スローに流れてく光

La fenêtre est entrouverte et seule la lumière du quart de lune éclaire son cadre. Elle donne sur un toit légèrement en pente qui est relié à celui de l’immeuble voisin. Je tente cette fois-ci de traverser cette fenêtre en posant d’abord un pied pour tester la solidité de la structure. Les ardoises du toit sont plus résistantes que je ne l’imaginais. Alors que je pensais qu’elles craqueraient sous mon poids, elles semblent beaucoup plus résistantes que prévues. Le toit soutient maintenant tout mon corps et les mouvements qui l’accompagnent. J’espère que le toit de cet immeuble voisin après la gouttière sera de facture identique. Je l’ai souvent regardé, pendant de longues heures, depuis ma chambre au dernier étage sous les toits. J’ai étudié cette toiture sous ses moindres détails et craquelures avant de finalement me décider à franchir le pas. Le toit est un peu plus oblique sur cette partie de l’immeuble en face. Il devait y avoir autrefois un grillage de fer séparant les deux immeubles mais celui-ci est devenu tellement lâche qu’il tombe presque de lui-même. On peut le franchir très facilement. En s’aidant des blocs cimentés formant plusieurs cheminées, il n’est pas très difficile d’atteindre le haut du toit de l’immeuble voisin. Une des fenêtres donnant sur l’escalier reste souvent ouverte lors des jours de chaleur excessive. J’attendais cette journée avec impatience car je savais qu’elle m’ouvrirait les portes de l’immeuble voisin. Je ne sais pas encore ce que je vais y trouver, mais ça fait maintenant plusieurs mois que je suis persuadée qu’il me donnera des réponses. Je suis déjà bien engagée et il est de toute façon trop tard pour faire demi-tour car le grillage s’est relevé et est maintenant infranchissable. La lumière de la lune me montre l’emplacement de la petite fenêtre qui me donnera accès à l’immeuble voisin. Une veilleuse tremblotante est installée dans la cage d’escalier à chaque étage. Je suis au quatrième et dernier étage. Une flèche noire inscrite sur le mur m’indique qu’il faut descendre. Chaque étage est similaire aux autres mais devient de plus en plus sombre alors que je descends les étages. Il y a des portes d’acier à chaque étage. Je suis persuadée qu’elles sont fermées de l’intérieur. L’escalier descend jusqu’au premier sous-sol. La veilleuse y est éteinte ou peut-être l’ampoule est-elle grillée. L’immeuble est ancien, mais la peinture a certainement été refaite il y a quelques années malgré les nombreuses craquelures faisant déjà leur apparition. Il y a une autre porte au premier sous-sol. Je la devine à peine, mais sa couleur rouge foncée entourée d’un cadre noir en surimpression la rend tout à fait remarquable. Que se passe t’il derrière cette porte? Il me suffit d’ouvrir pour voir. J’hésite pourtant car une peur soudaine me gagne. Il ne s’agit pas d’effroi mais d’une crainte d’y trouver des choses que je ne saurais comprendre. Elle semble complètement étanche mais un bruit sourd s’en échappe tout de même. Une musique peut-être, un chant de femme. La porte épaisse, lorsque je l’ouvre doucement, donne sur un couloir sombre entouré de draperies de velours de couleur rouge bordeaux. La musique d’un style jazz de cabaret est désormais distincte et la voix de femme très puissante et assurée m’interpelle immédiatement car elle me semble tout à fait familière. Je m’approche de l’épais rideau délimitant l’accès à la salle où se déroule ce concert. En entrouvrant le rideau, j’aperçois cette salle remplie de tables, de chaises et d’un public assis en silence, les yeux rivés sur la petite scène. L’ambiance figée semble provenir d’une autre époque. Sur la scène, une batterie et une contrebasse accompagnent les notes de piano et la voix de la chanteuse. Elle est habillée d’une robe noire avec des tissus de satin, mais son visage n’est pas clair. Je l’entends maintenant chanter d’une manière maîtrisée tout en nuances en anglais. « One of these mornings you’re going to rise up singing, then you’ll spread your wings and you’ll take to the sky ». Je reconnais rapidement une reprise de Summertime d’Ella Fitzgerald. On se laisserait facilement hypnotiser par cette voix et ça semble être le cas des spectateurs et spectatrices dans la salle. Les visages sont figés comme s’il s’agissait de mannequins de cire. Je ne distingue toujours pas le visage de cette chanteuse plongée dans la pénombre, tout comme ceux de l’audience que je vois de l’arrière et légèrement de profil. Le morceau suivant est un autre standard du jazz américain, The Lady Is A Tramp, toujours chanté par Ella Fitzgerald mais avec Frank Sinatra. L’homme qui est monté sur scène n’a certes pas le charisme de Sinatra mais reste assez convaincant face à cette mystérieuse chanteuse qui ne montre pas son visage. Il faudrait s’approcher un peu plus pour découvrir ce visage, mais traverser l’épais rideau de velours et entrer à l’intérieur de la petite salle du cabaret ne pourra se faire discrètement même si cette salle est très sombre. Je me contente donc d’écouter cette voix qui me transmet une passion palpable. Je connais bien sûr cette voix depuis ma tendre enfance, j’ai souvent essayé de l’imiter lorsque j’étais très jeune car elle m’a inspiré. Pourquoi cette voix n’est elle plus maintenant? Pourquoi un tel don est il voué à disparaître? Une masse sombre devant moi me surprend soudainement en pleine réflexion et me saisit par le cou au point où il m’est rendu difficile de respirer. Je n’ai pas la force de me débattre. La voix d’Ella sur Blue Moon interprétée par Ayako Imamura m’entraine dans d’autres songes. Le noir se propage et la voix se dissipe petit à petit jusqu’au réveil soudain.

Kei se réveille en sursaut dans la chambre de son petit appartement près du parc Inokashira. Sans avoir vu son visage dans la pénombre, elle a reconnu dans son rêve la voix de sa mère disparue. Il est 5h moins le quart de l’après-midi. Il est rare que Kei s’assoupisse en fin d’après-midi un samedi. Elle a certes vécu une semaine riche en événements avec la découverte de son amie Rikako dans les montagnes de Nagano et son rapatriement dans un hôpital de Tokyo. Toutes ces émotions soudaines l’ont beaucoup fatigué et lui ont donné à réfléchir plus qu’il ne faudrait. Il était de toute façon l’heure de se réveiller car Ruka doit bientôt arriver à moto pour l’amener jusqu’au centre médical de l’Université Toho à Ōmori, dans l’arrondissement d’Ōta, où se trouve Rikako en observation. Ruka est toujours à l’heure, en toutes circonstances, ce qui contraste avec l’esprit rock and roll qui le caractérise par ailleurs. Kei apprécie cette ponctualité. Elle arrive même à prévoir son arrivée exacte au pied de son vieil immeuble de brique rouge, comme si elle entendait au loin ronronner le bi-cylindre en V de sa nouvelle moto. Ça lui laisse en général quelques minutes pour sortir à l’avance, descendre l’escalier et s’assoir deux ou trois minutes sur les barres métalliques de protection au bord de la rue, le casque à la main, prête à arçonner la moto à l’arrière de Ruka. La voilà qui arrive. Kei ne connaît pas le modèle de cette moto qui a remplacé la vieille CB400 de couleur Bordeaux. Celle-ci a une couleur plus claire, presque jaunâtre. Ruka y a fait inscrire à l’arrière les mots en anglais « the end », comme pour signifier à ses éventuels suiveurs qu’ils n’arriveront pas à le rattraper. « Leave them all behind » comme chantait Ride. Ruka a parfois ce côté puéril d’adolescent qui amuse Kei et est souvent sujet à de gentilles moqueries. Si la disparition de Rikako n’eut ne serait ce qu’un point positif, c’est bien le rapprochement entre Kei et Ruka. L’adversité a en quelque sorte obligé Kei à s’ouvrir et à sortir de sa réserve naturelle. Ruka n’est pas d’un naturel très bavard, disons qu’il ne parle pas à tord et à travers et n’a pas peur des moments de silence. Peut-être trouve t’il d’ailleurs dans ces moments de silence le ressourcement nécessaire lui permettant ensuite d’exploser sur scène pendant les concerts de son groupe. Kei comprend tout à fait cette dualité et la ressent elle-même souvent. Sa bête intérieure ne demande parfois qu’à crier de toutes ses forces, comme pourrait le faire Atsushi Sakurai dans ses morceaux les plus violents. Elle envie Ruka de pouvoir s’exprimer ainsi sur scène. « Tu devrais venir chanter sur scène avec moi et le groupe, un duo de nos voix serait extraordinaire, j’en suis certain ». Kei a toujours refusé son offre mais elle est maintenant prête à l’accepter. Ce changement soudain d’opinion est peut-être dû à la voix qu’elle a entendu il y a quelques dizaines de minutes dans son rêve.

Kei a à peine le temps de toucher la main de Ruka en signe de bonjour qu’elle est déjà assise à l’arrière de la moto prête à partir. Il faut environ une quarantaine de minutes jusqu’au centre médical en empruntant la rue Inokashira puis le grand arc circulaire de voies rapides Kanana. Elle s’accroche à la moto grâce aux deux poignets arrières. Plutôt que de regarder la route droit devant elle en se penchant légèrement la tête sur la droite ou la gauche, Kei préfère divaguer parmi les fils électriques. Elle suit des yeux ce réseau filaire sans fin s’emmêler dans les poteaux puis se démêler ensuite comme par magie pour filer en hauteur le long de la rue. Mais ils partent parfois dans des rues perpendiculaires le long d’immeubles en béton et elle les perd vite de vue. On ne s’ennuie pas à les regarder. Le trajet semble moins long lorsqu’on rêve la tête en l’air, mais lorsqu’on entre sur la voie plus rapide Kanana, une certaine attention est nécessaire pour ne pas se laisser surprendre par les accélérations subites. Kei chante souvent dans sa tête pendant ces trajets. Les morceaux suivent son humeur mais aujourd’hui, elle ne pense qu’à Ella et à Summertime.

Il faudra finalement un peu plus de trente minutes pour arriver à Ōmori. Kei est déjà venu une fois il y a deux jours dans cet hôpital rendre visite à Rikako au même moment que sa mère. Cette fois-là, Rikako dormait à son arrivée mais a ensuite ouvert les yeux. Ils étaient ouverts dans le vide comme si Rikako ne voyait pas les personnes et les choses qui l’entouraient. On la sentait perdue dans un espace infini sans points sur lesquels s’accrocher. Kei imagine que Rikako se trouve dans un espace d’un noir profond où le moindre son qu’elle voudrait émettre est absorbé. Peut-être m’entend elle, se demande t’elle. Les infirmières lui recommande de lui parler, d’évoquer des souvenirs d’enfance à Nagoya ou plus récents à Tokyo. Après une heure de monologue dans la petite chambre de repos de l’hôpital accompagnée de Ruka et de la mère de Rikako, Kei n’avait pourtant pas réussi à susciter la moindre réaction sur le visage figé de son amie. Kei s’est pourtant donné comme objectif de ramener Rikako, elle qui l’avait laissé seule dans les songes de la salle de concert de Kabukichō. Plus qu’un désir profond d’aider son amie, c’était une obligation non-négociable qu’elle s’imposait à elle-même.

En ce samedi en fin d’après-midi, Rikako est endormie sur le lit de sa chambre sans personne autour d’elle. La télévision placée dans un coin en hauteur est allumée et diffuse une émission de sketchs comiques, qui ne correspond pas beaucoup à l’ambiance générale de la pièce. En tant normal, Kei aurait aimé s’asseoir devant cette télévision et rire de bon cœur devant les pitreries poussives de ces jeunes comédiens en devenir. Pourtant, les rires incessants et mécaniques sont aujourd’hui insupportable. Plutôt que d’essayer d’ignorer le bruit de cette télévision au son monté trop fort, elle préfère l’éteindre de suite pour trouver un calme qui lui permettra de ressentir le rythme de la respiration de Rikako. Kei s’assoit sur un tabouret métallique tout près du lit et du visage de Rikako. Elle hésite à lui passer la main dans les cheveux pour lui dégager le visage. Il est beaucoup plus pâle que d’habitude, d’un teint similaire au jour où on l’a retrouvé dans la station thermale de Bessho Onsen un peu plus tôt cette semaine. Son visage est également amaigri mais ses traits restent inchangés. Kei la regarde intensément. Ruka est lui derrière, debout près de la fenêtre donnant sur une terrasse de gazon et d’arbustes. Ce jardin est bien entretenu. Les positions de chacune des branches semblent maintenues et contrôlées par des fils invisibles. Cette immobilité du jardin donne le sentiment que le temps s’est arrêté. Il est vrai que le temps doit sembler long et même interminable lorsqu’on est emprisonné dans une chambre d’hôpital. Rikako ne doit pas ressentir le temps qui passe se dit il à ce moment là. Kei semble également avoir oublié les heures qui passent, restant immobile à regarder Rikako. « Veux tu un café ? » lui demande Ruka pour la sortir de son hypnose volontaire. Kei accepte volontiers mais elle le boira sur place dans la chambre. En sortant de la chambre en direction du bloc de distributeurs automatiques de boissons, Ruka croise Hikari qui avait également fait le déplacement au centre médical à la demande de Kei. Hikari et Kei se regardent sans échanger un mot. Que dire dans cette situation ? Si on ne peut rien dire, peut-être faut il chanter. « Tu devrais lui chanter quelque chose, elle devrait l’entendre et ça la fera peut-être réagir ». Kei imagine d’abord fredonner une des chansons qu’elles écoutaient toutes les trois quand elles étaient en école primaire, comme celles du groupe SPEED qu’elles avaient été voir au Nagoya Dome en Août 1998. Kei se souvient très bien de l’excitation de ce moment et ça la fait sourire sous le regard interrogatif d’Hikari. Pourtant, elle a envie de chanter autre chose. Le morceau Summertime d’Ella Fitzgerald lui vient comme une évidence. Elle n’a pas l’habitude de chanter Summertime mais les paroles s’enchainent automatiquement dès qu’elle commence à le fredonner. Au fur et à mesure qu’elle chante, sa voix devient plus claire, plus puissante et assurée. Ruka reste figé, fixant les cheveux bruns de Kei, droits comme des tiges. C’est lui qui est maintenant hypnotisé. Hikari ne peut s’empêcher de saisir la main de Kei car elle ressent que quelque chose de spécial est en train de se dérouler. Ça peut paraître impensable mais Rikako ouvrit soudain les yeux. Elle ne regarde plus dans le vide comme il y a deux jours mais fixe maintenant Kei dans les yeux avec un regard tendre et expressif. Ses lèvres sont tremblotantes comme si elle tentait de parler. Cette réaction soudaine de Rikako ne perturbe cependant pas Kei qui continue à chanter. Elle comprend l’effet que son chant a sur les autres. C’est la première fois qu’elle s’en rend compte et ça lui procure un sentiment profond de satisfaction. Le mot n’est en fait pas assez fort pour traduire le sentiment qui traverse le cœur de Kei à ce moment là. On pourrait presque ressentir de manière physique ce sentiment comme une aura dépassant le corps des êtres, comme une subtile lumière qui lui éclaire le visage et les cheveux au point où on aurait l’impression qu’ils perdent petit à petit de leur noirceur. Hikari entrevoit cette lumière car elle aide parfois Kei à la catalyser dans les moments d’émotion intense. « Summertime » dit soudainement Rikako d’une voix frêle. « Summertime » répète elle d’une voix plus prononcée. « J’ai beaucoup écouté cette chanson ces derniers jours… ». « Tous les jours peut-être, dans ce petit cabaret à la lumière tamisée ». Rikako fait une pause pour reprendre son souffle court. Kei ne chante plus maintenant. Tout comme Hikari et Ruka, elle écoute attentivement Rikako. « C’était la chanson qu’elle préférait chanter, elle la chantait tous les soirs et le public devenait immobile. Elle disait à chaque fois qu’elle dédiait cette chanson à sa fille, Kei, pour qu’elle passe des jours heureux et qu’elle se dépasse d’elle-même ». Rikako continue « One of these mornings, you’re going to rise up singing, then you’ll spread your wings and you’ll take to the sky. » « Kei, ces paroles en particulier résonnaient parfaitement avec le message de ta mère. Je le ressentais très fortement à chaque écoute ». Beaucoup d’images et de sentiments traversent le cœur de Kei et ne sachant réagir, elle préfère prendre Rikako dans ses bras. Hikari soudainement prise d’une émotion difficilement contrôlable, laisse échapper quelques larmes. Quelques dizaines de secondes plus tard, les infirmières entrent dans la chambre d’un pas rapide suite aux signes de mains démonstratifs de Ruka à travers la porte entrouverte. Les deux infirmières écartent doucement les bras de Kei et la dégage, car il faut vérifier l’état de santé de Rikako. On leur demande de sortir quelques instants de la pièce.

Kei avait oublié le café que lui avait acheté Ruka mais il est maintenant bienvenu. « C’est extraordinaire ! » répète Hikari en ce parlant à elle-même. Rikako est une messagère et Kei a bien compris le message qu’on lui transmettait. Il lui faudra chanter pour apaiser ses propres démons et ceux des autres, comme sa mère autrefois qui chantait dans des cabarets jusqu’au jour où son père lui interdise sous prétexte que ce n’était pas le lieu pour une mère. Ayako Imamura arrêta complètement de chanter à ce moment là et disparu des affiches. Certains fans ont bien cherché à la retrouver mais elle avait déjà fait un trait sur sa carrière de chanteuse. Avec son groupe de jazz, elle connut pourtant un certain succès qui lui avait permis de jouer en Europe. Elle garda un souvenir particulier de Paris où elle s’est produite plusieurs fois. Arrêter de chanter l’avait profondément changé et cela avait beaucoup affecté le comportement de Kei. L’infirmière Nakamura en charge de Rikako vient interrompre Kei dans ses pensées en annonçant que celle-ci vient à nouveau de s’endormir. Son état est stable et elle a même repris quelques couleurs. Cette reemergence l’a pourtant beaucoup fatigué. « Pouvez-vous revenir la voir demain? Ça serait préférable », demande l’infirmière au groupe. Il ne fait pas l’ombre d’un doute qu’ils reviendront demain avec l’espoir d’en apprendre un peu plus sur ce que Rikako a vu et entendu pendant sa mystérieuse disparition. Il est déjà presque 20h30. « On va manger près de la gare d’Ōmorimachi? » propose Hikari. « J’ai vu un restaurant Denny’s juste à côté ». L’ambiance légère et familiale de ce genre d’établissements conviendra très bien. Sur le chemin qui mène à la gare, Hikari engage la conversation sur le groupe de Ruka, plutôt que de se lancer dans un récapitulatif des événements qui ont eu lieu à l’hôpital. « Tu as des concerts prévus prochainement? » demande t’elle. « Non… mais j’ai au moins trouvé une nouvelle chanteuse pour m’accompagner », rétorque Ruka en regardant Kei avec une grande insistance. Sans dire un mot, Kei répond aussitôt d’un signe négatif de la main tout en souriant, comme s’il elle voulait se faire prier. Hikari attrape cette main à la volée et les voilà marchant la main dans la main en rigolant au devant de Ruka. « Tu chanteras comme Moeka… ? ou comme Ringo…? Oui, je sais… comme Akina, ou Momoe peut-être ? ». « Oui, Momoe Yamaguchi, j’adore Yokosuka Story », s’exclame Kei avec un enthousiasme certain. Dans un fou-rire partagé, elles se mettent toutes les deux à chanter quelques paroles du morceau « Korekkiri Korekkiri mou… Korekkiri desu ka? » (Est-ce fini? Est-ce fini? Est-ce fini une fois pour toutes?). Elles se répètent plusieurs fois ces paroles si marquantes en éclatant de rire pour un rien. « Kei, je ne te l’avais jamais dit, mais tu ressembles un peu à Momoe avec tes cheveux coupés au carré ». « Ah oui ? », interroge Kei tout en posant ses deux mains en arrière pour soulever légèrement le dessous de ses cheveux, afin d’imiter une photographie de Momoe Yamaguchi sur la pochette d’un de ses albums. Elles éclatent à nouveau de rire. Ruka les suit en gardant une courte distance. Il ne voudrait pas interrompre leur complicité. Kei est radieuse en compagnie d’Hikari. Elle est belle et lumineuse. Ce soir, elle éclairerait même les nuits les plus sombres.

Le texte de fiction ci-dessus correspond au huitième chapitre de mon histoire au long cours Du Songe à la Lumière – l’histoire de Kei Imamura – que l’on trouve en intégralité sur une page dédiée incluant ce chapitre. Je continue cette histoire à mon rythme et elle prend pour moi de plus en plus d’importance. J’aimerais m’y pencher un peu plus fréquemment.


J’écoute beaucoup de musique japonaise en ce moment comme si je me devais de rattraper un retard imaginaire pris pendant les vacances d’été où je n’avais écouté que très peu de nouvelles choses. Je n’ai pas fait, ces derniers jours, de nouvelles découvertes d’artistes ou de groupes, car j’ai plutôt cherché à approfondir la discographie d’artistes que j’écoute déjà. Regarder à la suite les concerts de Buck-Tick disponible sur WOWOW m’a fait revenir en force sur les albums du groupe notamment leur avant-dernier Abracadabra, comme je l’évoquais dans mon billet précédent, qui s’avère être vraiment très bon. Voir les concerts en vidéo apporte un plus à l’écoute ultérieure des albums car des images restent en tête. Je serais à deux doigts de devenir un fish-tanker, tel est le nom des membres du fan club, mais je n’irais pas jusqu’à la souscription, qui est plus onéreuse que celle de Ringohan pour comparaison. Ça ferait trop. Mais je reviens également vers la musique de Nagisa Kuroki (黒木渚) dont j’ai déjà parlé dans un billet récent pour l’excellent morceau intitulé Kikikaikai (器器回回). J’écoute toujours beaucoup ce morceau dont le titre correspond en fait à celui du EP le contenant, sorti le 6 Septembre 2023. J’aime vraiment beaucoup les deux premiers morceaux du EP: Rakurai (落雷) et Gatsby. L’approche est pop mais avec suffisamment d’éléments rock dissonants et inventifs pour m’intéresser. J’aime beaucoup son approche musicale, notamment le morceau Gatsby qui a une construction tout à fait inhabituelle. En fait, la voix de Nagisa Kuroki nous amène d’emblée vers la pop, mais les arrangements musicaux nous désarçonnent pour rendre l’ensemble particulièrement enthousiasmant. La photo ci-dessus est tirée de la vidéo du morceau Rakurai qui semble avoir été tournée à New York.

Chirinuruwowaka (チリヌルヲワカ) est un groupe dont j’ai également parlé quelques fois, car il s’agit du groupe rock indé de Yuu, de feu GO!GO!7188 et du projet récent YAYYAY. Ça fait un moment que je me dis que je devrais attaquer la discographie de Chirinuruwowaka, car je ne connais que leur premier album Iroha (イロハ) sorti en 2005, mais je suis en quelque sorte un peu intimidé car le groupe a déjà quatorze albums au compteur. Ils ont sorti exactement un album par an depuis 2011. Je ne doute pas du tout de la qualité de l’ensemble, mais je me demande un peu par lequel commencer, après Iroha. En attendant, je pioche plutôt par hasard en utilisant les recommandations ciblées de YouTube qui m’indique le morceau Bakenokawa (化ケノ皮), inclu dans le quatorzième album Nanatsu no mujitsu (七ツノ無実) sorti le 13 Septembre 2023. Le morceau ne diverge pas beaucoup du rock dont Yuu nous a habitué, avec une voix tout en nuances proche d’une version rock du Enka.

Je vais bien entendu évoquer le nouveau single de a子 intitulé Trank et sorti le 13 Septembre 2023. Les habitués de la compositrice et interprète ne seront pas dépaysés, car on retrouve un esprit similaire à ses titres récents. La composition n’est certes pas particulièrement originale par rapport à ses autres morceaux mais a子 a un don certain pour l’accroche musicale qui ne laisse pas indifférent. Dans la vidéo, elle tient un main un sabre. Lorsqu’on la voit ensuite à bord d’une voiture étrangère vintage, l’idée me vient en tête qu’elle va peut-être la découper en deux comme Sheena Ringo dans Tsumi to Batsu (罪と罰) ou plus récemment dans la vidéo du morceau W●RK en collaboration avec le Millenium Parade de Daiki Tsuneta. Il n’en est malheureusement rien. Elle a dû se retenir très fort. Le budget de la vidéo ne permettait peut-être pas non plus de couper une voiture en deux.

Autre continuation de découverte, je reviens vers Skaai avec deux morceaux sortis sur son dernier EP: Pro et We’ll Die This Way. J’aime beaucoup ces deux morceaux pour la fluidité de son flot verbal à l’articulation très marquée. Sur Pro, j’adore la manière dont il vient narguer ses collègues du hip-hop japonais: « Oh my God, Look at what I have done, I have just let 90% of JP rappers behind. No offense though… ». Le morceau We’ll Die This Way n’est pas aussi joueur et est beaucoup plus atmosphérique. Je ne cacherais pas que la composition du morceau me rappelle par moment Frank Ocean sur l’album Blonde de 2016, dans sa manière de varier les ambiances. Tout en étant très bon, il n’arrive tout de même pas à la cheville des quelques meilleurs titres de Blonde comme Nikes, Ivy ou Nights. J’ai d’ailleurs à chaque fois envie d’ėcouter ces quelques morceaux après We’ll Die This Way.

Et je continue à écouter le rock de Hitsuji Bungaku (羊文学), notamment leur premier EP Tonneru wo Nuketara (トンネルを抜けたら) sorti en 2017, suivi d’un autre EP intitulé A short Trip to the Orange-Chocolate House (オレンジチョコレートハウスまでの道のり) sorti l’année suivante en 2018. Le premier album du groupe Dear Youths (若者たちへ) est sorti cette même année. Parmi les singles, on trouve celui intitulé Step dont la vidéo a été produite par un certain Shunji Iwai. Et puis, il y a également un morceau plus récent, Eien no Blue (永遠のブルー). Il y a une grande consistance et une qualité constante dans tous les morceaux du groupe. Je mets tous ces albums et EPs à la suite dans une playlist sur mon iPod et je me lance dans une écoute continue qu’il me suivra pendant tout un parcours piéton du week-end. Cette petite préparation est nécessaire avant le concert qui se fait désormais très proche.

言葉以上・現実以上

Le retour au rythme tokyoïte sur Made in Tokyo n’est pas aussi facile que je l’imaginais. Le sentiment de fatigue post-Covid m’a poursuivi plusieurs semaines et j’ai par conséquent eu un manque de volonté et d’énergie pour me lancer dans l’écriture de longs billets comme j‘ai pu en écrire jusqu’à présent avant nos vacances en France ou comme je le fais maintenant. Et pourtant, le niveau de fréquentation particulièrement haut du blog pendant le mois d’Août aurait dû me motiver un peu plus. La chaleur estivale infernale avec ces 35 degrés tous les jours de la semaine est peut propice aux promenades photographiques, mais j’ai tout de même marcher près du gymnase de Yoyogi, où des danses Yosakoi (よさこい) ont attiré mon attention. Le Yosakoi est une interprétation moderne de la danse traditionnelle Awa-Odori que l’on peut souvent voir dans les festivals d’été. Plusieurs groupes habillés de tenues différentes dansaient les uns après les autres, d’une manière très dynamique caractéristique du genre, le long de la large allée piétonne séparant le Hall de la NHK du gymnase de Yoyogi. La musique qui accompagne les danses a un côté un peu kitsch mais l’énergie communicative des danseurs et danseuses faisaient plaisir à voir. Ils m’ont en quelque sorte transmis un peu de leur énergie. Bien que je n’ai pas publié de billets pendant ces vacances françaises, ça ne m’a pas empêché de réfléchir à la direction que je devrais donner à ce blog. Je me suis dit que ça n’avait pas beaucoup de sens de montrer des photos de choses et d’endroits que j’ai déjà maintes fois montré et qu’il faudrait que j’y apporte une touche un peu plus personnelle et spécifique à mon style visuel. Il faudrait aussi que je travaille un peu plus la sensibilité des textes qui accompagnent mes photographies pour éviter le descriptif.

Mais cette sensibilité est de toute façon grandement et principalement influencée par la musique que j’écoute. Je me remets lentement mais sûrement à écouter de nouvelles très belles choses musicalement. Quand je me perds dans la direction de ce que je veux écouter, je reviens souvent vers LUNA SEA et cette fois-ci, j’écoute beaucoup l’album Lunacy de 2000. Je l’avais acheté en CD à l’époque et ce n’est pas l’album vers lequel je reviens le plus souvent, ce qui est une erreur car le morceau Gravity est un de leurs meilleurs. J’avais aussi oublié que certains morceaux étaient des collaborations avec DJ KRUSH, comme celui intitulé KISS. Quelques morceaux au milieu de l’album sont particulièrement inspirés, notamment le sublime Virgin Mary. C’est un long morceau de plus de 9 minutes placé exactement au centre de l’album. Ce morceau me rappelle que Ryuchi Kawamura utilise régulièrement des références religieuses, en particulier chrétiennes, dans les paroles de ses morceaux. Il m’est d’ailleurs arrivé plusieurs fois d’être assis à côté de sa femme et de son fils à l’église avec mon grand lorsqu’ils étaient petits dans la même école maternelle. Ryuchi Kawamura ne venait bien évidemment pas. Je n’ai malheureusement jamais pu dire à sa femme toute l’admiration que j’avais pour lui. LUNA SEA est le seul groupe qui fait le lien entre la musique japonaise que j’écoutais en France et celle que j’écoute encore maintenant. Écouter LUNA SEA remet en quelque sorte les pendules à l’heure, pour me permettre de repartir vers d’autres horizons.

Dans ces belles découvertes récentes, il y a le morceau Kikikaikai (器器回回) de Nagisa Kuroki (黒木渚) sorti le 23 Août 2023. Je ne connaissais pas cette compositrice et interprète originaire de la préfecture de Miyazaki dans le Kyūshū. Je la découvre par l’intermédiaire de la photographe et vidéaste Mana Hiraki (平木希奈), que j’ai déjà évoqué plusieurs fois sur ce blog, car elle a réalisé la vidéo de ce morceau. Cette vidéo est très inspirée d’ailleurs, comme peut l’être le morceau. Nagisa Kuroki a fait ses études à Fukuoka, ce qui peut expliquer qu’Hisako Tabuchi (田渕ひさ子) ait joué de la guitare sur certains enregistrements de ses morceaux. Mais Hisako Tabuchi ne joue pas sur le morceau que j’écoute en ce moment. Kikikaikai a une composition brillante, très méthodique avec un flot verbal en escalade. La dynamique du morceau est très prenante et laisse peu de temps au répit sans pourtant être poussive. La dernière minute de Kikikaikai est particulièrement excellente car la densité et la tension vocale deviennent débordantes. C’est un excellent morceau qui se savoure d’autant plus après plusieurs écoutes.

Le morceau asphyxia de Cö shu Nie sur l’album PURE n’est pas récent car il date de 2019, mais l’idée m’est venu de revenir un peu vers la musique de ce groupe après avoir vu plusieurs fois la compositrice et interprète Miku Nakamura (中村未来) sur mon flux Twitter (on dit maintenant X mais je préfère l’ignorer pour l’instant) ou Instagram. Le morceau asphyxia est une sorte d’objet musical non identifié car la voix de Miku et la composition musicale ont toutes les caractéristiques de déconstruction du math rock. On y trouve une grande élégance et inventivité. Le morceau nous trimballe sur différentes voies comme si le train musical déraillait soudainement pour se rattraper de justesse vers une nouvelle direction. Mais le morceau n’en reste pas moins très construit. On peut se demander ce qui passe par la tête de la compositrice pour en arriver à de telles envolées. Sur le même album, j’écoute également Zettai Zetsumei (絶体絶命), car je suis attiré par le titre me rappelant un morceau de Tokyo Jihen. Ce morceau est un peu plus conventionnel et calme qu’asphyxia, mais juste un peu car l’escalade instrumentale est toujours bien présente, pour mon plus grand bonheur, il faut bien le dire. C’est un style musical, un peu comme celui de Ling Toshite Sigure, qui me paraît tout à fait unique au Japon.

L’émission radio du dimanche soir What’s New FUN? de Teppei Hayashi (林哲平) sur InterFm me fait découvrir le rappeur originaire d’Oita Skaai qui y était invité pour une interview. Quelques morceaux de Skaai étaient diffusés, notamment celui intitulé Scene! en collaboration avec Bonbero. Ce morceau de hip-hop en duo est vraiment excellent pour son ambiance sombre et atmosphérique, comme on pourrait en trouver chez DJ KRUSH, et pour les talents vocaux multiples de Skaai. J’adore le hip-hop lorsqu’il part vocalement vers ce genre de terrains mouvants. Je découvre plus tard un autre excellent morceau hip-hop de Skaai intitulé FLOOR IS MINE (featuring BIM, UIN). La voix de Skaai chantant en anglais le refrain me rappelle vaguement un morceau de Red Hot Chili Pepper mais je n’arriverais pas à vraiment dire lequel. Le compte Twitter de Skaai m’indique également une collaboration avec le rappeur coréen nommé 27RING (이칠링) sur un morceau énorme intitulé Brainwashing (세뇌) Ultra Remix tiré de son album 27LIT. Le morceau est énorme car il fait plus de 8 minutes et fait collaborer pas moins de 12 rappeurs prenant la parole les uns à la suite des autres sur une trame commune dense et anxiogène. Je ne connais pas tous ces noms (TAK, Moosoo, DON FVBIO, Ted Park, maddoaeji, Boi B, DAMINI, New Champ, Lee Hyun Jun, Skaai, Asol) qui semblent principalement coréens à part Skaai (qui est en fait moitié coréen, parlant la langue). La puissance de l’ensemble et son agressivité conservant un bon contrôle des phrasés parfois ultra-rapides, m’impressionnent vraiment. Chaque intervention des rappeurs invités est entrecoupée d’exclamations proche du cri de 27RING scandant en coréen dans le texte « Mon cerveau a subi un lavage de cerveau » (세뇌 당했지 나의 뇌). La vidéo très graphique est viscérale et correspond bien à l’ambiance du morceau. Il faut d’ailleurs l’écouter fort dans les écouteurs en regardant la vidéo pour bien s’immerger. Je me sens parfois reconnaissant, envers je ne sais qui ou quoi, de tomber sur ce genre de morceaux qui réveillent mon émerveillement musical.

Je reviens ensuite vers des terrains rock plus connus en écoutant le nouveau single du groupe Hitsuji Bungaku (羊文学) intitulé More than Words. J’aime la voix de Moeka Shiotsuka (塩塚モエカ) qui a un petit quelque chose de particulier et que je trouve très mature sur ce morceau. Dès les premières notes, le son des guitares est très présent, rempli de réverbération, et le rythme de la batterie est extrêmement soutenu. Je suis toujours surpris par la qualité du son qu’il et elles arrivent à sortir à trois. Le son des guitares est ici très spacieux. Ce single est utilisé comme thème de fin de l’anime à succès Jujutsu Kaisen (呪術廻戦), du mangaka Gege Akutami (芥見下々), pour une série intitulée Shibuya Jihen (渋谷事変), à ne pas confondre avec Tokyo Jihen (東京事変). Le thème d’ouverture de ce même anime est un morceau de King Gnu intitulé Specialz (スペシャルズ) qu’il me faudra écouter un peu plus (en tout cas la vidéo est impressionnante). En ce moment, j’écoute aussi deux EPs de Hitsuji Bungaku, à savoir Kirameki (きらめき) sorti en 2019 et Zawameki (ざわめき) sorti en 2020. Je ne connaissais en fait pas ces EPs en entier. En les écoutant, je me prépare en quelque sorte pour le concert à Tokyo Haneda le mois prochain, en Octobre 2023. J’ai très hâte d’aller les voir en live. Je sais déjà que ça rendra bien, pour les avoir vu et entendu en streaming lors de leur passage au festival Fuji Rock, il y a quelques années.

Shinichi Osawa (大沢伸一) de MONDO GROSSO produit le nouveau morceau d’Hikari Mitsushima (満島ひかり) intitulé Shadow Dance. C’est à ma connaissance la troisième collaboration entre les deux artistes. Ce morceau est très beau. L’élégance naturelle d’Hikari Mitsushima déteint forcément sur ce morceau, qui est très délicat, notamment dans ses moments parlés. Ce morceau fait apparemment référence au court métrage publicitaire Kaguya by Gucci, réalisé par Makoto Nagahisa dans lequel Hikari Mitsushima jouait déjà. Pour les plus attentifs, j’en ai déjà parlé plusieurs fois. La qualité de la production musicale de MONDO GROSSO n’est plus à démontrer et je suis toujours très satisfait qu’il travaille avec des artistes que j’aime, comme Daoko, Sheena Ringo, AiNA entre autres. J’aimerais d’ailleurs beaucoup que Sheena Ringo écrive un morceau pour Hikari Mitsushima. Il y a déjà des liens entre les deux. J’ignore par contre complètement le morceau que Sheena Ringo a écrit et composé récemment pour Sexy Zone. Faisons comme si il n’avait jamais existé car il n’est de toute façon pas brillant. Je suis également assez déçu par le nouveau single d’Utada Hikaru (宇多田ヒカル) intitulé Gold (~また逢う日まで~). Le morceau est loin d’être mauvais mais il n’a absolument rien d’original, par rapport à ses morceaux précédents. Je l’ai bien écouté plusieurs fois, mais j’ai beaucoup de mal à m’en souvenir. Elle aurait besoin d’un nouveau souffle et je ne doute pas qu’elle le trouvera, comme ça avait été le cas pour l’album Fantôme. Cet album ne semble d’ailleurs pas être le préféré des amateurs d’Utada Hikaru. C’est pourtant pour moi un des plus intéressants et celui qui m’a fait revenir vers sa musique. Et pour revenir à MONDO GROSSO, quelle plaisir de voir une collaboration avec KAF (花譜) dont je parle aussi assez souvent sur ces pages. Le morceau qui vient juste de sortir s’intitule My Voice (わたしの声). Il mélange habilement des sons classiques de piano et de cordes avec un rythme électronique particulièrement intéressant et la voix immédiatement reconnaissable de la chanteuse virtuelle KAF (qui est une vraie personne représentée par son avatar). Comme je le disais un peu plus haut, les choix artistiques de Shinichi Osawa m’épatent vraiment car ils sont quasiment en adéquation avec les artistes que j’apprécie.

Je ne vous obligerais pas à me suivre sur le dernier morceau sélectionné sur cette petite playlist de fin d’été, car la voix d’Ayuni D n’est pas la plus évidente à apprécier. Mais le nouveau morceau Tondeyuke (飛んでゆけ) de son groupe PEDRO qu’elle forme avec Hisako Tabuchi est vraiment enthousiasmant. En fait, j’aime beaucoup l’ambiance bucolique de la vidéo accompagnant le morceau, et le sentiment de nonchalance estivale qui l’accompagne. La manière de chanter d’Ayuni sur ce morceau, en chuchotant presque la fin de chaque phrase, me plait aussi beaucoup. Et il y a un petit passage de guitare vers la fin du morceau où les sons que dégage Hisako me rappellent Sonic Youth. Ce single et la musique de PEDRO ont apparemment un certain succès. J’étais plutôt surpris d’entendre que Tondeyuke était placé à la 54ème place du classement hebdomadaire Tokio Hot 100 de la radio J-Wave, que j’écoute très régulièrement le dimanche après-midi (de 13h à 17h) lorsque nous sommes en voiture. Après la dissolution de BISH, ça fait plaisir de voir chacune des anciennes membres trouver une nouvelle voix. C’est aussi le cas de CENTCHiHiRO CHiTTiii qui s’est lancé dans une carrière solo sous le diminutif de CENT. Son nouveau single Kesshin (決心) est un rock plutôt classique et j’étais assez surpris de voir que la musique a été composée par Kazunobu Mineta (峯田和伸) de Ging Nang Boyz (銀杏BOYZ).

AiNA The End a une carrière musicale pour l’instant très dense et on pourra la voir bientôt au cinéma sur le nouveau film du réalisateur Shunji Iwai (岩井俊二), Kyrie no Uta (キリエのうた). J’ai très récemment trouvé au Disk Union de Shimokitazawa le CD de la bande originale du film All About Lily Chou Chou (リリイ・シュシュのすべて) sorti en 2001, du même Shunji Iwai. J’avais déjà parlé sur ce blog de la musique du film chantée par Salyu. Le premier morceau intitulé Arabesque (アラベスク), qui accompagne les premières images du film dans les herbes hautes près d’Ashikaga (足利駅) dans la préfecture de Tochigi, est tellement sublime que je le compte volontiers dans la liste des morceaux que je préfère. La force d’évocation émotionnelle de cette musique et de la voix extrêmement sensible de Salyu me donnent à chaque fois des frissons. C’est proche du divin, sans trop exagérer. J’ai du coup revu le film qui m’avait beaucoup marqué la première fois que je l’avais vu. Je suis très curieux des films de Shunji Iwai mais ils ne sont pas disponibles sur Netflix ou Amazon Prime. J’ai quand même vu récemment le film Last Letter (ラストレター) sorti en 2020 basé sur un roman qu’il à écrit lui-même. Beaucoup d’actrices et d’acteurs reconnus jouent dans ce film, comme Takako Matsu, Suzu Hirose, Nana Mori et Masaharu Fukuyama entre autres. La surprise était de voir le réalisateur Hideaki Anno (de Neon Genesis Evangelion) joué un second rôle, celui du mari du personnage joué par Takako Matsu. Que ça soit sur des films ou des drama télévisés, je croise souvent la route de Takako Matsu (松たか子) en ce moment. La dernière fois était sur le drama Quartet (カルテット), dans lequel jouait également Hikari Mitsushima. Tout finit par se reboucler dans mes billets.