something in the air right above the palm tree

Idéalement placée en plein centre de Daikanyama près du palmier synthétique jaune et vert couvert de panneaux solaires, la nouvelle résidence conçue par Kengo Kuma semble être proche d’être terminée. Son design, utilisant le bois comme très souvent chez l’architecte, est élégant, du moins beaucoup plus que l’ancien centre commercial que cette résidence vient remplacer. Le palmier reste lui immuable et est devenu emblématique du quartier. En regardant de loin, on pourrait vaguement penser à un palmier au bord de mer dans une illustration de Hiroshi Nagai comme celle intitulée Shade of Palm Grove. Hiroshi Nagai est notamment connu pour la couverture de l’album City Pop A Long Vacation d’Eiichi Ohtaki, sorti en 1981. Je n’ai jamais été attiré par le style City Pop des années 1980 à part quelques morceaux découverts un peu par hasard sur Internet. Dans les rues de Daikanyama, je retrouve des autocollants de la fille au regard déterminé dessinée par Fuki Committee. Il est très actif à Shibuya et dans ses quartiers limitrophes. J’aurais voulu aller voir son exposition récente dans la petite galerie Night Out, mais le temps m’a malheureusement manqué. Je ne me souviens plus quel était l’objectif de cette marche. Il n’y avait sans doute pas d’objectif précis, à part celui de marcher en écoutant la musique que j’aime. J’ai à priori fait une boucle qui m’a ramené vers le centre de Shibuya, en passant devant Bunkamura. J’y prends en photo les affiches alignées car je reconnais l’ancien et photogénique Hôtel Belvédère construit en 1882 en Suisse qui doit apparemment apparaître dans un film de Wes Anderson. En fait non, il s’agit d’une exposition de photographies intitulée Accidentally Wes Anderson qui aura lieu du 25 Novembre au 28 Décembre 2023 dans le hall d’exposition du building Hikarie à Shibuya. Cette exposition semble très intéressante. À côté de cette affiche, il s’agit d’Élisabeth d’Autriche, surnommée Sissi, dans une pause singulière pour l’époque. Le film intitulé Corsage retrace la vie de Sissi pendant l’année 1878. Il est très peu probable que j’aille le voir, ceci étant dit, car l’affiche ne nous y invite pas vraiment.

Je parlais un peu plus haut de la galerie Night Out, que je voulais visiter depuis un bon petit moment sans pourtant trouver une bonne occasion. Les images des peintures de l’artiste Shigeki Matsuyama (松山しげき) pour son exposition Portrait of dazzle vues sur le compte Instagram de la galerie m’attirent tout de suite, et je me décide à aller les voir ce lundi, jour férié mais pluvieux. Je n’aime pas beaucoup marcher longtemps sous la pluie mais je ne voulais pas manquer de voir de près ces portraits tout à fait fascinants. La galerie se trouve dans une petite rue à quelques dizaines de mètres du musée Watarium. Elle est située au troisième étage d’un immeuble étroit et il faut sonner à l’interphone pour y entrer. La galerie se compose d’une seule grande salle rectangulaire composée de murs blancs et donnant sur une longue baie vitrée. L’espace est très lumineux et met d’autant plus en valeur les œuvres de Matsuyama posées sur chacun des murs. Sur ces portraits, le contraste entre les yeux très détaillés et expressifs et les formes des visages et des corps très simples et stylisées me fascinent. Il y a un mélange d’universalité et d’unicité dans ces représentations abstraites. C’est vraiment brillant car ces formes simples nous semblent familières sans forcément avoir une idée précise en tête de qui il pourrait bien s’agir. La plupart de ses figures sont féminines à part une seule posée à côté du comptoir de la galerie. Cette figure là semble masculine mais est en même temps androgyne. Je pense très vaguement à Grace Jones. En me voyant prendre de nombreuses photographies et m’attarder longtemps sur chaque œuvre, la personne tenant la galerie (je ne sais si elle est gérante ou seulement employée de la galerie) me demande si je connais personnellement l’artiste, ce qui n’est pas le cas. Étant seul dans la galerie, la conversation s’engage car cette personne est très sympathique. On parle des œuvres que l’on admire dans la galerie et j’en viens à expliquer les raisons pour lesquelles je connais cette galerie. Je l’avais découverte en faisant des recherches sur Internet après avoir pris en photo les autocollants de Fuki Committee comme celui montré ci-dessus. Elle me dit qu’elle en fera part à l’artiste Fuki-san qui sera certainement content d’apprendre le cheminement de cette découverte. Au passage, elle me donne des autocollants que je vais garder précieusement. J’ai très souvent pensé créer mes propres autocollants à partir de mes formes urbano-végétales pour ensuite aller les coller dans les rues de Tokyo, mais ça ne doit pas être autorisé. Je me retiens donc fortement.

Il y a un plusieurs semaines, j’ai entendu à la radio un nouveau morceau de Kirinji (キリンジ) intitulé Honomekashi (ほのめかし) qui m’a tout de suite attiré. Kirinji est depuis l’année 2020 le projet solo de Takaki Horigome (堀込高樹) et il était invité dans cette émission de radio (J-Wave, je pense) pour présenter son nouvel album Steppin’ Out, sorti le 6 Septembre 2023. Ce morceau Honomekashi est une collaboration avec un duo rock coréen appelé SE SO NEON (새소년). Ce n’est pas la première fois que j’entends Kirinji en duo avec un ou une artiste coréen. Le premier morceau que j’ai écouté de Kirinji était d’ailleurs le sublime Killer Tune Kills Me avec la coréenne YonYon. J’aime beaucoup Honomekashi car on s’y sent bien en l’écoutant, flottant loin au dessus de tout ce qui va mal dans ce monde. Avec Kirinji, j’aime quelques morceaux pris indépendamment mais je ne me suis jamais lancé dans l’écoute d’un album entier. Pourquoi ne pas essayer avec son dernier Steppin’ Out? Ça commence très bien avec le premier long morceau Runner’s High, que j’aime vraiment beaucoup, et ce dès les toutes premières notes électroniques cosmiques. J’aime aussi beaucoup la manière dont Takaki Horigome chante dans la deuxième partie du morceau tout en tension maîtrisée. Il y a clairement une ambiance City Pop, à laquelle je ne suis pas vraiment habitué. On qualifie de City Pop, toute la musique pop japonaise qu’on a envie d’écouter la nuit en ville en voiture en faisant durer le trajet pour pouvoir écouter l’album en entier (et optionellement le chanter en même temps). Enfin, c’est la définition que je donne et ça correspond parfaitement à ce morceau là de Kirinji. Le deuxième de l’album, nestling, est moins fort mais continue assez bien dans cette lignée City Pop. Kirinji a un sens très affuté de la mélodie. Malheureusement, les trois et quatrième morceaux me plaisent beaucoup moins et je décroche jusqu’au cinquième Honomekashi, qui m’interpelle à chaque fois. Le sixième morceau intitulé seven/four me plaît aussi énormément car il s’agit d’un instrumental jazz très atmosphérique. La suite m’intéresse de nouveau beaucoup moins. Au total, sur les neuf morceaux de l’album, j’en apprécie réellement que quatre. Je suis un peu déçu de ne pas pouvoir apprécier l’album en entier, d’autant plus que la couverture dessinée par l’illustrateur Naofumi Osawa “Miche” (みっちぇ) du studio Bōrei Kōbō (亡霊工房) est superbe. Ça sera peut être pour son prochain album. En entendant, ces quatre morceaux sélectionnés tournent très régulièrement dans ma playlist et je ne m’en lasse pas.

8 commentaires

  1. Merci merci merci ! J’adore ta définition de la musique City Pop !! Car elle justifie a posteriori le nom que j’ai donné aux compilations « maison » de musique japonaise de ces 3 dernières années. Je les intitulais « City Pop » tout en sachant que le terme n’était pas approprié mais l’imagerie City Pop colle tellement bien à ces compilations que je ne pouvais pas me résoudre à les appeler autrement. Ambiance de mégalopole au soleil couchant, néon, quiétude de la vie urbaine…Une fois par an je me remémorais en relisant la définition de city pop sur wikipedia et en espérant y trouver une justification mais en vain. Alors autant te le dire tout de suite, je fais mienne ta définition !

  2. Salut Nicolas, Ahah, on est une fois de plus sur la même longueur d’onde! Je n’ai jamais été très doué avec les classifications musicales alors que je vois parfois certaines personnes être en mesure de décrire très précisément le style de chaque artiste ou groupe. Ces classifications n’enchantent en général pas beaucoup les artistes/groupes et peuvent être souvent très subjectives car un artiste ou un groupe a tout à fait le droit de changer de style en cours de carrière. Bref, ma définition est très vague et subjective mais je pense qu’il y a quand même cette idée de se créer un moment privilégié pour écouter cette musique, en dehors de obligations de la vie ordinaires. Mais, je pense qu’il y a bien cette idée de ville la nuit dans la city pop.

  3. Re-salut Frédéric, la classification est effectivement un art délicat. C’est intéressant de mettre un mot sur un concept pour aider à l’appréhender mais il ne faut pas que ça entraine une querelle de chapelle, ni que ce soit un piège pour l’artiste à qui on colle tel ou tel terme. Parfois le journaliste qui se prête au jeu de la classification accouche d’un terme intéressant ou qui a une trajectoire que nul n’imaginait (celui qui a qualifié le groupe Darling de jouer du daft punk par exemple), parfois c’est l’artiste lui même qui crée un terme original qui aide à comprendre sa musique (Daiki Tsuneda et « tokyo chaotic »). Personnellement j’essaye d’utiliser ces termes avec parcimonie, flexibilité et surtout beaucoup de subjectivité (jusqu’à tordre le sens d’un mot pour le coller à la musique que j’écoute, City Pop en est le meilleur exemple !)

  4. Oui, je repensais justement au Tokyo Chaotic de Daiki Tsuneta en regardant une de leur vidéos récentes pour le morceau SpecialZ, par OSRIN de Perimetron! Cette évocation de Tokyo Chaotic me ramène à une conversation dans les commentaires d’un ancien billet. J’ai pris l’habitude depuis de vérifier qui réalise les vidéos, car c’est devenu un élément qui me permet de faire des liens entre des artistes et donc de me faire découvrir de nouvelles choses. Dernièrement, c’est la photographe et vidéaste Mana Hiraki qui m’a fait découvrir des artistes comme Nagisa Kuroki et Ohzora Kimishima dont je parle dans quelques billets.

  5. Salut Nicolas, et non, je n’ai pas avancé du tout sur ce sujet bien que je n’arrête pas d’en parler. Il faudrait que je trouve d’abord un outil qui me permettrait de faire cela facilement, et puis trouver le temps nécessaire pour ré-éplucher toutes les pages du blog pour retranscrire ces liens entre les artistes. Ça me parait être un travail titanesque.

  6. Salut Frédéric, oui ce serait un travail si colossal que le choix de l’outil nécessite d’être murement réfléchi. Je n’en connais pas.

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