergie plus positive fait beaucoup de bien de temps en temps. Précisons que j’ai acheté cet album et cet EP sur Bandcamp les jours où le site levait entièrement leurs frais de gestion. Pendant cette période du Corona virus, Bandcamp fait ce geste une fois par mois au bénéfice des artistes qui reçoivent donc la totalité du montant d’achat de l’album.

l’apogée du cerisier en fleur (1)

Cette année est tout particulièrement bonne pour les cerisiers en fleur, je dirais même exceptionnelle car je n’ai pas le souvenir d’une météo aussi faste pendant la période des cerisiers. En général, une vague de froid et de pluie vient soudainement balayer les fleurs et grandement écourter la période déjà bien éphémère pendant laquelle on peut les apprécier. Les photographies de ce billet datent de samedi dernier au moment de la pleine floraison. Le long de la rue Nisseki, des rangées de cerisiers bordent l’hôpital et ensuite l’école pour filles Jogakkan. Un peu plus loin dans Hiroo, mon oeil bifurque des cerisiers vers l’architecture, celle d’une étrange maison individuelle avec imitation d’un pont aux faux airs californiens. Et sur la photographie ci-dessus, le restaurant japonais Waketokuyama fait de briques par Kengo Kuma se mélange avec un cerisier en hauteur qui surplombe l’édifice d’une très belle manière.

Nous sommes ici en plusieurs photographies devant le rivière Meguro aux alentours de Naka-Meguro. C’est un passage obligé en cette période et j’y prends en photo les cerisiers tous les ans. Mais de toute manière, j’y vais très souvent, même plusieurs fois par semaine. C’est un endroit que j’apprécie, et bien entendu, je ne suis pas le seul. La foule venue nombreuse est au rendez-vous. Il y a même beaucoup trop de monde car il est difficile de se déplacer dans les rues longeant la rivière en cette période des cerisiers. Les lieux sont beaucoup plus calme heureusement, en temps normal.

La rue Meiji, au niveau de Shibuyabashi à proximité de Ebisu, est vraiment magnifique cette année. J’ai même l’impression que les cerisiers ont plus de volume que l’année dernière, mais ce n’est peut être qu’une impression. Continuons encore un peu dans un prochain billet, avec d’autres photographies, celles du dimanche.

les prémices du cerisier en fleur

Les photographies de ce billet se passent dans trois endroits différents, les quatre premières dans le parc Inokashira près de Kichijoji, les trois suivantes au bord de la rivière Meguro à Naka-Meguro et la dernière à Shinjuku devant la sortie Sud près du Department Store Lumine. Elles datent d’il y a plus d’une semaine et les cerisiers commençaient tout juste a fleurir. La floraison n’avait en fait pas vraiment commencé à Inokashira et c’était bien dommage car nous aurions été extrêmement bien placé à l’étage du restaurent japonais appelé Sublime, avec vue sur l’étang et les cerisiers. On retiendra au moins une bonne adresse. A Naka-Meguro, il n’y avait pas encore la foule qui se pressera à petits pas la semaine d’après pour la pleine floraison mankai le long des deux rives. Au hasard des rues, je découvre ce lutteur sumo dessiné en bas d’un immeuble et une représentation par l’artiste de rue Invader du Mont Fuji rouge de Katsushika Hokusai, appelé en japonais Gaifū kaisei 凱風快晴, une des 36 vues du Mont Fuji. Je connais pourtant bien le quartier, mais je n’avais jamais remarqué cette mosaïque à cet endroit. Quelques photographies de la pleine floraison des cerisiers vont suivre dans les prochains billets.

comme bloqué sur une boucle

Me revoilà assis dans ce café de Naka-Meguro après une longue marche de deux heures. Il est 7h du soir comme la dernière fois et la journée a été chaude. L’été est bel et bien commencé, mais se faisait plus supportable dans les rues de Meguro à partir de 5h du soir. Le but de mon parcours cette fois-ci était de suivre la rue Kyu-Yamate de loin, depuis les petites rues parallèles jusqu’à Ikejiri Ohashi. Je l’avais déjà montré il y a de cela quelques temps quand il était encore en construction, cet objet architectural massif ressemble à un bunker de béton aux formes arrondies et au centre creux. Il s’agit en fait d’une gigantesque boucle renfermant des voies d’autoroutes en spirale. La raison d’être de cette boucle est de réguler le traffic tout en joignant plusieurs autoroutes, rentrant dans Tokyo et périphérique au centre de Tokyo. Je le dis assez régulièrement mais les autoroutes suspendues intra-muros de Tokyo sont des véritables chefs d’oeuvres d’architecture et d’ingénierie. J’aime observer les courbes de ces morceaux d’autoroutes qui se rejoignent. Il y a une grande fluidité dans ces formes et une certaine légèreté du fait qu’elles volent dans les airs, au dessus d’autres rues. Je ne suis jamais rentré à l’intérieur de la boucle de Ikejiri Ohashi en voiture mais ça me tente d’essayer un de ces jours.

Je suis venu cette fois-ci jusqu’ici pour monter sur les toits de la boucle, qui sont aménagés en terrasse verte. Le terrain sur les toits est aménagé en jardin en pente avec des chemins pour se promener. Ce jardin dans les airs est très agréable, surtout à cette heure-ci alors qu’une brise commence à se faire légèrement sentir. Cet endroit est une fois de plus ce qui fait la beauté et l’intérêt de cette ville. On ne soupçonnerait pas qu’un tel jardin soit aménagé ici, au dessus d’un bloc de béton renfermant des lignes d’autoroutes. Je pense qu’il s’agit d’une norme urbaine, les toits des immeubles sont souvent recouverts de verdure. C’est aussi le cas de la résidence où nous habitons, où les toits sont recouverts de végétation bien qu’on ne puisse pas y accéder. A Ikejiri Ohashi, le jardin en hauteur est accessible jusqu’à 9h du soir. Il y a deux tours à proximité de la boucle qui sont reliées au jardin par des passerelles, mais malgré cela l’endroit était très calme. Je reviendrais certainement dans ce jardin secret.

Je passe le reste de ma promenade à zigzaguer dans les rues résidentielles entre le bunker de béton de Ikejiri Ohashi et la station de Naka-Meguro, en prenant des photographies quand un bâtiment me semble sortir du lot du commun résidentiel. On me dit parfois que mes photographies montrent un Tokyo vide, car il y a la plupart du temps personne sur les photographies que je prends. En fait, mes promenades photographiques m’amènent très régulièrement dans les rues résidentielles qui sont vides. C’est d’ailleurs assez étrange et ce n’est pas spécialement dû à la chaleur. Ces rues sont la plupart du temps vide de population.

Pour accompagner mon parcours, j’écoute Rashomon de Suiyōbi no Campanella 水曜日のカンパネラ. Ce n’est pas un album récent (2013), j’écoute petit à petit la discographie complète de ce groupe japonais mélangeant pop électronique et paroles à l’originalité débordante et d’un décalage certain. On trouve ce mélange sur tous les albums que je connais du groupe. Même si le chant de KOM I est parfois à la limite de la justesse, il y une alchimie qui fonctionne bien. La fantaisie dans l’enchainement des mots me fait revenir sans cesse vers cette musique unique. J’écoute ensuite AMOK de Atoms for Peace, sorti également en 2013. J’étais passé à côté de ce disque à l’époque de sa sortie, à part peut être un ou deux morceaux. Après avoir écouté le OKNOTOK de Radiohead, j’ai ressenti le besoin d’écouter des musiques similaires, d’où l’idée de se tourner vers ce projet de Thom Yorke. La musique y est assez sombre, et pas fondamentalement différente de ce que pourrait créer Radiohead à mon humble avis. Je trouve cet album d’une grande qualité bien que Pitchfork avait à l’époque un avis plus mitigé.

Alors que 7h approche bientôt, je gagne le café près de la gare en longeant la rivière Meguro. Le quartier change petit à petit et des boutiques ou autres salons de coiffure font leur apparition, remplaçant les vieux hangars. Les deux photographies ci-dessus montrent ces deux aspects du quartier: un vieil hangar qui résiste et la nouvelle librairie Tsutaya coincée sous la voie de chemin de fer.