merging on highways

People are afraid to merge on Highways
Les autoroutes intra-muros de Tokyo sont une sorte de labyrinthe que j’avais un peu peur d’emprunter lors de mes débuts de conduite à Tokyo. Les premières fois devaient être à moto, avec la Honda CB400 de couleur bordeaux qui m’a accompagné pour quelques courts voyages autour de Tokyo. En voiture, la conduite sur les hauteurs de l’autoroute Shutoko (首都高) demande une attention permanente entre les virages soudains, l’étroitesse des voies, les embranchements entrant depuis la gauche ou depuis la droite, les nombreux changements de direction et les quelques conducteurs impatients dépassant allègrement les limites de vitesse. Malgré cela, et peut-être même en raison de tout cela, je n’évite pas la conduite sur l’autoroute intra-muros Shutoko, car visuellement cela vaut clairement le détour, comme par exemple lorsque l’on longe la rivière Sumida pour remonter vers le Nord Est de Tokyo. Ça pourrait clairement être un parcours touristique mais heureusement les karts, qui se sont démultipliés depuis quelques années dans Tokyo, ne sont pas autorisés à monter là-haut. Et s’il y a une once de ‘cyberpunk’ à Tokyo, c’est certainement sur les autoroutes survolant la ville au niveau des quatrième ou cinquième étages des immeubles qu’on peut le trouver.

De haut en bas et de gauche à droite: A Picture of an Air Raid on New York City (War Picture Returns) par Makoto Aida (2012), Postmodern Silly Battle: Headquarters of the Silly Forces par Akira Yamaguchi (2001), History of the Rise an Fall par Manabu Ikeda (2008), Giant Salamander par Makoto Aida (2003), Green Mountain par Yoshitomo Nara (2003), Surf Angel (Provisional Monument 2) par Motohiko Odani (2022), Chapter Four “The Return – Sirius Odyssey” par Tomoko Konoide (2004), Drop curtain of cowhide par Tomoko Konoide (2015-16), Stretch par Yukino Yamanaka (2022), Pansies par Mika Kato (2001), GHOST CUBE par KOMAKUS (2019) et rode work Tokyo_spiral junction par Side Core / Everyday Holiday Squad (2022).

A personal view of Japanese Contemporary Art
Le Samedi 2 Novembre, j’ai visité l’exposition A Personal View of Japanese Contemporary Art qui se déroulait au Museum of Contemporary Art Tokyo (MOT) du 3 Août au 10 Novembre 2024. L’exposition montrait de nombreuses œuvres de la collection de Ryutaro Takahashi (高橋龍太郎). Je suis familier d’un grand nombre des artistes présentés car ils et elles comptent parmi mes préférés de la scène contemporaine japonaise, et j’en ai régulièrement parlé sur ce blog. Plus que cela même, je suis en fait déjà allé voir une exposition de ce collectionneur d’art particulièrement réputé. C’était une exposition intitulée ART de Cha Cha Cha (ART de チャチャチャ) qui se déroulait du 28 Avril au 27 Août 2023 au WHAT Museum opéré par Terrada à Toyosu (豊洲). Les œuvres présentées lors de l’exposition au MOT étaient différentes de celles montrées au WHAT Museum, ce qui donne une bonne idée de la très grande étendue de la collection d’art de Ryutaro Takahashi. Parmi les noms dont j’ai déjà parlé sur ce blog, on trouve entre beaucoup d’autres, des artistes de différentes générations comme Yayoi Kusama (草間彌生), Aquirax Uno (宇野亞喜良), Daido Moriyama (森山大道), Hajime Sorayama (空山基), Yoshitomo Nara (奈良美智), Tomoko Konoide (鴻池朋子), Takashi Murakami (村上隆), Makoto Aida (会田誠), Kenji Yanobe (ヤノベケンジ), Hisashi Tenmyouya (天明屋尚), Akira Yamaguchi (山口晃), Mika Ninagawa (蜷川実花), Manabu Ikeda (池田学), Kohei Nawa (名和晃平), Erina Matsui (松井えり菜)… J’avais déjà vu quelques unes des œuvres présentées lors d’expositions solo de certains artistes, comme celles de Chim↑Pom ou de Chiharu Shiota (塩田千春) au Mori Art Museum de Roppongi Hills. Certaines des sculptures et installations présentées étaient de taille immense, profitant pleinement des hauts plafonds des salles du musée. La questions m’a effleuré l’esprit de savoir où le collectionneur conserve toutes ses œuvres. Peut-être sont elles en fait toujours sur la route, prêtées de musées en musées. Ceci étant dit, j’ai toujours une attirance pour les peintures. Je découvre notamment la beauté d’un portrait ressemblant à une esquisse par Yukino Yamanaka, que je montre en photo ci-dessus sous le nom de stretch. J’aurais pu montrer de nombreuses autres œuvres dans ce billet, tellement la visite était intéressante et inspirante, mais je me limite à quelques unes dont j’indique le titre et l’auteur pour les esprits curieux.

un petit musée à Fukasawa

Le petit musée de Fukasawa (深沢小さな美術館) est un endroit tout à fait inattendu, perdu dans les forêts de montagne près de la petite ville d’Akiruno dans la partie tout à l’Ouest de Tokyo. Ce musée est consacré aux œuvres de l’artiste sculpteur Shozo Tomonaga (友永詔三). Depuis la station JR Musashi-Itsukaichi, il faut environ 15 minutes en voiture pour accéder à ce petit musée, en se laissant guider sur la route par des nains, au bonnet rouge et à la barbe blanche, sculptés dans le bois. On peut difficilement se tromper mais la route est étroite et on se demande par moment si un musée se trouve bien dans les environs car la forêt est dense. Un dernier petit chemin nous amène vers un parking de quelques places sans marquage devant l’entrée du petit musée de Fukasawa. On y trouve une vieille maison de plus de cent ans, rénovée par l’artiste lui-même. Il y a apporté des extensions dans un style architectural irrégulier qui peut rappeler le palais idéal du Facteur Cheval en France, car tout a été construit par l’artiste lui-même. Avec ses murs en pierre et ses portes et fenêtres sculptées en bois, on a l’impression d’entrer dans une maison de contes pour enfants. C’est tout à fait à propos car Shozo Tomonaga est avant tout connu pour les nombreuses marionnettes qu’il a entièrement conçu pour une série télévisée de la NHK intitulée Purin Purin Monogatari (プリンプリン物語). Ce spectacle de marionnettes racontant l’histoire de la princesse Purin a été diffusé sur la chaîne NHK pendant trois ans à partir de 1979. Une rediffusion a démarré en ce moment sur la chaîne éducative de la NHK. Une bonne partie du musée montre un grand nombre des marionnettes utilisées pour ce spectacle, certaines ayant des visages très marqués qu’on devine être ceux des méchants de l’histoire. Mari avait regardé cette série lorsqu’elle était toute petite, et ces visages ont été apparemment marquants. Outre l’histoire de la Princesse Purin, Shozo Tomonaga a également conçu des marionnettes pour le spectacle intitulé Himiko, Reine du soleil levant (卑弥呼ー日出る国の女王) qui a été joué à New York en 1987.

La salle principale du musée montre un grand nombre de sculptures créées par l’artiste, dont celles de jeunes femmes élancées, de personnages se mélangeant à des poissons, de grandes lampes en papier japonais washi prenant la forme de champignons. Ce monde onirique est tout à fait fascinant et nous amène bien loin de notre quotidien. En regardant ces objets de bois, on imagine toute sorte d’histoires du folklore ancestral ou de légendes peuplées de créatures mystérieuses. Chaque sculpture comporte des détails qui nous échappent parfois à notre premier passage (les lampes champignon ont par exemple des petits pieds à peine visibles), comme si ce monde ne se révélait que progressivement après que notre cœur et notre esprit se soient adaptés à cette forêt d’objets. Parmi toutes ces sculptures, j’aime beaucoup les deux femmes à robes rouges à poix, portant un oiseau à la main et un chapeau-coiffure en forme de pomme sur la tête. La créature ailée dorée posée sur un arbre me parle aussi beaucoup, car une même statue de grande taille se trouve près du terrain de Rugby Chichibu no Miya, dans la rue menant au grand Stade Olympique de Tokyo. Les objets ronds de la dernière photographie ci-dessus nous sont également très familiers car ce sont des représentations des signes du zodiaque chinois vendues à chaque début d’année au sanctuaire Meiji Jingu. Nous avons en fait à la maison la figure de cette année représentant le dragon, et on était particulièrement surpris d’apprendre que Shozo Tomonaga les avait conçu. On fait toutes ces découvertes en compagnie de l’artiste. Il est présent dans son musée et engage facilement la conversation. Une des pièces du musée sert de café. On peut s’asseoir en regardant les carpes à travers la fenêtre entrouverte. L’épouse de l’artiste assure le service et n’hésite pas à répondre à toutes nos interrogations sur ce lieu. Le bassin des carpes a par exemple une construction atypique. Il ressemble à un aquarium avec un vitrage latéral permettant de voir nager les carpes. Elle nous explique que chaque détail de la décoration de cette pièce servant de salon de thé a été créé par Shozo Tomonaga, que les chaises aux formes rondes irrégulières sont aussi le fruit de son imagination. Il a actuellement 80 ans mais est apparemment toujours actif, et participe à des expositions. On a un peu de mal à quitter ce monde. Malgré la relative petitesse de l’endroit, on y a passé beaucoup de temps. Le nombre de visiteurs était limité mais arrivait en flux continu. On souhaiterait qu’un nombre important de visiteurs découvre les œuvres fascinantes de Shozo Tomonaga, mais ce musée n’est pas vraiment conçu par accueillir une foule de personnes. On voudrait que ce petit musée de Fukasawa reste secret, mais nous l’avons nous même découvert grâce aux réseaux sociaux.

Hoki Museum

Nous profitons d’une belle journée du mois de Septembre pour aller visiter un musée que j’avais depuis longtemps sur ma liste de lieux à voir absolument, tout autant pour l’art qu’il contient à l’intérieur que pour l’expression artistique de son extérieur. Le Musée Hoki (ホキ美術館) est consacré à la peinture réaliste et compte une collection de 450 œuvres d’environ 50 artistes principalement japonais. Il est situé dans la zone résidentielle d’Asumigaoka (あすみが丘), à la limite du grand parc Showa no Mori (昭和の森), dans l’arrondissement de Midori de la ville de Chiba (千葉市緑区), dans la préfecture de Chiba. Le musée composé de béton et de matériaux métalliques a été construit par Nikken Sekkei et a ouvert ses portes le 3 Novembre 2010. Il a été fondé par Masao Hoki, président de Hogy Medical, qui est un grand fournisseur de produits médicaux, chirurgicaux et de stérilisation, pour y montrer sa collection privée de peintures réalistes. Le Musée Hoki est actuellement dirigé par sa fille Hiroko Hoki. Le bâtiment de sept mètres de haut se compose de trois étages, dont deux en sous-sol, formant de longues galeries en forme de couloirs courbés placées les unes au dessus des autres. La partie la plus impressionnante du musée est la longue zone cantilevée du bâtiment qui semble flotter dans les airs. Dès notre arrivée au musée après une heure et demi de voiture depuis le centre de Tokyo, on se dirige tout de suite vers l’arrière du building pour apprécier sa partie flottant dans les airs. Les parois du building sont fines et élancées. Un étroit chemin entouré de béton nous amène jusqu’à l’entrée du musée, mais on peut continuer ce chemin pour descendre vers l’arrière. Le bloc qui s’élance sur trente mètres dans le vide en défiant la gravité se révèle doucement alors qu’on descend la pente. J’avais bien sûr vu de nombreuses photographies de ce building et de ce tube cantilevé en particulier, mais la réalité est plus impressionnante que ce que j’ai pu voir en photo. On constatera plus tard dans le musée que la galerie à l’intérieur s’avance pratiquement jusqu’à l’extrémité de ce bloc poussé dans le vide. La surface du tube est fine, ce qui donne une légèreté et une grande élégance à l’ensemble qui n’en reste pas moins imposant vu de l’extérieur. C’est une architecture vraiment remarquable, qui me rappelle un peu la résidence privée White Base par l’architecte Akira Yoneda (Architecton) pour sa structure montant dans les airs.

Vue d’ensemble du musée et vues de l’intérieur de plusieurs galeries.

Nous revenons ensuite vers l’entrée du musée pour commencer notre visite, qui démarre par l’étage supérieur et nous fera ensuite descendre méthodiquement et progressivement vers les sous-sols. On ne peut malheureusement pas prendre de photos à l’intérieur, et celles ci-dessus proviennent de différents sites internet traitant d’architecture. La disposition des œuvres dans les galeries est également remarquable. Dans les longues galeries en forme de couloirs pouvant faire jusqu’à 100 mètres, on peut voir les peintures d’une manière séquentielle sans éléments venant perturber notre vision des œuvres. La forme courbée des murs donne en fait une vue d’ensemble des œuvres montrées dans l’espace d’exposition. On avance doucement, comme si on suivait un chemin, attiré par la lumière naturelle au fond du couloir correspondant à la partie surélevée du musée. La lumière varie alors que l’on descend progressivement vers les bas étages du musée. J’ai été plusieurs fois surpris par le volume des espaces qui sont par moment beaucoup plus importants que ce qu’on peut imaginer par rapport à la taille relativement limitée du musée vu de l’extérieur. Le musée fait en tout 3700 m2 de surface et les zones d’exposition couvrent environ 1800 m2 sur neuf galeries.

Sur la partie gauche: le Flyer de l’exposition The Artist’s Gaze. Past, Present, and Then … (作家口視線。 過去亡現在、そして•••) comportant les peintures et installations “Injection Devices” (2023) et “Idle Slumber” (1993-2012) par Kenichiro Ishiguro (石黒賢一郎). Sur la partie droite: de haut en bas et de gauche à droite, “Purple Tears” (2022) et “Praying Beneath a Tree” (2021) par Lo Chan Peng, “Still Life with Lemon” par Fumihiko Gomi (五味文彦), un portrait nu par Nobuyuki Shimamura (島村信之), Shaft Tower par Kenichiro Ishiguro, “The Sacred – Ⅳ” par Hiroshi Noda (野田弘志) et un portrait par Kenichiro Ishiguro.

L’exposition du moment s’intitule The Artist’s Gaze. Past, Present, and Then … (作家口視線。 過去亡現在、そして•••) et se déroule du 23 Mai au 11 Novembre 2024, mais elle se mélange avec la collection permanente. Pour les nouveaux venus dont nous faisons partie, cette distinction entre collection permanente et temporaire n’est en fait pas très importante car on découvre toutes ces œuvres comme un tout. Je suis relativement peu familier des œuvres ultra réalistes des artistes présentés dont les noms m’étaient inconnus jusqu’à maintenant: Kenichiro Ishiguro (石黒賢一郎), Nobuyuki Shimamura (島村信之), Fumihiko Gomi (五味文彦), Hiroshi Noda (野田弘志), entre beaucoup d’autres. J’ai tout de suite été impressionné par la qualité visuelle méticuleuse des natures mortes de Fumihiko Gomi qui touche à un réalisme photographique. Il en est de même des nombreux portraits. Ce qui est intéressant sur les portraits est que l’artiste n’essaie pas de gommer les imperfections comme ça pourrait être le cas en photographie, ce qui fait que ces portraits s’éloignent d’une beauté universelle pour s’approcher de notre réalité. Ces portraits ultra-réalistes en deviennent parfois plus réels que des photographies. Ces peintures prennent des mois à être réalisées, ce qui laisse beaucoup de temps à l’artiste devant sa toile pour non seulement travailler chaque détails mais également pour mûrir sa vision et sa conception des choses. On imagine ce travail et ce temps long passé seul devant une œuvre, mais on a un peu de mal à l’appréhender dans notre époque de l’immédiateté où n’importe quelle intelligence artificielle permet de créer des nouveaux portraits réalistes en quelques secondes. En regardant les œuvres exposées au musée Hoki, on apprécie à la fois la beauté et l’émotion de ce que l’on voit et la dedication sans limites de l’artiste à son œuvre. Cette beauté là n’a pas de prix et est très précieuse à notre époque.

Après notre longue visite du musée, serpentant de galeries en galeries, nous remontons finalement vers l’extérieur pour faire un dernier tour complet du bâtiment avant de reprendre la route. On peut constater que les surfaces arrondies de béton sans ouverture font face aux résidences du quartier pour éviter les vis-à-vis, tandis que les vitrages sont orientés vers la forêt toute proche. Cette forêt est immense et c’est le plus grand parc de la préfecture de Chiba. Nous tentons bien de la traverser en voiture mais nous sommes contraint d’abandonner en cours de route car il nous faut bientôt rentrer.

the streets #10

On peut se demander combien d’épisodes va durer cette série. Il en reste deux pour l’instant incluant celui-ci, car je me suis décidé ces derniers jours à utiliser de nouveau mon objectif Canon 17-40. Les photographies de la série the streets sont par contre pratiquement toutes prises avec mon petit objectif fixe 40mm. Sur les premières photographies, on revient vers le quartier de Jimbocho avec la fameuse météorite du Jimbocho Theater. On repasse ensuite faire un tour dans la librairie vintage Komiyama Tokyo. Je constate avec un certain plaisir que la série de grands posters de l’illustratrice Akiakane (秋赤音) est toujours affichée à l’étage. L’affiche publicitaire Supreme avec Kate Moss semble par contre avoir été vendue, et celle avec Neil Young est toujours là, sur un mur de l’escalier montant à l’étage. Ils ne vendent pas encore celle avec Lady Gaga. Juste à côté d’une plaque au sol NTT à l’effigie du petit chat du roman Je suis un chat (吾輩は猫である) de Natsume Sōseki (夏目漱石), nous nous arrêtons quelques instants chez un petit glacier donnant sur la rue. Mari et moi observons la rue distraitement tout en mangeant notre glace à la pistache assis sur un petit banc. Les autres photographies ont été prises à Ginza, dans le grand Department Store Ginza6. J’aime y aller de temps en temps en filant directement à l’étage du Tsutaya, car on y trouve deux petites galeries d’art. Je voulais voir cette fois-ci les gros chats cosmonautes de l’artiste contemporain Kenji Yanobe (ヤノベケンジ), connu pour ses très grandes sculptures. Celle-ci se nomme Big Cat Bang. Dans le vaste atrium de Ginza6, les deux chats sont assis sur la fameuse Tour de Soleil de Tarō Okamoto (岡本太郎). La Tour du Soleil, créée pour l’Exposition universelle de 1970 et toujours en place à Osaka, est bien entendu modifiée pour pouvoir voyager dans l’espace, avec turbines, hublots et autres artifices félins. Les chats ne peuvent par contre apparemment pas entrer à l’intérieur de cette fusée « okamotesque ». Et avec ce billet qui montre beaucoup de photos de chats, je compte ben entendu re-dynamiser mon auditoire.

Photographie extraite de la vidéo du morceau City Lights du groupe anglais The WAEVE.

Côté musique, je pioche quelques très bons morceaux anglais et américains après avoir écouter le podcast Very Good Trip de Michka Assayas sur France Inter. J’écoute ce podcast par à-coups suivant les sujets couverts. J’aime beaucoup les grandes rétrospectives sur un ou une artiste ou sur un genre (récemment sur le hip-hop new-yorkais), couvrant plusieurs épisodes du podcast, ainsi que les épisodes évoquant les nouveautés rock et parfois electro-pop. Sur l’épisode Un automne très anglais, je découvre de très belles choses avec le groupe The WAEVE de Graham Coxon et Rose Elinor Dougall sur le morceau City Lights de l’album du même nom. On reconnaît tout de suite la touche Blur qu’apporte Graham Coxon à la guitare sur ce morceau, et l’intervention du saxophone vers la fin du morceau est un vrai bonheur. J’y découvre également l’excellent morceau intitulé The Painting of the Bay par W. H. Lung sur leur nouvel album Every Inch of Earth Pulsates. J’adore ce type de sons synth-pop-rock. Dans ce podcast, Michka Assayas évoque également le groupe irlandais Fontaines D.C. dont le nom m’est déjà familier, sans m’être penché sur leur musique. Ma petite sœur qui semble beaucoup apprécié la musique du groupe me conseille de démarrer avec le morceau Starbuster de leur dernier album Romance. Ce morceau à base de phrasés hip-hop mélangeant piano et rock est en effet assez exceptionnel. Il y a une intensité qui ne nous laisse pas tranquille pendant toute l’écoute. Le podcast de Very Good Trip consacré à l’ex-Pink Floyd David Gilmour et ses héritiers inattendus me fait découvrir le sublime morceau Between Two Points que David Gilmour interprète avec sa fille, Romany Gilmour, au chant. La voix de Romany et le morceau ont une beauté pénétrante à laquelle on ne peut rester indifférent. Dans les héritiers inattendus mentionnés dans le titre de ce podcast, on trouve Thurston Moore avec un nouveau morceau intitulé New in Town sur son dernier album Flow Critical Lucidity. Thurston Moore s’éloigne ici un peu des sons rock vers quelque chose de plus abstrait voire psychédélique, même si certains accords sonnent toujours comme du Sonic Youth (au moins un accord). Je trouve que son approche rejoint un peu celle de Kim Gordon. Je ne suis pas sûr d’ailleurs d’avoir mentionné ici l’excellent morceau Bye Bye de Kim Gordon sur son album The Collective sorti en Mars 2024, démarrant par des sons de passages ferroviaires japonais. Ces deux là devraient considérer une réformation de Sonic Youth et partir vers ce type de sons expérimentaux. Mais l’irréparable ne peut peut-être pas être réparé. Une excellente surprise de ce podcast Very Good Trip est l’écoute du morceau Riptide d’un groupe nommé Orcas sur l’album How to Color a Thousand Mistakes. Orcas est un duo américain formé par le compositeur minimaliste Rafael Anton Irisarri et par le compositeur, chanteur multi-instrumentiste Benoit Pioulard. Ce deuxième nom m’est tout de suite familier car j’ai quelques morceaux de Benoit Pioulard sur mon iPod depuis presque vingt ans, notamment le morceau RTO vers lequel je reviens régulièrement car sa composition me fascine. Sur le podcast, Michka Assayas nous apprend que Benoit Pioulard est en fait un pseudonyme et que le véritable nom de l’artiste est Thomas Meluch. Je tombe de ma chaise (c’est une image) car le nom Benoit Pioulard m’avait beaucoup intrigué lorsque j’avais découvert ses premiers morceaux. J’imaginais que cet américain devait forcément avoir des origines québécoises, ce qui donnait à sa musique un côté bucolique. Cette impression est peut-être dû au fait que j’associe très fortement le morceau RTO à un lieu spécifique dans la verdure de Nasu Shiobara lorsque j’écoutais presque religieusement ce morceau. Il y a quelque chose qui me réconforte dans la voix de Benoit Pioulard, et je retrouve tout de suite cette impression sur ce nouveau morceau d’Orcas.

the streets #7

C’est assez reposant pour l’esprit de prendre des photos plus abstraites en se basant simplement sur l’impression que nous donne des formes ou des superpositions de matériaux. On saisit les choses qui nous interpellent sans besoin d’expliquer descriptivement ce que l’on a devant nous. Je pourrais certainement préciser le nom des architectes de certaines des architectures montrées ci-dessus mais je les ai déjà montré plusieurs fois sur Made in Tokyo. Les billets intitulés the streets, comme le précédent, ont tendance à partir dans des directions variées, sans avoir de cohérence très précise. Ces photographies parfois énigmatiques et ces textes qui partent dans tous les sens contribuent à cette image de forêt dense dans laquelle on se perdrait, que j’aime donner à ce blog. Quand j’imagine cette forêt dense, me reviennent en tête les photographies de Yoshihiko Ueda dans le recueil intitulé Quinault prenant pour thème la forêt profonde du parc de Quinault près de Seattle aux États Unis. Je parlais de ce livre dans un billet d’Avril 2011 intitulé Structure and Clouds, sur lequel je reviens régulièrement. Sur Made in Tokyo, certains billets sont plus structurant que d’autres, comme des troncs d’arbres dont la cime dépasserait les autres arbres tout autour. Il y a un certain nombre de billets qui ont pour moi une importance toute particulière et cette importance est souvent liée aux discussions qui suivent dans les commentaires qui m’ont amené vers des directions nouvelles ou conforté dans certaines voies.

Je suis allé voir le Samedi 31 Août 2024 la grande exposition dédiée à l’artiste Japonais Keiichi Tanaami (田名網敬一) au National Art Center Tokyo (NACT). Cette exposition intitulée Adventures in Memory (記憶の冒険) a démarré le 7 Août et fermera ses portes le 11 Novembre 2024. J’ai été très impressionné par le densité de ces œuvres, souvent basées sur des collages de multiples éléments tirés de magazines ou illustrés par lui-même. Cette exposition nous montre aussi ces peintures, un grand nombre de sculptures aux formes fantastiques et objets bizarres aux couleurs fortes. On peut également y voir quelques vidéos expérimentales. Keiichi Tanaami est un artiste qui touche à tout, mais son style reste immédiatement reconnaissable. Cette exposition est la première rétrospective majeure de son œuvre, et en soixante ans de carrière, il y a vraiment beaucoup de belles choses à montrer, certaines étant parfois un peu dérangeantes. L’artiste est mort à l’âge de 88 ans le 9 Août 2024, deux jours seulement après l’ouverture de cette grande exposition. Avec l’exposition CLAMP se déroulant en même temps dans d’autres salles, les propositions artistiques axées pop culture du musée NACT sont particulièrement intéressantes en ce moment.

J’adore retrouver la musique hyperpop d’4s4ki lorsqu’elle créé d’excellent morceaux comme celui intitulé ReEnd (再終焉) de son EP Collective Obsession (集合体大好病) sorti le 4 Octobre 2024. Il s’agit d’une collaboration avec le compositeur et DJ NUU$HI et Eijun Suganami (菅波栄純), guitariste du groupe THE BACK HORN. J’aime beaucoup quand le chant rappé légèrement modifié d’4s4ki s’entoure d’une ambiance musicale qui a de l’ampleur comme ici. L’autre morceau intitulé Ganbariyasan dakara ai shite (頑張り屋さんだから愛して) que j’écoute beaucoup est nettement plus détendu, peut-être parce qu’il s’agit d’une nouvelle collaboration avec Rinahamu qui n’est pas vraiment connue pour partir dans les tours. C’est peut-être parce que les voix d’4s4ki et de Rinahamu sont différentes qu’elles se complémentent bien. Leur autre duo était sur le morceau NEXUS sur l’album Your Dreamland d’4s4ki (2020), qui reste un de ceux que je préfère de cet album. Le EP Collective Obsession démarre par une collaboration avec Dé Dé Mouse intitulée Espa Shōgakusei (エスパー小学生) qui, je trouve, va un peu trop loin dans l’agressivité électronique pour vraiment m’accrocher.

Je n’écoute pas souvent la musique de Seiko Ōmori (大森靖子) mais je reste toujours attentif aux nouveaux albums qu’elle sort. Son dernier s’intitule, dans un anglais un peu approximatif, THIS IS JAPANESE GIRL et il est sorti le 18 Septembre 2024. En survolant les morceaux de l’album, je retiens le cinquième Momoiro Danchi (桃色団地). Mon oreille est certainement attirée par le fait qu’il s’agit d’un duo avec Shūtoku Mukai (向井秀徳) et par le son très appuyé de synthétiseur vintage démarrant le morceau. Il faut aimer la façon très maniérée de chanter de Seiko Ōmori, mais il faut dire que la voix de Shūtoku Mukai est également assez particulière et quand les deux chantent en même temps, on atteint une sorte d’harmonie inattendue. Cette collaboration m’a fait me demander si Seiko Ōmori avait déjà chanté en duo avec Kazunobu Mineta (峯田和伸) de Ging Nang Boyz, une autre figure du rock indé japonais. Je me suis rappelé du single Re: Re: Love, sorti en 2019 dont la vidéo était un véritable petit drama avec les joie, chagrin et dispute d’un couple. Il y a une densité émotionnelle, à chaque fois prête à éclater, dans les morceaux de Seiko Ōmori qui ne laisse pas indifférent, même si personnellement, je n’accroche vraiment que sur certains morceaux, comme les deux mentionnés ci-dessus ou l’album TOKYO BLACK HOLE dont j’avais déjà parlé sur Made in Tokyo et vers lequel je reviens régulièrement.