courir et sauter de la mer jusqu’aux montagnes

Depuis les hauteurs de Shichirigahama 七里ヶ浜, on peut voir l’océan. Une route en pente nous y amène tout droit et semble même y plonger. Si on prend assez d’élan, on peut courir jusqu’au bout de la route et sauter jusqu’à la mer. Et si on y met un peu plus d’effort, on peut atteindre l’île de Enoshima. En temps normal, on empruntera plutôt le pont routier et piéton, mais il est très souvent encombré.

En France, outre un numéro des Inrockuptibles, je jette toujours un oeil sur le magazine Première. Ce numéro d’été a tout de suite attiré l’oeil car on y parle du Blade Runner 2049 qui sortira en octobre cette année en France. Pour le Japon, je ne sais pas exactement. C’est pour sûr un film que je courais voir en salle à sa sortie, notamment parce que ce nouveau Blade Runner est dirigé par le réalisateur canadien Denis Villeneuve. J’ai énormément apprécié les quelques films que j’ai pu voir de ce réalisateur, comme le film de science fiction Premier Contact (Arrival) et le thriller psychologique Enemy, des films très différents mais tous les deux « habités ». On peut anticiper une adaptation très personnelle de l’univers de Blade Runner. Du coup, ça me donne envie de revoir l’original de Ridley Scott et ces images dans les airs d’une ville sombre et verticale. Je ne me souvenais plus qu’il y avait autant d’inscriptions en japonais sur les panneaux électriques lumineux de la ville basse. Par contre, je me souvenais très bien de ces grands panneaux télévisés japonisants, qui sont une marque de fabrique d’un Los Angeles en 2019 sous influence tokyoïte. Rappelons que Blade Runner est sorti en 1982, il y a 35 ans. En 35 ans, le monde n’a pas évolué aussi vite que le prévoyait Ridley Scott, et c’est tant mieux, mais les dangers de l’intelligence artificielle semblent de plus en plus envisageables.

Sautons de la mer vers la montagne. Un saut de puce, car la montagne de Kamakurayama 鎌倉山 est proche du bord de mer de Shichirigahama. Nous passerons le reste de cette après-midi de dimanche à Kamakurayama. Il faut s’y déplacer en voiture et j’aime beaucoup cette route sinueuse entourée d’arbres et de résidences qui nous fait traverser les montagnes de Kamakura. On s’arrête dans un café appelé « Le Milieu », à peu près à mi-chemin des cette route. Depuis le café, on a une vue superbe sur les collines boisées de Kamakurayama et au fond, on peu distinguer l’océan de la baie de Sagami, se mélangeant avec le ciel. Pas très loin du café, sur cette même route sinueuse, je ne résiste pas à l’envie d’aller prendre en photo deux maisons individuelles remarquables, prises en photo auparavant: Wood Deck House par Tezuka Architects, et la maison en blocs qui semble en équilibre sur un flanc de montagne, Kamakurayama no ie, par Kimitsugu Sugihara. Depuis la terrasse du café, on se trouve véritablement devant des vagues de verdure. Une maison semble flotter sur les vagues vertes d’une mer déchainée.

結び

Je fais un tour rapide des photographies de l’année dernière que je n’ai pas encore publié sur ce blog et j’en trouve quelques unes prises un soir d’octobre dans le quartier des livres de Jimbocho. Je connais assez peu ce quartier et je n’avais ce jour là qu’une petite heure devant moi pour faire un tour. Ce soir là, il y avait un marché aux livres dans une des rues mais je regarde plutôt les librairies pour en trouver une qui attirerait mon regard. Je décide d’explorer Komiyama Shoten 小宮山書店, attiré par les grandes affiches de photographes japonais sur les murs. Il y a beaucoup de livres photographiques et une galerie à un des étages. Il y a peine assez de place dans les étages étroits pour y entasser tous les livres offerts à la vente. Cette librairie établie en 1939 a beaucoup de charme, j’y reviendrais certainement, pour explorer d’autres lieux également, quand j’aurais un peu plus de temps devant moi.

A la fin du mois de décembre, nous sommes allés au Tokyo Metropolitan Teien Art Museum, près de Shirogane. Nous accompagnons l’amie de Mari, Yo et sa fille, pour aller voir l’exposition de Christian Boltanski intitulée « Animitas – Les âmes qui murmurent« , composée de 3 ou 4 grandes installations (vidéos, sonores ou autres). J’étais en fait plus intéressé par la visite du musée lui-même, dont de nombreuses pièces sont du style Art Deco, par le designer français Henri Rapin. On peut visiter de nombreuses pièces de ce qui était l’ancienne demeure du Prince Asaka. On est impressionné par la richesse du design et la beauté des matériaux. Nous avions déjà visité ce musée il y a une dizaine d’années, mais il avait fermé pour rénovation dernièrement. Une annexe moderne a été construite à l’arrière de la demeure et les deux bâtiments sont reliés par un couloir avec une paroi de verre. Comme on peut le voir sur la photographie ci-dessus, la lumière traversant la paroi de verre et se reflétant sur le mur donne une texture intéressante, comme des coussins d’un sofa, qui intrigue beaucoup les passants.

君の名は。(Kimi no na ha – Your Name), on parle beaucoup de ce film d’animation de Makoto Shinkai depuis plusieurs mois et le succès ne semble pas s’estomper. En profitant d’un peu de temps libre en ce long week end, je me décide à aller voir ce film dont on parle tant, en ne savant pas trop à quoi m’attendre. Je n’ai absolument rien lu en avance sur le sujet de ce film d’animation et j’en sais peu de choses à part à travers les images superbes et réalistes que j’ai pu voir dans les bandes annonces. On n’est en effet pas déçu par la beauté du dessin et du rendu des décors, que ce soit le réalisme très poussé des paysages urbains de Tokyo ou ceux des montagnes de Takayama avec sanctuaire perché autour d’un lac circulaire. L’histoire, elle, va au delà du réel et mélange rêves et sensations extra-humaines. Je me garderais d’expliquer l’histoire ici, mais ça serait de toute façon assez compliqué. En fond, le film parle de liens entre les êtres, du lien invisible entre un lycéen Taki et une lycéenne Mitsuha habitant dans des lieux très éloignés mais qui sont destinés à se sauver l’un l’autre. A tout moment, on oscille entre rêve et réalité. Les deux personnages principaux s’échangent leur vies par un grand mystère, mais qui révèlent des destins liés. Cette relation me rappelle un peu les liens entre les personnages de 1Q84 de Haruki Murakami, Aomame et Tengo. Bien que l’histoire soit complètement différente, on y retrouve des atmosphères irréels et cette forme de lien qu’on l’appelle musubi (結び). J’ai beaucoup aimé ce film et je suis assez satisfait de constater que le public nombreux et que la critique excellente ne s’y trompent pas. On parle de Makoto Shinkai comme du nouveau Hayao Miyazaki.

nouveau moment

Une nouvelle année s’ouvre derrière les rideaux des temples et sanctuaires. Comme tous les ans, nous avons passé les premiers jours de la nouvelle année à Ofuna, près de Kamakura, d’une manière assez classique en regardant d’abord l’émission musicale « Kōhaku Uta Gassen NHK紅白歌合戦 » sur NHK le soir du réveillon jusqu’à un peu avant minuit. Regarder Kōhaku, c’est une tradition à laquelle on n’échappe pas. J’aime de toute façon regarder cette émission, car elle donne une bonne rétrospective de ce qui s’est passé musicalement au Japon pendant l’année écoulée. Il y a évidemment beaucoup et principalement de la musique populaire et commerciale mélangée avec des chansons plus anciennes dans le style Enka, pour plaire à tous les publics. Cela reste une chaîne publique, les écarts sont rarement permis, mais on peut y voir et étendre des choses intéressantes.

Je suis toujours avec une certaine attention le parcours de Sheena Ringo 椎名林檎 au cas elle sortirait des morceaux comme A Life Supreme 至上の人生, qui était vraiment excellent, ou dans le style rock des premiers albums. Elle chante maintenant régulièrement dans cette émission de la NHK depuis quelques années. Cette fois-ci, elle ne chantait pas dans les studios de la NHK, mais à l’extérieur dans le froid devant la mairie de Tokyo à Nishi Shinjuku, un morceau intitulé « Seishun no Mabataki 青春の瞬き » avec comme sous-titre « FROM NEO TOKYO 2016 ». Je suis assez intrigué par ce sous-titre qui me ferait plutôt penser au Neo-Tokyo de 2020 dans Akira. Dans Akira, 2020 était l’année prévue pour les Jeux Olympiques de Tokyo et Sheena Ringo a déjà composé dans le passé un morceau pour un événement sportif intitulé NIPPON et elle a participé aux musiques du passage de baton entre Rio et Tokyo à la cérémonie de cloture des Jeux de 2016. Cette association d’idées nous indique peut être qu’elle écrira ou interprétera le thème des futurs jeux de Tokyo. A suivre. Cette chanson interprétée à Kōhaku s’appelle également avec un nom en français (allez savoir pourquoi): Le Moment, sorti en 2014 sur l’album Reimport: Ports and Harbours Bureau 逆輸入 ~港湾局~. Ce morceau fut initialement écrit par Sheena Ringo pour Chiaki Kuriyama (également actrice, elle était Takako Chigusa dans Battle Royale et Gogo Yubari dans Kill Bill vol.1). A la fin de l’émission, Utada Hikaru chantait également pour la première fois dans cette émission. J’espérais qu’elle interpréterait avec Sheena Ringo le morceau 二時間だけのバカンス (des vacances de deux heures seulement), mais ce n’était pas le cas malheureusement. Cela aurait été assez compliqué à organiser de toute façon vu que Utada Hikaru habite à Londres depuis des années et qu’elle interprétait en duplex. Il s’agissait d’un autre morceau, moins intéressant que les autres morceaux de son dernier album Fantôme (un titre en français, encore une fois), que l’on écoute beaucoup à la maison (ou dans la voiture plutôt).

Il y avait une curiosité quand même dans cette 67ème édition de Kōhaku, c’était le duo entre la star pop Seiko Matsuda (54 ans mais qui étonnamment ne vieillit plus depuis plusieurs années) et Yoshiki, le leader de X Japan, également batteur et pianiste du groupe de rock mythique japonais. Après ce morceau au piano que l’on oubliera vite, le groupe X Japan au complet jouera un ancien single intitulé « Kurenai » de l’album « Blue Blood » sorti en 1989. A vrai dire, je ne trouvais pas d’intérêt particulier pour X Japan, sachant qu’il s’agit de rock plutôt old school oscillant entre le speed métal et le rock progressif. C’est par contre un groupe culte au Japon et les fans sont nombreux. On dit qu’il y a un avant et après X Japan dans l’histoire du rock japonais et qu’ils ont lancé le style Visual Kei (mélange de glam gothique post-punk alternatif), qui sera ensuite repris par beaucoup d’autres groupes à cette époque des années 90. Dans ce style de rock, je m’étais plus attaché à Luna Sea, groupe rock mené par Ryuchi Kawamura, se rapprochant du Visual Kei, mais avec un rock plus alternatif et « contemporain » que X Japan. J’ai toujours questionné la part d’authenticité de la démarche Visual Kei, notamment les contraintes commerciales qui gangrènent la créativité rock alternative au Japon me semble t’il. Un article sorti récemment sur Pitchfork viendra bousculer mes à priori sur X Japan et attisé mon intérêt. On peut tout d’abord se demander pourquoi on parle d’un groupe de rock japonais sur un site comme Pitchfork et j’en étais agréablement surpris. La raison est qu’un documentaire américain intitulé « We Are X » par Stephen Kijak est sorti en 2016 et présenté au festival du film de Sundance. Je n’ai pas vu le documentaire mais les explications sur la page Pitchfork et ce que j’ai pu lire sur wikipedia nous parle d’un groupe au destin tragique (plusieurs morts chez les membres dont Hide, toujours membre à titre posthume, lavage de cerveau du chanteur par une secte conduisant le groupe à faire une longue trêve depuis 1997) et d’un leader fascinant, tête pensante du groupe, maîtrisant aussi bien la batterie que le piano, et acharné jusqu’à en perdre contrôle. Bref, rien à voir avec les groupes fabriqués de toutes pièces par les studios de production.

Ma curiosité m’amène donc vers un album du groupe, le 4ème intitulé « Art of Life ». La particularité de cet album est qu’il n’est composé que d’un seul morceau long de 29 minutes, mélangeant guitares rapides, orchestrations et passage au piano, avec une mélodie chantée qui revient comme un refrain sous plusieurs formes. Il faut passé le cap de la voix de Toshi et je suis assez peu habitué à ce style de rock progressif. Mais le morceau fascine et s’enchaine avec beaucoup de maîtrise. Je me surprends à vouloir écouter encore et encore ce long morceau, sans que le temps paraisse long tant il se renouvelle sans cesse. Je vous invite à en lire plus sur un article revue du morceau de sputnik music. Je continue maintenant à défricher un peu plus les albums du groupe avec d’abord « Jealousy » et « Blue Blood ».

Mon premier point d’attache avec la musique rock japonaise était Luna Sea, que je découvrais alors que j’étais encore en France à la fin des années 1990 (peu être grâce au feu magazine-fanzine Tsunami). Alors que l’on parle de Visual Kei et de rock lourd en guitares, me reviennent en tête des morceaux de Luna Sea, notamment sur leur meilleur album « Mother », sorti en 1994. Je me remets à écouter leur discographie complète, enfin plutôt les premiers albums. Là encore, il faut une certaine période d’adaptation au style de chant emprunt de romantisme, mais les qualités de la voix du chanteur, la technique et l’inventivité musicale, ainsi que la personnalité singulière des morceaux sont accrocheurs.

Mais revenons à cette soirée de la nouvelle année. Quelques dizaines de minutes avant le passage au nouvel an, NHK nous montre en direct en images le hatsumōde (初詣), la première visite au sanctuaire Shintō, dans un sanctuaire quelque part au Japon. J’aime quand ils choisissent un sanctuaire enneigé entouré de forêts ou de montagnes, mais ça ne sera pas le cas cette année. Un peu avant minuit, les foules se déplacent vers les sanctuaires et depuis quelques années, nous faisons de même au sanctuaire Aoki, dans un des quartiers de Ofuna. C’est un petit sanctuaire en haut d’une colline. Il faut monter un escalier étroit de 100 marches environ pour y accéder. Et il y a foule à minuit. On résiste au froid autour du feu devant le sanctuaire et avec un verre de amazake chaud à la mains. J’aime beaucoup cette boisson non-alcolisé (malgré ce que le nom pourrait laisser penser) qui réchauffe dans les allées froides des sanctuaires. En revenant à la maison et après le bain chaud, on se cache sous le futon jusqu’au petit matin. On n’aura pas le courage de se réveiller pour voir le premier levé de soleil (comme on l’avait fait à Atami, il y a quelques jours, j’y reviendrais). Le matin, je me réveille toujours avant tout le monde dans la maison. J’aime ce moment alors que tout le monde dort encore. Ce matin là, je reste un peu plus longtemps sous le futon pour écouter un peu de musique sur l’ipod, l’album « In colour » de Jamie xx, sorti en 2015. Je découvre cet album sur le tard alors que The xx, dont fait partie Jamie xx (on pouvait deviner), sort un nouveau morceau « On-hold » que j’écoute beaucoup en ce moment, et qui sera sur la track list de leur futur album « I see you ». Il y a d’ailleurs un long article sur Pitchfork. Après l’écoute de « In colour », je reconnais d’ailleurs une influence plus forte de Jamie xx sur le nouveau morceau de The xx, dans la composition, par rapport au style plus minimaliste de leur premier album (je ne connais pas le deuxième album de The xx). J’aime beaucoup « In colour » pour son inventivité et par le rythme des morceaux électroniques. C’est aussi assez intéressant de retrouver les voix de Romy et de Oliver Sim, les deux collègues de The xx, sur certains morceaux de « In colour ». L’album forme un ensemble continu qui se tient bien.

Toujours sous le futon et après avoir fini l’écoute de « In colour », personne n’est encore réveillé dans la maison. Je me mets dans l’idée de revoir l’épisode 4 de Star Wars, « A New Hope« , le premier épisode de la série de Georges Lucas. J’avais revu tous les épisodes l’année dernière après avoir vu l’épisode 7 « The Force Awakens » au cinéma. Je suis en fait aller voir Rogue One la dernière semaine de l’année 2016 au Toho de Roppongi Hills. Cet épisode indépendant de la trame Skywalker a reçu de bonnes critiques dans l’ensemble et je ne vais pas dépareiller. je me demande d’ailleurs si je ne préfère pas cet épisode à l’épisode 7, un peu trop teinté de nostalgie et d’analogie avec « A New Hope ». Certaines critiques nous disent que l’action et le rythme de Rogue One apporte un contraste trop fort avec l’épisode 4 qui le suit directement dans la chronologie Star Wars, mais on ne peut pas reprocher à ce nouvel épisode d’utiliser les techniques modernes de son temps. On apprécie en tout cas une histoire originale, même si on connaît le scénario depuis longtemps car annoncé dans le générique en défilement de l’épisode 4. L’environnement de cet épisode est très travaillé, notamment la ville forteresse de Jedha. On apprécie de se replonger dans cet univers extraordinaire et je ne résiste pas, comme pour « The Force Awakens » à me procurer le livre « The Art of Rogue One » qui nous montre les illustrations de préparation du film par l’équipe d’illustrateurs et designers de Lucasfilm, menés par les deux co-production designers Doug Chiang et Neil Lamont ainsi que par le réalisateur de cet épisode Gareth Edwards. On y découvre beaucoup de prototypes et de d’essais de personnages qui ne verront finalement pas le jour dans le film final. J’ai quand même très hâte de découvrir l’épisode 8 de la série à la fin de l’année (avec les dernières images posthumes de la princesse Princess Leia Organa / Carrie Fisher).

Alors que tout le monde se réveille enfin dans la maison, il est temps de commencer les Osechi avec un ou plusieurs verres de sake. Pour le nouvel an, nous avons pris l’habitude de commander du sake Kokuryu, provenant des montagnes de Fukui. La premier journée de l’année est en général très calme. Après un passage au sanctuaire Aoki juste à côté, nous décidons pour une fois d’aller rendre visite à la grande statue Kannon près de la station de Ofuna. La statue blanche est gigantesque et on ne peut pas la manquer. On trouve un temple bouddhiste au pied de la statue construite dans les années 1960. A l’intérieur, il y a un espace de prière où quatre moines commencent des chants. Je suis surpris par la puissance des voix des moines. On s’assoit quelques instants sur les bancs pour écouter. Dans une petite pièce à côté, des centaines de statues miniatures sont alignées. Elles sont certainement faites mains car elles sont toutes différentes.

Le 2 Janvier, nous allons comme tous les ans au sanctuaire de Enoshima. Nous le savions très bien mais il y a foule pour grimper jusqu’au sanctuaire par la rue étroite bordée d’échoppes. On avance doucement avec en point de mire la porte du sanctuaire, où il faut ensuite prendre son mal en patience dans les escaliers. En ce qui nous concerne, comme je suis dans mes années de yakudoshi, nous avons participé à la cérémonie de purification yakubarai, qui nous permet par la même occasion de passer par une file rapide. Après cette étape de rituel très commune au Japon, précisons-le, espérons que cette nouvelle année se présente sous de beaux jours.

Quand la nuit tombe sur Enoshima, à partir de 5h en hiver, les jardins s’illuminent. Les palmiers verts illuminés ont un petit air de Californie. Aux portes du sanctuaire, les lampes s’allument également et il est temps de rentrer, de reprendre le monorail suspendu qui nous ramènera vers Ofuna. Le soir, il faut terminer les Osechi qui restaient du 1er janvier.

Les 2 et 3 janvier, se déroule la course Hakone Ekiden entre Tokyo et Hakone. Nous la regardons avec beaucoup d’attention depuis 6 ans car l’école de Zoa, Aoyama Gakuin, y participe, du moins l’université de l’école. Aogaku a remporté la première place de cette course allé-retour deux fois de suite (en 2016 et 2015) et est en bonne place pour terminer premier cette année également. Comme tous les ans, nous nous postons aux bords de la route nationale 1 qui verra passer les coureurs, munis de petits drapeaux aux couleurs de l’école. Aogaku a dominé pratiquement toute la course et les coureurs défileront même dans Shibuya dans quelques jours pour fêter cette victoire ininterrompue. On aurait presque souhaité un peu plus de suspense, mais on ne va pas s’en plaindre.

Pour cette dernière journée des congés de nouvel an, nous reprenons la voiture pour la côte du Shonan. Nous apercevons Enoshima, toujours, au loin alors que l’on mange en terrasse sous le soleil hivernal. Il faisait étonnement doux pour ces premières journées de l’année. Nous terminerons nos visites de temples et sanctuaires par le temple Ryukoji à L’entrée de Enoshima, dans les terres. Le train Enoden, en photographie ci-dessus, passe aux portes du temple, mais nous ne l’emprunterons pas cette fois-ci.

Pour terminer ce long billet par une note sur le blog, contrairement à l’année dernière à la même époque, je ne ressens pas l’envie de faire une pause de blog. D’année en année, le nombre de billets publiés sur Made in Tokyo est en constante diminution (35 billets en 2016 contre 44 en 2015 et 55 en 2014), mais l’envie de continuer pour une quatorzième année est toujours présente. En souhaitant une bonne et heureuse année aux visiteurs de Made in Tokyo.

Formes futuristes organiques (troisième série) et autres univers irréels

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« Souvenons nous des étoiles lointaines, celles que l’on se persuadait de voir au plus profond de la nuit lorsque la Ville dort et que ses lumières s’épuisent. Elles clignotent d’usure et pendant un bref instant de noirceur idéale, elles nous laissent entrevoir toute l’éternité. Elles nous manquent ces étoiles à Tokyo. On ne s’en souvient que dans les livres. Cette éternité là nous échappe et la retrouver nous est nécessaire. En attendant, on se contente de la lumière de la Ville comme moindre consolation. »

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« Elle regarde depuis la porte vitrée de la petite chambre un point fixe dans la foule. Le mouvement incessant, les montées et descentes des escalators vers la station de métro ne perturbent pas ce regard fixe et concentré. Lorsqu’elle ferme enfin les yeux, le mouvement s’interrompt devant la gare jusqu’à ce que l’alarme du réveil vienne remettre tout ce monde en mouvement. »

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« Le taxi frôle le rouge du feu devant le koban du quartier voisin. Il maitrise parfaitement cet infime instant où la traversée est toujours possible, sans éveiller les réflexes du gardien du quartier, de toute façon plus occupé à aiguiller les impatients vers un lieu de rendez-vous introuvable. Il s’engouffre ensuite dans une rue étroite en pente et sens unique, chavire à droite puis fonce à gauche en évitant les poteaux électriques qui débordent volontairement sur la rue. Il navigue en rythme mais sans musique pour guider l’enchainement de ses mouvements. Quelle pourrait être l’influence de la musique stridente et expérimentale que j’écoute en ce moment sur le rythme de conduite de ce taxi? Une sortie de route garantie au premier virage, ou au contraire une dextérité décuplée qui viendrait nous faire tenter les virages à la corde, les freinages avant les lignes blanches juste après le « 止 », et un final de course comme une danse de tôle froissée. »

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Bien que je sois en pause de blog, je ne résiste pas à l’envie de montrer mes derniers dessins version A3 de formes futuristes et organiques. Sur le dernier dessin, en tête d’article, je m’essaie à représenter des formes « reconnaissables », comme ce dragon futuriste. Je pense continuer sur cette voie petit à petit. La série de dessins de ce billet est en fait la troisième série, suite à la deuxième sur format A3 Nobi (légèrement plus grand que le format A3, ce qui m’embête bien car je ne peux les scanner) et la première série en format A4. J’ai scanné cette troisième série chez Kinko’s, c’est donc d’une bonne qualité qui me permettra de les intégrer plus tard dans un futur photobook, mon 5ème photobook, celui-ci mélangera probablement dessins et compositions photographiques. C’est une idée que j’ai en tête depuis un petit moment, mais il me faut construire le contenu. Mes créations personnelles en ce moment se limitent au dessin, car je ne prends plus beaucoup de photographies de rues ou d’architecture en ce moment. Il faudrait que je prenne un peu de temps pour faire une promenade solitaire afin de refaire le plein de photographies. En fait, quand je regarde l’année précédente, les mois de froid de janvier et février ont été également assez peu productifs en photographies.

Quant au blog, je ne l’ai pas vraiment arrêté, je n’ai pas vraiment trouvé un nouveau concept non plus, mais j’ai envie de mélanger un peu plus ce que je crée (les dessins, les photographies, les compositions graphiques et musicales, …) avec ce que j’aime et m’intéresse (musiques électronique et alternative, films, expositions, livres, architecture, Tokyo …) à travers photos et textes, ou liens internet. En fait, dans le passé sur ce blog, j’aimais beaucoup écrire des longs billets qui mélangent beaucoup de choses, de sujets différents, comme un patchwork. J’ai toujours cette idée du blog comme un carnet de voyage, un moleskine sur lequel on vient coller les uns à côté des autres des petits textes griffonnés, des morceaux de photos usées, des billets de musées, un dessin ou un plan de lieu… J’essaie de faire un peu cela sur mon journal de bord écrit (que je ne partage pas sur internet cependant), sans le côté brouillon du carnet de voyage, car il y bien longtemps que je vis au Japon (en fait cela fait 17 ans depuis le 1er février) et que toute impression de voyage a longtemps disparu en moi quand il s’agit du Japon.

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Un soir à la sortie du bureau, pas trop tard, vers 8h quoi, je passe faire un tour au dernier étage du libraire Maruzen du Building Oazo à Marunouchi, juste en face de la gare de Tokyo. Au dernier étage, on peut trouver un nombre important de livres et de magazines étrangers, un peu comme au Kinokuniya de Shinjuku (à coté du Takashimaya). On paie le prix fort par contre, par rapport au prix Amazon.com, mais c’est agréable de se promener dans les rayons pour y découvrir par hasard des choses intéressantes. C’était le cas de ce livre bilingue, japano-anglais, de Nobuhisa KANEKO intitulé « Surprise! » ou « おどろかす » qui nous montre un grand nombre de Ukiyo-e de Utagawa Kuniyoshi (1797-1861). J’apprécie en général les estampes Ukiyo-e mais je les regarde avec un regard distrait. J’ai par contre été vraiment happé par l’oeuvre de Kuniyoshi, par ses représentations de monstres à la fois humoristiques et inquiétants. On y voit des squelettes géants, comme la sublime image ci-dessus du « vieux palace hanté de Souma », des poissons à têtes humaines ou des représentations d’acteurs de l’époque à têtes d’animaux. Cette représentation, ci-dessus, de monstres appréciant tranquillement la fraicheur d’une soirée d’été (道外化もの夕涼) est pleine d’humour et même les animaux de compagnie sont des petits monstres. Chacune des 42 ukiyo-e présentées est accompagnée d’un court texte explicatif qui vient nous expliquer le contexte de chaque oeuvre. A la maison, Zoa n’arrête pas de me parler de yōkai (créatures fantastiques) avec son jeu vidéo 3DS yōkai-watch, extrêmement populaire chez les petits garçons de son âge. A ma manière, j’avais ce désir inconscient de découvrir cette culture du monstre à la japonaise, que ce livre permet d’aborder avec beaucoup d’élégance.

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Des monstres, on en voit aussi en musique, sur les pochettes des albums de Grimes, très inspirées par le manga fantastique. Grimes est le nom de scène de la jeune artiste canadienne Claire Boucher. Elle dessine les pochettes, mais surtout compose et interprète la musique électronique pop expérimentale de Grimes. Chacun des 14 morceaux de son nouvel album « Art Angels » possède son dessin correspondant, et j’aime cette correspondance entre art et musique, qui contribue notamment à mon désir d’écoute. J’ai découvert Grimes en 2012 avec quelques morceaux de son album « Visions », notamment les morceaux Genesis et Oblivion, et j’avais également tenté quelques morceaux sur son précédent « Halfaxa ». Avec « Art Angels », on ressent une évolution certaine dans la qualité de la production, la profondeur des sons et la mue de la voix frêle de Claire Boucher vers une voix plus affirmée et plus claire (justement). En fait, ce que j’aime surtout, c’est son approche « artistique » qui conçoit un tout entre musique et visuel (art et vidéo), sans donner l’impression de subir une influence extérieure. Les morceaux de « Art Angels » sont parfois inégaux, mais il y a un grand nombre de morceaux clés comme Flesh without Blood, Kill V Maim, Pin, Realiti ou Butterly, comme mélange toujours pop alternative et expérimentation.

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Je mets toujours un peu de temps avant d’acheter des morceaux de musique sur iTunes, et je prends encore plus de temps à me décider d’acheter un album entier. J’écoute en général des morceaux petit à petit. J’ai acheté assez peu d’albums en entier ces dernières années: celui de Grimes « Art Angels » ci-dessus, l’album de Oneohtrix Point Never « Garden of Delete » dont je parlais il y a quelque temps dans un billet, le EP de Kelela « Hallucinogen », des albums de Sonic Youth, de Autechre, de Boards of Canada, celui de Clark du même nom, de SBTRK intitulé « Wonder where we land » ou encore Flying Lotus avec l’extrêmement brillant « You’re Dead ». Bref, assez peu d’albums d’une manière générale, car je préfère picorer par ci par là, sauf quand un album s’avère excellent de morceau en morceau ou lorsqu’il forme un tout.

Pour Arca typiquement, j’hésite encore à me procurer l’album « Mutant » en entier. J’écoute trois morceaux de cet album en ce moment: « alive », « Vanity », qui est certainement le morceau phare de l’album, et « Soichiro ». Il s’agit d’électronique expérimentale. Comme pour « Garden of Delete » de Oneohtrix Point Never, ce n’est pas forcément à mettre entre toutes oreilles. C’est une musique puissante et organique, qui semble se modifier à son propre gré. Sur « Vanity », le son électronique est très beau, tout en hésitation, il progresse doucement et s’affirme avec plus de force par moment dans un flot de notes qui s’entrechoquent.

Je reviens très régulièrement sur le morceau « Dead Format » de Blanck Mass. Parfois, ce type de morceaux sans concession, qui trace sa route sans détour, fait beaucoup de bien. Par exemple, après une journée difficile, ce morceau remet sur les rails. Il n’est pas à écouter en boucle sous peine de perdre la tête, mais une fois de temps en temps, comme une piqure de rappel. Je n’avais pas vraiment exploré d’autres morceaux de cet album, à part « Cruel Sport » que je découvre plus en avant. Bien que n’étant pas aussi prenant que « Dead Format », j’aime beaucoup le rythme répétitif et marquant comme une machine (peut être de salle de sport, si on en croit le titre). Le fond sonore prend petit à petit de plus en plus de place et d’espace sonore dans le morceau, pour devenir même strident par instant. Vers la moitié du morceau, une voix étrange et incompréhensible vient accompagnée le morceau, comme sur « Dead Format ». Vers la fin du morceau, tous les sons s’additionnent et la machine devient inarrêtable, jusqu’au coup de frein progressif des dernières dizaines de secondes.

Toujours en musique électronique, mais dans un style plus adouci et éthéré, je découvre un morceau de Actress « Ascending » sur l’album « R.I.P. ». A vrai dire, j’avais repéré cet album depuis un petit moment car il est sorti en 2012, mais l’occasion ne s’était jamais présentée de le découvrir. Bien que cette musique soit moins poignante que Arca ou Blanck Mass, j’apprécie ce rythme sursautant dans une ambiance de rêve. En fermant les yeux, c’est comme si on rêvait à quelque chose d’agréable mais qui reste toujours à distance, qui ne serait jamais atteignable.

Pour terminer en musique. Je ne connaissais pas du tout Deru et je l’ai découvert par hazard sur Youtube après avoir écouté un ou deux morceaux de Actress. Sur l’album intitulé 1979, j’écoute le morceau titre qui est rempli de mélancolie. La musique est volontairement grésillante comme un vieux souvenir, et tourne comme une bande sonore avec quelques notes qui se répètent sans fin sous une ambiance sonore en fond qui évolue doucement. Cette musique force à une sorte de méditation. J’hésite à parcourir le reste de l’album, car bien que ce premier morceau est d’une grande beauté, j’ai un peu peur de rentrer pleinement dans cette mélancolie musicale.

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Fin décembre 2015, je suis allé voir le nouvel épisode de Star Wars, « The Force Awakens » au cinéma Toho de Roppongi Hills, et je l’ai trouvé superbe, sans fausses notes et d’une très grande qualité d’exécution comme on est désormais habitué avec JJ Abrams (Bien que n’appréciant pas spécialement l’univers de Star Trek, j’avais beaucoup aimé et été impressionné par les deux épisodes réalisés par JJ Abrams). Je retournerais le voir avec plaisir (ce que j’ai fait récemment en fait en version japonaise avec Zoa), car c’est captivant de voir se dérouler l’histoire dans une telle atmosphère. L’empreinte du réalisateur est évidente, ce qui fait que ce Star Wars est différent des autres.

En même temps, bien qu’ayant beaucoup apprécié le film, j’ai quelques points de réserve qu’on ne peut éviter de mentionner, notamment sur le fait que le film fonctionne constamment en clin d’oeil vers les anciens épisodes (surtout l’épisode 4 « A new Hope »). Beaucoup de scènes sont ouvertement inspirées: Jakku ressemble beaucoup à Tatouine, on retrouve une scène de taverne, toujours cette relation père et fils, une nouvelle Death Star mais en plus puissante (Starkiller cette fois-ci). Bien sûr, retrouver les personnages de Han Solo, Leila ou Chewbacca ou encore l’increvable Millenium Falcon (qui était déjà dépassé dans l’épisode 4) est un réel plaisir, qu’on ne boude pas. Mais on a l’impression que JJ Abrams ne voulait tellement pas décevoir les fans qu’il n’a pas voulu s’éloigner des idées et du scénario de l’épisode 4. C’est assez frappant et un peu dommage, car on aurait aimé une histoire un peu plus originale. Le scénario pêche vraiment sur cet épisode.

Je suis aussi un peu déçu par les vaisseaux et les décors. Bien que les paysages de Jakku dans le sable et les dunes avec ruines d’une guerre passée où s’entassent quadrupodes et croiseurs impériaux échoués, soient vraiment superbes et symboliques, beaucoup des décors des autres planètes ressemblent un peu trop à mon avis à des décors terriens. On a l’impression parfois que ça se passe en Bretagne (sur la dernière scène par exemple, même en exagérant un peu). J’aurais aimé voir un plus grand détachement, avec des décors fantastiques comme dans les épisodes précédents (les premiers épisodes 1, 2 et 3 par exemple). J’ai un peu de mal à imaginer que la végétation et les roches sur une planète à priori très éloignée ressemble à ce point à celles de la Terre. On regrette également de ne pas voir plus de nouveaux vaisseaux et engins, car il n’y a pas beaucoup d’évolutions techniques entre les épisodes 4, 5 et 6 et ce nouvel épisode, on retrouve quasiment les mêmes X-Wing et Tie-Fighters. Dans les épisodes précédents, on était impressionné par exemple de découvrir pour la première fois les quadripodes impériaux sur la planète Hoth dans l’empire Contre Attaque, et ça faisait partie du rêve. Rien de très nouveau donc côté mécanique dans ce nouvel épisode. Mais on est tout de même ravi de revoir le Millenium Falcon en action (et quelle action!). Les prises de vue sont superbes ainsi que les interactions avec les éléments, comme par exemple les scènes où l’escadre de X-Wings frôle la surface de l’eau, les effets de lumière quand le Millenium Falcon fait des acrobaties avant de plonger dans les ruines d’un croiseur.

On rencontre également une copie de Darth Vador, en la personne de Kylo Ren, mais avec un lien de descendance un peu différent de celui de l’épisode 4, 5 et 6. Il est très réussi, notamment dans ses moments de colère soudaine. Par contre, quand il enlève le masque, on est surpris de voir une tête d’adolescent, ce qui est un peu déconcertant. J’aime beaucoup le personnage de femme forte de Rey (la Luke Skywalker de cet épisode) et l’humour de Finn (le Han Solo jeune de cet épisode, peut être) et les gros plans en images de synthèse de Maz Kanata avec ses binocles ajustables. Bref, le film a une personnalité bien à lui, très bien fait dans l’image, le son des sabres lasers et la dynamique. J’aurais aimé y voir un peu plus de nouveautés, moins de clins d’oeil et un peu plus de prise de risques dans le scénario. Tout ceci ne m’a pas empêché de le voir deux fois, une deuxième fois en non-3D avec Zoa.

Et voir ce nouvel épisode a relancé ma passion pour cette saga. Je me suis procuré un beau livre intitulé « The Art of Star Wars: The Force Awakens ». Je suis tombé dessus par chance au Maruzen de Marunouchi, en même temps que le livre de Ukiyo-e ci-dessus. L’auteur Phil Szostak, intégré dans les équipes de Lucasfilm, nous montre la genèse du design artistique de cet épisode à travers une approche chronologique de Janvier 2013 jusqu’à Janvier 2015. On y découvre un très grand nombre de concepts, de dessins de décors, personnages, machines et vaisseaux par l’équipe d’artistes autour des deux co-production designers Rick Carter et Darren Gilford. On y voit beaucoup de concepts qui n’aboutiront finalement pas dans la version finale (ce qui est parfois dommage dans certains cas). On comprend le long travail de conception de Kylo Ren, dû certainement à la pression de créer un personnage aussi emblématique que Vador.

Un livre en amenant un autre, je me décide de commander sur Internet un magazine numéro spécial de ImagineFX, intitulé « The Art of Film: Star Wars ». Ce magazine de 180 pages montrent l’univers de Star Wars vu par une cinquantaine d’artistes, plus ou moins impliqués d’ailleurs dans cet univers. Certains sont en contrat avec Lucasfilm, d’autres ont seulement eu l’occasion de créer quelques oeuvres dans le cadres d’événements Star Wars spécifiques. Pour beaucoup d’entre eux, le créateur original, Ralph McQuarrie, qui a conçu avec Georges Lucas tous les éléments majeurs de la première trilogie, est un modèle et une inspiration. Les styles et approches des artistes sont bien entendus très différents et ont parfois pour objet l’univers étendu de Star Wars (non directement inspiré des lieux et personnages des films), comme la peinture ci-dessus d’une apprentie au sabre laser rouge par le français Simon Goinard.

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En continuant sur ma lancée Star Wars, j’en viens à vouloir redécouvrir la première trilogie. J’étais trop jeune à l’époque pour voir les trois épisodes au cinéma. Je les ai découvert à la télévision et revus de nombreuses fois sur cassette VHS. Je me suis procuré récemment trois gros livres par JW Rinzler sur le making of des épisodes 4, 5 et 6 qui annoncent raconter l’histoire définitive de la création de chaque épisode avec de nombreuses photos et textes. J’en ai bien pour un an pour tout lire, mais ça s’avère passionnant. J’étais passionné de cinéma il y a 20 ans et cet intérêt renait dernièrement.

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Pour conclure ce long article, je reviens vers une autre forme de futur, celle des courses anti-gravité. J’étais grand amateur du jeu Wipeout 2097, de Psygnosis, lorsqu’il était sorti en 1996 sur la première Playstation. Je le garde en tête comme une référence que j’ai toujours cherché à retrouver. C’est un peu le cas avec Fast Racing Neo de Shin’en. Les graphismes y sont superbes mais c’est surtout la vitesse des vaisseaux anti-gravité qui impressionne. On a peu de temps pour admirer les décors, ce qui est un peu dommage vu la qualité des lieux, que ça soit les jungles luxuriantes ou les villes futuristes. On slalome entre les immeubles à Chuoku City, on survole de très haut Sendai Outpost sur des voies étroites, on parcourt ce qui ressemble à une ville en ruine à Kamagori City. Chaque course demande une concentration de tous les instants et le moindre faux pas ne pardonne pas. Le jeu est beaucoup plus difficile que Wipeout (dans mes souvenirs), mais il y a un plaisir certain dans l’utilisation excessif des turbos. Cette vitesse est grisante et nous fait revenir dans la course malgré le sentiment de frustration dès qu’on loupe un virage pour atterrir dans le vide. Ce jeu de course futuriste tourne sur Wii U, c’est la seule console « nouvelle génération » que l’on a à la maison. Je ne parle pas souvent de jeu video sur Made in Tokyo, mais j’ai pourtant cette passion depuis de nombreuses années. Bizarrement, j’avais pratiquement arrêté le jeu video à mon arrivée au Japon, ce qui peut paraître assez contradictoire. Je m’y suis remis tranquillement depuis environ un an avec la Wii U et les émulations de jeux plus anciens sur OpenEmu sur iMac.