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Ça fait maintenant dix ans que la station de Shibuya et ses alentours sont en phase d’importants re-développements, qui sont encore loin d’être terminés. En recherchant le premier billet intitulé Shibuya changing que j’avais écrit sur le sujet, je suis moi-même surpris que dix années se sont déjà écoulées. Le building Hikarie était un des premiers bâtiments construits dans ce vaste re-développement urbain et j’aime bien de temps en temps grimper les étages jusqu’au 11ème pour avoir une vue d’ensemble. Une annexe de la marie de Shibuya fournissant des services administratifs est en fait placée au huitième étage de ce building. Aller y chercher un certificat ou autre papier d’importance est toujours une occasion de passer quelques minutes devant les grandes baies vitrées pour admirer de loin la foule qui s’agite en cadence. Je me suis d’ailleurs amusé à prendre cette vue le soir en time-lapse avec mon iPhone et je montre cette vidéo sur YouTube (et ci-dessous). Prendre un peu plus de quinze minutes de vidéo donne environ trente secondes avec l’accéléré du time-lapse. L’accélération du time-lapse rend bien compte de cette impression de cadence chorégraphiée de la foule à Shibuya.

Je savais que Kengo Kuma et SANAA intervenaient sur certaines parties de ce développement urbain du centre de Shibuya autour de la station, mais je ne savais pas qu’Hiroshi Naito faisait partie de la supervision de l’ensemble. Il est notamment en charge du Comité de Design et membre du Comité de Coordination du ce développement. C’est Takaaki qui m’apprend cela lors d’un déjeuner dans le restaurant de ramen au yuzu Afuri à Ebisu (adresse fortement recommandée). On ne s’était pas vu depuis longtemps et on parle beaucoup d’architecture japonaise, sujet d’interêt que nous avons en commun. Il regarde de temps en temps Made in Tokyo mais se contente des photos car il ne lis pas le français. Ce souci de la langue d’écriture m’interpelle de temps en temps, et me revient en tête dans ce genre de moments. Si l’intelligence artificielle pouvait m’être utile, ça serait de pouvoir traduire de manière rapide et naturelle mes textes en français sur Made in Tokyo dans différentes langues. On n’en est pas encore là mais ça va arrivé très vite, j’en suis sûr. On parle des endroits que l’on a aimé visiter ces derniers temps et qu’on se conseille, de l’architecture de Shin Takamatsu, entre autres. C’est étonnant de voir qu’on a souvent été voir les mêmes expositions photographiques, celle de Masahisa Fukase par exemple à Yebisu Garden Place. En ce promenant dans Ebisu, nous arrivons devant la petite libraire-galerie POST books, qu’il fréquente régulièrement. Je la connaissais déjà, car la propriétaire est une amie de Mari, mais je n’étais en fait, assez bizarrement, jamais entré à l’intérieur. J’y vois un livre de photos qui m’intéresse de l’anglais Stephen Gill. Je l’avais noté dans mes bookmarks d’Instagram il y a quelques temps. Le livre s’intitule Magnificent Failure et montre des superpositions de photographies, qu’il a d’abord construit par erreur. On le feuillette avec beaucoup d’interêt avec les explications de la jeune gérante de la librairie. Elle est très renseignée et n’hésite pas à donner de son temps pour répondre à nos questions sur les livres en stock et sur la série d’œuvres montrées dans la petite galerie. C’est assez rare pour le noter. J’aurais dû acheter le livre de Stephen Gill. Mais comme souvent, il me faut un long temps de réflexion avant d’acheter des livres d’art ou de photographies, car la place manque sur nos étagères à la maison.

Le Department Store PARCO a ouvert ses portes en 1973 et fête donc cette année l’anniversaire de ses 50 ans. Cette célébration démarrait le Vendredi soir 17 Novembre au PARCO de Shibuya avec des artistes invités jouant à chaque étage du grand magasin utilisant l’espace des boutiques. Je n’avais pas eu vent de cet événement mais mahl m’en a gentiment fait part car AAAMYYY y faisait une session de DJ. La session commençant à 18h le vendredi, c’était trop tôt pour arriver à l’heure mais je réussis tout de même à m’y rendre une quinzaine de minutes avant la fin de son set. Il m’aurait été très difficile d’y aller un autre jour de la semaine que le Vendredi ou le week-end. J’étais tout de même très satisfait de pouvoir la voir en action derrière les platines, même si elle n’a pas chanté ni ne s’est adressée aux personnes venues la voir dans le magasin de lunettes qui lui servait de lieu de performance. A la sortie du bureau avec mon sac à dos, je me suis senti un peu en désaccord, au niveau du code vestimentaire, avec la plupart des autres personnes présentes dans le magasin. Il s’agit de PARCO et les personnes soignant leur style étaient nombreuses, mais passaient souvent leur temps à se déplacer sans vraiment porter attention à la musique. Ça ne m’a de toute façon pas trop préoccupé. Pendant son set, AAAMYYY a passé un morceau de Maika Loubté, ce qui était en quelque sorte un habile renvoi d’ascenseur car elle était invitée sur scène le jour d’avant pour chanter à son concert dans la salle WWW X située à quelques mètres seulement du PARCO. AAAMYYY est ensuite restée à côté dans le magasin à discuter avec des personnes qui semblaient être de son staff ou des connaissances. Je n’ai pas senti un moment propice pour aller lui dire bonjour et toute l’admiration que j’ai pour sa musique. Pendant ce temps là, le musicien électronique Miru Shinoda avait pris la relève et j’ai beaucoup aimé le début de son set. Je n’ai malheureusement pas pu resté très longtemps. On revoit un peu AAAMYYY dans les médias ces derniers temps car elle était invitée de l‘émission musicale KanJam la semaine dernière, le dimanche 12 Novembre. Espérons que ça présage l’arrivée d’un nouvel album ou EP.

Le week-end dernier, je suis passé par hasard à vélo devant le parc Kitaya de Shibuya. Depuis que j’y ai vu jouer Miyuna (みゆな) en mini-concert gratuit, ce parc me donne l’impression qu’il doit s’y passer plein de choses intéressantes. Ce qui n’est apparemment pas faux car on y montrait cette fois-ci un film en plein air, et il s’agissait d’un film dont j’ai déjà parlé sans pourtant l’avoir vu. Le film s’intitule Ice Cream Fever (アイスクリームフィーバー), réalisé par Tetsuya Chihara (千原徹也) et tiré d’un roman de Mieko Kawakami (川上未映子). Le réalisateur était assis à l’arrière sur une petite chaise de camping. Je le suis sur Instagram depuis ce film et il est facilement reconnaissable, portant toujours le même chapeau. De ce film, je ne connais en fait que le thème musical intitulé Kōrigashi (氷菓子), interprété par Kayoko Yoshizawa (吉澤嘉代子). J’aime vraiment beaucoup ce morceau que j’écoute toujours assez régulièrement. Kayoko Yoshizawa joue également dans ce film avec Riho Yoshioka (吉岡里帆), Marika Matsumoto (松本まりか), Serina Motola (モトーラ世理奈) et Utaha (詩羽) de Wednesday Campanella. Je gare rapidement mon vélo pour pouvoir regarder quelques minutes du film, debout derrière les chaises prévues pour le visionnage. On pouvait voir le film assis en achetant une place à 1000 yens. Le film était déjà commencé quand je suis arrivé et je ne pouvais pas rester très longtemps. J’ai tout de même pu prendre mon temps pour suivre quelques scènes du film d’une manière certes un peu distraite. Il faudra maintenant que je vois ce film dans de bonnes conditions.

ヒカリに

Je dépose Mari dans une rue près de Nishi-Shinjuku et profite d’une petite heure et demi pour explorer les alentours de la Mairie de Tokyo. Je connais bien sûr déjà ces endroits mais assez peu le parc central de Shinjuku (新宿中央公園). Je n’avais pas l’image d’un parc agréable pour la promenade, le sachant coincé à l’ombre des hautes tours de Nishi-Shinjuku, mais je m’étais trompé. En fait, je ne suis pas venu dans ce quartier depuis la construction de la grande tour d’habitation de verre au nom à rallonge Central Park Tower La Tour Shinjuku (セントラルパークタワー・ラ・トゥール新宿). On peut bien sûr crier d’effroi devant la multiplication des tours à Tokyo, mais celle-ci est presque transparente malgré sa taille imposante. Le verre des façades reflète les nuages et le bleu du ciel. Avec un peu d’inattention, on pourrait croire qu’elle a la faculté de se fondre dans le ciel. Les couples et les familles sont assez nombreux dans le parc qui est plus ensoleillé que je ne l’imaginais. Sur une place près de l’entrée, un marché aux puces est installé ce jour là. Je passe devant les stands posés à même le sol, au cas où il y aurait un trésor inattendu, mais je ne regarde que très distraitement étant persuadé de ne rien y trouver qui m’intéresserait. Les deux premières photographies du billet montrent la grande Marie de Tokyo conçue par Kenzo Tange. Lorsque je viens à Nishi-Shinjuku devant ces tours, je pense pratiquement à chaque fois au roman de Ryu Murakami (村上龍), Les Bébés de la consigne automatique (コインロッカー・ベイビーズ) publié en 1980, car c’est un des lieux clés de l’histoire sombre des deux demi-frêres Hashi et Riku. J’en avais parlé dans un billet de 2006 avec une photographie bleutée (à la Blade Runner diront certains) qui reste encore maintenant marquée dans mon esprit. Le temple ombragé de la sixième photographie s’appellant Jōfuji (淨風寺) est situé juste à côté de la grande tour de verre. Je ne lui trouve pas de qualités remarquables à part cette entrée recouverte d’arcs successifs. Les deux dernières photographies sont prises à Shibuya pendant une autre journée moins ensoleillée. Shibuya est en pleine reconstruction et les tours que je montre se trouvent au niveau de la nouvelle entrée Sud de la gare, derrière la tour Shibuya Stream placée au niveau de la rivière bétonnée de Shibuya. Et la dernière photo est particulière. Je recherchais depuis longtemps cet immeuble de métal gris d’apparence argentée avec une inscription SR. Je l’avais vu sur Instagram mais le lieu qui y était indiqué n’étais pas correct. Je ne le recherchais pas activement mais trouver ce petit building tout à fait par hasard au détour d’une rue m’a procuré une satisfaction certaine. Je ne me donnerais pas la peine d’expliquer pourquoi trouver un immeuble nommé SR m’intéressait tant.

Je suis enfin aller voir Kyrie no Uta (キリエのうた) de Shunji Iwai (岩井俊二) ce samedi matin à la première séance de 9h15 au cinéma Toho de Shibuya. C’est un film qu’il faut aller voir à Shibuya ou à Shinjuku, car certaines scènes du film à Tokyo se déroulent dans ces quartiers. J’étais d’ailleurs très surpris de voir que certains moments importants du film ont été tournés dans le parc de Nishi Shinjuku que je mentionne ci-dessus et que j’avais été visiter la semaine auparavant sans savoir qu’il était utilisé comme décor dans le film. Il m’arrive très souvent d’aller à un endroit puis inconsciemment me trouver à y retourner peu de temps après. Mari me fait souvent cette remarque et j’étais amusé de me rendre comprendre que ce phénomène s’appliquait également aux films, comme si la force de certains lieux me poussait à y revenir. J’allais voir Kyrie no Uta avec l’idée pré-établie que j’allais aimer le film, et je n’ai pas été déçu. J’ai en fait adorer l’atmosphère du film et les trois heures ont passé à toute vitesse. Il y a certainement quelques longueurs mais j’ai aimé partager ces moments avec les personnages du film. Le réalisateur Shinji Iwai sait être proche des émotions de ces personnages et arrive parfaitement à les montrer à l’écran. Il a une façon de filmer assez caractéristique à la fois proche des actrices et acteurs qu’il filme mais en même temps soucieux de les montrer dans leur environnement. Le film commence dans les terrains enneigés d’Hokkaido du côté de Shikaoi, et je repense tout de suite aux premières scènes dans les herbes folles d’Ashikaga dans All About Lily Chou-Chou (リリイ・シュシュのすべて). Il y a quelque chose de contemplatif dans le cinéma de Shunji Iwai qui me plait beaucoup. Je ne vais pas raconter l’histoire du film car il faut mieux en savoir peu, ce qui était mon cas, avant de voir le film. On suit l’histoire de Ruka interprétée par AiNA The End (アイナ・ジ・エンド), dont c’est le premier rôle, à différentes périodes de sa vie. Elle a perdu en grande partie sa voix suite à un choc dans son enfance, mais arrive tout de même à chanter, ce qui devient son principal moyen de communication et sa raison d’être. La vie de Ruka, qui se renomme elle-même Kyrie (une référence à Kyrie eleison), est pleine de souffrances qu’elle intériorise depuis son enfance. Le film nous explique beaucoup de choses avec de très nombreux flashbacks et flashforwards passant de la petite enfance de Ruka à Ishinomaki (石巻市) à Miyagi en 2010 puis à Osaka en 2011, puis son adolescence à Hokkaido en 2018 jusqu’à la période actuelle en 2023 à Tokyo. Le lieu et le moment de la petite enfance de Ruka nous laisse deviner la nature du choc qui lui fera perdre la voix. Elle croisera la route de plusieurs personnes, interprétés par Hokuto Matsumura (松村北斗), Suzu Hirose (広瀬すず) et Haru Kuroki (黒木華), qui l’aideront dont son parcours. Le film durant trois heures, il prend le temps de couvrir l’histoire de celui et celles qui accompagneront Kyrie mais laisse aussi volontairement beaucoup de flou. Il y a de nombreuses scènes mémorables, notamment celles réunissant AiNA et Suzu avec cette dernière changeant de couleur de cheveux à chaque scène. Je repense notamment à une scène sur les plages de Sanmu (山武) à Chiba, où AiNA se lance dans une chorégraphie improvisée et imprévisible. Je comprends que c’est ce genre de choses qui a poussé Shunji Iwai à construire son film avec elle. La caméra nous donne l’impression d’y être, tout proche des mouvements, les pieds dans le sable. Comme sur All About Lily Chou-Chou, la musique, composée par Takeshi Kobayashi (小林武史), joue un rôle primordial. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je voulais absolument voir ce film, sachant que Shunji Iwai accorde une grande importance à la musique comme personnage à part entière de ses films. La perspective d’entendre chanter AiNA m’enchantait, et elle trouve tout à fait ses marques dans le film, par son jeu et son chant. On peut entendre plusieurs fois Kyrie et son groupe de rue, interpréter Awaremi no Sanka (憐れみの讃歌) que j’appréciais déjà beaucoup avant d’avoir vu le film, mais qui prend une nouvelle dimension après visionnage. L’histoire de Ruka/Kyrie m’a saisit dès les premières scènes, et je me suis laissé surprendre à nombreuses reprises pendant le film par l’émotion qu’il m’a procuré. Je me souviens qu’AiNA avait perdu il y a quelques années sa voix et le groupe BiSH était par conséquent mis en hiatus. Je ne peux m’empêcher de penser que Shunji Iwai s’est appuyé sur cette expérience pour construire son film. La voix actuelle d’AINA qui est toujours proche de la fracture, à la fois fragile et forte, correspond à la perfection au rôle du film, ce qui me fait également penser que Shunji Iwai a construit son film pour elle. J’aime les films de Shunji Iwai car il me parle d’émotions proches de celles que j’éprouve dans les musiques que j’écoute. Il met la musique au centre de ses films plutôt que de la concevoir comme un accessoire à la narration. J’écoute maintenant quelques morceaux de la bande originale du film, sur l’album intitulé DEBUT de Kyrie, le morceau clé mentionné ci-dessus bien sûr mais également quelques autres comme Hikari ni (ヒカリに) et Genei (幻影) qui me plaisent énormément. Alors que j’écris ces lignes, des images du film me reviennent en tête avec une rémanence similaire à la période de quelques jours suivant un concert lorsque j’en écris le rapport. Les émotions sont très similaires et j’ai déjà envie de les revivre en retournant voir le film. Il me fait maintenant penser à mon histoire de Kei, du songe à la lumière. Kei pourrait très bien être AiNA The End et Hikari, Suzu Hirose. On peut toujours rêver en attendant que je termine mon histoire.

悲しみもう何も無い、永遠にESCAPE

L’instant bucolique de la dernière photographie vient l’emporter malgré lui sur toute l’intensité urbaine des autres photos du billet. En plaçant cette dernière photo apparemment inadaptée au reste du flot d’images, je repense à un ancien billet intitulé Capsules Urbaines qui reste une sorte de modèle. J’ajoute souvent des images végétales et florales pour adoucir la densité du béton, de l’acier et du bitume, mais celles-ci viennent parfois accaparer toute l’attention. Ce n’est pas la première fois que je prends en photo des fleurs cosmos en contre-plongée avec vue sur le ciel. Le béton, l’acier et le bitume nous ramènent au sol, tandis que les cosmos regardant le ciel à la recherche du soleil couchant nous poussent à rêver au loin pour une échappée vers l’infini. Cette dernière photo a été prise quelque part à Nishihara entre Yoyogi et Sasazuka. Il y a quelques années (presque 10 ans en fait), j’avais beaucoup parcouru et photographié les rues de Yoyogi-Uehara et de Nishihara, notamment pour rechercher une maison sur une rue incurvée de Kazuo Shinohara, au point de très bien connaître toutes les rues du quartier et les endroits où l’architecture est remarquable. La première photographie du billet est prise à Higashi dans l’arrondissement de Shibuya. Cette grande baleine surgissant de l’océan est dessinée par Emi Tanaji (エミタナジ) sur une des façades du bain chaud sentō Kairyōyu (改良湯). J’y suis déjà allé une fois il y a deux ou trois ans.

En repensant justement aux bains chauds du morceau Energy Furo (エナジー風呂) que j’évoquais dans mon billet précédent, je me suis mis dans l’idée de rechercher d’autres morceaux faisant intervenir le son de tabla de U-zhaan (ユザーン). J’ai rapidement constaté qu’il y avait en fait plusieurs morceaux regroupant U-zhaan, Tamaki ROY (環ROY) et Chinza DOPENESS (鎮座DOPENESS). Un album du trio est même sorti en 2021. Il s’intitule Tanoshimi (たのしみ) et j’en découvre pour l’instant deux morceaux que j’apprécie beaucoup: Bunka et Summer Jam’95 (サマージャム’95). Ce dernier est une reprise d’un autre groupe de hip-hop japonais nommé Scha Dara Parr (スチャダラパー). Il y a une certaine nonchalance et un humour qui me plaisent bien dans les morceaux de ce trio. Le tabla apporte un côté apaisé qui contraste avec le phrasé rapide des deux rappeurs, sans que celui-ci ne devienne pour autant agressif. J’aime beaucoup la vidéo de Summer Jam’95, contenant de nombreuses scènes du quotidien des musiciens: U-zhaan jouant du tabla devant sa baie vitrée ouverte sur le jardin, Chinza descendant tranquillement une rue sur son skateboard en portant ses courses à la main, les trois partant pour une journée au bord de l’océan à Hayama en dansant à l’occasion des mouvements saccadés bizarres. Ces quelques morceaux du trio sont comme une échappée dans la musique que j’écoute d’habitude et ça me plait beaucoup.

Une fois n’est pas coutume, la musique qui suit est une installation sonore d’aéroport. On peut se demander quel peut bien être l’interêt d’écouter de la musique d’aéroport (à part peut-être celle de Brian Eno), mais le fait qu’il s’agisse d’Etsuko Yakushimaru (やくしまるえつこ) au commande a tout de suite éveillé ma curiosité. Elle a conçu la bande sonore, incluant musique et voix, que les voyageurs venant de l’étranger pourront écouter à leur arrivée dans la zone internationale du Terminal 2 de l’Aéroport de Tokyo Haneda. En plus de la musique d’ambiance que je trouve d’ailleurs un brin aquatique, la voix d’Etsuko Yakushimaru donne des messages d’accueil, donne l’heure et la météo du jour à Tokyo, entre autres. Les messages évoluent bien sûr en fonction de l’heure et des conditions météo. Ils sont énoncés en japonais, suivi de l’anglais avec un petit accent charmant. Je ne sais pas à quelle fréquence ces messages sont diffusés mais j’imagine qu’elle a dû enregistrer de nombreuses versions des voix de cette bande sonore, et qu’elle ne passe pas ses journées au micro de l’aéroport. Ce qui est agréable, c’est que sa voix n’a rien de l’automatisme formel qu’on peut entendre en général dans ce genre d’endroits. Ça me donnerait presque envie de prendre exprès l’avion vers l’étranger pour revenir à Tokyo et pouvoir écouter cette bande sonore nous accueillir. Cela donne tout de suite un air beaucoup plus cool et moderne à la moquette bleue un peu passée et aux murs gris clair des couloirs de l’aéroport. Je ne suis en fait pas vraiment étonné qu’elle expérimente ce genre d’installations sonores. Je me souviens d’une installation artistique au Mori Art Museum qui se construisait autour d’un morceau intitulé I’m Humanity (わたしは人類), et qu’elle a également présenté à l’étranger.

Je n’ai pas encore vu Kyrie no Uta (キリエのうた), le nouveau film du réalisateur Shunji Iwai (岩井俊二), avec AiNA The End dans le rôle principal, mais j’écoute beaucoup le single thème qui accompagne le film. J’ai déjà évoqué Awaremi no Sanka (憐れみの讃歌) dans un billet précédent, mas je ne résiste pas à l’envie d’en parler de nouveau car une version alternative vient de sortir sur YouTube dans le format The First Take. C’est une belle surprise de voir Yukio Nagoshi (qui accompagne souvent Sheena Ringo) à la guitare sur cette version. Le compositeur du morceau, Takeshi Kobayashi (小林武史), est lui au clavier et un orchestre de cordes vient supporter l’ensemble. AiNA laisse transparaître toute sa passion dans son chant et sa gestuelle, que ça soit sur YouTube ou dans l’émission Music Station ce Vendredi 20 Octobre 2023. Je ne voulais absolument pas manquer cette émission car Hitsuji Bungaku (羊文学) y interprétait également leur dernier single, More Than Words. C’était leur premier passage à Music Station et donc une étape de plus vers une reconnaissance mainstream. J’attendais une photo de Hitsuji Bungaku avec AiNA, et on a eu le plaisir de la voir publiée sur le compte Twitter de l’émission (je la montre également ci-dessus). Le Dimanche 22 Octobre 2023, AiNA était l’invitée de Riho Yoshioka (吉岡里帆) sur son émission du soir à 18h UR Lifestyle College. Dans cette conversation radio, j’aime beaucoup la manière naturelle d’AiNA de parler sans forcément essayer à tout pris de plaire. J’y ressens une authenticité certaine et je pense que c’est ce que les gens apprécient en elle. Nous étions en voiture de retour de Tachikawa et cette émission de radio qui m’accompagnait dans les rues du grand Tokyo la nuit était un très bon moment.

Dans ma playlist du moment, j’inclus également un morceau intitulé I.W.S.P par le groupe pop-rock Illiomote (イリオモテ). Il s’agit d’un duo composé de YOCO (ヨーコ) au chant et à la guitare ainsi que MAIYA (マイヤ) à la guitare et aux chœurs. Ce nom de groupe me fait penser à celui de l’île Iriomote à Okinawa, mais elles sont en fait originaires de Tokyo. Elles se connaissent apparemment depuis la maternelle et sont basées dans le quartier d’Ikebukuro qui sert également de décor à la vidéo de I.W.S.P. Je connaissais ce groupe pour avoir entendu un single à la radio. Il s’agissait certainement de it’s gonna be you car il aurait atteint le Top 10 du classement hebdomadaire TOKIO HOT 100 de la radio J-WAVE. Je vois plusieurs EPs à leur actif et une participation passée au festival Fujirock. Tout en restant plutôt indé, je comprends tout à fait l’engouement qu’on peut avoir pour le groupe car un morceau comme I.W.S.P est particulièrement dynamique et accrocheur tout alliant un son de guitares très proche du rock alternatif américain des années 90. En écoutant ce morceau, je me dis qu’il faudrait que j’approfondisse cette découverte en écoutant les EPs, mais j’ai déjà beaucoup d’autres choses à écouter et le temps finit par me manquer.

Dans un style différent, j’aime aussi beaucoup le morceau mélangeant sons classiques de piano et électroniques intitulé a no piano de Mukishitsu Norm. Cette formation se compose de deux musiciens se faisant appeler O02 et unhate. Ces noms de code sont bien mystérieux et on en sait très peu de choses sur cette formation, d’autant plus qu’elle n’a sorti pour le moment que deux morceaux incluant celui-ci, du moins si on en croit la discographie disponible sur iTunes. Le morceau commence d’abord par une voix parlée qu’on pourrait croire extraite d’une scène de film pour évoluer ensuite d’une très belle manière avec l’introduction de nappes électroniques et de toute sorte de glitches. La vidéo renforce également cette ambiance cinématographique mais plutôt que d’avoir l’impression de voir des scènes de films, on a plutôt le sentiment de voir des scènes filmées comme des répétitions.

Et pour faire un grand écart, j’écoute également un morceau du groupe I’s intitulé Eien Shōdō (永遠衝動). Ce groupe est en fait la formation rock entourant Ano (あの). Je suis loin d’être un inconditionnel de la voix d’Ano que ça soit en musique ou lors de ses interventions télévisées assez nombreuses depuis le succès du morceau accompagnant l’anime Chainsaw Man (NDLR: ちゅ、多様性。). J’avais écouté et apprécié quelques uns de ses premiers singles solo, puis je m’étais éloigné de sa musique ces derniers temps. À vrai dire, seulement certains types de morceaux d’Ano m’intéressent, ceux qui ne misent pas totalement sur sa voix. Celui-ci me plaît bien car il atteint une intensité jusqu’au cris qui m’intéresse beaucoup. En fait, comme pour AiNA, je ne doute pas de l’authenticité d’Ano. J’étais notamment amusé de voir Hitsuji Bungaku se faire prendre en photo avec Ano lors de l’émission CDTV du lundi 23 Octobre 2023. Le rock de Eien Shōdō est assez classique et c’est vraiment la tension vocale déraillante d’Ano qui le fait décoller.

Bon, et comment ne pas évoquer le décès soudain d’Atsushi Sakurai (櫻井敦司) à l’age de 57 ans d’une hémorragie cérébrale survenue suite à un concert au Zepp de Yokohama. Je me suis pris de passion pour la musique de Buck-Tick depuis plusieurs mois et j’avais même envisagé aller les voir en concert au mois de Décembre. Je n’en suis qu’à la moitié de l’écoute de leurs albums qui m’avaient petit à petit persuadé de l’importance de la musique du groupe dans le paysage rock japonais. J’avais enregistré 5 ou 6 concerts sur la chaîne WOWOW dans l’idée de les regarder progressivement. En rentrant ce soir, j’ai écouté leur avant dernier album Abracadabra avec une certaine tristesse et je regarde maintenant en écrivant ces dernières lignes un des derniers concerts de Buck-Tick au Nippon Budokan. La photographie ci-dessus d’Atsushi Sakurai avec Sheena Ringo est extraite du passage à l’émission Music Station le 29 Mai 2019.

something in the air right above the palm tree

Idéalement placée en plein centre de Daikanyama près du palmier synthétique jaune et vert couvert de panneaux solaires, la nouvelle résidence conçue par Kengo Kuma semble être proche d’être terminée. Son design, utilisant le bois comme très souvent chez l’architecte, est élégant, du moins beaucoup plus que l’ancien centre commercial que cette résidence vient remplacer. Le palmier reste lui immuable et est devenu emblématique du quartier. En regardant de loin, on pourrait vaguement penser à un palmier au bord de mer dans une illustration de Hiroshi Nagai comme celle intitulée Shade of Palm Grove. Hiroshi Nagai est notamment connu pour la couverture de l’album City Pop A Long Vacation d’Eiichi Ohtaki, sorti en 1981. Je n’ai jamais été attiré par le style City Pop des années 1980 à part quelques morceaux découverts un peu par hasard sur Internet. Dans les rues de Daikanyama, je retrouve des autocollants de la fille au regard déterminé dessinée par Fuki Committee. Il est très actif à Shibuya et dans ses quartiers limitrophes. J’aurais voulu aller voir son exposition récente dans la petite galerie Night Out, mais le temps m’a malheureusement manqué. Je ne me souviens plus quel était l’objectif de cette marche. Il n’y avait sans doute pas d’objectif précis, à part celui de marcher en écoutant la musique que j’aime. J’ai à priori fait une boucle qui m’a ramené vers le centre de Shibuya, en passant devant Bunkamura. J’y prends en photo les affiches alignées car je reconnais l’ancien et photogénique Hôtel Belvédère construit en 1882 en Suisse qui doit apparemment apparaître dans un film de Wes Anderson. En fait non, il s’agit d’une exposition de photographies intitulée Accidentally Wes Anderson qui aura lieu du 25 Novembre au 28 Décembre 2023 dans le hall d’exposition du building Hikarie à Shibuya. Cette exposition semble très intéressante. À côté de cette affiche, il s’agit d’Élisabeth d’Autriche, surnommée Sissi, dans une pause singulière pour l’époque. Le film intitulé Corsage retrace la vie de Sissi pendant l’année 1878. Il est très peu probable que j’aille le voir, ceci étant dit, car l’affiche ne nous y invite pas vraiment.

Je parlais un peu plus haut de la galerie Night Out, que je voulais visiter depuis un bon petit moment sans pourtant trouver une bonne occasion. Les images des peintures de l’artiste Shigeki Matsuyama (松山しげき) pour son exposition Portrait of dazzle vues sur le compte Instagram de la galerie m’attirent tout de suite, et je me décide à aller les voir ce lundi, jour férié mais pluvieux. Je n’aime pas beaucoup marcher longtemps sous la pluie mais je ne voulais pas manquer de voir de près ces portraits tout à fait fascinants. La galerie se trouve dans une petite rue à quelques dizaines de mètres du musée Watarium. Elle est située au troisième étage d’un immeuble étroit et il faut sonner à l’interphone pour y entrer. La galerie se compose d’une seule grande salle rectangulaire composée de murs blancs et donnant sur une longue baie vitrée. L’espace est très lumineux et met d’autant plus en valeur les œuvres de Matsuyama posées sur chacun des murs. Sur ces portraits, le contraste entre les yeux très détaillés et expressifs et les formes des visages et des corps très simples et stylisées me fascinent. Il y a un mélange d’universalité et d’unicité dans ces représentations abstraites. C’est vraiment brillant car ces formes simples nous semblent familières sans forcément avoir une idée précise en tête de qui il pourrait bien s’agir. La plupart de ses figures sont féminines à part une seule posée à côté du comptoir de la galerie. Cette figure là semble masculine mais est en même temps androgyne. Je pense très vaguement à Grace Jones. En me voyant prendre de nombreuses photographies et m’attarder longtemps sur chaque œuvre, la personne tenant la galerie (je ne sais si elle est gérante ou seulement employée de la galerie) me demande si je connais personnellement l’artiste, ce qui n’est pas le cas. Étant seul dans la galerie, la conversation s’engage car cette personne est très sympathique. On parle des œuvres que l’on admire dans la galerie et j’en viens à expliquer les raisons pour lesquelles je connais cette galerie. Je l’avais découverte en faisant des recherches sur Internet après avoir pris en photo les autocollants de Fuki Committee comme celui montré ci-dessus. Elle me dit qu’elle en fera part à l’artiste Fuki-san qui sera certainement content d’apprendre le cheminement de cette découverte. Au passage, elle me donne des autocollants que je vais garder précieusement. J’ai très souvent pensé créer mes propres autocollants à partir de mes formes urbano-végétales pour ensuite aller les coller dans les rues de Tokyo, mais ça ne doit pas être autorisé. Je me retiens donc fortement.

Il y a un plusieurs semaines, j’ai entendu à la radio un nouveau morceau de Kirinji (キリンジ) intitulé Honomekashi (ほのめかし) qui m’a tout de suite attiré. Kirinji est depuis l’année 2020 le projet solo de Takaki Horigome (堀込高樹) et il était invité dans cette émission de radio (J-Wave, je pense) pour présenter son nouvel album Steppin’ Out, sorti le 6 Septembre 2023. Ce morceau Honomekashi est une collaboration avec un duo rock coréen appelé SE SO NEON (새소년). Ce n’est pas la première fois que j’entends Kirinji en duo avec un ou une artiste coréen. Le premier morceau que j’ai écouté de Kirinji était d’ailleurs le sublime Killer Tune Kills Me avec la coréenne YonYon. J’aime beaucoup Honomekashi car on s’y sent bien en l’écoutant, flottant loin au dessus de tout ce qui va mal dans ce monde. Avec Kirinji, j’aime quelques morceaux pris indépendamment mais je ne me suis jamais lancé dans l’écoute d’un album entier. Pourquoi ne pas essayer avec son dernier Steppin’ Out? Ça commence très bien avec le premier long morceau Runner’s High, que j’aime vraiment beaucoup, et ce dès les toutes premières notes électroniques cosmiques. J’aime aussi beaucoup la manière dont Takaki Horigome chante dans la deuxième partie du morceau tout en tension maîtrisée. Il y a clairement une ambiance City Pop, à laquelle je ne suis pas vraiment habitué. On qualifie de City Pop, toute la musique pop japonaise qu’on a envie d’écouter la nuit en ville en voiture en faisant durer le trajet pour pouvoir écouter l’album en entier (et optionellement le chanter en même temps). Enfin, c’est la définition que je donne et ça correspond parfaitement à ce morceau là de Kirinji. Le deuxième de l’album, nestling, est moins fort mais continue assez bien dans cette lignée City Pop. Kirinji a un sens très affuté de la mélodie. Malheureusement, les trois et quatrième morceaux me plaisent beaucoup moins et je décroche jusqu’au cinquième Honomekashi, qui m’interpelle à chaque fois. Le sixième morceau intitulé seven/four me plaît aussi énormément car il s’agit d’un instrumental jazz très atmosphérique. La suite m’intéresse de nouveau beaucoup moins. Au total, sur les neuf morceaux de l’album, j’en apprécie réellement que quatre. Je suis un peu déçu de ne pas pouvoir apprécier l’album en entier, d’autant plus que la couverture dessinée par l’illustrateur Naofumi Osawa “Miche” (みっちぇ) du studio Bōrei Kōbō (亡霊工房) est superbe. Ça sera peut être pour son prochain album. En entendant, ces quatre morceaux sélectionnés tournent très régulièrement dans ma playlist et je ne m’en lasse pas.

une échappée sous la lune

J’essaie quelques évolutions du titre du blog, qui était dernièrement écrit en japonais, en katakana pour être précis. Je tente d’y mélanger des blocs d’architecture glanés par-ci par-là dans Tokyo. Le titre restera en principe en noir et blanc, mais celui montré actuellement n’est à priori pas définitif. Lorsque je me lance à créer ce genre de titre, j’ai toujours en tête l’image de ma page À propos que j’avais créé il y a plusieurs années, mélangeant des mots (« Tokyo » en l’occurrence) avec des morceaux d’immeubles et de végétation. Comme une conséquence indirecte de cette recherche graphique, les photographies et compositions de ce billet en deviennent plus abstraites. J’aspire à créer ou à sélectionner un peu plus souvent ce types de photographies plus imagées, mais je me laisse parfois rattraper par l’encombrante réalité.

Je me suis inscris pour une période d’essai d’un mois à la chaine BS WOWOW, afin de pouvoir voir le concert de Sheena Ringo Aitsura to Shiru Shogyōmujō (椎名林檎と彼奴等と知る諸行無常) que j’avais été voir le 9 Mai 2023 au Tokyo International Forum. Le concert filmé et diffusé sur WOWOW le Samedi 9 Septembre 2023 était la dernière représentation, celle du 10 Mai 2023. C’était un vrai plaisir de voir en images avec plans serrés des scènes que je n’avais pu voir que de loin depuis ma place lors du concert. Je n’avais par exemple pas pu profiter de tous les détails de l’étrange chapeau qu’elle portait pendant la dernière partie du concert avant les rappels. Je n’avais pas non plus distingué quel était le sake qu’elle tendait à bout de bras et que je montre ci-dessus. L’excellente surprise était de constater qu’il s’agissait d’un sake Kokuryu (黒滝) originaire de la préfecture de Fukui, sake que j’apprécie particulièrement car on en a acheté plusieurs fois pour le nouvel an, quand on arrive à en trouver. Enfin, il ne s’agissait pas de celui qu’elle montre sur scène, qui est une édition limitée appelée Kokuryu Ishidaya Junmai Daiginjo, forcément très chère. Ce sake se vend à 13,200 Yens la bouteille. On apprend d’ailleurs que ce concert sortira en Blu-ray et DVD le 22 Novembre 2023, en version complète avec bonus, car la version de WOWOW ne contenait pas les rappels.

Je me rends compte que la chaîne WOWOW montre beaucoup de musique, en particulier des concerts très récents. J’en ai profité pour regarder celui de Yoasobi à Saitama Super Arena (さいたまスーパーアリーナ) qui avait lieu le 3 Juin 2023. Ce concert s’appelait Denkōsekka (YOASOBI ARENA TOUR 2023 “電光石火”). Je suis très loin de connaître tous les morceaux du groupe, mais au moins leur dernier succès récent intitulé Idol (アイドル) qui est assez fantastique d’énergie sur scène. Le concert se déroulant dans une salle omnisports de type Arena, la foule présente était impressionnante même en vidéo sur grand écran. Saitama Super Arena a une capacité maximale de 37,000 personnes. Il s’agit d’une des plus grandes salles du monde en cinquième position derrière la Paris La Défense Arena de 40,000 places et le Tokyo Dôme de 55,000 places. La scène rempli de lumières est tellement grande qu’on doit avoir un peu de mal à voir Ikura car elle n’est pas très grande, sauf quand elle monte sur une petite estrade. Ceci étant dit, elle arrive très bien à attraper la foule, et c’est intéressant à regarder même si tous les morceaux ne me plaisent pas forcément. Le spectacle est conçu comme un show qui va plus loin que la musique en elle-même. En concert, j’aurais plutôt tendance à me contenter seulement de la musique même si les petits passages que les artistes adressent à la foule concrétisent en quelque sorte leur réalité physique.

Je continue à faire le curieux sur WOWOW en regardant et en enregistrant le concert d’un groupe que je connais encore moins, BABYMETAL. Je n’ai jamais eu envie d’écouter leur musique car le nom du groupe m’a toujours paru ridicule et certains morceaux comme Gimme Chocolate me paraissait exagérer à l’extrême le contraste entre le côté kawaii des trois chanteuses et le dureté du métal le plus basique. Je me suis tout de même laisser tenter avec ce concert intitulé BABYMETAL RETURNS - THE OTHER ONE -, car l’imagerie est assez fascinante et la curiosité a été plus forte que ma volonté. Ce concert est très récent car il s’agit d’une captation des 28 et 29 Janvier 2023. J’ai été en fait très surpris par la qualité des morceaux que j’ai pu écouter lors de ce concert. Je me suis même surpris à noter quelques noms de morceaux, ceux qui m’intéressaient, pour ensuite les écouter en version studio sur YouTube. Je me rends compte que la grande majorité des morceaux dont j’ai apprécié l’écoute étaient tirés du dernier album intitulé The Other One, sorti le 24 Mars 2023. Les morceaux de cet album ont complètement perdu le côté kawaii des premiers albums, ce qui n’est pas vraiment étonnant car les deux chanteuses de BABYMETAL, Suzuka Nakamoto (au nom de scène Su-metal) et Moa Kikuchi (aussi appelée Moametal), ont respectivement 25 et 24 ans. Elles ont commencé le groupe il y a dix ans et donc à l’age de 14-15 ans. Il semble tout à fait normal que la musique et le chant du groupe aient gagné en maturité. C’est à mon avis tout à fait bienvenu. J’écoute maintenant le nouvel album en entier et le morceau Divine Attack (神撃), qui est vraiment excellent, est déjà mon préféré. Le chant de Su-metal est très affirmé et ne perd pas en force face au rythme forcené de la batterie et les guitares métal envahissantes. Les musiciens métalleux ne plaisantent en général pas avec la qualité de leur son. Le néophyte devrait écouter ce morceau pour se donner une idée. J’aime aussi beaucoup d’autres morceaux comme Light and Darkness, Metal Kingdom et le plus calme, entre guillemets, The Legend, qui conclut l’album. Ce dernier morceau est particulièrement intéressant car il dévie des sonorités typiques du métal en introduisant du saxophone. Peut-être s’agit d’une prochaine orientation pour le groupe d’apporter des instruments nouveaux. La particularité du groupe est de mélanger les sons électroniques aux guitares. Ce rythme électronique est particulièrement marqué sur un morceau comme Metalizm, qui est également un des très bons morceaux de l’album, tout en étant le plus déstructuré. Je lisais dans les revues de cet album qu’il avait perdu le côté fun que l’on pouvait entendre sur les premiers albums. Le concert que je regarde sur WOWOW garde quelques morceaux ayant ce côté ludique. Headbanger!! est un bon exemple de cela. Depuis ce concert, le groupe est repassé à trois chanteuses avec l’arrivée récente de Momoko Okazaki. Ce concert est visuellement impressionnant et très scenarisé avec des interludes entre les morceaux. Là encore, la salle de Makuhari Messe à Chiba est gigantesque, mais les trois filles de BABYMETAL savent bien maîtriser la foule. C’est particulièrement intéressant de voir Su-metal contrôler les mouvements de cette foule de fans, avec un air sérieux ou pince-sans-rire. C’est parfois tout à fait fascinant, et même un peu inquiétant quand une partie du public se met à courir en cercle quasiment sous les ordres des trois filles, ou peut-être est ce plutôt au son des guitares, je ne saurais pas vraiment dire. J’avais déjà remarqué cela il y a quelques temps sur la vidéo live du morceau plus ancien Road of Resistance. Il était également joué pendant ce concert à Makuhari Messe. Je trouve quand même ce morceau un peu trop teinté de sonorités musicales d’idoles à mon goût. On ne retrouve pas ce côté idole kawaii dans le nouvel album, ce qui me plait particulièrement. Mon seul regret est que le groupe n’est pas changé de nom avec l’arrivée de la troisième chanteuse et le revirement stylistique des morceaux.

J’ai déjà écouté une dizaine d’albums de Buck-Tick mais je suis loin d’avoir fait le tour de leur discographie extensive s’étendant sur 35 ans. Le groupe fête donc ses 35 années de carrière et WOWOW diffuse pour l’occasion plusieurs concerts. J’imagine que le néophyte débarquant par hasard sur une retransmission d’un concert de Buck-Tick doit être particulièrement décontenancé. Le regard sombre et perçant du chanteur au style gothique Atsushi Sakurai (櫻井敦司) a de quoi soit effrayer, soit fasciner. Je suis personnellement dans la deuxième catégorie. Sakurai a un charisme et une présence sur scène qui accaparent toute l’attention, mais j’aime aussi la flamboyance certaine du guitariste et compositeur Hisashi Imai (今井 寿). Les membres du groupe approchent maintenant de la soixantaine mais les années n’ont pas l’air d’altérer leur musique. Ce qui m’impressionne c’est que la musique du groupe semble complètement hermétique aux goûts du jour. Buck-Tick poursuit son chemin mais mélange aussi beaucoup les styles, ce qui peut être au premier abord assez déconcertant. Les qualités musicales du groupe et la voix très marquante de Sakurai peuvent en fait tout intégrer, du rock gothique le plus sombre aux sons électroniques les plus accentués en passant soudainement par des moments beaucoup plus pop et accrocheurs avec toujours des restes de Visual-Kei, comme en témoigne la crête du batteur Toll Yagami (ヤガミ・トール). Il y a en fait assez peu de demi-mesure car chaque morceau est mené avec une tension qui est loin de laisser indifférent. Je regarde donc le concert intitulé SHOW AFTER DARK (魅世物小屋が暮れてから) avec beaucoup de passion. Il s’agit d’une captation au Nihon Budokan (日本武道館) le 29 Décembre 2021, quelques mois après la sortie de l’album Abracadabra. Buck-Tick joue bien entendu plusieurs morceaux de cet album comme MOONLIGHT ESCAPE, Villain, Kemonotachi no Yoru (獣たちの夜), Bōkyaku (忘却), Eureka (ユリイカ), entre autres. Je ne connaissais pas l’album Abracadabra et je découvre ces très bons morceaux en regardant le concert. Le groupe reprend aussi certains morceaux plus anciens et particulièrement marquants comme Muma (夢魔 -The Nightmare), Rakuen (楽園) ou BABEL. Ce sont des morceaux envoûtants, et je dirais même hantés, qui nous font redécouvrir tout le génie musical du groupe. Je n’exagère pas ce terme et je pense même que le talent du groupe n’est pas assez reconnu malgré leur longévité hors-norme. Buck-Tick est bien passé sur Music Station un peu plus tôt cette année pour la sortie de leur dernier single et album, mais on ne les sentait pas du tout à leur place sur un plateau de télévision grand public. Le groupe doit s’accommoder de l’ombre et de la fidélité de leur public. J’arrive tout à fait à comprendre que ce public de fans viennent nombreux aux concerts de Buck-Tick. J’aimerais aussi assister à un de leur concert, mais ça semble bien difficile sans faire partie du fan club. En attendant, je regarde les uns à la suite des autres les quelques concerts diffusés sur WOWOW.