地球に帰りたい

Je commence parfois ce genre de compositions futuristes sans les terminer et elles finissent par se perdre dans les répertoires remplis de photographies du iMac, jusqu’à ce que je les retrouve soudainement en parcourant mes archives mois après mois à la recherche d’inspiration. Quand je trouve ce genre de compositions, je ne suis d’ailleurs plus très sûr si je les ai déjà montré dans le passé, sous une autre version car ces buildings flottant dans le ciel tokyoïte se ressemblent tous beaucoup. Je retrouve cette composition au dessus du ciel de Nishi-Shinjuku, d’où s’échappe la tour futuriste Mode Gakuen Cocoon Tower par l’architecte Paul Noritaka Tange, fils de Kenzo.

Je fais une rechute d’Autechre en ce moment. Après avoir ré-écouté le classique album Confield de 2001, je me plonge dans les 5 volumes de elseq sortis en 2016. Je l’avais acheté à sa sortie en digital, mais n’avait écouté à l’époque que quelques morceaux du premier volume. Je pense que la série elseq, environ 4 heures de musique en tout, ne tombait pas, à cette époque là, au bon moment de mon cycle d’écoute musicale. Car on ne peut pas écouter Autechre l’air de rien d’une oreille discrète, ça demande un certain investissement. Bien sûr, c’est difficile d’écouter cette série d’une traite et c’est encore plus difficile d’en parler. On n’a même pas besoin d’en parler d’ailleurs, car l’amateur d’Autechre saura à quoi s’attendre et ne sera pas déçu, tandis que le néophyte se demandera certainement ce que tout cela veut bien pouvoir signifier. Elseq n’est pas la porte d’entrée la plus aisée dans le monde d’Autechre, il faut idéalement commencer par les premiers albums qui n’ont pas vieilli de toute façon et remonter les années jusqu’à maintenant pour comprendre comment Autechre s’est peu à peu affranchi de tous les concepts classiques qui composent normalement la musique électronique. Les morceaux de elseq sont souvent obscurs mais ne renient pas toutes conceptions mélodiques. Les mélodies sont bien là, plutôt évidentes sur certains morceaux proches de l’ambient ou beaucoup plus difficiles à déchiffrer lorsqu’elles se cachent derrière des nappes de sons ultra-détaillés se fracassant les uns contre les autres. Je ne peux m’empêcher d’y voir l’image d’une musique post-humaine. Si on le veut bien, on se laisse emporter par la beauté et la complexité de ces sons, pour revenir sur terre un peu plus tard, comme l’image de la megastructure de ma composition graphique ci-dessus. Un peu plus tard peu être, il me restera à écouter les 8 heures de NTS Sessions 1-4

春休み#7〜Miho no Matsubara

En dernière étape de nos petites vacances, nous nous arrêtons à Miho no Matsubara (三保の松原), un long bosquet de pins au bord de l’océan sur la péninsule de Miho, située dans l’arrondissement de Shimizu de la ville de Shizuoka. Miho no Matsubara, pour la vue panoramique qu’il donne du Mont Fuji, est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Hiroshige en a représenté une estampe ukiyo-e. Malheureusement, le ciel était très couvert au moment de notre passage et le Mont Fuji restait caché au loin. Nous avons espéré que le ciel se dégage soudainement mais notre attente fut vaine. Il n’empêche que la beauté des lieux valait le détour, notamment pour les pins centenaires aux formes biscornues, comme sculptées par les vents marins. On accède à la longue plage de pins par un chemin de 500 mètres bordé lui-même de pins et appelé Kami no Michi, la route de Dieu.

Miho no Matsubara est aussi connu pour la légende de Hagomoro qui raconte l’histoire d’un ange vêtu d’un manteau de plumes appelé hagomoro, survolant la plage de la péninsule de Miho. Éblouie par le blanc des sables de la plage, l’être céleste se dévêtit du hagomoro et l’accroche à un pin avant de se baigner. Un pêcheur découvre ce manteau de plumes et ne le rendra à l’ange qu’à la condition qu’elle exécute une danse céleste pour lui, ce qu’elle fera avant de rejoindre le ciel sous les yeux admiratifs du pêcheur. Le blanc du sable sur la plage de Miho a depuis longtemps disparu mais la légende continue d’être célébrée tous les ans en octobre le temps d’un festival racontant cette histoire sous la forme d’un théâtre nō près du fameux pin où était accroché le hagomoro. C’est avec cette histoire en tête que nous reprenons la route du retour, un peu déçu de ne pas avoir aperçu le Mont Fuji sur cette plage.

the streets #3

Nous sommes entrés dans l’ère Reiwa depuis ce matin mais je continue à montrer des photographies prises pendant l’ère précédente Heisei. Vous me pardonnerez ce mélange d’époques, car il me reste encore beaucoup de photographies de l’époque Heisei à montrer sur ce site et les photographies que j’ai pris aujourd’hui pendant les longs congés de la Golden Week sont loin d’être développées. Quand je parle de développement, il s’agit bien entendu de développement numérique. Je retouche assez peu mes photographies mais passe par une phase d’ajustement systématique de la balance des couleurs et de la saturation, du contraste, du renforcement des noirs tout essayant de récupérer certains détails effacés par une éventuelle sur-exposition. Je fais cette phase d’ajustement, que j’appelle développement numérique, d’une manière presque mécanique photo après photo. Les ajustements pour chaque photographie sont bien entendu différents mais l’habitude que j’ai gagné avec les années me permet de développer mes photographies assez rapidement. Un de mes soucis est de ne pas exagérer le trait, ne pas trop forcer sur les ajustements pour garder une photographie naturelle. C’est assez facile de tomber dans le piège de l’excès.

Je n’ai pas beaucoup de commentaires à écrire sur la série de photographies ci-dessus, à part de préciser qu’elles sont prises à des périodes différentes. Je les réunis sur ce billet pour faire jouer le contraste entre béton et verdure. Tadao Ando nous l’a appris, le béton brut s’accorde bien avec le vert des jardins, il doit même être un facteur mettant en valeur le vert. Dans ma série, j’intercale volontairement le béton d’un bâtiment au bord de la rivière de Meguro et celui d’un petit building couvert d’un rideau métallique à Aoyama, avec les plantes à l’abandon derrière une vieille baraque ou sur un terrain vague et celles beaucoup plus organisées dans des petits pots de fleurs. Il n’est pas rare de voir ce genre de petits pots de fleurs soigneusement alignés le long d’une maison ou d’une balustrade de rue de quartier résidentiel.

Ce matin, premier jour de Reiwa, je me réveille en écoutant un nouveau morceau du futur album de Sheena Ringo, 三毒史 (Sandokushi) qui sortira le 27 mai. Il s’agit du premier morceau de l’album et il s’intitule 鶏と蛇と豚 (Niwatori to Hebi to Buta – Gate of Living). Le morceau est malheureusement assez court et j’aurais préféré la voix de Sheena Ringo sans auto-tune, mais l’ambiance musicale y est très intéressante. C’est le premier morceau de l’album donc il ressemble à une introduction à ce qui va suivre. Ce matin, on achète le journal du jour pour le garder en souvenir et parce que Zoa a comme devoir d’école de résumer un article de journal qu’il aura choisit. En feuilletant le journal Asahi du premier jour de Reiwa, je découvre par surprise une annonce en pleine page du nouvel album de Sheena Ringo. La couverture de l’album, où elle se transforme en centaure ailé guitare à la main, est vraiment surprenante et, pour sûr, ne passe pas inaperçue. J’apprécie la prise de risque alors qu’elle aurait pu se contenter d’une imagerie plus traditionnelle, preuve que Sheena Ringo n’est pas une artiste comme les autres. J’espère que les nouveaux morceaux de l’album qu’on découvrira à la fin du mois provoqueront le même effet de surprise. L’affiche donne également la liste des titres et on retrouve avec plaisir les effets de symétrie de la playlist que j’avais déjà constaté sur des albums précédents, notamment de Tokyo Jihen. Par exemple, la playlist de 13 morceaux est centrée autour du septième morceau TOKYO, le seul en Romangi. Ou encore: tous les titres des morceaux font exactement la même longueur, les premier et dernier morceaux ont des compositions similaires et les deux seuls morceaux en katakana sont à des emplacements symétriques en 3ème et 11ème places. J’aime beaucoup ce genre de petits jeux de présentation, qui laisse penser que rien n’est laissé au hasard.

春休み#6〜Le château de Kakegawa

Sur le chemin du retour depuis Hamanako, nous nous arrêtons quelques heures dans la petite ville de Kakegawa pour aller voir son château. Nous n’avions pas forcément l’intention initiale d’aller voir autant de châteaux pendant ces courtes vacances, mais l’occasion s’est présentée sur le moment. La ville de Kakegawa est calme, extrêmement calme, on se demande même un instant si des gens y vivent. La ville a en fait une population d’environ 114,000 personnes, mais assez peu de personnes dans les rues à part quelques touristes et assez peu de commerces ouverts autour du château. C’est loin d’être désagréable. On peut stationner la voiture dans un parking couvert en forme de château et ensuite marcher jusqu’à l’enceinte. Le premier château de Kakegawa fut construit de 1469 à 1487 par Asahina Yasuhiro, un vassal du clan Imagawa dominant la région. Comme c’était le cas pour le château de Hamamatsu, il passera ensuite sous les mains de Tokugawa Ieyasu en 1568 suite à la défaite du clan Imagawa. Après la bataille de Odawara en 1590, il changera ensuite de mains par des jeux de pouvoir entre les seigneurs de guerre Toyotomi Hideyoshi et Tokugawa Ieyasu. Le seigneur Yamauchi Kazutoyo, vassal de Toyotomi Hideyoshi, prendra le contrôle du domaine de Kakegawa et reconstruira le château dans sa totalité. Les murs actuels datent de cette période, mais la tour principale subit des dommages sévères plus tard en décembre 1854 lors du tremblement de terre Ansei Tōkai de magnitude 8.4. Plusieurs structures furent reconstruites les années suivantes, sauf la tour du donjon qui sera reconstruite beaucoup plus récemment en 1994. Au pied du château, se trouve la demeure du Daimyō Ni-no-Maru Goten construite après le tremblement de terre de 1854 par le seigneur Ōta Sukekatsu. Tout comme le château, on peut visiter cette grande demeure. Il y avait une exposition de calligraphie dans une des premières salles de la demeure. Nous faisons en général toutes nos visites ensemble, groupé en famille, mais je ne sais plus pour quelle raison, j’avais commencé la visite de Ni-no-Maru Goten en avance. Alors que je regardais les calligraphies de kanji anciens, je suis pris à parti par l’organisateur de cette petite exposition, apparemment content que des étrangers s’intéressent à ces calligraphies. Alors qu’il me demande ma nationalité, il s’exclame sur le fait que des français étaient également venus la journée d’avant. Je l’entends dire en souriant que son exposition est populaire auprès des français, ce qui semble le ravir. Je me prête ensuite au jeu de la signature du livre d’or et de la photographie devant les kanji alors que Mari et Zoa arrivaient enfin dans la demeure. Ça faisait longtemps que je n’avais pas été pris à parti en tant qu’étranger.