色々ウォーク❸

Ma série de quatre épisodes continue mais change légèrement de titre car je m’écarte de Shibuya tout en restant dans le centre de Tokyo. Les deux premières photographies sont prises à Shinjuku, la même journée que ma visite au Tower Records près de la gare où se déroulait l’exposition de costumes de Tokyo mentionnée précédemment. L’exposition se terminait le 28 Juin donc j’imagine que les affiches que l’on pouvait voir à l’extérieur de l’immeuble Flags ont toutes été enlevées. Cette même journée ensoleillée, j’avais fait un tour à Kabukichō pour y voir l’exposition murale de photographies de Daido Moriyama. Sur le retour vers la station de Shinjuku, on fait face à l’immeuble tout en courbes Yunika et sa série d’écrans. A la sortie du DVD/Blu-ray de News Flash de Tokyo Jihen, des vidéos extraites du concert étaient montrées sur ces écrans à certains moments de la journée pendant quelques jours. Je n’avais pas eu le courage ni le temps d’aller voir aux heures de diffusion. Les deux photographies suivantes sont prises le soir à Aoyama un peu avant le couché de soleil. Les surfaces en ondulation sont celles du petit building Dear Jingu-mae rénové en 2014 par Amano Design Office. Le trait lumineux rouge sur le bâtiment de la photographie suivante m’intrigue beaucoup. On dirait un rayon de sabre laser du côté obscur de la force. Le mur noir sur lequel il est posé et le reflet sur la surface lisse perpendiculaire renforcent cette impression presque futuriste du lieu. La cinquième photographie est une vue des plus classiques de Tokyo qu’on est souvent tenté de prendre lorsqu’on lève un peu les yeux. La photographie de câbles électriques et transformateurs prise par Daido Moriyama sur le mur de Kabukichō est beaucoup plus impressionnante que ma photographie ci-dessus. Je me demande d’ailleurs s’il y a un site ou un compte Instagram répertoriant les arrangements électriques les plus compliqués et les poteaux électriques les plus beaux. Il y a bien des comptes Instagram répertoriant les conduits de ventilation des buildings tokyoïtes ou les maisons et immeubles envahis par la végétation. Ce sont des comptes que j’ai découvert récemment sur Instagram et que je suis distraitement depuis. Sur la dernière photographie de cette série, il s’agit de la zone de bureaux de Shinagawa Inter-city, vue depuis la passerelle reliant les deux parties principales du complexe. La passerelle passe au dessus du parc intérieur et on a l’impression de survoler une mer verte. On obtient un contraste intéressant entre les contours irréguliers de cette végétation dense et l’uniformité des buildings de verre qui limitent l’espace du parc. Je viens souvent à cet endroit mais ça faisait assez longtemps que je n’y avais pas pris de photos.

En écrivant mon billet sur l’émission spéciale de KanJam avec Tokyo Jihen, je m’étais demandé quels pouvaient être les liens entre Sheena Ringo et King Gnu, le groupe de Daiki Tsuneta. Parmi les liens identifiés, l’emission nous mentionnait le fait que Sheena avait assisté à un concert de Daiki Tsuneta à Tokyo, quelques années avant la formation de King Gnu. On sait également que Tokyo Jihen a déjà été invité à l’émission Music Station en même temps que King Gnu (le 25 Décembre 2020). On a également déjà vu une photo réunissant Sheena et Tsuneta, photo qui a dû être prise au moment de l’émission KanJam bien que j’ai le sentiment qu’elle soit plus ancienne. En cherchant un peu plus, je vois que Sheena Ringo et King Gnu ont participé au même album hommage au chanteur et compositeur Inoue Yōsui (井上陽水), figure importante de la scène musicale japonaise. Le morceau Shōnen Jidai (少年時代) de Inoue Yōsui est tellement connu qu’il est en quelque sorte entré dans l’inconscient collectif japonais. Utada Hikaru interprète d’ailleurs ce morceau sur la compilation hommage. A vrai dire, ce genre de morceaux ne m’intéresse pas beaucoup et l’interprétation qu’elle en fait est plutôt peu inspirée. Je préfère à la rigueur la version plus récente de Suis du groupe Yorushika pour le nouveau film d’animation Luca produit par Pixar. L’album hommage à Inoue Yōsui s’intitule Inoue Yōsui Tribute (井上陽水トリビュート) et est sorti en Novembre 2019. J’y sélectionne trois morceaux que j’aime beaucoup, dont Kazari Janai no yo Namida ha (飾りじゃないのよ涙は) interprété par King Gnu. Le morceau original fut écrit et composé par Inoue Yōsui pour la chanteuse Nakamori Akina (中森明菜) en 1984. Inoue interpréta également lui-même ce morceau sur un album de reprise sorti la même année. Ce morceau sortit également en single beaucoup plus tard en 2002. L’interprétation par Daiki Tsuneta et Satoru Iguchi est très personnelle et on reconnaît tout de suite l’approche musicale de King Gnu, ce qui me plait beaucoup.

Le quatrième morceau de la compilation, qui suit celui de King Gnu, s’intitule Wine Red no Kokoro (ワインレッドの心) et est interprété par Sheena Ringo. Inoue Yōsui a écrit les paroles de ce morceau datant de 1983 mais la musique est composée par Tamaki Koji du groupe Anzen Chitai (安全地帯). Ce groupe qui accompagnait Inoue sur scène se fait connaître du grand public grâce à ce morceau. L’interprétation de Sheena Ringo est magnifique. Elle ne chante pas ces paroles à la légère et on sent que le ton de chaque mot est mesuré. J’aime beaucoup cette tension qui nous accroche à l’écoute. Ce morceau me refait penser à l’album de reprises Utaite Myōri: Sono Ichi (唄ひ手冥利 ~其ノ壱~) qu’elle avait sorti en 2002 juste avant KSK. Je me souviens avoir été assez déconcerté par cet album quand je l’avais acheté à l’époque, certainement un peu déçu du fait que ce n’étaient pas des morceaux originaux qui le composaient. Il y a tout de même de nombreux excellents morceaux, comme Haiiro no Hitomi (灰色の瞳) ou Momen no Handkerchief (木綿のハンカチーフ), mais également des choix plus discutables. En fait, j’aime beaucoup quand Sheena Ringo reprend des morceaux du répertoire populaire japonais. La reprise du morceau Kurumaya-san (車屋さん) de Misora Hibari par Tokyo Jihen sur la tournée Dynamite! de 2005 reste pour moi une des meilleures reprises qu’elle ait faite. Comme l’album Utaite Myōri de 2002 était le premier volume et qu’il n’y a jamais eu de deuxième volume, je me demande si elle a en tête de sortir une nouvelle compilation de ce style. Je me suis mis à réécouter Utaite Myōri il y a quelques mois et je l’apprécie beaucoup plus qu’avant. Dans l’enquête du fan club Ringohan (celle de l’année dernière que je mentionne sans arrêt), la question était posée de suggérer un ou une artiste dont Sheena pourrait reprendre un morceau. J’avais suggéré Jun Togawa sans grande conviction car cette possibilité me paraît plutôt improbable, mais pas totalement impossible. La réalisatrice Mika Ninagawa du film Sakuran dont Sheena a écrit les musiques a déjà signé une compilation de morceaux de Jun Togawa (elle assurait la sélection des morceaux) et je vois donc là un lien qui ouvre des possibilités.

Pour revenir à la compilation Inoue Yōsui Tribute, le troisième morceau que j’apprécie beaucoup est une reprise de Higahi he Nishi he (東へ西へ), écrit par Inoue en 1972, et interprété par iri. Elle a une voix remarquable et laisse vraiment son empreinte sur ce morceau en lui donnant un rythme très accrocheur. Je suis toujours très curieux d’écouter ses nouveaux morceaux. Il se trouve qu’elle vient de sortir un nouveau single intitulé Uzu (渦), qui a l’air de bien fonctionner au niveau des ventes, si on en croit le classement Hot 100 de la radio J-Wave. Ce morceau est excellent et je l’écoute très régulièrement dans ma playlist personnelle. J’ai le sentiment qu’elle mériterait d’être un peu plus reconnue car on ne la voit pas beaucoup dans les émissions musicales télévisées, comme Music Station ou Music Day hier Samedi. Enfin, on pourrait aussi comprendre l’envie d’éviter le tourbillon des apparences médiatiques.

白黒になる東京 (4)

Depuis la gare de Shinjuku, je marche maintenant vers Kabukichō en direction de la station de Seibu Shinjuku. Cette zone de Shinjuku a pris ce nom de Kabukichō car elle était initialement destinée à accueillir un théâtre kabuki après la seconde guerre mondiale. Ce théâtre, qui était censé s’appeler Kiku-za, n’a jamais vu le jour en raison de problèmes de financement, mais le nom de Kabukichō est resté. Des centres de divertissement se sont tout de même développés un peu plus tard, notamment un cinéma appelé Tokyu Milano-za construit en 1956 ainsi que d’autres établissements: un centre culturel, un théâtre et une patinoire. Le cinéma Tokyu Milano-za a fermé ses portes le 31 Décembre 2014. Le bâtiment a été rasé et va laisser place à une tour de 225 mètres actuellement en cours de construction. Je ne suis pas venu à Kabukichō pour voir ce nouveau building en construction qui va continuer à transformer l’image du quartier, mais plutôt pour aller voir la palissade de métal blanc qui l’entoure. Dans le cadre d’un projet intitulé Shinjuku Art Wall (新宿アートウォール・プロジェクト), une sélection de photographies de Daido Moriyama y sont affichées en grand format sur les murs Sud et Ouest. Certaines photographies sont assez connues comme celle avec des bas résille formant des motifs courbes, celle montrant des lèvres féminines prises en gros plan ou encore la photographie de câblages électriques compliqués accrochés sur un poteau. Je ne connaissais pas la plupart des autres photographies, notamment celles montrant des personnages de la série Evangelion comme Ayanami Rei. C’est une bonne idée d’utiliser ces surfaces autour des constructions pour montrer des photographies, illustrations ou autres œuvres d’art. J’ai l’impression que cette méthode d’exposition devient plus fréquente ces derniers temps. Je me souviens des palissades blanches autour du PARCO de Shibuya sur lesquelles Katsuhiro Ōtomo et Kosuke Kawamura s’étaient associés pour montrer des illustrations du manga Akira. Ce n’est pas le seul exemple d’art de rue éphémère que j’ai pu voir à Shibuya.

J’écoute souvent l’album éponyme de Millenium Parade mais je me rends compte que je n’en avais jamais parlé dans un billet à part entière, car je l’avais en fait évoqué dans des commentaires d’un ancien billet lorsque je commençais à écouter l’album en Mars 2021 un mois après sa sortie. Je l’écoute de plus en plus maintenant car c’est un album qui se révèle petit à petit. Millenium Parade (abrévié en Mirepa ミレパ) est un projet musical mené par Daiki Tsuneta, fondateur de King Gnu avec Satoru Iguchi. Alors que King Gnu a une approche rock plutôt mélodique, Millenium Parade prend une approche plus éclectique mélangeant les styles entre rock, passages plus symphoniques, des moments électroniques ou jazz et d’autres de hip-hop. J’aime beaucoup King Gnu et c’est le groupe qui réconcilie tout le monde à la maison. Je m’étais procuré sur iTunes leurs deux derniers albums, à savoir celui intitulé Sympa sorti en Janvier 2019 et leur dernier intitulé Ceremony sorti en Janvier 2020. Ceremony comprend le single Hakujitsu (白日) qui a grandement contribué à la notoriété du groupe, notamment pour la voix rare de Satoru Iguchi. Iguchi et Tsuneta sont proches car ils viennent tous les deux de la même université des Beaux Arts de Tokyo, Département Musique. Iguchi ne fait cependant pas partie de Millenium Parade mais est tout de même invité sur deux morceaux à la fin de l’album dont le morceau Familia qui le conclut. Ce morceau reste très proche de l’esprit musical de King Gnu. Daiki Tsuneta est également membre fondateur de Perimetron qui est un collectif composé de vidéastes, d’illustrateurs graphistes et de musiciens. Perimetron ressemble à une troupe d’artistes très proches partageant une même vision créative. Ce groupe réalise les vidéos de King Gnu et de Millenium Parade. Dans son ensemble, King Gnu est à mon avis plus axé mainstream que Millenium Parade qui se présente plutôt comme un concept musical. Daiki Tsuneta y compose les musiques et invite différents artistes pour les interprétations vocales et instrumentales, comme les voix féminines de l’interprète Ermhoi sur quelques morceaux comme 2992 ou Lost and Found ou encore Friday Night Plans sur le morceau Trepanation. Leurs interprétations vocales sont superbes d’ailleurs. Tsuneta chante également sur plusieurs morceaux. Les paroles sont presque toutes en anglais bien que les membres du groupe et les invités soient tous des artistes japonais, mais parfois d’origines diverses. Millenium Parade est très intéressant musicalement dans un esprit rock se mélangeant avec une approche symphonique, parfois jazz, mais gardant quelque chose d’assez chaotique. C’est d’ailleurs une image que Tsuneta recherche, car il évoque lui-même le Tokyo Chaotic Sound comme tendance principale de leur art. Il y a d’ailleurs un morceau intitulé Tokyo Choatic!!! qui se trouve être une interlude musicale. Il y a beaucoup de courtes transitions musicales dans cet album, contribuant à son approche conceptuelle. Ces transitions façonnent d’ailleurs l’ambiance générale qui se dégage de l’album. Plusieurs d’entre elles évoquent le folklore japonais, comme le tout premier morceau intitulé Hyakki Yagyō (百鬼夜行) qui fait référence à la parade nocturne des 100 démons yōkai arpentant tous les ans les rues durant les nuits d’été et provoquant la mort à ceux qui ont le malheur de croiser leur procession. Hyakki Yagyō était également le thème de la tournée de Sheena Ringo en 2015 (椎名林檎と彼奴等がゆく 百鬼夜行2015), dont j’ai le Blu-ray sans l’avoir vu car je fais durer le plaisir. Ce trait d’union m’interpelle forcément un peu. Une autre interlude de Millenium Parade s’appelle Matsuri no ato et vient reprendre des fragments du morceau suivant 2992, constituant ainsi une sorte d’introduction. Ce genre de liaisons est très intéressante. Millenium Parade s’est surtout fait connaître par le morceau Fly with Me, qui est le thème d’ouverture de la série Ghost in The Shell: SAC_2045. La vidéo animée de style futuriste par Perimetron est superbe, sans forcément reprendre le style GITS. En fait le désordre urbain me rappelle plus le manga et l’anime Tekkonkinkreet. Il se trouve que Daiki Tsuneta est fan de GITS et s’en inspire apparemment dans son approche artistique. J’adore également GITS et les autres manga cultes de Masamune Shirow (Appleseed ou Orion par exemple). La vidéo de Veil par exemple, semble être complètement influencée par l’univers de GITS avec ces tubes reliant des corps cybernétiques. Veil est un des singles du groupe mais n’est bizarrement par présent sur l’album Millenium Parade. J’aime beaucoup l’approche artistique « complète » de cet album où le même collectif autour de Daiki Tsuneta compose les musiques des morceaux, les interprète, tourne les vidéos et illustre les pochettes de leurs albums. Ça donne une certaine consistance de style et quelque chose de très puissant qui m’intéresse beaucoup.

Vous allez peut-être vous inquiétez du fait que je n’ai pas encore évoqué Tokyo Jihen sur ce billet alors que c’était le cas sur presque tous les billets précédents (enfin j’évoque bien Sheena Ringo un peu plus haut). Dans un souci de continuer à tester l’endurance des lecteurs de Made in Tokyo, dont le nombre est en conséquence en baisse en ce moment, je vais quand même évoquer une nouvelle fois Tokyo Jihen ici. En fait, il m’est revenu en tête d’écrire au sujet de Millenium Parade et de Daiki Tsuneta car il était invité avec le batteur de King Gnu, Yū Seki, à l’émission KanJam Kanzen Nen-SHOW (関ジャム 完全燃SHOW) en deux parties les Dimanche soir 13 et 20 Juin 2021 sur TV Asahi. L’émission est présentée par le groupe d’idoles masculines KanJani8 (関ジャニ∞), originaire du Kansai comme leur nom le suggère. Vu qu’ils sont incapables de chanter correctement, je me suis toujours demandé pour quelle raison ils s’étaient retrouvés à animer une émission musicale qui peut être par moment assez pointue. On voit d’ailleurs régulièrement qu’ils sont un peu dépassés par les discussions qui ont lieu pendant l’émission, et c’est d’ailleurs également assez régulièrement mon cas pour être très honnête. Il s’avère tout de même qu’il s’agit d’une des émissions musicales les plus intéressantes de la télévision japonaise, avec celles de la NHK dans un style certes plus formel. Les émissions de KanJam du 13 et 20 Juin ont en fait été hijackées par Tokyo Jihen remplaçant KanJani8 dans le rôle d’animateurs et les reléguant au rôle de spectateurs. L’émission avait même changé de nom pour devenir HenJam Shinra Ban-Show (変ジャム 森羅万SHOW). La mise en scène était amusante car les membres de Tokyo Jihen prétendaient être d’autres personnes liées aux membres du groupe, des frères ou des cousins. Sheena Ringo, qui présentait l’émission avec Ichiyō Izawa, prétendait être Shiina Tekuno (椎名てく乃), cousine de Sheena Ringo qui se trouve être présentatrice de profession. Izawa Ichiyō se présentait en tant que Izawa Amaō (伊澤甘王), cousin au deuxième degré de Ichiyō et journaliste. Je pense qu’on lui a donné le nom de Amaō car on sait qu’il aime les choses sucrées depuis l’épisode de Hanakin Night qui lui était consacré. Kameda Seiji devenait Kameda Seizo, petit frère de Seiji et responsable dans une entreprise. Ukigumo se présentait sous le nom de Yamigumo (闇雲), son frère jumeau et ingénieur de profession. Finalement, Hata Toshiki devenait Hatahata Toshiki (鰰(はたはた)都市紀), chercheur en poisson d’eau de mer et parent de Hata Toshiki. Cette mise en scène très compliquée provoqua bien entendu la surprise des autres personnes sur le plateau. Ce qui était amusant, c’est que Sheena prenait un malin plaisir à ne pas répondre lorsque l’on lui demandait le sens de cette plaisanterie. On ressentait assez clairement que toute cette mise en scène avait été imaginée par Sheena Ringo, certainement pour alléger le stress de ce genre d’émissions, mais on voyait que les autres membres du groupe avaient du mal à se tenir à leurs rôles imposés. Je pense que le chaos qui est en résultait était volontaire et donnait quelque chose d’assez particulier à suivre. Dans cette mise en scène, les membres de Tokyo Jihen devaient parler d’eux-mêmes à la troisième personne, n’étant que les cousins ou petits frères des véritables membres du groupe. On pouvait remarquer que Kameda avait tout de suite du mal à se tenir à cette mise en scène et Sheena le reprenait sous les sourires de tous. C’est une drôle d’idée complètement décalée.

L’autre surprise de l’émission était donc de voir Daiki Tsuneta invité avec le batteur de King Gnu, Yū Seki, à cette émission. Je me souviens que lors d’une enquête du fan club Ringohan, Sheena Ringo demandait qu’on lui suggère des artistes avec lesquels elle pourrait collaborer musicalement et j’avais proposé King Gnu. Ça me fait donc plaisir de voir une partie du groupe invité même s’il ne s’agit pas d’une participation commune à l’élaboration d’un morceau de musique. Ce sera peut être pour une autre fois, mais l’émission avait au moins le mérite d’indiquer qu’il y a des points communs entre Sheena Ringo et King Gnu. C’est en fait Sheena qui a invité Daiki Tsuneta dans l’émission et il explique lui-même qu’il ne pouvait pas refuser. Il se trouve que Sheena a assisté à un de ses premiers concerts à Tokyo il y a quelques années et qu’il se sentait donc obligé d’accepter cette invitation pour cette émission. Le ton de l’émission était volontairement piquant donc on ne sait pas trop dans quelle mesure il s’agit d’humour ou de réalité. Mes souvenirs de Tsuneta dans des émissions de télévision étaient qu’il avait une attitude un peu hautaine (je ne me souviens en fait que d’une seule émission où King Gnu était interviewé, donc mon impression est peut être fausse) mais il avait ici l’air très humble, très souriant et même un peu gêné pendant cette émission qu’on lui fasse des compliments, comme s’il y avait une relation de Kohai à Senpai entre Tokyo Jihen et King Gnu. Daiki Tsuneta dit beaucoup de bonnes choses sur Tokyo Jihen. C’est amusant de voir Sheena l’écouter avec un sourire en coin en baissant la tête. On comprend tout de suite que les commentaires élogieux de Tsuneta sur le groupe lui plaisent beaucoup. Il insiste aussi beaucoup sur le jeu de basse de Kameda et les distorsions (歪み) qu’il y introduit. L’émission prend en exemple son solo de basse sur OSCA qui remplace très bien un solo de guitare. En même temps, Sheena nous dit que la basse de Kameda vient parfois empiéter sur sa plage vocale et qu’il est parfois difficile pour elle de chanter sur un morceau quand le son de la basse devient trop présent. Cette remarque un peu piquante là encore mais volontairement humoristique fait rire toute l’assemblée. Et Ukigumo de commenter qu’avec la basse de Kameda, on n’a même plus besoin de guitare. Le sujet des distorsions occupent un bon moment de la seconde partie de l’émission car Tsuneta apprécie beaucoup cet aspect du groupe et entend même des distorsions dans la batterie de Toshiki Hata.

Outre King Gnu, Chan Mari (ちゃんMARI) du groupe Gesu no Kiwami Otome (ゲスの極み乙女) et le producteur Akimitsu Honma, membre régulier de l’émission, intervenaient également. Chan Mari nous dit d’entrée de jeu être fan de Tokyo Jihen, avec une pointe d’émotion dans la voix. Elle est au clavier dans son groupe et insiste beaucoup dans l’émission sur les talents de composition de Izawa, en prenant comme exemple les solos sur le morceau Osorubeki Otonatachi (恐るべき大人達) en version live sur la tournée Discovery, sur le morceau Aka no Dōmei (赤の同盟) sur le dernier album Music ou sur Himitsu (秘密). Le producteur Akimitsu Honma note que la particularité de Tokyo Jihen est que chaque membre du groupe est capable de composer des morceaux en plus d’être musicien, ce qui est un fait rare. Il remarque certains rapprochements entre l’approche musicale de Tokyo Jihen et celle de King Gnu. Je suis assez d’accord avec cela dans le sens où ces deux groupes ne se sentent pas limité dans leurs approches musicales et sont en mesure de s’approprier différents styles en les adaptant à leurs propres atmosphères. Je ressens également une même sophistication et profondeur dans les sons qu’ils produisent, un certain perfectionnisme. Dans l’émission, en plus de cette capacité à composer, on évoque également le fait que la plupart des membres du groupe ont de multiples capacités en plus de jouer de leurs instruments d’origine, notamment celle de chanter pour Izawa et Ukigumo et de jouer de la guitare en plus des claviers pour Izawa.

L’émission aborde ensuite le fait que le groupe développe sans cesse des nouvelles versions de leurs morceaux, ce qui rend d’ailleurs les concerts intéressants car les morceaux varient souvent par rapport à ce qu’on connaît des albums. Sheena évoque une fois de plus son souci de plaire au public en proposant des interprétations nouvelles plutôt que de répéter des versions que le public connait déjà. A ce sujet, Ukigumo ne fait jamais deux fois les mêmes solos de guitare. On nous le démontre dans l’émission en prenant différents exemples en concert du morceau Killer Tune pour lequel le solo est à chaque fois diffèrent. Ukigumo nous dit que changer à chaque fois permet de ne jamais se tromper car il n’est pas nécessaire de reproduire exactement la même partition à chaque interprétation. Mais ça veut surtout dire qu’il a une excellente capacité d’improvisation ce qui désoriente d’ailleurs un peu les autres membres du groupe. En studio d’enregistrement, il improvise souvent une partition qui se trouve être meilleure que ce qui était écrit à l’origine. Le problème est qu’il ne se souvient parfois pas après coup ce qu’il a improvisé et il faut lui faire réécouter la bande de son propre passage de guitare pour qu’il puisse le reproduire à l’identique en se copiant lui-même. On lui pose la question si le changement perpétuel de version peut être dû au fait qu’il ne retient pas la partition originale et il nous confirme avec une moitié de sourire qu’il y a également un peu de cela. Sur Ukigumo, Tsuneta nous dit qu’il est un génie de la guitare car son approche musicale n’est jamais standard ou normale, et qu’il est respecté par les jeunes guitaristes.

Chan MARI évoque un peu plus tard la multiplicité des voix de Sheena, ce que j’aime aussi énormément et Akimitsu Honma parle aussi de génie pour le chant de Sheena. Il y a beaucoup de superlatifs dans cette émission, ce qui peut paraitre un peu trop. Mais ce qui est avant tout intéressant, c’est le déroulement chaotique de l’émission, comme une distorsion de la réalité, qui nous pousse à sourire. Par exemple, Yū Seki de King Gnu nous explique qu’il a été invité par Hata Toshiki dans cette émission mais lui-même n’a pas l’air très au courant. Sheena répond toujours à moitié aux questions et quand ça l’arrange. A une question de l’acteur, invité régulier de l’émission, Arata Furuta, elle nous dit qu’elle n’est pas Sheena Ringo (puisqu’elle est le personnage de Tekuno) et qu’elle n’est donc pas en mesure de répondre précisément. Elle change même rapidement de sujet en posant une question à Daiki Tsuneta. Cette mise en scène est en fait un moyen pratique pour ne pas répondre aux questions ennuyeuses. Arata Furuta lui demandait si la raison pour laquelle elle avait arrêté sa carrière solo était bien pour faire partie d’un groupe. C’est une question à laquelle elle a dû répondre tellement de fois qu’elle expédie la réponse en passant rapidement à autre chose. Un peu plus tard dans l’émission, Ukigumo nous révèle qu’on l’oblige à porter des vêtements bizarres, comme le costume d’indien qu’il a porté récemment pendant l’émission Music Station pour le morceau Ryokushu (緑酒), et que parfois c’est dur à vivre. L’éclat de rire de Tsuneta quand Ukigumo nous annonce cela fait plaisir à voir. Là encore, on ne sait pas trop si cette complainte est véritable, mais j’imagine bien Sheena obliger gentiment tout le monde à porter ces tenues de scènes, sans que personne ne soit en mesure de refuser tout en se disant que ça ne doit pas être une si mauvaise idée que cela. L’émission décortique également plusieurs morceaux mais je trouve les explications plus floues et moins convaincantes. En tout cas, j’ai appris pas mal de nouvelles choses sur le groupe, et des petites anecdotes. Le respect mutuel entre les membres du groupe, et entre Tokyo Jihen et King Gnu, transparaissait véritablement dans cette émission, et m’a d’autant plus donné envie de revenir vers les albums de Millenium Parade et de King Gnu, en alternance avec Music de Tokyo Jihen que j’écoute toujours beaucoup sans m’en lasser.

銀座オンパレード

J’ai passé tellement de temps à écrire le billet précédent que j’ai un peu perdu le fil des photographies que je voulais montrer sur ce blog. Je vais revenir à des billets un peu plus courts en commençant par celui-ci. Toute la difficulté est de ne pas se laisser attirer par un sujet annexe qui me ferait m’étendre indéfiniment. Je ne nies pas cependant le fait que j’apprécie écrire dans la longueur même si ça demeure assez fatiguant, surtout pour le travail de recherche que ça demande. Les quelques photographies ci-dessus sont prises à Ginza. Je ne me souviens déjà plus vraiment de la raison pour laquelle nous sommes allés à Ginza, mais c’était cette fois-ci l’occasion de monter au dernier étage de la tour Tokyu Plaza. Il y a une terrasse ouverte au public sur le toit de l’immeuble et des baies vitrées permettant de voir le grand carrefour de Sukiyabashi. En fait, je connaissais ce point de vue pour l’avoir aperçu sur le site web du photographe anglais basé à Tokyo, Alfie Goodrich. On ne se lasse pas de prendre des photographies plongeantes et le problème ensuite est de sélectionner celles que l’on mettra sur les pages de ce blog, car elles se ressemblent toutes mais avec des voitures différentes. Je préfère limiter les prises pour éviter ensuite de passer mon temps en sélection, mais quand on regarde l’assemblage de photographies similaires sur une page unique sur le site d’Alfie Goodrich, l’agencement fonctionne très bien. La parade qui passait à Ginza au niveau du carrefour de Sukiyabashi pour supporter un ancien président américain m’a beaucoup étonné. On distingue vaguement des drapeaux américains depuis la terrasse du Tokyo Plaza.

Depuis les hauteurs du Tokyu Plaza, on aperçoit le Ginza Sony Park, remplaçant l’ancien immeuble Sony détruit il y a de cela quelques temps et jamais reconstruit. Il reste un parc à cet emplacement ainsi qu’une zone utilisée pour des événements artistiques en sous-sol. Un des avantages de voir la tour Sony disparaître est qu’on peut apprécier pleinement les façades de carrés de verre de l’immeuble Hermès de Renzo Piano, situé juste derrière. Sur l’escalier de béton menant au sous-sol du Sony Park, deux illustrations sont posés de chaque côté, un gnou de couleur bleu et un garçon hirsute en survêtement regardant vers le ciel. Une exposition intitulée Millenium Parade occupe l’espace intérieur. On peut y accéder gratuitement jusqu’à un certain point, mais il faut ensuite avoir un billet que je n’ai pas. Je n’ai pas beaucoup de temps non plus pour chercher à savoir ce qui se trouve dans l’espace payant de cette exposition consacré au groupe King Gnu. L’ambiance Street Art y est pourtant très intéressante. On écoute très souvent leurs deux albums Sympa et Ceremony dans la voiture car c’est un des groupes que l’on apprécie tous au même niveau. Leur dernier morceau Sanmon Shōsetsu (三文小説) est vraiment superbe. La voix de falsetto et la technique vocale de Satoru Iguchi m’impressionnent vraiment. Elle se mélange bien avec celle du guitariste Daiki Tsuneta, qui écrit également la plupart des morceaux du groupe. Iguchi et Tsuneta sortent tous les deux de l’université des Beaux Arts de Tokyo, et c’était une des raisons pour lesquelles Mari s’était initialement intéressé à eux (sauf qu’ils étaient dans un autre département, celui de musique). On regarde beaucoup les émissions musicales de fin d’année, principalement parce que je change discrètement de chaîne quand je sais que Tokyo Jihen est dans la liste des invités (en général, je n’ai aucun contrôle sur la télécommande). On regarde à chaque fois les prestations de King Gnu, après avoir pris son mal en patience à écouter tous les groupes de Johnny’s Entertainment dont je mélange les noms (à part Arashi du moins jusqu’à la fin de cette année).

La dernière émission musicale en date était Music Station le jour de Noël. L’émission durait 6 heures en tout et je me demande comment Tamori, à 75 ans, a pu tenir toute l’émission. Il m’a d’ailleurs eu l’air d’être peu réceptif à ce que Kameda et Sheena lui disaient avant le passage en Live de Tokyo Jihen. King Gnu y jouait Sanmon Shōsetsu et Tokyo Jihen interprétait deux morceaux à la suite: le nouveau Blue ID (青のID) et le morceau de 2007 Senkō Shōjo (閃光少女). Sheena était habillée en tenue de boxeuse avec des gants de boxe, forcément très adaptés à la scène. Elle n’avait heureusement pas à tenir le micro en mains. J’aime beaucoup ces petites touches inattendues et j’espère qu’ils vont continuer en ce sens. Sheena semble inspirer beaucoup d’artistes sur Twitter, comme Tomei_Ningen dont je montre trois dessins ci-dessus. Je trouve que ce sont les plus réussis de ceux que j’ai pu voir sur le fil Twitter et je me permets de les montrer ci-dessus, mais il y en a beaucoup d’autres (quelques exemples: 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7). Je sais que King Gnu est également capable de ce genre d’excentricité, mais ils semblent plus réservés ces derniers temps. Tiens pour revenir à l’enquête Ringohan, Sheena demandait avec quel groupe ou artiste on souhaiterait qu’elle collabore pour un morceau. Sans forcément être très convaincu, j’avais mentionné King Gnu, tout simplement pour entendre la manière dont la voix de Iguchi et de Sheena pourraient s’accorder ensemble. Il y a cependant peu de chances que ça arrive, mais on ne sait jamais. C’est dommage que King Gnu ne participe pas à Kōhaku cette année. Les groupes et artistes qui m’intéressent se comptent sur les doigts d’une main (seulement quelques doigts) cette année, un peu comme les autres années d’ailleurs. Tokyo Jihen, dont c’est la première participation, y jouera deux morceaux à la suite Uruuruurū (うるうるうるう) et Nōdōteki Sanpukan (能動的三分間) sous le nom de Uruuruurū ~ Nōdōteki Urū Shime Hen (うるうるうるう~能動的閏〆篇~ ) qui viennent conclure cette année bissextile (閏年 – Urūdoshi) pour le groupe. Remarquons le palindrome dans le titre du morceau du EP News sorti en ce début d’année et le kanji parfaitement symétrique pour Urū. Pour en savoir plus sur le sujet des palindromes, n’hésitons pas à revenir sur le long et très instructif thread de commentaires d’un billet précédent.

真夏.1

(ア) Harumi (晴海): Structure temporaire CLT Park Harumi, par Kengo Kuma, composée de grandes plaques de bois faites de couches collées orthogonalement entre elles, appelées CLT pour ‘Cross-Laminated Timber’, et dont l’intérieur est utilisé comme espace de jeux pour enfants. (イ) Kichijōji (吉祥寺): Nature débordante le long de la voie ferrée de la ligne Inokashira près du parc du même nom. (ウ) Ginza (銀座): Grande avenue au centre de Ginza ouverte aux piétons le dimanche. (エ) Jingūmae (神宮前): Ruelle peu fréquentée à Jingumae, parallèle à l’avenue Meiji et donnant une vue intermittente sur la ligne de train Yamanote. (オ) Jingūmae (神宮前): Glaçon dessiné par Creative Designers International pointant vers le ciel comme un iceberg qui tenterait de nous rafraichir des 36 degrés quasi-permanents. (+) Accompagnement musical: deux morceaux de King Gnu, 白日 et どろん de leur album CEREMONY sorti en Janvier 2020.

au premier jour d’une nouvelle décennie

L’émission annuelle musicale Kōhaku 紅白歌合戦 de la NHK du 31 décembre 2019 que l’on regarde à chaque fois comme une tradition ne m’a pas fait découvrir de groupes ou des morceaux que je ne connaissais pas. Cette année ressemblait plus à une compilation de la décennie, car beaucoup des artistes invités faisaient des medley de quelques uns de leurs morceaux les plus connus. Même Sheena Ringo, dont c’est la septième participation, n’a interprété que des moitiés de deux morceaux plus anciens, à savoir Jiyu-dom ジューダム et Jinsei ha yumei darake 人生は夢だらけ, notamment car ces deux morceaux apparaissent sur la compilation sortie en 2019. Le morceau que j’ai préféré de l’émission était celui de King Gnu, Hakujitsu 白日 qui sera présent sur leur prochain album Ceremony prévu pour le 15 janvier 2020. Le groupe est une des révélations de cette année et ce morceau Hakujitsu a eu beaucoup de succès. Nous écoutons d’ailleurs de temps en temps leur précédent album intitulé Sympa, dans la voiture pendant les trajets un peu plus longs que d’habitude. Un peu avant King Gnu dans l’émission, LiSA chantait le thème de l’anime Kimetsu no Yaiba (鬼滅の刃) que j’ai commencé à regarder sur Netflix car le petit est en train de lire le manga et que cette histoire de chasseur de démons m’intriguait. J’ai commencé à regarder les quatre ou cinq premiers épisodes de l’anime et bien que l’histoire de démons mangeurs d’Homme ne soit pas en elle-même très originale pour le moment, l’ambiance générale de l’anime et son univers graphique sont très beaux. Il s’agit de l’histoire d’un jeune chasseur de démons Tanjirō Kamado cherchant un antidote pour sauver sa petite sœur Nezuko, transformée en démon avec un morceau de bambou dans la mâchoire pour éviter qu’elle morde. L’histoire se passe dans les campagnes japonaises à l’ère Taisho et ces lieux sont remplis de folklore et de croyances fantastiques. Je n’avais pas regardé d’anime depuis très longtemps et je me suis laissé emporter par cette histoire et ce monde. Le manga est toujours en cours avec 18 volumes. Le morceau que chantait LiSA à Kōhaku intitulé Gurenge 紅蓮華 est en fait le thème d’ouverture de chaque épisode de l’anime. Il n’a rien de vraiment original. Je trouve qu’il ressemble à un morceau classique d’anime, il doit y avoir des codes spécifiques au genre, mais LiSA met beaucoup de ferveur dans son interprétation sur la scène de Kōhaku.

On n’a pas vu la soirée passer que minuit approche déjà. La nouvelle décennie n’est plus qu’à quelques minutes de nous lorsque nous regardons les images de la NHK montrant des temples et sanctuaires aux quatre coins du Japon. Année olympique oblige, on nous montre également des images du nouveau stade olympique de Kuma Kengo qui est maintenant achevé. Après s’être souhaité une bonne et heureuse année, nous allons comme d’habitude au sanctuaire du quartier. Un feu brûle devant le sanctuaire pour réchauffer les visiteurs de minuit comme nous. Le verre de amazake offert par le sanctuaire est le bienvenu. On le boit tranquillement en regardant les flammes dans la nuit. Il y a du monde autour de nous malgré le froid. J’hésite à rester un peu plus longtemps que d’habitude mais il se fait déjà tard.

Une surprise m’attendait en rentrant à la maison un peu avant 1h du matin après la visite du sanctuaire. Un email de Ringohan dans ma boîte aux lettres annonce la réformation de Tokyo Jihen à compter du 1er janvier 2020 avec un nouveau single Erabarezaru Kokumin (選ばれざる国民). Quel plaisir et surprise de voir Tokyo Jihen se réformer, surtout que leur nouveau morceau est excellent. On ne les avait pas entendu depuis 8 ans car leur dernier album Color Bars date de janvier 2012. On retrouve le style des derniers albums, avec ici une construction assez atypique sans véritable refrain mais avec mélange des voix. A la voix de Sheena Ringo, s’ajoutent celles de Ichiyo Izawa et Ukigumo. C’est un morceau à la fois élégant, sophistiqué et rafraîchissant comme sait si bien le faire le groupe, ce qui est de bonne augure pour l’album. En attendant l’album, le groupe annonce une tournée au Japon appelée ‘Live Tour 2020 News Flash’ à partir de 29 février. Ce morceau est le premier que j’écoute en cette nouvelle année et décennie. Il me donne envie de me replonger encore dans la discographie complète de Tokyo Jihen en réécoutant chaque album en ordre chronologique.

Le premier jour de l’année n’est pas très mouvementé. Comme tous les ans, une bonne partie de la journée se passe à table devant les Oseichi pour le déjeuner, tout en regardant distraitement les émissions spéciales à la télévision, principalement des émissions humoristiques en direct animées par des comédiens confirmés ou en devenir. Mais il faut bien faire notre première sortie au sanctuaire ou au temple avant leur fermeture vers 16h. Nous allons d’abord au sanctuaire du quartier puis nous marchons une bonne heure jusqu’au temple Kencho-ji de Kamakura. Je le connais moins que le temple Engakuji à Kita Kamakura bien qu’ils soient assez proches l’un de l’autre. Kencho-ji est un des grands temples zen de Kamakura et un des plus anciens monastères d’entrainement zen du Japon. Sa construction date de 1253 sous l’ère Kenchō d’où il prend d’ailleurs son nom. La composition de Kencho-ji variera avec le temps car certains des bâtiments du temple seront détruits par des incendies. Dès notre entrée dans l’enceinte, on est face à face avec l’immensité de la porte principale appelé Sanmon et datant de 1754. On peut entrer dans plusieurs grands halls dont le Butsuden, contenant une grande statue de Bouddha. Il fut déplacé du temple Zozo-ji à Tokyo jusqu’à Kamakura en 1647. Le hall suivant, le Hatto datant de 1814, est impressionnant pour sa peinture de dragon au plafond appelée Unryu-zu. C’est en fait une peinture récente datant de 2003 par Koizumi Junsaku, créée à l’occasion du 750ème anniversaire de Kencho-ji. Une autre porte appelée Karamon, plus petite mais luxueuse car couverte de dorures, renferme le jardin intérieur du hall principal du temple. Ce hall nommé Hojo était autrefois la résidence du responsable religieux des lieux, mais s’est depuis transformé pour accueillir les services religieux pour les fidèles. On peut également visiter l’intérieur en retirant nos chaussures. Il n’y a pas de services pendant notre visite et on découvre donc le hall principal couvert de tatami entièrement vide. Au fond de la vaste pièce, on peut y voir un grand dessin de dragon. On appelle également ce hall le Ryuo-den, le hall du Roi Dragon. Un espace de cette pièce est réservé aux visiteurs pour exercer le Zazen. Un homme qui était assis à cet endroit me conseille de m’y asseoir également quelques instants, en m’indiquant la position assise adéquate. Je n’ose pas refuser car l’homme prend de son temps pour m’expliquer l’assise à prendre. Je m’assois donc seul pendant quelques instants devant le Roi Dragon. J’apprécie ces instants dans la lumière jaune du soir, mais on m’attend un peu plus loin à l’autre bout du bâtiment, donc aucune possibilité d’approcher une possible plénitude zen en si peu de temps. Il m’effleure l’idée d’y revenir seul un jour pour m’asseoir ici pendant des heures, mais je sais déjà que cette idée ne se concrétisera probablement jamais. Le soleil commence déjà à se coucher un peu après 16h. Nous rentrerons à pieds comme à l’aller. Cette longue marche aura été utile pour se nettoyer le corps du sake bu pendant le long déjeuner, et la visite du Kencho-ji nous aura chargé en énergie pour cette nouvelle année.