ヤエス出口から御徒町

La première photographie montrant le côté Yaesu (八重洲) de la grande gare de Tokyo a été prise depuis la tour récente Tokyo Mid-Town Yaesu que Mari et moi avons visité sommairement il y a quelques semaines, histoire de voir s’il y avait des choses intéressantes. Un des étages comprend un vaste espace ouvert semblable à un food court qui est plutôt agréable. Juste à côté de Yaesu Mid-Town, le Yanmar Tokyo Building conçu par Nikken Sekkei est particulièrement intéressant pour son alignement de tubes rouges recouvrant une partie du rez-de-chaussée donnant accès à l’entrée du building. Ça m’a donné l’image d’un découpage au sabre d’une partie du béton et du verre du rez-de-chaussée pour donner accès à l’entrée. Ceci étant dit, je doute quand même que ce rouge vif représente les entrailles du building, et j’imagine qu’il s’agit plutôt d’une correspondance à la forme et à la couleur du logo de la marque d’équipements agricoles (entre autres) Yanmar, qui donne son nom à ce building. La tour se compose principalement de bureaux avec quelques restaurants. Je ne l’ai malheureusement pas remarqué moi-même, mais certains étages laissent apparemment la végétation dépasser sur la façade.

Quelques semaines plus tard, j’étais assis avec mahl de l’autre côté de la grande station de Tokyo, côté Marunouchi, sur la terrasse d’étage du building KITTE. On regardait ces buildings tout un buvant un café et en discutant de diverses choses. C’était la première fois qu’on se rencontrait et c’est toujours étonnant de se voir finalement après de nombreuses années à avoir échangé par écrits interposés sur nos blogs. Nous parlons de musique japonaise bien sûr, du fait d’écrire sur un blog et de beaucoup d’autres choses. Il passait en coup de vent à Tokyo pour la journée pour repartir ensuite à Nagoya, et la rencontre pour le déjeuner a été bien rapide. Au plaisir d’une prochaine rencontre.

Les autres photographies du billet ont été prises depuis la gare d’Okachimachi (御徒町駅), juste avant Ueno. Elles datent de Septembre alors que je partais à la découverte du building Monospinal par l’architecte Makoto Yamaguchi, au pied de la station Asakusabashi (浅草橋駅). Devant la station d’Okachimachi, des idoles en devenir chantaient devant un public parsemé. Je ne sais pas exactement quel était l’occasion de ce rassemblement, mais l’estrade sur laquelle elles dansaient et chantaient ressemblait fortement à un ring de boxe ou de catch. Ce n’est pas la première fois que je vois ce genre de spectacle de rue sur la place devant la station d’Okachimachi.

C’était par contre la première fois que je visitais la petite galerie Mizuma Art située à Ichigaya Tamachi (市谷田町). J’apprécie beaucoup d’artistes présentant leurs œuvres dans cette galerie mais je n’avais jusqu’à maintenant jamais trouvé une occasion d’y aller. On y présente en ce moment, jusqu’au 11 Novembre, quelques œuvres de Yoshitaka Amano (天野喜孝展) dans une série bleue intitulée Blue Sky (青天). Comme beaucoup je pense, je connais et apprécie Yoshitaka Amano depuis la découverte de ses illustrations pour la série de jeux vidéos Final Fantasy. Cette exposition à la galerie Mizuma ne montre que quelques unes de ses œuvres sélectionnées pour l’utilisation de la couleur bleue. Elles sont très belles bien sûr mais on a vite fait le tour de la galerie. J’espère pouvoir apprécier un jour une grande rétrospective de son œuvre dans une galerie où un musée de plus grande taille. Je feuillette en attendant les deux livres, recueils de ses œuvres, placés sur le comptoir près de l’entrée de la galerie. Une photo dans un des livres montre son studio créatif qui se trouve dans un petit building dont je reconnais le design car je l’ai déjà pris en photo et montré sur ce blog. Je ne me souviens pas exactement dans quel quartier de Minato ou Shibuya il se trouve, et je ne pense pas être en mesure de retrouver cette photo parmi les 2320 billets qui composent Made in Tokyo. Je le retrouverais certainement par hasard aux détours d’une rue. La galerie Mizuma Art présentera à la fin du mois de Novembre un autre artiste que j’aime beaucoup, Tomiyuki Kaneko (金子富之). Ce sera à ne pas manquer.

Musicalement parlant, je continue à écouter l’album DEBUT de Kyrie (aka AiNA The End) et Takeshi Kobayashi accompagnant le film Kyrie no Uta (キリエのうた). J’y découvre au fur et à mesure quelques morceaux sublimes comme Niji Iro Kujira (虹色クジラ) et Zuruiyona (するいよな). Je trouve l’album inégal dans son ensemble mais il y a de nombreux morceaux particulièrement beaux et inspirés, comme ces deux là et ceux que je mentionnais dans mon précédent billet évoquant le film. J’ai l’impression que je n’avais pas écouté la musique de Vaundy depuis un petit moment mais je me rattrape avec son dernier single Todome no Ichigeki (トドメの一撃) accompagné par le guitariste Cory Wong. Je suis tout de suite happé par la dynamique pop qui se dégage du morceau. C’est le type de morceau que j’adore écouter en roulant en voiture, car il a un parfum de week-end et une énergie très communicative. La vidéo sur un bateau de croisière avec l’actrice Masami Nagasawa en rôle principal ajoute certainement à l’ambiance générale du morceau. Il est utilisé comme thème final de la saison 2 de Spy x Family, ce qui me rappelle que je n’ai pas encore terminé la première saison sur Netflix. Je m’y remets donc doucement avec beaucoup de plaisir. J’avais d’abord un avis assez mitigé sur le nouveau single SpecialZ de King Gnu, mais la vidéo réalisée par OSRIN de Perimetron (le collectif artistique de Daiki Tsuneta) est artistiquement assez exceptionnelle et m’a remis rapidement sur les rails. L’aspect chaotique de la vidéo accompagne et explique même d’une certaine manière la désorientation qu’on peut avoir à la première écoute du morceau. Cette image chaotique est très présente dans l’oeuvre musicale et visuelle de Daiki Tsuneta. Il s’agit également du thème principal du premier album de son autre groupe Millenium Parade. SpecialZ est le thème d’ouverture de l’anime Jujutsu Kaisen Shibuya Jihen (呪術廻戦 渋谷事変), tandis que le thème de fin est le dernier single de Hitsuji Bungaku (羊文学), More Than Words. King Gnu, tout comme Vaundy d’ailleurs, sortira bientôt un nouvel album qu’il faudra suivre avec attention. J’écoute aussi beaucoup quelques morceaux de Fujii Kaze (藤井風), en particulier Hana (花) et Workin’ Hard. Fujii Kaze m’a toujours un peu agacé, mais il faut quand même reconnaître qu’il y a beaucoup de talent. Il y a toujours une sorte d’évidence dans ses morceaux, comme si ça lui venait tout seul, sans efforts. C’est très certainement loin de la vérité mais cette impression reste pour moi très marquée. J’aime beaucoup le dernier single Hana, mais je ne peux m’empêcher de penser qu’il manque un instrument en fond, un piano aux notes claires et flottantes comme des lumières de neons (bon, j’ai peut-être trop écouté Kirinji). Cette série musicale est, une fois n’est pas coutume, très « mainstream » mais je vais bientôt repartir vers des profondeurs plus sombres. Je reprends en quelque sorte ma respiration avant de plonger.

AAAsakusaMainlYYY

Le rouge domine dans les rues d’Asakusa (浅草) que je n’ai pas visité depuis longtemps. Les touristes dans la petite rue piétonne commerçante Nakamise (仲見世通り) ne sont pas aussi nombreux qu’avant la crise sanitaire. Lorsque je sors mon appareil photo et prends des photos à Asakusa aux abords de la grande lampe de la porte Kaminarimon (雷門) ou du temple Sensōji (浅草寺), je me demande toujours si on me prend pour un touriste fraîchement débarqué à Tokyo et faisant la découverte des merveilles de cette ville. Et que doit faire un touriste en visite pour la première fois à Asakusa ? Prendre en photo les temples aux couleurs vives et les jeunes filles en yukata. Je suis en ce sens un éternel touriste dans cette ville. Mes pas m’amènent ensuite péniblement (en raison de la chaleur) jusqu’à la station d’Okachimachi (御徒町) en passant par le sanctuaire Shitaya que je ne connaissais pas. Une porte rouge démesurée par rapport à la taille du sanctuaire y est plantée au niveau de la rue. Sa taille est optimisée pour utiliser tout l’espace disponible en ne laissant que quelques petits centimètres de distance avec les deux immeubles autour. Ou ce sont peut-être les immeubles qui ont été construits après la grande porte rouge. J’apprendrais plus tard que ce sanctuaire a été initialement fondé en l’an 730 à l’intérieur de l’actuel parc d’Ueno, mais il a été ensuite déplacé à cet endroit en 1703. Les bâtiments actuels sont plus récents et datent de 1934, ils avaient été détruits par le grand tremblement de terre de Tokyo. Je voulais ensuite passer un peu de temps à parcourir les rues d’Okachimachi mais la chaleur m’a poussé vers la fraîcheur des trains me ramenant à la maison.

Depuis que j’ai lu le billet de mahl sur son blog qui évoquait AAAMYYY, j’ėcoute également beaucoup cette compositrice et interprète originaire de Nagano. En plus de sa carrière solo, elle est connue pour être membre du groupe à tendance rock psychédélique appelé Temparay que je ne connais pas beaucoup. Le vrai nom d’AAAMYYY est Honami Furuhara, mais elle se fait appeler Amy, peut-être est-ce suite à sa vie au Canada pendant quelques années lorsqu’elle avait 20 ans et était à l’Université. Je me suis d’abord mis à écouter son dernier EP sorti le 8 Juillet 2022 intitulé Echo Chamber. J’ai tout de suite aimé sa manière souvent non-conventionnelle de composer et de chanter, et sa voix un peu voilée. J’ai eu très vite envie de découvrir son album sorti en 2021, Annihilation, tellement j’avais aimé le EP. Je suis ensuite passé sur son album précédent Body sorti en 2019 et écouté quelques morceaux sélectionnés des EPs Maborosi Weekend et Etcetra sortis tous les deux en 2018. Je concours tout à fait avec les commentaires que mahl faisait sur son billet au sujet de la musique de AAAMYYY, et sur les commentaires que l’on fait tous les deux sur ce précédent billet 祭りがない間に. Je me trouve maintenant à écouter tous ses albums et EPs à la suite ou dans le désordre, et la musique d’AAAMYYY occupe une grande partie de mon temps disponible d’écoute musicale en ce moment. Ce qui est assez intéressant, c’est que je ne lasse pas vraiment donc je continue l’écoute. On sent l’évolution entre les premiers EPs et son dernier, car les compositions électroniques se font de plus en plus évoluées et prennent plus d’ampleur musicalement et vocalement. Mais AAAMYYY est capable de créer un morceau tout à fait prenant avec une composition plutôt minimaliste. On revient toujours pour sa voix et sa manière de chanter, ainsi que pour ce sens certain à créer des accords légèrement non conventionnels qui nous accrochent et pourraient même devenir légèrement obsédant.

Je suis rentré dans son univers musical par le morceau Ano Emi (あの笑み), ou Your Smile, qu’elle interprète avec l’ex-idole et également compositrice et interprète Ano (あの). Un point amusant est que le titre devait initialement être Ano AAAMYYY pour reprendre les noms des deux artistes, mais une erreur plutôt bienvenue a transformé ce titre de morceau en celui qu’on connaît actuellement. Depuis que j’écoute ce morceau, je me demande quelles peuvent être les liens entre ces deux artistes car leurs univers sont très différents. J’ai déjà parlé plusieurs fois de la musique aux accents rock parfois agressifs d’Ano qui contraste avec son apparente manière d’être. Elle a une voix très particulière et une personnalité également très particulière. On la voit très régulièrement à la télévision et ses réactions sont la plupart du temps déconcertantes. C’est pour sûr un personnage à part mais qui a une certaine aura, qu’il serait un peu difficile à expliquer. Il s’avère qu’Ano attire les autres musiciens. Je me souviens avoir commencé à écouter la musique de Towa Tei avec son morceau REM en collaboration avec Ano sur son album EMO sorti en 2017. On voyait aussi Ano en photo avec Mukai Shutoku lors d’un festival. Les rumeurs qui sont très certainement fondées prêtent (ou prêtaient) une relation entre Ano et Satoru Iguchi du groupe King Gnu. Ça m’avait d’abord paru plutôt improbable voyant la personnalité atypique d’Ano, mais il s’avère que Satoru Iguchi a une personnalité toute aussi particulière (le groupe n’imaginerait par exemple pas le laisser conduire). Je n’ai pas d’intérêt particulier sur ce genre de rumeurs mais quand elles permettent de comprendre des liens possibles entre des artistes, ça m’intéresse forcément un peu plus. Je crois entrevoir quelques liens entre Daiki Tsuneta du groupe King Gnu et AAAMYYY. Ils sont tous les deux originaires de la préfecture de Nagano et ont à peu près le même âge (31 ans pour AAAMYYY et 30 ans pour Daiki Tsuneta). AAAMYYY emploie Perimetron, le groupe de créatifs fondé par Daiki Tsuneta sur plusieurs de ses vidéos et a joué en concert au Ginza Sony Park au moment où King Gnu et Millenium Parade (l’autre collectif musical de Daiki Tsuneta) investissait les lieux. Il y a forcément des liens entre les deux, du moins leurs univers créatifs s’entrecroisent. Comme AAAMYYY mentionne dans une interview pour Ginza Mag qu’elle a rencontré Ano pour la première fois dans un izakaya avec un groupe d’amis, je parierais que cette première rencontre s’est faite grâce à ses liens avec les groupes tournant autour de Daiki Tsuneta (dont son compère Satoru Iguchi). Enfin, tout ceci n’est que pure supposition de ma part et je me trompe régulièrement, mais je ressens le besoin de noter tout cela ici. Dans cette interview jointe d’AAAMYYY et d’Ano pour Ginza Mag, AAAMYYY précise d’ailleurs qu’elle est fan depuis plusieurs années, de l’époque où Ano était idole dans le groupe ゆるめるモ! (You’ll melt more!). Le morceau Ano Emi (あの笑み) est très différent des autres morceaux que l’on connaît d’AAAMYYY et on ressent bien le fait qu’elle ait voulu correspondre à l’univers plus rock d’Ano. Petit détail amusant de l’interview, AAAMYYY propose à Ano de regarder la saison 4 de Strangers Things ensemble. AAAMYYY semble être amatrice de films de science-fiction, citant dans ses préférés: Interstellar, 2001 Space Odyssey et le film de Luc Besson Le Cinquième Élément. J’avais adoré ce film à sa sortie, d’autant plus que j’étais à cette époque dans une phase musicale trip-hop à beaucoup écouter Tricky qui jouait un petit rôle dans ce film, mais je trouve qu’il a bien mal vieilli. Autre détail amusant, Aya Gloomy (dont je parle régulièrement ici) mentionnait également Le Cinquième Élément comme un de ses films préférés dans une interview récente. Je ne nie pas par contre la force d’évocation du personnage aux cheveux oranges interprété par Milla Jovovich dans le film.

Mais je m’éloigne de mon sujet qui est la discographie d’AAAMYYY. J’aime la totalité des morceaux que j’ai pu écouter jusqu’à maintenant, mais certains sont tout simplement sublimes comme Fiction, Takes Time et After Life de l’album Annihilation, Over My Dead Body (屍を越えてゆけ) sur Body, Maborosi sur Maborosi Weekend, Hail (雨) feat. (sic)boy sur Echo Chamber. Ça peut parfois tenir à des détails comme le rythme électronique apparemment bancal au début du morceau Maborosi ou la manière avec laquelle elle ne prononce pas Maboroshi mais Maborosi (sans le h). La vidéo de Over My Dead Body (屍を越えてゆけ) a été, je pense, tournée à Nagano car je crois reconnaître la grande allée naturelle du sanctuaire Togakuchi que nous n’avions pas pu voir lors de notre passage en Mars. On y retournera très certainement un de ces jours. La vidéo de Hail (雨) a par contre été tournée dans les forêts d’Hinode, à l’Ouest de Tokyo. Sur ce morceau comme sur de nombreux autres, AAAMYYY fait souvent intervenir des invités venant la plupart du temps du monde du hip-hop japonais. A vrai dire, je ne connais pas beaucoup tous ces invités, à part Ryohu sur le morceau Bluev. J’aime beaucoup sa manière exagérément marquée de rapper, qui s’accorde bien avec l’approche beaucoup plus mélodique de chanter d’AAAMYYY. Un morceau comme All by Myself sur l’album Body s’est vraiment développé pour moi après plusieurs écoutes, notamment pour l’intervention vocale très douce à mi-morceau de JIL. Le morceau est particulièrement beau quand leurs voix s’additionnent puis se dépareillent vers la fin. Il y a ces petits quelques choses très subtils dans la musique d’AAAMYYY et elle est pour sûr une artiste à suivre de près.