戦う 逃げ出したい 本当は

La chaleur estival qui approche les 40 degrés sur Tokyo est quasiment insupportable. Marcher dehors en pleine journée ressemble à une bataille (戦う) contre les éléments. On préférait s’échapper (逃げ出したい) dans des endroits plus frais mais on prend sur soi. Cette chaleur m’oblige en tout cas à abréger mes marches urbaines et, par conséquent, à moins prendre de photos en ce moment. Celles ci-dessus datent de la semaine dernière. Alors que je vais en général jusqu’à Shimokitazawa à pieds, j’ai préféré m’y rendre cette fois-ci en train depuis la gare de Shibuya pour revenir ensuite à pieds alors que le soleil commençait tranquillement à se coucher. On le remarque à la couleur de la lumière de certaines des photographies de ce billet. J’aime beaucoup cette ambiance de fin de journée. La vue sur la dernière photographie de ce billet a été un choc. Sur ce petit bout de mur grisâtre d’un pont ferroviaire près du magasin de disques Tower Records et près du parc Miyashita, on avait le plaisir d’apercevoir une mosaïque du petit robot Astro (Atom en japonais) d’Osamu Tezuka par l’artiste de rue français Invader. La mosaïque a été enlevée la semaine dernière sans aucune explication. Je ne pense pas qu’elle ait été volée, mais plutôt enlevée, car la zone de mur du pont où elle se trouvait a été repeinte. C’est extrêmement regrettable car cette mosaïque faisait partie du décor urbain de Shibuya. Elle était même devenue emblématique, à mon avis. C’est bien dommage car ce genre de symboles construisent l’histoire urbaine du lieu et les supprimer vient en quelque sorte effacer une petite partie de cette histoire. Ce qui m’étonne d’autant plus est que les graffitis assez grossiers dessinées sur le mur blanc juste à côté ont été laissés intacts. On en avait discuté dans les commentaires d’un billet précédent et j’étais pourtant persuadé que cette mosaïque ne disparaitrait pas (comme quoi…). J’espère qu’elle n’a été enlevée que temporairement pour repeindre le mur, mais j’ai beaucoup de doutes qu’il s’agisse seulement d’un simple nettoyage. On verra bien, mais Tokyo n’a de toute façon pas l’habitude de laisser vivre les choses trop longtemps. Le renouvellement perpétuel assure sa jeunesse éternelle comme un sérum de jouvence, que ça nous plaise ou pas. Elle se détruit pour se reconstruire sans cesse (東京破壊).

Tokyo Hakai (東京破壊) est le titre du deuxième album d’Aya Gloomy sorti il y a déjà un an, le 28 Avril 2021. Je connaissais déjà à peu près la moitié des morceaux de l’album pour les avoir écouté au fur et à mesure en single au moment de leur sortie (Start Again et Micro Creature) ou pour en avoir sélectionné quelques uns sur iTunes. Mais je n’avais bizarrement pas complété l’album en me procurant tous les morceaux. Ma pratique consistant à écouter les morceaux au compte-goutte me fait parfois oublier d’écouter un album en entier, si d’autres musiques viennent me distraire au même moment. Le dernier single intitulé Iro Iro d’Aya Gloomy, dont j’ai parlé récemment, me rappelle de manière soudaine et irrésistible vers cet album. J’aurais eu tord de ne pas m’y plonger une nouvelle fois dans sa totalité. Le monde d’Aya Gloomy est très particulier et unique car très personnel. En fait, j’adore sa manière de chanter et les sons électroniques qu’elle emploie sur ses morceaux. L’album s’intitule Tokyo Hakai qui veut dire Tokyo destruction et démarre avec un premier morceau intitulé 2020 (二〇二〇) qui répète ce titre d’album. Aya fait référence aux Jeux Olympiques de Tokyo en utilisant des extraits sonores de la conférence de presse pendant laquelle Tokyo a été sélectionné. C’est un thème récurrent car son premier album Riku no Kotō (陸の孤島) avait déjà un morceau intitulé 2020 / Tokyo Destruction. Celui-ci reprenait des sons similaires à ceux qu’on peut entendre sur la bande originale du film d’animation Akira. J’aimais beaucoup Riku no Kotō mais Tokyo Hakai est clairement plus abouti. L’ambiance pleine d’étrangeté est toujours très présente, car Aya nous rappelle qu’elle a pour aspiration de vivre dans l’espace mais reste malheureusement une forme vivante comme les autres coincée sur terre (私は宇宙に行くこともできない、地球にいる一つの生命体). On peut toujours lui souhaiter qu’elle arrive un jour à rejoindre les mondes intergalactiques mais on serait tout de même perdant si on n’était plus en mesure d’écouter ses nouveaux albums. Il y a fort à parier qu’elle reste accrochée sur terre pour quelque temps encore. L’ensemble de l’album est excellent et s’écoute préférablement dans son intégralité (ce que j’aurais dû faire depuis le début), mais les morceaux que j’aime par dessus tout en ce moment sont le cinquième morceau intitulé The Fight (dont je tire d’ailleurs le titre de ce billet) et le dixième Turn ☺︎ff. Je ne sais pas si je vais convaincre certains visiteurs d’écouter cet album, mais j’aurais au moins essayer.

9 commentaires

  1. Bonjour Frédéric,
    Sentiment grandement partagé au sujet de la disparition d’Astro boy. C’est vraiment difficile de comprendre la motivation derrière ce geste. J’espère découvrir dans un prochain billet qu’il est réapparu ! En attendant j’écoute Tokyo Hakai qui fait sens avec la disparition de ce « micro » monument qu’était pour moi l’Astro Boy de Miyashita Park.

  2. Salut Nicolas, heureux de te retrouver dans les commentaires de Made in Tokyo après tes vacances japonaises (il y a un article plus loin où je mentionne notre rencontre à Shinjuku :-). La disparition du Astro Boy est bien dommage en effet. Tu m’as fait chercher un peu pour voir ce qui s’était passé mais je n’ai pas trouvé de réponses claires. On sait qu’il a été enlevé proprement le 17 Juin. Bien qu’ils ne le disent pas clairement ce ‘nettoyage’ malheureux serait le fait de l’unité Clean Town Development Office de l’arrondissement de Shibuya. Je vois dans cet article qu’ils ont été interrogés, ont confirmé la date où la mosaïque a été enlevée mais ne confirment pas qu’ils en sont responsables ni la raison de cette suppression. Le fait que la surface soit repeinte après coup indique quand même qu’il s’agit d’une action organisée et non pas d’un vol à l’arrache. J’apprends que pour chacune de ses œuvres de rue, Invader crée un double également en céramiques mais posé sur un plastique acrylique Perspex et signé au dos avec carte d’identité. Il doit garder au frais ces doubles pour des expositions ou pour la vente. Il existe donc un double de TK_119, le nom de code de l’Astro Boy du Miyashita Park installé par Invader lors d’une de ses visites en Mai 2014. Le double aurait été montré lors d’une exposition en 2017 intitulée « Hello, My Game Is » au Musée en Herbe de Paris. Plus d’une centaine de ses œuvres (des doubles donc, j’imagine) auraient été montrées lors de cette exposition. Le double du Astro Boy TK_119 aurait été vendu aux enchères chez Sotheby’s en Novembre 2019 pour la modique somme de 1.22 Millions de dollars (pas mal quand même)! C’est 3 ans avant la suppression de l’original à Shibuya et c’est donc difficile de savoir s’il y a un lien entre cette vente en Novembre 2019 et la disparition en Juin 2022. Peut-être s’agit il d’une condition que l’achat par le client entraîne la suppression de l’oeuvre de rue, pour maintenir l’aspect unique de l’oeuvre, et peut-être que la situation Covid a entraîné un retard de 3 ans dans l’execution. Je ne sais pas vraiment, mais j’ai un peu de mal à imaginer une opération si compliquée. Mais le fait que l’oeuvre soit vendue à plus d’un million de dollar pourrait justifier les caprices de l’acheteur. Le mystère reste intact et j’ai bien peur qu’on n’en sache pas beaucoup plus. Ceci étant dit, Bonne écoute de Tokyo Hakai d’Aya Gloomy qui correspond bien en effet à cette discussion !

  3. Salut Frédéric,
    Merci pour ton enquête. J’ai lu l’article auquel tu renvoies. Malheureusement le mystère s’épaissit, et c’est assez frustrant ! Si je comprends bien, l’unité Clean Town Development n’a pas clairement dit si elle était ou non à l’origine de cette enlèvement. C’est quand même très étrange. Si elle n’avait pas été à l’origine, je ne vois pas la difficulté de répondre librement. Or elle ne ne fait pas, ce qui me laisse penser qu’ils pourraient être derrière cette action. J’essaie d’imaginer des raisons à cette action organisée, mais je n’en trouve pas. Le Japon est-il à ce point opposé au street art pour organiser ce type de disparition ? Je connais mal la position du pays à ce sujet, mais ce serait assez idiot de s’en prendre au street art dans ce quartier bouillonnant de culture pop. Deuxième hypothèse, celle du lien avec la vente que tu mentionnes. Ton hypothèse ne me semble pas impossible. Quand on peut payer ce prix là pour une œuvre d’art, j’imagine qu’on vit dans un autre monde où tout semble permis. Peut-être qu’elle a été achetée par un japonais influent qui peut demander ce genre d’action organisée (par exemple j’imagine bien Yusaka Maezawa acheter cette oeuvre). Concernant le timing, l’acquéreur du double aurait eu tort de faire enlever l’original de Miyashita Park dans la foulée de son acquisition, le lien entre la vente du double et la disparition de l’original aurait alors été évident. A 3 ans d’intervalle, c’est plus difficile d’y voir un lien de cause à effet (et c’est peut être ce qui était souhaité par l’acquéreur). J’ai cherché « astroboy » sur instagram, dans l’espoir de trouver des photos prises par des passants de l’enlèvement du 17 juin. Je n’en ai pas trouvé mais par contre il y a dans les premiers résultats de la recherche, il y a un post avec plusieurs photos de feu astroboy avec un commentaire au sujet de la disparition. La dernière photo est intéressante, il s’agit de quelques débris de la mosaïque ramassés par un passant après l’enlèvement de l’oeuvre. On comprend que l’enlèvement n’a pas été indolore pour Astro (voire qu’il a été vraiment détruit). Bref, le mystère reste entier, au contraire du pauvre Astro qui doit être en miettes…

  4. Salut Nicolas,
    Merci également pour tes recherches ! Suite à ton commentaire, je suis allé voir cette image montrant des débris du Astroboy sur Instagram. J’avais lu quelque part que la céramique utilisée par Invader est, volontairement peut-être, assez friable et de ce fait difficile à enlever sans l’abîmer. C’est en quelque sorte un moyen de protéger l’œuvre. Je suis de plus en plus persuadé qu’il a été enlevé pour une raison autre que le nettoyage des rues. Sous ce même pont ferroviaire, il y a d’autres illustrations commandées d’un style plutôt pop qui sont censées rendre un peu plus attrayant ce passage qui a toujours été un peu sombre. Je ne connais pas les artistes sauf Kosuke Kawamura, qui était notamment à l’origine des fresques sur Akira autour du grand magasin PARCO lorsqu’il était en construction. Je trouve bizarre et contre productif d’enlever une œuvre qui contribuait à égailler ce passage, surtout que d’autres graffitis dessinés à l’arrache sont conservés juste à côté. Peut-être s’agit il d’une histoire de droits car, après tout, Astroboy est une œuvre d’Osamu Tezuka. Je me demande d’ailleurs comment Invader peut vendre une œuvre avec un personnage dont il n’est pas l’auteur. Peut-être doit il reverser ensuite des droits d’auteur. Ton hypothèse d’un achat par un riche amateur d’art comme Yusuke Maezawa est très intéressante et plausible, sachant qu’il achète de l’art contemporain. Il a par contre tendance à vouloir le faire savoir et j’ai l’impression qu’il se tourne plutôt vers des très grands noms comme Jean-Michel Basquiat ou Jeff Koons. Le mystère reste entier mais c’est vraiment très intriguant !

  5. Très intriguant et très inquiétant ! J’ai découvert qu’il y a (au moins) un autre invader de type robot issu de la culture manga à Odaiba. Si j’ai bien situé la scène, le Goldorak est sur le rebord d’un escalier ou de la promenade qui nous amène face au grand gundamn. Malheureusement je ne l’ai pas encore flashé, et j’ignore même s’il y est encore. J’espère avoir la chance de le voir lors de mon prochain passage. A moins qu’il ne soit victime lui aussi d’une disparition inexplicable (ce qui ferait penser au pitch de l’histoire d’Astroboy revisitée par Naoki Urazawa prise à rebours…).

  6. Salut Nicolas, tu fais peut-être référence à ce petit Goldorak au pied d’un escalier à Odaiba Diver City. Cette photo date de 2015 et une petite recherche sur cet endroit sur Google Street View ne le montre malheureusement pas. Je suis allé quelques fois sur cette allée piétonne, notamment l’année dernière car on pouvait y apercevoir de loin des compétitions paralympiques pendant les Jeux de Tokyo 2020, mais je n’ai pas vu cette petite mosaïque. Elle semble avoir déjà disparu, ce qui est bien dommage. Elle était un peu trop facile d’accès à mon avis. Il y a un autre Goldorak beaucoup plus grand près d’Ebisu sur la rue Komazawa. J’avais montré quelques photos ici.

  7. Salut Frédéric,
    Décidément, il ne fait pas bon être un robot envahisseur au Japon !
    Je dirai 100pts pour le Goldorak d’Ebisu ;)
    Merci pour les liens renvoyant à ta série d’invasion murale de 2014 !

  8. Le Goldorak d’Ebisu a l’air de tenir bon. Je le sens en train de préparer une invasion en silence. Enfin, c’est plutôt les plantes sur le mur où il se trouve qui commencent à l’envahir petit à petit…

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