haut parc

En suite directe du billet précédent, je rentre à l’intérieur du nouveau Department Store PARCO. Je n’ai malheureusement pas vu l’exposition Akira qui s’y déroulait, je pense qu’elle était déjà achevée le jour où je m’y suis rendu. Il reste par contre une affiche transparente géante collée sur une des grandes baies vitrées. En grimpant les étages du Département Store, je tombe assez vite sur la magasin Nintendo qui ne reste accessible que sur réservation. Je ne le verrais que de l’extérieur, à travers les murs de verre couverts de belles affiches des personnages de Nintendo, comme Bowser ou Link sur les photographies ci-dessus. Je préfère donc sortir sur la terrasse. Un escalier à l’extérieur nous fait monter les étages jusqu’à un parc sur une autre terrasse, nous donnant une vue nouvelle sur les toits de Shibuya.

Je ne vais au cinéma qu’une fois par an et c’est à chaque fois pour aller voir les nouveaux épisodes de Star Wars, en général au mois de décembre. Je vais donc voir The Rise of Skywalker cette année au cinéma Toho de Roppongi Hills, comme à chaque fois. C’était par contre la première fois que je voyais un film dans la salle avec le son de la technologie Atmos et c’était également la première fois que j’allais au cinéma aussi tôt, car il s’agissait de la séance de 8h30 du matin. Il y avait donc assez peu de personnes dans la grande salle. Je ne pense pas avoir un avis objectif sur la qualité du film car j’adore la série et cet épisode de conclusion de la troisième trilogie ne déçoit pas. En fait, j’aime beaucoup plus le personnage de Rey dans cet épisode 9 que dans les deux épisodes précédents, notamment les expressions de colères sur son visage qui nous rappellent que la limite est fine avec le côté obscur de la force. Ce dernier épisode ne manque pas de lieux et de scènes de confrontations emblématiques. Quelques décors comme celui de l’ancienne Death Star envahie par les flots de l’océan, ou le repère obscur et angoissant de l’empereur sur la planète Exegol, sont assez impressionnants. On n’échappera pas au ‘fan service’ obligatoire, avec les apparitions des personnages clés de la série et le retour dans certains lieux des trilogies précédentes. Comme dans un des episodes précédents où on voyait la princesse Leia revenir à la vie après avoir été éjectée d’un croiseur spatial par une explosion, il y a aussi quelques scènes bizarres dans cet épisode. On peut être surpris par exemple q’aucun casque à oxygène ne soit nécessaire dans l’espace, ou par le fait que les pouvoirs de la force se font de plus en plus puissants au fur et à mesure des épisodes. En même temps, Star Wars n’a jamais tenté le réalisme, mais la course à dos de yack (ou plutôt une bête qui y ressemble) sur les ailes d’un croiseur impérial me semblait un peu de trop. Au final, cet épisode n’apporte pas de grande nouveauté côté scénario, mais on apprécie tout de même grandement les scènes d’actions intergalactiques et les paysages grandioses, l’introduction de quelques nouveaux personnages comme la chasseresse Zorii Bliss, connaissance de Poe sur la planète Kijimi, ou un nouveau petit robot blanc et vert appelé D-O qui vient accompagné BB-8, mais également les confrontations assez ambiguës entre Kylo Ren et Rey, et les révélations sur la parenté de Rey. Je ne peux m’empêcher d’être déçu que cette saga Skywalker se termine, mais je suis certain qu’une nouvelle série basée sur ce monde verra le jour.

slowing down the rollercoaster

Que voit-on sur la série photographique ci-dessus? Une vue sur une partie de Shibuya en transformation près de la gare, des immeubles bordant la rue piétonne Center Gai, et l’ancien cinéma Rise au bout de l’étroite rue piétonne en pente Spain Zaka. Depuis cette petite rue assez empruntée par les touristes de toutes nationalités, on arrive à l’arrière du nouveau Department Store PARCO qui vient d’ouvrir ses portes récemment. PARCO a initialement ouvert à Shibuya au milieu des années 1970 avant d’être complètement détruit il y a quelques années pour reconstruction complète. C’est un établissement emblématique dans lequel j’allais régulièrement, surtout à la grande librairie (LIBRO, si ma mémoire ne me fait pas défaut) située au premier sous-sol. Il n’y a plus de librairie au sous-sol du nouveau PARCO. On y trouve par contre un disquaire DISK UNION, mais qui ne propose que des disques vinyls. Je comprends bien que le disque vinyl soit en lui-même un bel objet que l’on souhaite collectionner mais en ce qui me concerne, j’écoute très peu la musique que j’aime dans des espaces ouverts. J’écoute pratiquement exclusivement aux écouteurs et dans la voiture. J’ai parfois le sentiment de déceler à l’écoute la saturation sonore du MP3 (ou le format équivalent iTunes). J’ai parfois envie de me racheter un lecteur CD portable pour voir si je peux détecter à l’oreille une différence notable par rapport à la compression du MP3. Je me fais peut être seulement des idées. C’est sûr que je suis parfois tenté de vouloir écouter des disques au format analogique vinyl pour essayer de comprendre la différence, la chaleur du son dont on parle tant. L’espace à la maison ne le permet pas beaucoup. Le vinyl n’est de toute façon pas de ma génération car j’ai plutôt grandi avec la K7 et le Walkman puis avec le CD. Dans un prochain billet, on entrera à l’intérieur du PARCO.

Sur son blog, mahl donne quelques recommandations musicales intéressantes, notamment Teebs que j’écoute maintenant suite à son billet. De Teebs, je ne connaissais qu’un seul morceau intitulé Cook, Clean, Pay the Rent sur son deuxième album Collections 01 de 2011. Je me souviens avoir été intrigué à l’époque par la couverture de l’album qui montre une superbe peinture d’un personnage avec la tête couverte de fleurs, peinture créée par Teebs lui-même. C’était la période où j’écoutais la musique par morceaux plutôt que par albums entiers. Je me souviens avoir eu l’intention d’écouter plus de musique de Teebs car j’aimais beaucoup ce morceau, mais le temps a passé sans que j’approfondisse le sujet. J’écoute donc maintenant son dernier album Anicca, sorti en Octobre 2019. Cela fait cinq ans que Teebs, aka Mtendere Mandowa, n’a pas réalisé d’album. Dès les premières notes du premier morceau Atoms Song, on est envahi par l’ambiance qui avance doucement et qui ressemble à un rêve éveillé. Il y a quelque chose de reposant dans ces nappes floues musicales qui poussent même à l’introspection. L’album n’est pas qu’instrumental car plusieurs voix invitées participent à l’album, beaucoup de noms que je ne connais pas à part Panda Bear, de son vrai nom Noah Lennox du groupe électronique expérimental Animal Collective. Réentendre soudainement la voix de Lennox, sur le morceau Studie, me donne d’ailleurs envie de réécouter le fabuleux Merriweather Post Pavilion d’Animal Collective datant de 2006. L’association de la musique de Teebs avec ces voix invitées fonctionne extrêmement bien, car les ambiances sont différentes mais font passer une même intensité émotionnelle qui ne laisse pas indifférent, que ce soit le deuxième morceau Black Dove avec Sudan Archives, le quatrième Threads avec Anna Wise et surtout le neuvième morceau intitulé Universe avec un certain daydream Masi. Cette voix est superbe et ça doit être le morceau que je préfère sur l’album, avec l’instrumental Mirror Memory qui est malheureusement un peu trop court. Écouter ce morceau au milieu de l’album nous envahit sans qu’on se rende compte et on ne pourra en sortir qu’à la fin de l’album. Le morceau instrumental qui suit juste après Prayer i me fait tout d’un coup penser à la musique de Boards of Canada à l’époque Geogaddi car le morceau semble avoir été enregistré à contre-sens, comme s’il cachait un mystère à déchiffrer (c’est ce qu’on dit de la musique de BoC). Après avoir écouté beaucoup de musique rock ces derniers temps, cette musique est exactement le style que je voulais écouter en cette fin d’année alors que le rythme du train-train quotidien se calme un peu en approchant des fêtes.

black is beautiful さ

Je reviens assez régulièrement vers ce type de composition photographique où la beauté du noir prend le dessus sur les motifs de l’image. Pour créer ces images, je superpose plusieurs photographies de ciels nuageux jusqu’à noircir et cacher complètement la photographie d’origine. Je gomme ensuite les couches de nuages les unes après les autres, par petites touches sélectives, pour révéler certains éléments de l’image originale. Je fais en général des essais sur plusieurs photographies, pour ne retenir finalement que quelques unes que je publierais dans un billet du blog. J’aime quand des couleurs vives se dégagent du magma obscur, comme un rayon de soleil se frayant difficilement un chemin entre d’épais nuages. Je perçois dans ce type de constructions (ou plutôt de dé-construction) de l’image une notion de ‘combat’, comme dans la musique rock entre la voix humaine et la puissance écrasante de la partition musicale. L’album Double Negative du groupe Low est un très bon exemple de cette dualité que j’essaie souvent de représenter en photographies. C’est un de ces albums vers lequel je reviens régulièrement pour me rappeler la direction que doit prendre ce site.

Image extraite de la vidéo sur YouTube du morceau OTNK du groupe BiSH sur l’album FAKE METAL JACKET sorti en Janvier 2016.

Je continue doucement mais sûrement à écouter la discographie du groupe BiSH de l’agence d’idoles alternatives WACK, avec un album plus ancien intitulé FAKE METAL JACKET, sorti en Janvier 2016. Le titre est bien entendu inspiré du nom du film de Stanley Kubrick et on trouve d’ailleurs un personnage qui ressemble au sergent sadique de Full Metal Jacket dans le clip d’un des morceaux appelé MONSTERS. L’ensemble de l’album s’apparente plus au registre pop rock que leur dernier album CARROTS and STiCKS qui partait parfois dans des extrêmes punk sur quelques morceaux. Il y a beaucoup plus de consistance sur FAKE METAL JACKET, malgré les déchaînements de guitares par moments, comme sur le morceau MONSTERS, pour le citer encore. Les morceaux sont tous très accrocheurs et ne laissent pas une seconde d’ennui. Certains des morceaux de cet album sont des nouvelles versions, très similaires d’ailleurs, de leur premier opus, Brand-New Idol Shit. Rappelons, qu’avec toute la délicatesse du producteur Junnosuke Watanabe, BiSH ビッシュ tire son nom de Brand-new idol SHit (en japonais Shinsei Kuso Idol, 新生クソアイドル). Il s’agit en fait, initialement du moins, d’une réflexion sur les travers de cette industrie, sur l’attitude ‘Marche ou crève’ que doivent subir les membres de ce genre de groupes pour espérer y subsister. Je ne suis pas sûr que la réflexion de Watanabe soit très poussée ceci dit, mais la vidéo du deuxième morceau de l’album BiSH -Hoshi ga Matataku Yoru ni (BiSH -星が瞬く夜に) reflète cette idée. Ce morceau ressemble d’ailleurs à un hymne, tout comme un autre morceau Beautiful さ, qui est un des morceaux emblématiques du groupe (et qui m’inspire le titre de ce billet). Le sixième morceau OTNK, dont la vidéo assez fantaisiste voit le groupe attaqué par un crabe géant, est le premier single du groupe sorti en 2015 et fait partie des morceaux remarquables de l’album. Le rythme se tasse un peu vers la fin de l’album mais se rattrape avec l’avant dernier morceau intitulé Dear…, qui a une composition différente du reste de l’album avec des moments parlés. On ne trouvera malheureusement pas sur cet album des grands morceaux symphoniques comme My Landscape, DiSTANCE ou Stereo Future, style qui apparaîtra sur les albums et EPs qui suivent.

die for colors

Je n’ai pas beaucoup profité des feuilles jaunes et rouges de l’automne et nous entrons déjà dans le froid de l’hiver. Nous n’avons malheureusement pas beaucoup de temps pour sortir en dehors de Tokyo, dans les montagnes de Okutama par exemple, comme l’année dernière. Je me contente pour l’instant de ces quelques photographies prises un samedi matin sous la pluie. Quelques unes des photos sont prises dans l’enceinte du sanctuaire de Hikawa à Shibuya et d’autres dans les quartiers résidentiels à côté. La gigantesque pierre découpée se trouve dans un hall extérieur de l’université Kokugakuin, toujours à proximité de Hikawa. Au passage, j’aime assez les deux photographies ci-dessus de bifurcations de routes qui me sont inspirées par un tweet sur les Y-shaped junction tokyoïtes, il faudrait que j’en prenne d’autres pour en faire une série.

Je vous avais déjà parlé de Takara Araki 荒木宝 à la sortie dans son premier EP intitulé Paranoïa sur le label Tanukineiri Records. Elle vient de sortir un nouvel EP, disponible sur Bandcamp, Die for Me, mais les cinq morceaux qui composent le EP ne sont pas récents car ils datent d’il y a un an ou plus. En fait, les morceaux de ce nouvel EP semblent avoir été créé à la même époque que les morceaux de Paranoïa, d’où une certaine continuité de style, même s’ils sont dans l’ensemble moins sombres. Par rapport à Paranoïa, les morceaux de Die for Me utilisent moins d’effets et se concentrent plus sur la voix et la composition musicale que je trouve toujours très belle et évolutive tout au long des différents morceaux. Le morceau titre Die for Me reste le plus fort, mais l’ensemble des morceaux sont tous très intéressants. J’aime aussi beaucoup le deuxième morceau GODDESS. Ceci étant dit, je suis un peu dubitatif sur la pochette du EP qui reste pour moi assez énigmatique. Je suis Takara Araki sur Twitter depuis la sortie de Paranoïa. Elle y partage régulièrement ses compositions et parfois des interprétations sur les albums d’autres artistes comme le morceau Horizon sur l’album The Trip de Gimgigam sur le label Local Visions.

in the blazing sun I saw you

Quand la fin de l’année approche, j’ai tendance à mélanger les photographies que je n’ai pas encore publiées sans forcément les réunir par thème. A ce moment de l’année, mon inspiration pour écrire diminue aussi. Il faut dire que le billet précédent m’a en quelque sorte vidé de toute envie d’écrire pour quelques jours au moins. Le mois de décembre est en général moins actif niveau écriture, mais je me rends compte que l’année dernière avait quand même été assez chargée pour ce qui est du nombre de billets publiés et de la longueur des textes sur chaque billet. Il faut que je fasse quelques efforts pour terminer l’année.

Sur ce billet, les premières photographies montrent le village Shonan Kokusai Mura sur les hauteurs de Hayama, dans la préfecture de Kanagawa. Il s’agit d’un village assez récent, sans histoire ni histoires, assez isolé en haut d’une colline. Certains bâtiments ont des formes assez futuristes, comme celui tout en courbe de la première photographie. Il y a aussi des maisons individuelles regroupées dans un quartier résidentiel dont le silence nous fait croire que personne n’y vit. On croise bien des personnes dans ce village mais leur nombre vis à vis de l’étendue des lieux donne un sentiment de vide qui m’a un peu dérangé. Je n’avais pas eu cette impression la dernière fois que nous y étions allés, peut être parce que c’était en plein été, au mois de juillet. Notre dernière visite au Shonan Kokusai Mura date d’il y a 15 ans. Lorsque l’on descend de la colline, on arrive au bord de l’océan et on redécouvre la plage de Zushi. Nous allons souvent à Hayama, mais très peu à Zushi. J’aime beaucoup Hayama, je pourrais, je pense, y vivre (et j’ai d’ailleurs rencontré récemment un français qui y vivait).

La photographie suivante nous ramène vers Tokyo, à Ariake. J’ai pris cette photo après avoir fait le tour du salon de l’automobile. Sur la large allée entre Tokyo Big Sight et la gare la plus proche, avait lieu un spectacle de danse en costumes. A l’arrière, on faisait flotter de grands drapeaux tout en longueur et sur le devant une rangée de photographes saisissait tous les mouvements de la chorégraphie. Plusieurs groupes de danseuses et danseurs se produisaient les uns après les autres, toujours en synchronisation parfaite. Il s’agissait peut être d’un concours.

Les deux photographies qui suivent ont été prises à Shinagawa et Nishi-Magome. A Shinagawa, je suis toujours tenté de prendre en photo l’espace ouvert derrière la gare, notamment la barrière d’immeubles coiffées d’affiches publicitaires. A Nishi-Magome où je vais pour la première fois, je suis attiré par les blocs blancs d’un petit immeuble au bord des voies de Shinkansen. Je ne me suis pas approché pour vérifier si cet immeuble était intéressant d’un point de vue architectural. Il était au moins intéressant visuellement dans son environnement. La dernière photographie de cette série hétéroclite nous ramène dans la préfecture de Kanagawa. Ce petit chat obèse se trouve dans les jardins intérieurs du restaurant japonais Kokonotsuido. C’est un excellent restaurant dont les salles sont posées comme des petits cabanons sur le flanc d’une colline boisée. Un chemin nous fait naviguer sur cette colline et il est bordé de ce genre de petites statues.

Je n’ai pas écouté la musique de l’artiste britannique FKA Twigs (de son vrai nom Tahliah Debrett Barnett) depuis le morceau Water Me de son EP intitulé sobrement EP2, sorti en 2013. L’image digitale qui illustre son deuxième album Magdalene, sorti le 8 novembre 2019, est très étrange et m’a intrigué. Je me souviens avoir écouté l’introduction de chaque morceau sur iTunes le soir de sa sortie, avant de me coucher. J’avais tout de suite été impressionné par la force émotionnelle, dans sa voix notamment, de chacun des morceaux. Je me souviens également avoir été vérifier quelle était l’évaluation donnée par Pitchfork. Je ne suis pas toujours d’accord avec leurs avis, mais la note donnée à l’album m’a décidé à l’acheter dès le lendemain. Pourtant, je n’en ai pas parlé jusqu’à maintenant, car un peu comme l’album Anima de Thom Yorke, il faut être dans de bonnes conditions pour l’écouter, et ces bonnes conditions n’étaient pas toujours réunies ces derniers temps. Il s’avère que l’album est superbe et très prenant, même viscéral, en ce dès le premier morceau. Le sommet se situe au morceau Fallen Alien, qui a une force impressionnante. Du coup, je trouve les trois derniers morceaux qui le suivent un peu moins intéressant. Comme pour Anima, je pense que je reviendrais régulièrement vers cet album.

J’écoute aussi les quelques morceaux de Grimes qu’elle diffuse petit à petit avant la sortie complète de son album Miss Anthropocene en février 2020. Après le morceau Violence que j’aimais beaucoup et dont j’ai parlé sur un billet précédent, Grimes sort à la suite deux très beaux morceaux intitulés So heavy I fell through the earth et My name is dark. J’aime beaucoup l’ambiance sombre et éthérée des morceaux sortis jusqu’à maintenant. J’espère vraiment que le reste de l’album gardera cette unité de style et ne partira pas dans des envolées pop. L’ambiance est d’ailleurs assez différente de son album précédent Art Angels. Bien que j’avais beaucoup aimé Art Angels à l’époque, je préfère la direction qu’elle prend pour son nouvel album. En fait, l’approche artistique autodidacte de Claire Boucher (alias Grimes) est intéressante et même inspirante. Sans être forcément d’accord avec ce qu’elle dit, j’aime toujours lire ses interviews, assez excentriques et décalées parfois, comme cette interview récente de Grimes par Lana Del Rey et un podcast scientifique Sean Carroll’s Mindscape axé Intelligence Artificielle qui a généré quelques discussions et polémiques sur Twitter, comme rapporté ensuite sur Pitchfork. C’est d’ailleurs assez effrayant de voir comment certaines personnes réagissent au quart de tour sur Twitter sans sembler réfléchir aux mots employés. Il faut avoir la peau dure pour survivre aux salves de Twitter, et je comprends cette idée de Grimes de vouloir dissocier sa personnalité privée de celle publique d’artiste en utilisant un personnage avatar qui serait doté d’une intelligence artificielle (c’est le personnage que l’on voit sur les couvertures des morceaux, en images ci-dessus). L’avis scientifique du podcast ci-dessus est intéressant sur le sujet AI et corrige d’ailleurs les pensées parfois un peu trop fantaisistes de Grimes. Personnellement, j’ai été nourri par le manga Ghost in the Shell de Masamune Shirow quand j’étais plus jeune, donc ce type d’anticipation scientifique m’intéresse. Ces nouveaux morceaux de Grimes se combinent bien avec la musique de Yeule que j’écoute régulièrement depuis que j’ai découvert son album Serotonin II. Je ne peux m’empêcher de voir une influence de l’une (Grimes) sur l’autre (Yeule), pour l’ambiance sombre de leur musique et cette même idée de dissociation entre personne privée et personnalité artistique dotée d’une appellation spécifique. Yeule (de son vrai nom Nat Ćmiel) parle d’ailleurs souvent des multiples personnalités qui la caractérisent (des persona), dont celle digitale différente de sa personnalité privée. C’est un thème qui se rapproche de ce qu’évoque Grimes.

Dans un style très différent, j’écoute également deux morceaux de l’artiste japano-britannique Rina Sawayama, notamment le morceau ultra-pop (pour moi) Cherry, qui est extrêmement addictif dès la première écoute. J’aime beaucoup la densité du morceau et il y a une certaine fluidité dans sa construction qui est implacable. Je connaissais en fait cet artiste depuis un petit moment mais je m’étais toujours dit qu’il ne devait pas s’agir d’un style musical que j’apprécierais. Mais je m’autorise parfois des diversions musicales, comme par exemple, les albums Everything is Love de The Carters (Jay Z et Beyonce), Thank U, Next d’Ariana Grande ou ANTI de Rihanna. Ce sont des albums que j’ai beaucoup écouté quand ils sont sortis, sans forcément en parler ici. Ces petits détours font du bien de temps en temps. Rina Sawayama n’a pas tout à fait la voix de Rihanna, d’Ariana Grande ou de Beyonce, mais cela reste je trouve un de ses atouts. Le registre du morceau STFU! (qui veut très aimablement dire « Shut the fuck up! »), que j’ai découvert avant Cherry, est très différent, mélangeant les moments pop avec l’agressivité rock des guitares. La vidéo du morceau vaut le détour, surtout pour son introduction et sa conclusion montrant Rina lors d’un dîner avec un homme de type hipster occidental blanc se montrant assez peu respectueux d’elle et de sa culture, jusqu’à ce qu’elle finisse par péter les plombs (et c’est à ce moment que toute l’agressivité des guitares se déclenche). La situation est exagérée et même caricaturale, mais j’imagine assez bien ce genre de personnages prétendant savoir tout sur tout et coupant la parole des autres à longueur de conversation pour imposer leurs propres discours. J’ai déjà rencontré ce genre de personnages, il y a longtemps, qui après seulement quelques mois de vie à Tokyo, avait déjà tout compris sur ce pays et sa culture, et pouvait déjà donner des lessons complètes sur ce que sont les japonais.

Pour rester chez les britanniques mais dans un autre style encore, j’écoute un nouveau morceau de Burial (de son vrai nom William Bevan), intitulé Old tape sur la compilation HyperSwim des deux labels Hyperdub et Adult Swim à l’occasion des 15 ans de ce dernier. Un peu comme pour Grimes, je me précipite tout de suite pour écouter les nouveaux morceaux de Burial, car ils arrivent de manière très parsemée. Burial n’a pas sorti de nouvel album depuis son deuxième, Untrue sorti en 2007. Untrue, album culte, et notamment son deuxième morceau Archangel, ont posés les bases musicales de Burial, un style immédiatement reconnaissable qu’il continue à développer sur ses nouveaux morceaux. Burial a sorti de nombreux excellent EPs, dont j’ai régulièrement parlé ici, et il vient de les regrouper sur une compilation appelée Tunes 2011 to 2019. Je ne vais pas l’acheter car je m’étais déjà procuré tous les EPs en CDs ou en digital au moment de leur sortie ou un peu après. Je me suis quand même créé une playlist sur iTunes pour répliquer l’agencement des morceaux de la compilation. Je ne l’ai pas encore écouté car elle dure en tout 2h et 30 mins, mais j’imagine que ce nouvel agencement doit apporter une nouvelle vie à ces morceaux. Le morceau Old Tape de la compilation HyperSwim poursuit également le style Burial. On retrouve les collages de voix R&B sur des sons qui crépitent de synthétiseurs analogiques. Par rapport aux derniers EPs de Burial, ce morceau s’éloigne de l’ambient pour revenir vers une musique plus rythmée. Depuis Untrue, je trouve que Burial perfectionne son style tout en conservant le même univers sombre et pluvieux comme l’Angleterre industrielle.