懐こくされるのは致命傷

Pour une journée en semaine, que j’ai pris en congé, je m’attendais à voir un peu plus de salary men (les employés de bureau) dans le parc de Hibiya, comme on peut en voir dans les photographies de Bruno Quinquet du fameux Bureau d’Etudes Japonaises sur sa série Salaryman Project. Il y en avait peu aujourd’hui, peut être en raison du télétravail. Je ne sais plus pour quelle raison j’ai été amené à marcher avec Zoa dans ce parc à la toute fin de l’été, mais je l’ai découvert différemment. J’ai souvent traversé le parc le soir, mais plus rarement en pleine journée, surtout en semaine. On a pris notre temps car on avait environ une heure pour nous. Je sais que le parc est parfois utilisé pour des concerts, notamment le Hibiya Music Festival se déroulant en général sur deux jours. Seiji Kameda parle régulièrement de ce festival, dont il est le producteur, sur son compte Twitter, mais je n’y suis jamais allé. Il faudrait que je fasse le curieux l’année prochaine. J’imagine que certains des concerts se déroulent sur la grande pelouse verte que l’on peut voir sur la troisième photographie du billet, devant le vieux hall de briques. En marchant dans le parc, on fait un détour pour passer devant le fleuriste Hibiya Kadan, car je voulais revoir les blocs d’architecture aux hauts plafonds créés par Kumiko Inui pour cette boutique. En marchant aujourd’hui dans ce parc, je perds un peu de vue la raison pour laquelle je ne l’aime pas. C’était peut-être parce que, malgré sa grande taille, on ne peut que difficilement s’y perdre, ou peut-être parce qu’il est entouré de buildings de bureaux, ce qui ne constitue pas à priori une atmosphère reposante. Mon avis change un peu aujourd’hui en imaginant la musique qu’on y joue plutôt que la présence des employés de bureau en uniforme endormis sur un banc. En fait, j’ai compris la raison pour laquelle je n’aime pas beaucoup ce parc. J’ai l’image persistante en tête d’employés venant ici seuls pour évacuer leur stress, et les voir assis silencieux sur leur banc me fait imaginer leur situation. En traversant ce parc aujourd’hui, une image beaucoup plus légère flottait autour de nous.

Je n’allais bien sûr pas manquer les reprises faites par Sheena Ringo et Tokyo Jihen de morceaux du groupe Original Love (オリジナル・ラブ) sur la compilation hommage What a Wonderful World with Original Love?, sortie pour ses trente années de carrière musicale. Pour être tout à fait honnête, je n’avais jamais entendu parlé de ce groupe japonais pop au nom étrange, fondé en 1986 mais ayant sorti leur premier album majeur en 1991. A l’origine, le groupe se composait de quatre membres, mais il ne reste maintenant que Takao Tajima. Je n’allais pas manquer ces reprises car je sais que Sheena Ringo arrive toujours à transcender les morceaux qu’elle reprend. Je n’ai pas été déçu par les reprises récentes comme celle du morceau de Yōsui Inoue (Wine Red no Kokoro) et celle de Buck-Tick (Kakeochisha) pour des albums Tribute. Cette reprise du morceau Let’s Go! de Original Love, initialement sorti en Juin 1993 sur l’album Eyes, est tout simplement superbe. Sheena s’entoure d’une formation jazz qui inclut des habitués à savoir Midorin (みどりん) aux percussions, Keisuke Torigoe (鳥越啓介) à la basse et Masaki Hayashi (林 正樹) au piano. Ils étaient par exemple déjà présents sur les concerts de Tōtaikai (党大会) en 2013. J’aime beaucoup cette ambiance jazz et cette formation resserrée avec Sheena au chant excelle, au point où je souhaiterais vraiment que le prochain album solo de Sheena Ringo, s’il sort un jour, soit purement jazz dans cet esprit là. La capacité de cette formation à partir vers l’improvisation vers la fin du morceau est particulièrement savoureuse. Midorin est également membre à plein temps du sextuor SOIL& »PIMP »SESSIONS, dont j’écoutais d’ailleurs beaucoup le EP avec Sheena au chant intitulé Koroshiya Kiki Ippatsu (殺し屋危機一髪). Les performances jazz de SOIL& »PIMP »SESSIONS sont beaucoup plus énergétiques voire même explosives (au point où on appelle leur style Death Jazz) que ce qu’on peut entendre sur le morceau de cette compilation, qui joue beaucoup plus dans la retenue. J’aime ce style un peu plus posé qui je pense convient bien à la voix de Sheena (comme sur Tōtaikai), mais je me dis aussi qu’il faudrait que je parte un peu plus à la découverte de la musique de SOIL& »PIMP »SESSIONS. En écoutant ce morceau de Original Love, je me dis également que Sheena pourrait sortir le volume 2 de Utaite Myōri (唄ひ手冥利), la suite du volume 1 composé uniquement de reprises sorti il y a très longtemps en Mai 2002.

Le morceau interprété par Tokyo Jihen sur ce même album hommage à Original Love est en comparaison moins intéressant. Primal (プライマル), initialement sorti en Juillet 1996 sur l’album Desire, est joli mais un peu trop doux à mon avis, un peu trop éloigné de l’esprit du groupe. Il est interprété à deux voix en alternance par Sheena et Ukigumo. Je m’attendais à la première écoute à ce qu’il se produise un décrochage inattendu comme sait le faire Tokyo Jihen, mais ce n’est pas le cas et le morceau se termine dans la douceur comme il a commencé. Ça n’empêche pas qu’il soit beau et qu’il reste en tête après écoute, mais il souffre de la comparaison avec le morceau solo de Sheena. La compilation contient également un morceau interprété par Ukigumo en solo, sous son vrai nom, Ryosuke Nagaoka (長岡 亮介). Ce morceau intitulé Dear Baby (ディア・ベイビー) est dans un style country que j’ai énormément de mal à apprécier et qui m’a même donné une crainte que Tokyo Jihen parte un jour vers cette direction. J’espère que non même pour un seul morceau. Rien ne le présage pour l’instant en tout cas. Et au sujet du titre de ce billet 懐こくされるのは致命傷, que l’on peut traduire en « La nostalgie est une blessure mortelle », il s’agit d’un extrait des paroles du morceau Koroshiya Kiki Ippatsu mentionné un peu plus haut et que j’écris ici pour mémoire.

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