夜に溶けきれず星を飲んでる

La pleine lune majestueuse a refait son apparition ces dernières nuits au dessus de nos têtes dans le ciel de Tokyo. Celle-ci est irréelle car il s’agit d’une installation créée par l’artiste anglais Luke Jerram près de la gare de Shimo-Kitazawa. Je l’avais déjà montré l’année dernière à la même période mais en pleine journée. J’ai l’impression qu’elle va refaire son apparition tous les ans à la même période de l’année. Pendant ce temps là, la vraie lune était également majestueuse quand elle voulait bien se dévoiler en se dégageant des nuages omniprésents. Mari me dit qu’il est de bonne augure de boire un verre de saké sur le balcon en regardant la lune. Ça tombe bien, il en reste justement un peu au frais dans le frigo. Je prends un verre un peu plus grand que d’habitude pour faire durer ce moment sous le lune. L’alcool aidant un peu, je finis même par m’y perdre à force de la regarder fixement. J’aurais très bien pu m’endormir sur le balcon à côté du petit olivier en pot, comme ça m’est déjà arrivé quelques fois. J’ai hâte que le temps se rafraîchisse pour pouvoir profiter un peu plus du balcon, pour, par exemple, y écrire des billets pour ce blog avec le vieil iPad en mains. Je garde d’ailleurs un souvenir assez précis des textes que j’ai écris dehors sur le balcon. Pour chaque billet écrit, peut-être devrais-je annoter tous ces éléments participant à l’environnement d’écriture, comme le lieu et l’heure où j’ai écris le billet, la musique que j’écoutais au moment de l’écriture, bien qu’il s’agisse souvent de la musique dont je parle dans le même billet. C’est le cas cette fois-ci.

Le nom du musicien Ohzora Kimishima (君島大空) m’était familier depuis quelques temps, mais je n’avais jamais écouté sa musique jusqu’à maintenant. Son deuxième album no public sounds sorti il y a quelques jours, le 27 Septembre 2023, est pour moi un des meilleurs albums de l’année (avec celui de Cero). Je me suis rappelé à écouter sa musique après un tweet que j’avais écrit pour un billet consacré en partie à l’exposition de la photographe Mana Hiraki (平木希奈) que je n’avais malheureusement pas pu voir. J’avais été très surpris de voir qu’il avait aimé ce tweet et je me suis rendu compte après coup que Mana Hiraki avait créé pour Ohzora Kimishima une courte bande annonce pour son deuxième album. Je découvre un peu plus tard le single intitulé c r a z y qui me plait immédiatement pour l’émotion qui s’en dégage et une grande liberté de style avec un son de batterie très présent contrastant avec la voix délicate de Kimishima. Ce sentiment de liberté stylistique se dégage sur tout l’album qui mélange les sons pour former des ensembles souvent hétéroclites mais qui fonctionnent étrangement bien par la magie de son compositeur. Ce type de compositions me rappelle un peu KSK de Sheena Ringo, dans le sens où l’album de Ohzora Kimishima est à fleur d’émotion et joue avec les ambiances jusqu’à l’expérimental. Bien que musicalement différent, certains moments particuliers de l’album comme le dernier passage en larsens du superbe cinquième morceau Eiga (映画) me ramènent à certaines sonorités de KSK, sans pourtant être en mesure de pointer du doigt de quel morceau il s’agit. Je pense que ça doit être le mélange d’instruments, en particulier de guitare et de violon aux sonorités languissantes. Ce morceau est tout simplement magnifique. On s’accroche sans bouger à la voix calme et parfois tremblotante du chant de Kimishima, aux notes de piano pleines de réverbération et par moments dissonantes et en suspension. On y trouve une ambiance mélancolique mais les notes du piano sont tout de même très lumineuses. Ce n’est pas facile d’arriver à transmettre ce genre de sensibilité et j’aime particulièrement quand cette sensibilité se dégage au dessus d’un univers musical à l’apparence chaotique. Le quatrième morceau Arashi (˖嵐₊˚ˑ༄) est un très bon exemple du mélange de musicalité qui ponctue régulièrement l’album, car le morceau mélange sons de guitares électriques et sons électroniques. Ce type d’association est relativement fréquent sauf quand le beat électronique nous surprend en prenant tout l’espace et l’attention, en devenant très marqué et même dansant. Mais toute cette excitation rythmique soudaine est ensuite balayée par un passage expérimental chaotique comme une onde électrique venant perturber tous les instruments de musique. Ohzora Kimishima le chante d’ailleurs dans le morceau dans l’unique refrain (ここは嵐), en annonçant l’arrivée de cette bourrasque, celle annoncée également dans le titre du morceau. L’album avait pourtant démarré sur une ambiance très différente avec une guitare particulièrement active qui pouvait laisser deviner une dynamique soutenu pendant tout l’album, mais celle-ci bifurque ensuite vers un chant beaucoup plus pop et accrocheur qui me fait d’ailleurs un peu penser aux Beatles. Les pistes se brouillent régulièrement et on a de ce fait du mal à s’ennuyer à l’écoute de l’album. Certains morceaux comme 16:28 sont tout de même plus classiques dans leur approche musicale, mais la complexité musicale est toujours là, latente, prête à prendre le dessus si on la laisse faire. De ce fait, la beauté de l’album se révèle un peu plus à chaque écoute, et les préférences changent. On écrivant ces lignes, je me dis maintenant que le neuvième morceau – – nps – – (pour no public sounds) est le plus sensible. Il me donne même des frissons lorsque je l’écoute. Un grand nombre des morceaux de l’album possèdent une ambiance intimiste comme celui-ci. C’est une atmosphère très belle et délicate, mais en même temps dense et complexe.

Par curiosité, je regarde la page dédiée à cet album sur le site web de Ohzora Kimishima et je suis très agréablement surpris d’y lire à la suite des commentaires donnés par des artistes que j’apprécie. Il y a d’abord un commentaire du réalisateur de films Shunji Iwai (岩井俊二), dont je parle décidément très régulièrement sur ces pages ces derniers temps, un autre de Moeka Shiotsuka (塩塚モエカ) du groupe Hitsuji Bungaku (羊文学) que j’aime aussi beaucoup (on finira par le savoir) et de Kayoko Yoshizawa (吉澤嘉代子) que j’ai découvert plus récemment avec son très bel album Akaboshi Aoboshi (赤星青星) et son dernier single Kōrigashi (氷菓子). Ohzora Kimishima joue en fait de la guitare sur ce morceau. Il a même composé certains morceaux de Akaboshi Aoboshi et il y a également joué de la guitare. Quand aux liens avec le groupe Hitsuji Bungaku, Ohzora Kimishima et Moeka Shiotsuka ont interprété ensemble l’année dernière le morceau Hikaru Toki (光るとき) pour la chaîne YouTube The First Take. Cette version en duo, très différente de la version originale de Hitsuji Bungaku, est d’ailleurs superbe. Ohzora Kimishima et Hitsuji Bungaku ont également partagé une affiche de concert un peu plus tôt cette année, et ont même participé à une interview croisée. Bref, j’avais des raisons évidentes de trouver sa musique sur mon chemin. Et alors que j’écris ces quelques lignes, je me rends compte qu’il accompagnait également AiNA The End (アイナ・ジ・エンド) et Aoi Yamada (ヤマダアオイ) sur un festival intitulé Tokyo Chemistry qui avait lieu le 30 Septembre 2023. En parlant d’AiNA The End, je ne peux m’empêcher d’évoquer son dernier single intitulé Awaremi no Sanka (憐れみの讃歌) tiré du film Kyrie no Uta (キリエのうた) de Shunji Iwai. Sans grande surprise, ce morceau écrit et composé par Takeshi Kobayashi (小林武史), est vraiment très beau. Takeshi Kobayashi est un habitué des films de Shunji Iwai car il avait également composé les morceaux de l’album accompagnant le film All About Lily Chou-Chou. Un point intéressant est qu’AiNA interprète ce morceau, et le futur album DEBUT accompagnant le film, sous le nom de Kyrie (キリエ) qui est le nom de son personnage dans le film, tout comme c’était le cas de Salyu prenant le nom de Lily Chou-Chou sur l’album du film.

13 commentaires

  1. Salut ! Dis-donc, ne serais-tu pas un (fidèle) lecteur du magazine online de musique japonaise alternative Spincoaster ? Cela fait plusieurs fois que j’ai l’impression que l’on écoute les même albums à quelques jours d’intervalles, et quand je n’ai rien d’autre à faire j’adore écouter l’intégralité des nouveautés qui y sont présentés. J’ai ainsi également écouté l’album de Ohzora Kimishima il y a quelques jours, je l’avais découvert (sur Spincoaster, donc) via son single ‘crazy’ sorti début septembre qui m’avait bien plu.
    Je vois tout à fait la référence à KSK dont tu parles dans le titre ‘Eiga’ et ses larsens qui m’ont immédiatement fait penser à la fin de ‘o daijini’.
    Je dois cependant t’avouer que j’ai eu quelques difficultés à écouter l’album en entier, sa voix dépasse parfois le tremblotant pour vraiment sonner faux … Mais il se peut qu’au moment de son écoute je n’étais peut-être tout simplement pas ‘dans le mood’, une deuxième écoute s’impose donc. Excellente continuation !

  2. Salut ! Oui exactement, les trente dernières secondes de Odaijini où la guitare décroche petit à petit en larsens est très similaire à la fin de Eiga, certainement parce qu’il y a également du piano sur les deux morceaux. Il me semble d’ailleurs que tu apprécies particulièrement Odaijini sur KSK? J’aime beaucoup cet album d’Ohzora Kimishima mais je pense qu’il demande plusieurs écoutes en effet. A la première écoute, j’avais failli calé sur le troisième morceau Teikan, car il est difficile à saisir, mais je m’étais quand même dit que ça valait le coup d’approfondir. J’avais été ensuite particulièrement impressionné par la composition du morceau suivant Arashi, ce qui m’avait convaincu. Sa voix est certes atypique, je vois ce que tu veux dire. Pourtant, je trouve que sa fragilité toujours à la limite de la justesse correspond très bien à la sensibilité de ce que dégage sa musique. Il faut être en effet dans le mood, j’adore par exemple l’écouter tôt le matin le week-end avant que tout le monde soit levé (comme en écrivant ces lignes). Sinon, non, je ne suis pas du tout lecteur de Spincoaster, mais je devrais certainement regarder d’un peu plus près, merci!

  3. Salut ! Odaijini est le titre de Shiina Ringo que j’ai jusqu’à maintenant écouté le plus, une chanson vers laquelle j’aime revenir de temps en temps. Elle me remémore des moments agréables mais est également teintée d’une certaine tristesse et de nostalgie. Je trouve également le texte très beau, à force de l’écouter je me surprend à en chuchoter certaines parties de temps en temps, comme pour m’apaiser. Telle une berceuse, j’aime écouter ce morceau le soir, dans le noir. Odaijini a toujours été mon morceau préfère, mais l’incroyable version rock qui vient finir en apothéose le DVD ‘Electric Mole’, l’a rendue culte ! (りんごのうた, la chanson ‘bonus’ qui suit, pourtant lourde de sens à l’époque par rapport à la tournure que va prendre sa carrière, en passe complètement inaperçu …)

    Pour Spincoaster, les textes et explications sont vraiment rudimentaires mais j’y découvre régulièrement des artistes dont je n’entends pas parler ailleurs, ainsi que d’autres dont je vois les noms dans tes pages, c’est pourquoi je pensais que tu connaissais. Bonne continuation !

  4. Salut, oh, tu vas me donner envie de revoir le DVD d’Electric Mole! J’ai un peu peur que ça me fasse repartir dans un cycle où je vais me mettre à revoir tous ses concerts les uns après les autres. Ton message me rappelle cette longue discussion très pointue, que je relis de temps en temps. Ça ne date que d’il y a trois ans, mais je la relis avec une certaine nostalgie! J’y repense car cette discussion avait justement eu lieu pendant l’écriture du billet sur Electric Mole, qui m’avait pris pas mal de temps à écrire d’ailleurs. Pour Spincoaster, j’ai commencé à regarder un peu, mais il faudrait que je me lance dans les écoutes par-ci par-là.

  5. Il me faudra revoir le DVD d’Electric Mole moi aussi. C’est son seul DVD que j’ai, il a une grande importance pour moi car il comporte tout les titres de KSK, mon album préfère. C’est également le premier que j’ai acheté et ceci, lors de mon premier séjour au Japon. (J’ai l’impression de me répéter?)
    Je relis notre longue discussion et honte à moi, je ne m’étais pas aperçu qu’il y avait une suite et que Nicolas (celui auquel tu envoies tes textos en concert, je présumé ?) s’était joint à nous ! Je me souviens également que j’avais à l’époque une question à te poser à propos d’Electric Mole concernant un titre joué lors d’un interlude entre le concert où le groupe faisait ses répétitions. La ligne de basse de Kameda m’y plaisait beaucoup et je j’étais toujours dit qu’il serait génial qu’elle soit utilisée dans un morceau, mais je ne pense pas que ça ait été le cas par la suite. Je me regarde le DVD et te donne plus de détails !

  6. Oui, la discussion a continué ensuite sur ce billet avec les commentaires de Nicolas, qui commente souvent sur ce blog, beaucoup sur les sujets musicaux. Bon, il faut vraiment que je re-regarde Electric Mole, car cette ligne de basse de Kameda m’intrigue maintenant beaucoup. Je ne me souviens pas vraiment de ce passage extrait d’un des nombreux interludes du DVD. C’est vrai que ce concert là était directement lié à KSK mais tous les morceaux de l’album n’étaient joués. Il manquait notamment le dernier morceau Sōretsu, qu’elle ne jouera que beaucoup plus tard et lors d’une seule tournée à ma connaissance, celle de Ringo Expo’14. C’était d’ailleurs d’assez loin le meilleur morceau de cette tournée. Il aurait très bien pu coller à l’ambiance d’Electric Mole et cette omission est bizarre en y repensant. Le premier morceau Shūkyō manquait également à l’appel et il n’a été joué qu’en instrumental sur Ringo Expo 08. Il y avait au moins une symétrie des omissions de morceaux.

  7. Re-salut, je viens de re-regarder Electric Mole (qui est quand même un sacré concert!) suite au commentaire, mais je ne retrouve pas vraiment le morceau en interlude de répétition avec la ligne de basse de Kameda. A moins que ça soit la vidéo bonus du morceau Suberidai joué au Shinjuku Loft, car la basse de Kameda, bien qu’étant à priori la même que sur le morceau original, est beaucoup plus marquée, et elle est tout à fait remarquable!

  8. Re-salut ! Désolé pour le retard ! Je me suis regardé Electric Mole ce WE. Quel concert !! Je crois bien que cela fait une éternité que je ne l’ai pas regardé car il y a plein de détails auxquels je n’avais pas fait attention les fois précédentes. Pour ce qui est du passage de Kameda, je suis vraiment désolé de t’avoir fait regarder le DVD ‘pour rien’. Ai-je rêvé cette séquence ? Elle n’apparait effectivement pas dans le DVD, les morceaux défilaient et jusqu’à la fin j’y ai cru pourtant. ‘Tan-tan-taaaan, tan, tan-tan-ta-taaaan …’ C’est vraiment bizarre parce que j’ai encore la ligne de basse en tête … Franchement, je ne comprends pas, je dois avoir confondu avec un autre concert, mais je ne vois pas trop lequel. Y’a-t-il d’autres concerts avec des sessions de répétitions ? Il ne peut s’agir de 賣笑エクスタシー ou de 下剋上エクスタシー qui avec Electric Mole font partie des trois DVD que j’ai regardé sans cesse pendant ma periode de groupie de SR (rires) mais je ne me souviens pas qu’il y ait ce genre de scènes dans ces deux DVD … Je vais passer l’une ou l’autre soirée à regarder tout ce que YT compte comme videos du genre. Encore désolé !

  9. Salut ! Pas de soucis bien sûr, j’étais content de revoir le concert. Gekokujō Xstasy et Baishō Xstasy contiennent bien des passages hors du concert, mais je ne suis pas certain qu’il y ait beaucoup de répétitions. J’ai plutôt des souvenirs de Kameda recherchant son kanji dans les rues de je ne sais plus quelle ville où ils sont en concert. Sur Baishō Xstasy, les scènes hors du concert sont à mon souvenir liées à la mise en scène d’un malaise qui la fait partir en urgence dans une vieille BMW blanche. Mais, j’ai maintenant bien envie de les revoir avec Zazen Xstasy pour lequel je garde aussi un excellent souvenir.

  10. Salut ! Je reviens pour faire part de mon avancement dans mes recherches. Pour en avoir le coeur net à propos de cette ligne de basse je me suis emparé des DVD ‘Dynamite in/out’ et ‘Just Can’t Help it’ au seul Disk Union de Nagoya (1250Yens les deux !) Si Dynamite est un show incroyable, j’ai trouvé par contre ‘Just Can’t Help it’ un peu fouilli, peut-être parce que j’avais adoré l’aisance d’HZM au piano et la complicité entre Kameda et Hirama sur Dymanite … mais toujours pas de trace de ma scène de répétition !!!

    Je suis pourtant à peu près certain qu’il s’agit d’une scène de répétition de la formation Phase 1. J’ai quelque part gravé en mémoire les kanjis 喧嘩上等 (Kenka joto) s’affichant en rouge sur un immense écran derrière la scène car j’avais à l’époque été très impressionné par l’impact visuel des idéogrammes, mais je n’ai curieusement pas retrouvé cette partie dans Dynamite! … Suite du feuilleton dans un ou deux mois, tout cela me fait une excellente excuse pour me visionner tout leurs DVD ; )

  11. Salut, Dynamite Out est clairement dans le haut de la pile dans la liste des concerts de Tokyo Jihen. Je me souviens l’avoir beaucoup regardé et j’ai toujours dans l’idée de le revoir. J’ai l’impression que ton message va me pousser à le faire! J’imagine que tu as aussi regardé la partie documentaire sur le DVD Dynamite In? Sur le mystère de cette ligne de basse, je sèche de mon côté car Kenka Joto est plutôt de la phase 2 étant sorti sur Adult, donc je ne pense pas qu’il ait été joué par les membres de la phase 1. J’ai regardé la vidéo officielle du morceau (tournée dans les anciennes mines d’Oya) présente sur un DVD Adult Video sorti quel mois avant celui du concert Just can’t help it, mais je ne vois pas d’éléments différents du morceau original. Donc pas de pistes de ce côté.

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