j’apprends tokyo (jour après jour)

Je pense avoir déjà montré ici ces tuyaux d’aération en méandres sur la deuxième photographie, comme je pense avoir déjà pris une photographie similaire à la quatrième, attendant qu’un passant marche derrière la sculpture noire de Kan Yasuda (安田侃) à Tokyo Mid-Town. Je n’avais par contre jamais assisté à un festival du Setsubun dans un temple. Nous célébrons bien sûr Setsubun tous les ans à la maison en prenant un malin plaisir à lancer des haricots secs (mame) un peu partout à l’intérieur et à l’extérieur de l’appartement pour repousser les démons et inviter la chance à rester. Mon fils étant maintenant un peu trop grand, je ne porte bien sûr plus le masque de démon rouge, qui m’allait pourtant si bien. Je suis par contre toujours de corvée de ramassage des mame après la fin des hostilités. Certains haricots roulent et viennent se cacher dans les recoins de l’appartement. On ne les retrouve parfois que plusieurs mois plus tard. Comme Setsubun tombait cette année un Samedi, je me suis décidé, certes un peu tard, à aller voir les festivités qui se déroulaient au grand temple Ikegami Honmonji (池上本門寺). Le problème est que le site web du temple ne donnait pas l’heure exacte du début des festivités, et je suis malheureusement arrivé juste quand elles se terminaient. Dans ce genre d’évènements, des personnalités du monde du sport ou des médias sont parfois invitées pour lancer des sachets de ces fameux haricots vers la foule venue en nombre. Des installations étaient même mises en place devant le temple. Mais à mon arrivée vers 15h après environ 45 mins de train et de marche, la foule commençait déjà à partir et j’ai bien manqué l’événement. Ce n’était pas le premier acte manqué ces derniers jours. Je retiendrais la leçon pour l’année prochaine. Ça ne m’a pourtant pas empêché de faire un tour du temple et de son grand cimetière vallonné. Je remarque qu’une nouvelle tour est en construction et semble même être bientôt terminée.

Dès le Vendredi précédent, la météo avait annoncé de la neige pour ce lundi après-midi. Je n’y croyais d’abord pas beaucoup mais elle est finalement tombée sans pourtant bloquer tous les transports, comme c’était le cas il y a plusieurs années. J’aurais voulu terminer tôt pour profiter un peu de la neige, mais cette journée s’est déroulée comme toutes les autres et je suis rentrer tard. Les photographies sont prises donc le soir vers 21h dans les quartiers autour de la rue Kotto à Minami Aoyama. L’arbre enneigé qui ressemble à un bonsaï sur la deuxième photo est placé devant l’élégant bâtiment IDÉAL TOKYO conçu par Hiroshi Nakamura & NAP (中村拓志 &NAP建築設計事務所). Je continue avec l’architecture enneigée sur la troisième photo montrant un petit bâtiment de béton dessiné par Tadao Ando (安藤忠雄). Une bonne partie de cette neige a malheureusement disparu dans le courant de la journée suivante. Comme tout le monde je pense, j’ai toujours un sentiment partagé en voyant la neige tombée, entre une certaine forme de joie liée à des souvenirs d’enfance et une certaine appréhension en pensant aux éventuels problèmes de transport que cette neige va générer. Le premier sentiment l’emporte toujours. Je ne suis pas le seul à avoir un regard émerveillé et à prendre quelques photos au passage. Il faut bien sûr marcher doucement pour éviter de glisser et se retrouver à terre. L’album Sonatine de D.A.N. que j’évoquais dans mon billet précédent m’accompagne dans les rues enneigées, mais j’aurais également pu réécouter le très bel album Illuminate de Smany (えすめにー). Elle le conseille d’ailleurs elle-même sur Twitter lors de certains jours de pluie, ou de neige cette fois-ci (私のアルバムも雪に合うよ) et ça m’amuse toujours.

La guitariste et chanteuse Minori Nagashima (長嶋水徳), dont j’ai déjà parlé une ou deux fois sur ce blog, commente assez régulièrement sur son compte Instagram ou Twitter à propos d’Haru Nemuri (春ねむり). Je pensais qu’elle commentait car elle appréciait tout simplement sa musique, mais je me suis rendu compte que ça allait plus loin qu’une simple appréciation car Minori Nagashima joue en fait de la guitare électrique dans le groupe rock d’Haru Nemuri, du moins sur son dernier EP INSAINT sorti en Septembre 2023. On la voit en effet jouer de la guitare sur le très intéressant documentaire qu’Haru Nemuri consacre à cet EP, Recording Documentary – INSAINT. J’avais écouté sans trop de conviction cet EP au moment de sa sortie, sans vraiment y accrocher. Autant son premier album Haru to Shura (春と修羅) et ses mini-albums précédents Sayonara, Youthphobia (さよなら、ユースフォビア) et Atom Heart Mother (アトム・ハート・マザー), sans oublier le EP Kick in the World, avaient été pour moi des révélations, autant j’avais eu un avis mitigé sur la direction moins rock qu’elle prit ensuite avec le EP Lovetheism et surtout l’album Shunka Ryougen (春火燎原). Un morceau comme le single Fanfarre sur Lovetheism était particulièrement intéressant, mais j’avais trouvé les morceaux suivants de sa discographie beaucoup moins aboutis musicalement. INSAINT revient au contraire sur un terrain rock qui me plait beaucoup plus, en particulier le morceau Sanctuary wo Tobidashite (サンクチュアリを飛び出して) qui me rappelle les meilleurs moments de sa discographie. Je pense que j’aime ce morceau en particulier car elle ne force pas exagérément le trait. Le problème que j’ai avec Haru Nemuri est qu’elle est devenue une professionnelle de l’indignation sur les réseaux sociaux, et qu’elle le traduit dans sa musique d’une manière parfois exagérée. Le deuxième morceau I refuse (わたしは拒絶する) est par exemple musicalement intéressant et son approche vocale est puissante, mais je ne comprends pas le besoin de crier d’une voix sortie du death metal. Le morceau suivant Seizon wa teikō (生存は抵抗) a une approche similaire et sa voix rauque est difficile à entendre, ce qui est d’autant plus dommage que le contraste avec les chœurs est pourtant bien vu. Les paroles du premier morceau Destruction Sisters (ディストラクション・シスターズ) se veulent volontairement fortes et choquantes, mais je trouve qu’elle force le trait jusqu’à une certaine forme d’excès qui me dérange à l’écoute. J’en ai pourtant pas fini avec ce mini-album EP car j’y trouve tout de même des moments de brillance.

Je ne pensais pas revenir aussi vite vers un autre morceau du groupe Haze dont je parlais récemment. J’écoute maintenant celui intitulé Shushutaito (シュシュタイト) qui est tout de suite très accrocheur. En fait, j’aime beaucoup la voix de Katy qui n’est pas totalement fluide, mais qui ne donne pas pourtant le sentiment de se forcer. Sa manière d’appuyer sur les mots du refrain vers le fin du morceau les font sonner comme des coups de poing (sans pourtant avoir besoin de crier). Il y a comme sur le morceau NOISE une certaine qualité brute très riche en guitare avec tout de même une approche restant assez pop et immédiate. Le morceau est extrêmement efficace, ce qui m’a étonné car j’étais assez loin de m’en douter. Je ne connaissais pas le terme utilisé pour le titre Shushutaito, qui signifierait être coincé dans de vieilles habitudes et traditions, d’être inflexible, ce qui est traduit dans les paroles du morceau. Il me reste maintenant à partir à la découverte d’autres morceaux du groupe.

Il y a quelques semaines, j’ai été particulièrement surpris d’entendre le single racy de a子 jouer en fond sonore dans un supermarché de Nishi-Tokyo, ce qui m’a amené à penser qu’elle a passé une nouvelle étape vers une reconnaissance populaire. Ou alors est ce cette chaîne de supermarché, dont j’ai oublié malheureusement le nom, qui est particulièrement pointue dans sa sélection musicale. Dans tous les cas, a子 continue son parcours musical en sortant très régulièrement de nouveaux singles toujours aussi enthousiasmants. Ce nouveau morceau intitulé Planet (惑星) n’est peut-être pas aussi immédiat que racy, mais n’en est pas moins bon. Elle a clairement développé un style, une identité musicale qui lui est propre, grâce notamment à sa voix légèrement voilée et à l’approche musicale que je qualifierais d’indie-pop-rock. La vidéo réalisée par Shun Takeda accompagnant ce morceau est également très belle, notamment ces images d’une éclosion cybernétique très étrange. Shun Takeda avait déjà réalisé la vidéo du morceau trank de a子.

Voir NOW danser d’une manière très cool et naturelle sur un extrait d’Unknown Sense, le dernier single du groupe ExWHYZ m’a rappelé vers la musique de ce groupe petite sœur de feu-BiSH. L’électronique farouche composée par Josef Melin et Cecilia Kallin n’est certes pas le style que j’affectionne le plus, mais le morceau n’en reste pas moins terriblement efficace. ExWHYZ continue à faire appel à des musiciens et producteurs extérieurs pour composer les nouveaux morceaux du groupe. Shinichi Osawa reprend du service en composant et produisant l’excellent single Our Song, qui rentre assez facilement dans la liste des meilleurs titres du groupe. Ces deux morceaux seront présents sur le futur nouvel album du groupe intitulé Dress to Kill qui sortira le 20 Mars 2024. En attendant, j’écoute quelques autres morceaux que j’avais manqué, notamment 6WHYZ sorti sur le EP HOW HIGH?, où chacune des six membres du groupe propose son petit passage hip-hop. L’ensemble est particulièrement réussi et je pense que les arrangements musicaux et la production par Miru Shinoda et Kento Yamada (yahyel) contribue à la fluidité impeccable du morceau. Je n’avais pas écouté en entier le premier album du groupe (le premier après la première période sous le nom EMPiRE), mais j’y reviens également en constatant que certains morceaux, notamment les deux premiers, xYZ et D.Y.D (pour Dance Your Dance, qui est le motto de l’album), ont été composés par Miru Shinoda. J’avais vu ce musicien pendant quelques minutes au Department Store PARCO lorsque j’avais été voir AAAMYYY. Ils jouaient tous les deux devant les platines en alternance et j’avais été particulièrement impressionné par le son aux allures expérimentales que produisait Miru Shinoda. C’est également le cas sur le morceau D.Y.D, en particulier le passage final faisant sonner les sons electro comme une pale d’avion en décélération incontrôlée. L’agence Wack de Junnosuke Watanabe (渡辺淳之介) est particulièrement brillante pour mettre en œuvre ce genre de collaboration, et ça fait plaisir de voir ExWHYZ en tirer pleinement partie.

言葉以上・現実以上

Le retour au rythme tokyoïte sur Made in Tokyo n’est pas aussi facile que je l’imaginais. Le sentiment de fatigue post-Covid m’a poursuivi plusieurs semaines et j’ai par conséquent eu un manque de volonté et d’énergie pour me lancer dans l’écriture de longs billets comme j‘ai pu en écrire jusqu’à présent avant nos vacances en France ou comme je le fais maintenant. Et pourtant, le niveau de fréquentation particulièrement haut du blog pendant le mois d’Août aurait dû me motiver un peu plus. La chaleur estivale infernale avec ces 35 degrés tous les jours de la semaine est peut propice aux promenades photographiques, mais j’ai tout de même marcher près du gymnase de Yoyogi, où des danses Yosakoi (よさこい) ont attiré mon attention. Le Yosakoi est une interprétation moderne de la danse traditionnelle Awa-Odori que l’on peut souvent voir dans les festivals d’été. Plusieurs groupes habillés de tenues différentes dansaient les uns après les autres, d’une manière très dynamique caractéristique du genre, le long de la large allée piétonne séparant le Hall de la NHK du gymnase de Yoyogi. La musique qui accompagne les danses a un côté un peu kitsch mais l’énergie communicative des danseurs et danseuses faisaient plaisir à voir. Ils m’ont en quelque sorte transmis un peu de leur énergie. Bien que je n’ai pas publié de billets pendant ces vacances françaises, ça ne m’a pas empêché de réfléchir à la direction que je devrais donner à ce blog. Je me suis dit que ça n’avait pas beaucoup de sens de montrer des photos de choses et d’endroits que j’ai déjà maintes fois montré et qu’il faudrait que j’y apporte une touche un peu plus personnelle et spécifique à mon style visuel. Il faudrait aussi que je travaille un peu plus la sensibilité des textes qui accompagnent mes photographies pour éviter le descriptif.

Mais cette sensibilité est de toute façon grandement et principalement influencée par la musique que j’écoute. Je me remets lentement mais sûrement à écouter de nouvelles très belles choses musicalement. Quand je me perds dans la direction de ce que je veux écouter, je reviens souvent vers LUNA SEA et cette fois-ci, j’écoute beaucoup l’album Lunacy de 2000. Je l’avais acheté en CD à l’époque et ce n’est pas l’album vers lequel je reviens le plus souvent, ce qui est une erreur car le morceau Gravity est un de leurs meilleurs. J’avais aussi oublié que certains morceaux étaient des collaborations avec DJ KRUSH, comme celui intitulé KISS. Quelques morceaux au milieu de l’album sont particulièrement inspirés, notamment le sublime Virgin Mary. C’est un long morceau de plus de 9 minutes placé exactement au centre de l’album. Ce morceau me rappelle que Ryuchi Kawamura utilise régulièrement des références religieuses, en particulier chrétiennes, dans les paroles de ses morceaux. Il m’est d’ailleurs arrivé plusieurs fois d’être assis à côté de sa femme et de son fils à l’église avec mon grand lorsqu’ils étaient petits dans la même école maternelle. Ryuchi Kawamura ne venait bien évidemment pas. Je n’ai malheureusement jamais pu dire à sa femme toute l’admiration que j’avais pour lui. LUNA SEA est le seul groupe qui fait le lien entre la musique japonaise que j’écoutais en France et celle que j’écoute encore maintenant. Écouter LUNA SEA remet en quelque sorte les pendules à l’heure, pour me permettre de repartir vers d’autres horizons.

Dans ces belles découvertes récentes, il y a le morceau Kikikaikai (器器回回) de Nagisa Kuroki (黒木渚) sorti le 23 Août 2023. Je ne connaissais pas cette compositrice et interprète originaire de la préfecture de Miyazaki dans le Kyūshū. Je la découvre par l’intermédiaire de la photographe et vidéaste Mana Hiraki (平木希奈), que j’ai déjà évoqué plusieurs fois sur ce blog, car elle a réalisé la vidéo de ce morceau. Cette vidéo est très inspirée d’ailleurs, comme peut l’être le morceau. Nagisa Kuroki a fait ses études à Fukuoka, ce qui peut expliquer qu’Hisako Tabuchi (田渕ひさ子) ait joué de la guitare sur certains enregistrements de ses morceaux. Mais Hisako Tabuchi ne joue pas sur le morceau que j’écoute en ce moment. Kikikaikai a une composition brillante, très méthodique avec un flot verbal en escalade. La dynamique du morceau est très prenante et laisse peu de temps au répit sans pourtant être poussive. La dernière minute de Kikikaikai est particulièrement excellente car la densité et la tension vocale deviennent débordantes. C’est un excellent morceau qui se savoure d’autant plus après plusieurs écoutes.

Le morceau asphyxia de Cö shu Nie sur l’album PURE n’est pas récent car il date de 2019, mais l’idée m’est venu de revenir un peu vers la musique de ce groupe après avoir vu plusieurs fois la compositrice et interprète Miku Nakamura (中村未来) sur mon flux Twitter (on dit maintenant X mais je préfère l’ignorer pour l’instant) ou Instagram. Le morceau asphyxia est une sorte d’objet musical non identifié car la voix de Miku et la composition musicale ont toutes les caractéristiques de déconstruction du math rock. On y trouve une grande élégance et inventivité. Le morceau nous trimballe sur différentes voies comme si le train musical déraillait soudainement pour se rattraper de justesse vers une nouvelle direction. Mais le morceau n’en reste pas moins très construit. On peut se demander ce qui passe par la tête de la compositrice pour en arriver à de telles envolées. Sur le même album, j’écoute également Zettai Zetsumei (絶体絶命), car je suis attiré par le titre me rappelant un morceau de Tokyo Jihen. Ce morceau est un peu plus conventionnel et calme qu’asphyxia, mais juste un peu car l’escalade instrumentale est toujours bien présente, pour mon plus grand bonheur, il faut bien le dire. C’est un style musical, un peu comme celui de Ling Toshite Sigure, qui me paraît tout à fait unique au Japon.

L’émission radio du dimanche soir What’s New FUN? de Teppei Hayashi (林哲平) sur InterFm me fait découvrir le rappeur originaire d’Oita Skaai qui y était invité pour une interview. Quelques morceaux de Skaai étaient diffusés, notamment celui intitulé Scene! en collaboration avec Bonbero. Ce morceau de hip-hop en duo est vraiment excellent pour son ambiance sombre et atmosphérique, comme on pourrait en trouver chez DJ KRUSH, et pour les talents vocaux multiples de Skaai. J’adore le hip-hop lorsqu’il part vocalement vers ce genre de terrains mouvants. Je découvre plus tard un autre excellent morceau hip-hop de Skaai intitulé FLOOR IS MINE (featuring BIM, UIN). La voix de Skaai chantant en anglais le refrain me rappelle vaguement un morceau de Red Hot Chili Pepper mais je n’arriverais pas à vraiment dire lequel. Le compte Twitter de Skaai m’indique également une collaboration avec le rappeur coréen nommé 27RING (이칠링) sur un morceau énorme intitulé Brainwashing (세뇌) Ultra Remix tiré de son album 27LIT. Le morceau est énorme car il fait plus de 8 minutes et fait collaborer pas moins de 12 rappeurs prenant la parole les uns à la suite des autres sur une trame commune dense et anxiogène. Je ne connais pas tous ces noms (TAK, Moosoo, DON FVBIO, Ted Park, maddoaeji, Boi B, DAMINI, New Champ, Lee Hyun Jun, Skaai, Asol) qui semblent principalement coréens à part Skaai (qui est en fait moitié coréen, parlant la langue). La puissance de l’ensemble et son agressivité conservant un bon contrôle des phrasés parfois ultra-rapides, m’impressionnent vraiment. Chaque intervention des rappeurs invités est entrecoupée d’exclamations proche du cri de 27RING scandant en coréen dans le texte « Mon cerveau a subi un lavage de cerveau » (세뇌 당했지 나의 뇌). La vidéo très graphique est viscérale et correspond bien à l’ambiance du morceau. Il faut d’ailleurs l’écouter fort dans les écouteurs en regardant la vidéo pour bien s’immerger. Je me sens parfois reconnaissant, envers je ne sais qui ou quoi, de tomber sur ce genre de morceaux qui réveillent mon émerveillement musical.

Je reviens ensuite vers des terrains rock plus connus en écoutant le nouveau single du groupe Hitsuji Bungaku (羊文学) intitulé More than Words. J’aime la voix de Moeka Shiotsuka (塩塚モエカ) qui a un petit quelque chose de particulier et que je trouve très mature sur ce morceau. Dès les premières notes, le son des guitares est très présent, rempli de réverbération, et le rythme de la batterie est extrêmement soutenu. Je suis toujours surpris par la qualité du son qu’il et elles arrivent à sortir à trois. Le son des guitares est ici très spacieux. Ce single est utilisé comme thème de fin de l’anime à succès Jujutsu Kaisen (呪術廻戦), du mangaka Gege Akutami (芥見下々), pour une série intitulée Shibuya Jihen (渋谷事変), à ne pas confondre avec Tokyo Jihen (東京事変). Le thème d’ouverture de ce même anime est un morceau de King Gnu intitulé Specialz (スペシャルズ) qu’il me faudra écouter un peu plus (en tout cas la vidéo est impressionnante). En ce moment, j’écoute aussi deux EPs de Hitsuji Bungaku, à savoir Kirameki (きらめき) sorti en 2019 et Zawameki (ざわめき) sorti en 2020. Je ne connaissais en fait pas ces EPs en entier. En les écoutant, je me prépare en quelque sorte pour le concert à Tokyo Haneda le mois prochain, en Octobre 2023. J’ai très hâte d’aller les voir en live. Je sais déjà que ça rendra bien, pour les avoir vu et entendu en streaming lors de leur passage au festival Fuji Rock, il y a quelques années.

Shinichi Osawa (大沢伸一) de MONDO GROSSO produit le nouveau morceau d’Hikari Mitsushima (満島ひかり) intitulé Shadow Dance. C’est à ma connaissance la troisième collaboration entre les deux artistes. Ce morceau est très beau. L’élégance naturelle d’Hikari Mitsushima déteint forcément sur ce morceau, qui est très délicat, notamment dans ses moments parlés. Ce morceau fait apparemment référence au court métrage publicitaire Kaguya by Gucci, réalisé par Makoto Nagahisa dans lequel Hikari Mitsushima jouait déjà. Pour les plus attentifs, j’en ai déjà parlé plusieurs fois. La qualité de la production musicale de MONDO GROSSO n’est plus à démontrer et je suis toujours très satisfait qu’il travaille avec des artistes que j’aime, comme Daoko, Sheena Ringo, AiNA entre autres. J’aimerais d’ailleurs beaucoup que Sheena Ringo écrive un morceau pour Hikari Mitsushima. Il y a déjà des liens entre les deux. J’ignore par contre complètement le morceau que Sheena Ringo a écrit et composé récemment pour Sexy Zone. Faisons comme si il n’avait jamais existé car il n’est de toute façon pas brillant. Je suis également assez déçu par le nouveau single d’Utada Hikaru (宇多田ヒカル) intitulé Gold (~また逢う日まで~). Le morceau est loin d’être mauvais mais il n’a absolument rien d’original, par rapport à ses morceaux précédents. Je l’ai bien écouté plusieurs fois, mais j’ai beaucoup de mal à m’en souvenir. Elle aurait besoin d’un nouveau souffle et je ne doute pas qu’elle le trouvera, comme ça avait été le cas pour l’album Fantôme. Cet album ne semble d’ailleurs pas être le préféré des amateurs d’Utada Hikaru. C’est pourtant pour moi un des plus intéressants et celui qui m’a fait revenir vers sa musique. Et pour revenir à MONDO GROSSO, quelle plaisir de voir une collaboration avec KAF (花譜) dont je parle aussi assez souvent sur ces pages. Le morceau qui vient juste de sortir s’intitule My Voice (わたしの声). Il mélange habilement des sons classiques de piano et de cordes avec un rythme électronique particulièrement intéressant et la voix immédiatement reconnaissable de la chanteuse virtuelle KAF (qui est une vraie personne représentée par son avatar). Comme je le disais un peu plus haut, les choix artistiques de Shinichi Osawa m’épatent vraiment car ils sont quasiment en adéquation avec les artistes que j’apprécie.

Je ne vous obligerais pas à me suivre sur le dernier morceau sélectionné sur cette petite playlist de fin d’été, car la voix d’Ayuni D n’est pas la plus évidente à apprécier. Mais le nouveau morceau Tondeyuke (飛んでゆけ) de son groupe PEDRO qu’elle forme avec Hisako Tabuchi est vraiment enthousiasmant. En fait, j’aime beaucoup l’ambiance bucolique de la vidéo accompagnant le morceau, et le sentiment de nonchalance estivale qui l’accompagne. La manière de chanter d’Ayuni sur ce morceau, en chuchotant presque la fin de chaque phrase, me plait aussi beaucoup. Et il y a un petit passage de guitare vers la fin du morceau où les sons que dégage Hisako me rappellent Sonic Youth. Ce single et la musique de PEDRO ont apparemment un certain succès. J’étais plutôt surpris d’entendre que Tondeyuke était placé à la 54ème place du classement hebdomadaire Tokio Hot 100 de la radio J-Wave, que j’écoute très régulièrement le dimanche après-midi (de 13h à 17h) lorsque nous sommes en voiture. Après la dissolution de BISH, ça fait plaisir de voir chacune des anciennes membres trouver une nouvelle voix. C’est aussi le cas de CENTCHiHiRO CHiTTiii qui s’est lancé dans une carrière solo sous le diminutif de CENT. Son nouveau single Kesshin (決心) est un rock plutôt classique et j’étais assez surpris de voir que la musique a été composée par Kazunobu Mineta (峯田和伸) de Ging Nang Boyz (銀杏BOYZ).

AiNA The End a une carrière musicale pour l’instant très dense et on pourra la voir bientôt au cinéma sur le nouveau film du réalisateur Shunji Iwai (岩井俊二), Kyrie no Uta (キリエのうた). J’ai très récemment trouvé au Disk Union de Shimokitazawa le CD de la bande originale du film All About Lily Chou Chou (リリイ・シュシュのすべて) sorti en 2001, du même Shunji Iwai. J’avais déjà parlé sur ce blog de la musique du film chantée par Salyu. Le premier morceau intitulé Arabesque (アラベスク), qui accompagne les premières images du film dans les herbes hautes près d’Ashikaga (足利駅) dans la préfecture de Tochigi, est tellement sublime que je le compte volontiers dans la liste des morceaux que je préfère. La force d’évocation émotionnelle de cette musique et de la voix extrêmement sensible de Salyu me donnent à chaque fois des frissons. C’est proche du divin, sans trop exagérer. J’ai du coup revu le film qui m’avait beaucoup marqué la première fois que je l’avais vu. Je suis très curieux des films de Shunji Iwai mais ils ne sont pas disponibles sur Netflix ou Amazon Prime. J’ai quand même vu récemment le film Last Letter (ラストレター) sorti en 2020 basé sur un roman qu’il à écrit lui-même. Beaucoup d’actrices et d’acteurs reconnus jouent dans ce film, comme Takako Matsu, Suzu Hirose, Nana Mori et Masaharu Fukuyama entre autres. La surprise était de voir le réalisateur Hideaki Anno (de Neon Genesis Evangelion) joué un second rôle, celui du mari du personnage joué par Takako Matsu. Que ça soit sur des films ou des drama télévisés, je croise souvent la route de Takako Matsu (松たか子) en ce moment. La dernière fois était sur le drama Quartet (カルテット), dans lequel jouait également Hikari Mitsushima. Tout finit par se reboucler dans mes billets.

street remixed

#11: mika scape. Shibuya.

#12: kusama dots. Harajuku.

#13: driving riding. Jingumae.

#14: bonjour girl. Jingumae.

#15: passing drawings. Omotesando.

Les marques vestimentaires de luxe redoublent d’astuces pour essayer d’attirer le passant étourdi dans ses filets profitant de quelques secondes d’inattention de sa part. Je remarque qu’un magasin temporaire Louis Vuitton s’est installé discrètement (ou à peine) près de la gare de Harajuku avec toujours les motifs en forme de poids colorés de Kusama Yayoi. Je devine à l’intérieur une statue de l’artiste en très grand format et je ne peux résister à l’idée d’entrer à l’intérieur pour la voir de plus près. Un peu plus loin à Omotesando et sur la dernière photographie de ce billet, les personnages de l’illustrateur Yoshitomo Nara viennent agrémenter les créations vestimentaires de Stella McCartney. On dirait que chaque marque essaie de s’attirer son artiste attitré. Loewe s’était emparé pendant quelques temps de certains personnages du monde de Ghibli, en premier lieu Totoro que la marque de luxe avait réussi à sortir de son sommeil. Sur la deuxième photographie du billet, un personnage haut en couleurs par l’illustratrice Mika Pikazo est affiché sur une grande baie vitrée d’un immeuble d’Udagawachō. Ce n’est pas la première fois que je fais le tour d’une exposition de cette illustratrice à Shibuya. La fois précédente devait être en Septembre 2019 dans un espace ouvert sur la rue près de l’ancien cinéma Rise, désormais reconverti en une live house nommée WWW WWWX. Je ne suis jamais entré à l’intérieur mais il faudrait que je trouve une occasion pour admirer l’architecture d’Atsushi Kitagawara tout en y appréciant un concert, par exemple. Je passe très souvent près de la galerie d’art Design Festa pour vérifier si les illustrations sur les murs ont été modifiées. Je ne pense pas avoir déjà vu ce petit personnage coloré uniformément de rose. Il y a certains endroits à Tokyo, comme ici ou sur les murs extérieurs d’un magasin de disques hip-hop à Udagawachō, où les fresques sont très souvent mises à jour. Ce genre de remix urbain satisfait forcément beaucoup le photographe amateur que je suis.

Je viens d’acheter au Tower Records de Shibuya l’album remix de morceaux de Sheena Ringo intitulé Hyakuyakunochō (百薬の長) sorti le 11 Janvier 2023. Il est sous-titré en allemand « das Allheilmittel für alle Übel », ce qui voudrait dire « le remède à tous les maux ». Il s’agit à mon avis d’une correspondance avec le EP Ze-Chyō Syū (絶頂集, SR/ZCS) sorti en Septembre 2000 qui reprenait également l’imagerie de la boîte de médicaments. La version initiale de la pochette de Hyakuyakunochō avait même un logo « Sheener » ressemblant à celui de Pfizer mais il n’a (heureusement) pas été conservé. Je me suis procuré la version standard sans les objets additionnels (les goods) fournis avec la version deluxe, car le problème d’utilisation du logo de La Croix Rouge m’a fait comprendre que Sheena Ringo n’avait en fait aucune implication dans le choix de leur design. Les albums de remix sont en général le fait des maisons de disques sans forcément un apport de l’auteur initial de la musique remixée. C’est du moins ce que la maison de disques Sony Universal Japan a annoncé suite au problème reporté dans les médias, très certainement pour protéger l’artiste. Une chose est sûre, je remarque maintenant les ‘Help Mark‘ (ヘルプマーク) marquées sur fond rouge du cœur blanc et du logo de La Croix Rouge, et j’en vois beaucoup dans les rues ou dans les couloirs du métro alors que je les voyais à peine avant. Merci donc Sheena Ringo de m’avoir sensibilisé sur ce sujet. Mais le véritable problème de ce genre de goods est qu’on a tendance à ne volontairement pas les utiliser pour ne pas les abîmer et ils finissent oubliés au fond d’un tiroir.

L’exercice du remix est assez compliqué et même périlleux. On a souvent plusieurs cas de figures. Le remixeur ne prend parfois pas de risques et n’ajoutent que des petites touches musicales sans modifier la trame initiale du morceau. On peut aller vers des propositions à l’opposé où l’empreinte du remixeur est tellement forte qu’on peine à reconnaître le morceau original sur lequel il est basé. C’est un parti pris d’essayer de conserver l’atmosphère originale d’un morceau pour ne pas choquer les fans ou de partir vers des pistes complètement différentes. Il est à mon avis très difficile pour un remix d’égaler un morceau original car ça demande à l’auditeur d’oublier en quelque sorte ce qu’il connaît d’une musique mainte fois écoutée et d’accepter quelque chose de nouveau. Il est assez rare qu’un morceau remixé vienne dépasser et transcender sa version originale. Il y a pourtant des remixes qui amènent des morceaux vers d’autres rythmes et d’autres ambiances, qui ajoutent une épice qui ne manquait pas forcément à l’original mais qui devient indispensable une fois qu’on l’a ajouté. Certains remixes arrivent à sublimer un morceau tandis que d’autres ne font que l’alourdir et le déséquilibrer. C’est une chimie compliquée qui peut très bien fonctionner ou échouer lamentablement. Il y a un peu de tout cela dans ce premier album remix de Sheena Ringo.

Je ne sais pas si Sheena est à l’origine de la sélection des musiciens en charge des remixes mais je dirais que probablement non, vu qu’il s’agit d’une initiative de la maison de disques. Il y a beaucoup de noms réputés japonais mais aussi quelques étrangers. Certains noms me sont cependant complètement inconnus. Comme je le mentionnais auparavant, la coréenne Miso prend en charge le morceau Marunouchi Sadistic (丸ノ内サディスティック), ce qui n’est pas une mince affaire vu que c’est son morceau le plus populaire. Elle s’en sort très bien et laisse même clairement son empreinte en ajoutant sa voix sur la fin du morceau pour le compléter. Cet apport de voix est très bien vu, et Miso n’est pas la seule à le faire sur cette compilation de remixes. Le morceau Ishiki (意識 ~Conciously~) remixé par Shinichi Osawa, dont je parle régulièrement ici pour son projet MONDO GROSSO, est particulièrement réussi et cerise sur le gateau, DAOKO vient ajouter sa voix rappée sur la fin du morceau. J’adore le ton de voix immédiatement reconnaissable de DAOKO et sa manière d’accentuer certaines syllabes pour donner de la force à son phrasé. La version par moment forte en basse de Shinichi Osawa donne un souffle complètement différent à ce morceau. Le remix de Yokushitsu (浴室 ~la salle de bain~) par une des figures importantes de la musique électronique japonaise, Takkyu Ishino (石野卓球), est tout à fait enthousiasmant. Il conserve toute la force de la voix de Sheena Ringo et arrive à faire décoller le morceau, notamment dans sa deuxième partie. Yokushitsu, Marunouchi Sadistic et Ishiki sont des morceaux qui ont déjà eu des versions alternatives (notamment en anglais) sur des albums ou live de Sheena Ringo. On est donc d’une certaine manière habitué à ce que ces morceaux ne soient pas figés dans leurs formes originales, mais les versions qui nous sont proposés ici ont tout de même un style bien différent et très marqué électro.

Le morceau JL005 Bin de (JL005便で ~Flight JL005~) est remixé par Yoshinori Sunahara (砂原良徳) qui était intervenu sur deux morceaux de Tokyo Jihen enregistrés sur une cassette accompagnant la version spéciale du best album Sōgō (総合) sorti en Décembre 2021. J’avais beaucoup aimé les deux morceaux qu’il avait remixé: Karada (体) et Zettaizetsumei (絶体絶命). Je ne suis pas déçu par cette nouvelle version de JL005 Bin de qui démarre sur des prises de sons d’aéroport. Il y a une élégance typique des remixes de Yoshinori Sunahara, enfin de ceux que je connais jusqu’à présent. On retrouve cette même élégance dans la vidéo tournée pour ce morceau par Yuichi Kodama (évidemment). SAYA, de la formation Elevenplay que l’on retrouve régulièrement dans les concerts de Sheena Ringo, joue le rôle principal en hôtesse de l’air. J’aime beaucoup ces images et notamment le petit nuage qui vient s’incruster dans le paysage urbain (j’utilise régulièrement les interventions nuageuses dans mes compositions photographiques). Et on découvrira dans la vidéo qu’un jeu de morpion tourne en rond sur le tableau de bord et les écrans de contrôle de l’avion certainement pendant le pilotage automatique (mais y-a t’il un pilote dans l’avion? de demanderait Leslie Nielsen). Je laisserais les spécialistes en aéronautique préciser la réalité de ce genre de situation. Le sous-titre de ce morceau est B747-246, un avion Boeing donc de la compagnie JAL effectuant le vol de l’aéroport JFK à New York jusqu’à Tokyo Haneda (le vol JL005).

Les morceaux Anoyo no Mon (あの世の門 ~Gate of Hades~) et Chichinpuipui (ちちんぷいぷい ~Manipulate the time~) remixés respectivement par Telefon Tel Aviv et Gilles Peterson sont d’excellentes surprises, car ils s’écartent complètement de la version originale au point où on la reconnaît à peine. Remplacer l’ambiance euphorique de Chichinpuipui par une atmosphère Dark Jazz est assez singulière. On a l’impression d’entendre des nouveaux morceaux où la voix de Sheena est défigurée. Le morceau Adult Code (おとなの掟) remixé par object blue est par contre assez déplaisante. Le morceau d’origine est loin d’être le meilleur de Sheena Ringo et le remix crachotant semble être en permanence décorrélé des paroles. L’écoute en est assez désagréable malheureusement. Les remixes de Nagaku Migikai Matsuri (長く短い祭 ~In Summer, Night~) par Yasuyuki Okamura (岡村靖幸) et de Carnation (カーネーション ~L’œillet~) par Ovall sont agréables sans forcément apporter des propositions nouvelles ou prendre de risques. Ils n’en deviennent donc pas indispensables, même si ces versions restent belles. Je suis un peu dessus de la version par STUTS de Onnanoko ha Daredemo (女の子は誰でも ~Fly Me To Heaven~). Là encore, le remix n’est pas désagréable mais n’apporte pas grand chose de plus à l’original. On peut même se demander s’il y a une différence. L’excellente surprise est de trouver KID FRESINO sur l’avant dernier morceau Niwatori to Hebi to Buta (鶏と蛇と豚 ~Gate of Living~) car il y apporte sa voix hip-hop ce qui change complètement la dynamique du morceau. C’est une belle réussite même si le morceau reste trop court (c’était le cas de l’original). Je trouve une satisfaction certaine d’entendre la voix rap si particulière de KID FRESINO interagir avec l’univers de Sheena Ringo. Le dernier titre, une reprise du morceau le plus récent de Sheena Ringo, Ito wo Kashi (いとをかし ~toogood~) par Ajino Namero (鯵野滑郎) est une curiosité. Il s’agit d’une version en sons 8bits sortis tout droit d’une Famicom (qui serait quand même poussée dans ses derniers retranchements). Les sons primaires prennent étonnement de l’ampleur au fur et à mesure que le morceau se déroule, lui donnant même une dimension épique. J’ai grandi avec ses sons 8bits donc j’adore forcément ce morceau de conclusion, laissé instrumental. Au final, j’adore le début (trois premiers morceaux) et la deuxième partie (des morceaux 8 à 12) mais je trouve qu’il y a un passage à vide au milieu de la compilation (les morceaux 4, 5, 6 et 7). Je trouve le résultat final inégal mais n’en vaut pas moins le détour et j’y reviens très souvent ces derniers jours. Et je me dis qu’il faut absolument que Shinichi Osawa compose un morceau pour DAOKO.

slow down don’t calm down

#1: slow down. Shibuya.

#2: chandelier princess. Daikanyama & Yebisu Garden Place.

#3: walking bridges. Aobadai & Ebisu.

#4: thin trees. Aobadai & Omotesando.

#5: yellow pattern. Nihonbashi & Mitaka.

J’avais initialement dans l’idée de créer une série au long court fait de billets numérotés composés de diptyques, c’est à dire deux photographies ayant un lien plus ou moins fort entre elles ou du moins une correspondance de thème. Mon idée était de faire une centaine de billets de cette série pendant la durée de cette année mais je me suis assez rapidement ravisé. J’avais publié deux billets séparés mais que j’ai finalement regroupé dans un seul billet avec d’autres photos. Je suis moins certain de continuer cette manière de faire sur de nombreux billets mais je commence au moins par celui-ci. Je me suis posé la question de changer quelque chose sur la manière dont je construis mes billets, mais est ce vraiment nécessaire?

Musicalement parlant, je découvre deux morceaux épatants de hip-hop teinté de sons électroniques produits par Shinichi Osawa de MONDO GROSSO. C’est probablement le producteur électro que je préfère en ce moment et je n’ai pas encore écouté le morceau de Sheena Ringo qu’il a remixé avec des apports voix de DAOKO. Je pensais d’ailleurs avoir commandé l’album de remixes de Sheena Ringo mais je ne me rends compte que maintenant que ma commande sur le site Universal Music Japan a été annulé suite au problème d’utilisation du logo de La Croix rouge pour les goods fournis avec l’album. Sur les deux morceaux que j’écoute en ce moment, en boucle il faut bien le dire, Shinichi Osawa s’associe avec le duo hip-hop Dongurizu (どんぐりず) pour former une unité appelée DONGROSSO. J’écoute d’abord RAVE (Hungry Driver) qui inclut également RHYME au chant en deuxième partie de morceau. J’aime beaucoup le gros son électro assez lourd qui semble décéléré, le phrasé hip-hop agressif de Dongurizu et le virement plus enlevé quand RHYME pose sa voix sur ce rythme qui ne prend pas de pause. Le son et ses cassures me rappellent un peu certains morceaux de Mr Oizo (le nom de code de Quentin Dupieux) et je me suis mis du coup à réécouter les excellents morceaux Steroids et Positif. L’autre morceau produit par Shinichi Osawa que je découvre sur YouTube ne semble pas être sorti en single et je ne suis pas sûr que ça soit un morceau terminé car la vidéo ressemble plus à une session d’enregistrement. Il semble s’intituler Red Bull 64 Bars. Mori (森) de Dongurizu est seul à rapper devant un micro du studio d’enregistrement mais Shinichi Osawa n’est pas loin de l’autre côté de l’écran de verre. J’adore la manière dont il perd contrôle de lui-même en se mettant à danser frénétiquement quand le rap de Mori vient s’accorder parfaitement avec le rythme crescendo électro de Shinichi Osawa pour atteindre une sorte d’harmonie. Le morceau ne manque pas de punch et il devient vite addictif. Je peux comprendre qu’on puisse avoir envie de dégager cette énergie par le mouvement en écoutant ce phrasé rap très rapide et rythmé. Bien que les styles soient tout à fait différents, cette danse me ramène vers une vidéo d’une danse automatique que j’aime beaucoup inspirée par le morceau Lovers who uncover de Crystal Castles vs The Little Ones.

乃木坂0510

A chaque fois que je prends une journée de congé en semaine, la dite journée est pluvieuse. Je ne vérifie jamais la météo avant de me décider à prendre mes journée de congé mais je soupçonne très fortement que la météo soit influencée par mes choix. Enfin, c’est le sentiment que j’ai depuis quelques temps. Il ne pleuvait pas encore le matin et j’en ai donc profité pour me lancer dans une promenade dans les rues de Roppongi, Akasaka et Nogizaka. En fait mon objectif était d’aller voir la structure d’acier Hineri Utsuri Nagare (ひねり うつり ながれ) située à l’entrée du parc Nogi (乃木公園). Je la montre sur la première photographie du billet. Prise en contre-plongée, elle semble rivaliser en hauteur avec les buildings aux alentours. Il s’agit d’une oeuvre de Toshiaki Tsukui (津久井利彰) datant de 1996. Le parc se trouve à proximité immédiate de l’élégant sanctuaire de Nogizaka que je visite pour la première fois. Ce mercredi matin avant 10h, le personnel du sanctuaire s’active à nettoyer au balais les allées et places devant chacune des dépendances du sanctuaire. Juste en face du sanctuaire de Nogizaka, on ne peut pas manquer la très haute tour résidentielle de 44 étages, Park Court Akasaka Hinokichō The Tower, que je montre en partie sur la troisième photographie. Je ne savais pas que cette luxueuse tour construite en 2018 était conçue par Kengo Kuma, mais les lamelles latérales auraient dû tout de suite m’y faire penser. J’aime en fait beaucoup le petit jardin quasiment laissé à l’état sauvage au pied de la tour. Enfin, j’imagine que ce jardin est en fait très bien entretenu pour justement conserver cette apparence sauvage. Derrière la tour, sur la quatrième photographie du billet, on ne peut pas non plus manquer les impressionnants volumes de béton de la résidence Parkside 6 conçue par Sakakura Associates. Je me souviens avoir été impressionné par les arbres d’une vingtaine de mètres de haut placés à l’entrée de cette résidence. L’architecte Junzo Sakakura implanta apparemment à cet endroit ses bureaux en 1940 et les arbres ont été conservés de cette époque. C’est une bonne chose car béton et végétation s’accordent si bien. Lorsque je marche dans les rues de Nogizaka, j’ai à chaque fois l’idée presqu’inconsciente d’y trouver des posters et autres références au groupe d’idoles Nogizaka46 (乃木坂46), mais je trouverais seulement à la sortie de la station de métro une série d’autocollants posés sur un coin de mur montrant un groupe sœur de Nogizaka46, Keyakizaka46 (欅坂46). Cette série d’autocollants répétés à l’identique fait référence au premier single du groupe intitulé Silent Majority (サイレントマジョリティー) sorti en 2016. Les images montrent la figure principale du groupe, Yurina Hirate(平手友梨奈). Ce groupe n’existe plus maintenant, ayant changé de nom pour devenir Sakurazaka46 (桜坂46), bien qu’il avait à cette époque une popularité certaine. Je ne sais par contre pas qui est la personne sur l’autocollant de l’avant-dernière photographie, mais ce n’est de toute façon pas très grave. J’ai fait le curieux en écoutant sur YouTube ce morceau Silent Majority, mais je n’y accroche malheureusement pas.

J’accroche beaucoup plus au dernier single du groupe ExWHYZ (ex-EMPiRE) intitulé Obsession qui vient juste de sortir, il y a quelques jours. Tout comme pour Wanna Dance, le premier morceau du groupe (sous ce nouveau nom), composé par Shinichi Osawa (大沢伸一) de Mondo Grosso, ce nouveau morceau est également composé par des artistes électroniques extérieurs au groupe. Cette fois-ci, on doit la composition et la production à Maika Loubté et 80KIDZ. J’ai souvent vu le nom de 80KIDZ associé à des artistes que j’aime beaucoup, comme ce morceau intitulé Magic écrit et chanté par AAAMYYY sur l’album Angle de 80KIDZ mais je n’ai jamais vraiment creusé plus en avant la découverte. J’avais par contre déjà parlé de la compositrice et interprète franco-japonaise Maika Loubté (マイカ・ルブテ) pour le sublime morceau Hakumei (薄明) sur l’album Crepuscular de Kirinji (un point commun entre Hakumei et Obsession est que les vidéos sont toutes les deux tournées à Yokohama). J’aime beaucoup l’univers électronique du morceau Obsession, les basses notamment et le son distordant qui accompagne l’ensemble du morceau. C’est en tout cas une excellente idée de faire intervenir des musiciens électroniques talentueux, qui viennent ajouter une personnalité supplémentaire au naturel pop du groupe. Le chant en alternance entre les membres du groupe n’est jamais complètement parfait, mais c’est ce qui permet de conserver une certaine fraîcheur et une dose d’imprévu dans les compositions musicales parfaitement exécutées. Le premier album de ExWHYZ, xYZ qui sortira le 2 Novembre 2022, fera intervenir d’autres artistes comme Shin Sakiura, qu’on voit présent un peu partout ces dernières années: à la composition sur certains morceaux du premier album d’AiNA The End, par exemple, ou en collaboration avec AAAMYYY (décidément) sur le morceau Kono Mama Yume de (このまま夢で). Dans les crédits de ce futur album, je vois également d’autres noms comme Shingo Sekiguchi, Kento Yamada ou Miru Shinoda, que je ne connais pas du tout, mais que je devrais certainement explorer un peu plus: un morceau comme Tender Rose de Shingo Sekiguchi par exemple, ou la production disruptive de Miru Shinoda sur le morceau 突破/T.P.A. de RinSaga. Si le changement de nom de EMPiRE en ExWHYZ tout en gardant exactement les mêmes membres reste pour moi assez mystérieux, j’imagine que c’est lié au changement de major de Avex à EMI Universal. J’imagine aussi que ça doit faciliter certaines collaborations.

J’attendais une tournée ou un nouvel album de compositions originales, mais c’est un nouvel album de remixes de morceaux de Sheena Ringo qu’on aura cette année. L’album intitulé Hyakuyakunochō (百薬の長) sortira le 30 Novembre 2022 et sera composé de 12 morceaux tirés des albums solo de Sheena Ringo. Il n’y aura malheureusement pas de morceaux inédits. Je pense que cet album de remixes est de l’initiative d’Universal car on ne l’avait pas du tout vu venir. Ma première réaction était plutôt mitigé mais voir la liste des musiciens invités a grandement attisé mon intérêt. Voyons un peu la liste des morceaux et des musiciens invités ci-dessous.

1. Ito wo Kashi (いとをかし| toogood), Ajino Namero (鯵野滑郎) Bon Voyage Remix
2. Chichinpuipui (ちちんぷいぷい l Manipulate the time), Gilles Peterson’s Dark Jazz Remix
3. Yokushitsu (浴室 | la salle de bain), Takkyu Ishino (石野卓球) Remix
4. Niwatori to hebi to buta (鶏と蛇と豚 | Gate of Living, Kid Fresino Remix
5. Marunouchi Sadistic (丸ノ内サディスティック), Miso Remix)
6. Otona no Okite (おとなの掟 | Adult Code), object blue Pleasure Principle Remix
7. Nagaku Mijikai Matsuri (長く短い祭 | In Summer, Night, Yasuyuki Okamura (岡村靖幸)一寸 Remix
8. Carnation (カーネーション | L’œillet), Ovall Remix
9. Ishiki (意識 | Consciously), Shinichi Osawa (大沢伸一) Remix feat. Daoko
10. Onnanoko ha Daredemo (女の子は誰でも| Fly Me To Heaven), STUTS Remix
11. JL005 Bin de (JL005便で | Flight JL005), B747-246 Mix by Yoshinori Sunahara (砂原良徳)
12. Anoyo no Mon (あの世の門 | Gate of Hades), Telefon Tel Aviv Version

Je parlais juste avant de Shinichi Osawa de Mondo Grosso, et c’est une bonne surprise de le voir une fois encore ici, surtout que le morceau Ishiki qu’il remixera fait intervenir Daoko. Tous les artistes que j’aime finissent pas se rejoindre un jour où l’autre, c’est assez fascinant. On sait que Daoko est fan de Sheena Ringo, mais c’est la première fois que je vois Shinichi Osawa associé à Sheena Ringo. L’autre bonne surprise est de voir Kid Fresino dans cette liste pour le morceau Niwatori to hebi to buta. J’ai déjà évoqué le nom de ce rappeur japonais sur ce blog car j’avais beaucoup aimé son album de 2018, ai qing (qui faisait intervenir au Steel Pan sur un morceau, Utena Kobayashi, que j’aime aussi beaucoup). On y trouve quelques noms très renommés comme Takkyu Ishino (石野卓球) et d’autres émergeants comme STUTS. Yoshinori Sunahara (砂原良徳) avait déjà remixé deux morceaux de Tokyo Jihen, Karada (体) et Zettaizetsumei (絶体絶命), sur une mixtape sortie avec le coffret Prime Time à la fin de l’année dernière. Les remixers sont principalement japonais, mais il y a quelques étrangers comme l’anglais Gilles Peterson ou l’américain Telefon Tel Aviv. Je ne connaissais pas la compositrice et interprète sud-coréenne Miso que je découvre soudainement. J’aime déjà beaucoup ses morceaux, par exemple son single Slow Running. J’y reviendrais très vite. Bref, cet album s’annonce beaucoup plus intéressant que ce que j’imaginais initialement, ce qui fera peut être oublier les polémiques qui émergent subitement sur l’utilisation d’une croix rouge sur les ‘goods‘ fournis par Universal sur la version deluxe de l’album. Et si c’était simplement une marque de reconnaissance envers une profession particulièrement sollicitée ces deux dernières années? Il semble que l’utilisation de cette croix que l’on trouvait déjà sur le live Gekokujō Xstasy (下剋上エクスタシー) soit maintenant problématique, car à usage réservé. Ça sera interessant de voir si Universal va faire marche arrière sur ce sujet.

Et en attendant de pouvoir écouter le nouveau morceau d’Ado, AiNA The End nous faisait la surprise d’interpréter Marunouchi Sadistic dans l’édition spéciale de l’émission Music Station, le Vendredi 7 Octobre 2022. Ce n’est pas la première fois qu’AiNA reprend des morceaux solo de Sheena Ringo et elle avait déjà chanté avec le groupe eLopers créé par Sheena Ringo, le morceau Gunjō Biyori (群青日和) de Tokyo Jihen. Elle s’en est bien sortie, accompagnée par Tokyo Ska Paradise Orchestra. Le groupe avait déjà participé il y a très longtemps au single Mayonaka wa Junketsu (真夜中は純潔) de Sheena Ringo. Bref, je le répète mais tout finit par se rejoindre. J’adore voir ces liens se créer car ils permettent d’imaginer les directions ou collaborations futures d’un ou d’une artiste. Ça me parait maintenant évident que Sheena écrira ou composera un jour ou l’autre un morceau pour AiNA. Elle fait du moins un très fort appel du pied, dans ses chaussons jaunes sur Music Station qui me rappellent un peu les chaussons bleus de Fuji Kaze à Kōhaku l’année dernière. Fuji Kaze est un autre exemple de musicien faisant de nombreux appels à Sheena Ringo en reprenant au piano nombre de ses morceaux. 愛が溢れるんですね。